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Depuis de nombreuses années, les forces armées françaises ont toujours fonctionné sur des fusils de précision de manufacture française : FR-F2, Hécate II… L’armée de Terre a un nouveau fusil de précision semi-automatique (FPSA), remplaçant le FRF2, en service depuis 1980. En 2019, l’Armée française commande à FN Herstal un nouveau fusil de précision, afin de remplacer les FR-F2 assez vieux.

Les débuts du sniping : la Première Guerre Mondiale

Dès début 1915, français, allemands et anglais commencent à installer des lunettes sur des Lebel, des Gewehr 98 ou des Lee Enfield MKIII. Bloqués dans les tranchées pendant des semaines d’observation, la troupe prendra, dans le sang, l’habitude de pas trop sortir la tête du parapet au même endroit ou de ne plus allumer une cigarette la nuit venue à un poste d’observation non défilé. La guerre changeait de nature. Elle mettait fin à des siècles de tradition dans les tenues aussi.

Dans « Les Éparges », le lieutenant Maurice Genevoix raconte ce 25 avril 1915 où, dans le calme total de la journée, une balle lui traverse soudainement le bras gauche. A genou, foudroyé par la douleur et le choc, mais conscient, sa tête se penche vers le bas. Il regarde son corps. La troisième balle arrive et, sonné, rien à faire pour l’éviter. Juste le temps de réaliser ce qui est en train d’arriver. Une seconde à peine. Et là, une troisième balle fait sauter sous ses yeux un pan de sa vareuse en le frappant en pleine poitrine. Le récit de ces instants et de son irréelle évacuation par ses camarades traumatisés par la scène qu’ils viennent de voir constitue l’un des témoignages les plus forts sur cette guerre et un tour de force littéraire d’une qualité exceptionnelle. Et c’est aussi un témoignage in vivo de la redoutable efficacité du sniping dès 14-18. Ce lieutenant grand blessé, qui fera 7 mois d’hôpital et ne retrouvera jamais l’usage de sa main gauche, finira Secrétaire Perpétuel de l’Académie Française et panthéonisé. Alors que tout aurait du s’arrêter là, dans l’anonymat de milliers de croix de bois.

Comme souvent chez les allemands, on organise et on professionnalise. Dès fin 1914, au début, ce sont des officiers, nobles à 90%, grand chasseurs de gros à la carabine devant l’éternel dans leurs terres de Silésie ou de Bavière qui se spécialisent dans cette chasse un peu particulière. Souvent avec leur magnifique carabine de chasse au cerf ramenée de permission ou livrée par un valet mandaté pour ce faire ! Anglais et français, moins férus avant guerre de tir de chasse à la lunette, ayant moins de traditions dans l’optique, suivront avec un peu de retard et en moindre nombre.

Contrairement à l’armée allemande, l’arme n’est pas affectée à un tireur particulier. C’est au chef de section qu’il appartient de désigner « ses » tireurs d’élite. D’abord distribuée à raison d’une arme par compagnie, on finira par distribuer une arme avec lunette APX par section. Mais l’arme change de mains à chaque relève de section et les réglages de la lunette ne sont pas personnalisés. Les plus malins les refont eux-mêmes au fur et à mesure des combats.

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Toutefois les anglais auront une tendance à équiper leur sniper avec le fusil canadien Ross MK II, arme un peu fragile pour le combat de tranchée mais d’une redoutable précision supérieure au Enfield à 400 mètres et plus. Les américains feront de même avec leur Springfield 1903.

L'Émergence du FR-F1

Il faut attendre en fait 1964 pour qu’un véritable fusil français militaire de précision soit mis à l’étude à l’initiative du Général Ailleret (personnage qui vaut la lecture de sa biographie wiki comme son frère d’ailleurs - le type de français qui nous manquent aujourd’hui). L’arme est adoptée le 5 mars 1965. Le FR-F1 a été développé avec beaucoup de bon sens et de prudence ce qui explique sans doute ses illustres qualités.

Il en résulte un choix heureux qui a surtout consisté à limiter ses ambitions (tir de distance à 600 mètres pour une arme qui peut potentiellement se retrouver dans les mains d’un appelé du contingent) et à repartir de l’architecture éprouvée, fiable et très précise du MAS modèle 1936 (un des chouchous de Maître Flingus) et notamment de son excellente culasse (plus large pour le FR-F1 - elles ne sont pas interchangeables). De la longueur du canon au pas de rayure, de la taille de la culasse en passant par celle du boitier, de la détente réglable à la capacité, tout est différent ou presque. C’est important de le dire car des confusions sont parfois faites entre le FR-F1 (et son successeur FR-F2) et le FR-G2, fusil de précision de l’Armée de l’Air qui lui est véritablement un dérivé direct du MAS 36.

L’arme se distingue par une crosse novatrice, à poignée pistolet, et ajustable par un jeu de cales faciles à monter pour adapter sa longueur à la morphologie du tireur. La crosse est complétée d’un appui-joue « de série ». Cette crosse, fort pratique et agréable comparée aux modèles réglementaires plus anciens, portera le seul léger défaut de cette arme rustique et solide. Des cas de casse en extrémité de crosse ont été signalés car l’axe de maintien de la vis de plaque de couche qui traverse la crosse de part en part est très large et proche de la plaque de couche elle-même laissant peu de bois dans l’espace entre cet axe et la plaque de couche.

La chute violente de l’arme directement sur la plaque de couche (ou lors d’un » Reposez armes! » par trop enthousiaste) pouvait provoquer une rupture du bois dans cet espace. Cela a même fait l’objet d’une Directive du Matériel dès 1969 (DM n°50085 du 22.12.1969) et le système de fixation de la plaque de couche sera changé sur le FR-F2.

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Un canon spécialement dédié est créé. Son mode vibratoire a été particulièrement soigné. Il n’est pas totalement flottant mais très régulier. Il fait 600 millimètres de long et est à quatre rayures à droite au pas de 300mm.

Il est certain que notre FR-F1 peut tirer n’importe quelle 7,5 MAS du commerce (les PPU par exemple) mais les lots de 7,5 MAS affectés à ces armes étaient bel et bien tirés de lots au cahier des charges spécifiques. Ces boites sont toutes marquées » à balle ordinaire pour fusil de haute précision » ou » pour fusil de précision » ou mentionnant le « modèle FR-F1 ».

Le dit canon comporte en bouche un manchon cache-flamme, d’ailleurs réglable, qui absorbe aussi les vibrations de sortie de bouche. A ce titre, il faut signaler que les longues études de mise au point de l’arme ont montré que si son utilité comme cache-flamme était certaine, cet accessoire ne présentait pas d’amélioration sensible de précision à courte et moyenne distance (jusque 400 mètres). Autre différence avec le Mas 36, l’arme a une capacité de 10 cartouches et non plus de cinq. A noter aussi qu’il n’a pas existé de modèle réglementaire de modérateur de son pour cette arme. Quelques unités particulières ont acheté des modèles particuliers auprès de Stopson.

L’arme doit être en principe suspendue à une bretelle de portage cuir qui vient compléter l’U. C. (« unité collective » ou ensemble des accessoires gravitant autour de l’arme). Mais les utilisateurs opérationnels lui préfèreront souvent un port à bras, doigt dans le pontet, crosse appuyée en creux de coude, façon « légion », qui reste fortement attachée à l’imagerie de ce fusil dans le public.

Bien sûr, notre fusil FR-F1 est équipée d’une lunette de visée. Dans sa première version, cette lunette de visée est celle fabriquée par APX (Atelier de Construction de Puteaux devenue ensuite Section Technique de l’Armée de Terre). Cette lunette a une longue histoire. Issue de tests menés dès l’après-guerre sur la ZF-4 allemande du K98, cette dernière ne donna pas satisfaction (aucun étonnement à avoir - la célèbre et si adulée des collectionneurs lunette ZF4 est surtout un « bricolage » destiné à transformer un K98 en fusil de « sniper » ce qu’il n’est pas par construction et qui ne peut vaguement faire le taf que jusque 300/400 mètres pour un tireur déjà très entrainé).

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Devant l’absence de fournisseurs français adéquat au début des années 50, APX mettra au point cette lunette pour les MAS44 et MAS49. Elle ornera plus tard le MAS 49/56. C’est celle-là qui sera ensuite modifiée et adoptée sous la désignation « Modèle 53 bis » ou « APX806 bis » pour notre FR-F1, puis pour le FR-F2 (un Fr-F1 légèrement modifié mais en calibre 7,62 Otan ce qui change la lunette aussi). La lunette du FR-F1 est en millième avec une valeur de clic à 0,1 millième soit un centimètre à cent mètres. Elle possède un grossissement fixe de 3,85 fois et un réticule à pointe centrale croisée par une ligne médiane interrompue qui est le même que les lunettes allemandes et russes de la seconde guerre mondiale. Le réglage de la tourelle d’élévation graduée fait varier directement la hauteur du réticule dans l’objectif. Curiosité, la tourelle était considérée comme devant être accessible à la seconde.

Soyons clairs: les tirs de guerre à 600m sont quand même une rareté opérationnelle relative en conflits de haute intensité. 600 et plus, on est déjà dans le domaine des forces spéciales actuelles ultra spécialisées, ultra entrainées et ultra-équipées en matériel électronique d’acquisition et de calcul. Les amateurs fanatiques de TLD, qui régulent la concentricité de leur cartouche une par une, en utilisant des instruments de haute précision pour chaque cartouche au terme de tris ayatolesques, et que j’admire profondément (si j’avais 20 ans de moins et le temps, c’est exactement ce que je ferais comme tir) me diront à juste titre que c’est certes infiniment mieux que n’importe quel réglementaire de l’époque (et même parfois de maintenant!) mais pas non plus exceptionnel. C’est vrai. Mais je rappellerai que le cahier des charges visait à aligner un buste humain (50cm de coté) à 600 mètres. La promesse est donc mieux que tenue et le FR-F1, au mains d’un tireur entrainé, est une arme redoutable qui a tué beaucoup de monde en condition de combat.

Engagement du FR-F1 sur le terrain

Car notre FR-F1 a vraiment connu le feu. Adopté en 1965, et arrivé en unité dès 1966, il est engagé avec le 2e REP fin 1970 au Tchad avec des engagements violents contre les rebelles du Frolinat (12 tués français et 60 rebelles éliminés dans une véritable bataille rangée). Le GIGN l’utilisera pour la première fois lors de la prise d’otages de Loyada à Djibouti en 1976: 31 gamins et gamines, enfants de militaires français, pris en otage dans un bus par des terroristes. une nouveauté à l’époque, hélas appelée à se renouveler et ce, trois ans après les attentats de Munich où l’intervention d’une police brave mais non spécialisée dans ces situations extrêmes déclencha un carnage. Après 36 heures de négociations infructueuses, le GIGN donne l’assaut. En quelques minutes, les FR-F1 parlent et le groupe parvient à tuer tous des terroristes. Malgré la réussite de l’intervention, l’un des preneurs d’otages a la fraction de seconde lui permettant de tuer une petite fille et un autre enfant décédera à l’hôpital. Le succès de l’intervention rend le GIGN célèbre dans le monde entier. Et elle orientera définitivement ses missions car conscience est définitivement prise qu’un nouveau monde, pas des plus ragoûtant, est né. Mais « le Groupe » sait désormais à quoi il va devoir faire face et va pouvoir désormais s’entrainer plus durement à ces situations là.

Cette intervention modifie aussi notre FR-F1 car, après Loyoda, le GIGN décide de lui adjoindre une autre lunette que l’APX 806. Ce sera une Schmidt & Bender. Notre FR-F1 sera aussi de l’opération Lamantin en Mauritanie en 1973 avec le 13°RDP et la 11°DP. Il sera bien sûr utilisé lors de la bataille de Kolwezi au Zaïre en mai 1978 pour libérer 2.800 otages européens où, aux mains de nos légionnaires, il fera des coupes sombres dans les rangs adverses (250 éliminés pour 5 légionnaires tués ou disparus et 25 blessés). Le FR-F1 réalisera aussi de nécessaires et fréquentes éliminations au Liban et ailleurs dans le monde dans des opérations restées « discrètes ». La gendarmerie en fera aussi un large usage.

Notre arme de ce jour est un beau FR-F1 de type A. le type « A » pour tir militaire de combat jusque 600 mètres - le type « B », arme de compétition militaire avec un guidon match et un œilleton - ce dernier ne ressort d’ailleurs pas d’une fabrication spécifique, c’est un juste « A » sélectionnés parmi les meilleurs pour la compétition. Notez bien que c’est bien l’idée de cette version « C » civile de chasse qui a été reprise pour le fameux Mas Fournier, armurier spécialisé et, on le sait moins, chasseur alpin dans l’âme, sélectionné olympique pour les jeux de 1936 à Berlin et détenteur de nombreux records IUT à 300 mètres. Le notre est bien un de ces bons Mas militaire de Type A.

Production et Rareté du FR-F1

Pourquoi dire ça? Les archives indiquent que 5.150 FR-F1 ont été officiellement commandés par la Direction du Matériel et que leur production s’est arrêtée en 1973. 50 armes encore ont été montées à partir de pièces disponibles en 1976 et, peut-être encore, quelques armes en 1986. Ça nous fait, au grand maximum, peut-être 5.300 armes FR-F1 en étant optimiste. On sait aussi que, en tout, 7.500 FR-F1 et son successeur FR-F2 ont été produits.

Modèle Nombre d'armes produites Calibre Années de production
FR-F1 ~5300 7.5 MAS 1965-1973
FR-F2 ~2200 (FR-F1 modifiés) 7.62 NATO À partir de 1986

Mais là, ça se complique encore plus parce que l’essentiel des FR-F2 sont en fait des FR-F1 modifiés à divers moments par la Manufacture d’armes de Saint-Étienne avec des boîtiers re fraisés puis re gravés au nom du nouveau modèle et dans leur numéro d’origine. Les modifications essentielles du FR-F2 sont un nouveau manchon thermique avec une nouvelle ligne de visée et surtout un nouveau canon en 7,62 Otan. D’abord 3.500 environ ont été mis au standard Otan 7,62 en 1986 et 1987. Il s’agit pour l’essentiel de ces FR-F1 transformés FR-F2.

Outre ces FR-F1 transformés en FR-F2 après 1986 et 1987 il y a eu aussi des FR-F1 restés FR-F1 mais re-canonnés 7,62 Otan quand ce calibre a définitivement supplanté la 7,5 MAS au milieu et fin des années 80 aussi. A titre accessoire, on signalera que si l’essentiel des FR-F1 est allé à l’Armée de Terre qui l’avait commandé, la Gendarmerie reçu 130 FR-F1 (dans les deux calibres 7,5 MAS et 7,62 Otan), l’Armée de l’Air 250 et la Marine 50. D’autres aussi sont allés se balader à l’étranger ou au Ministère de l’Intérieur.

Sur les, peut-être, 2000/2500 armes subsistantes de la transformation au standard F2, beaucoup ont été ensuite détruites dans les holocaustes Jospin et Villepin des années 97 à 2009. Il restait déjà donc très peu d’armes FR-F1 en 7,54 MAS ayant survécus à tout ça. Le coup de grâce est venue de l’ancienne législation quand un petit reste de FR-F1, fait bien connus des collectionneurs, a miraculeusement été sauvé de la destruction pour finir chez l’armurier Dupuy qui, contraint par la loi sur « les calibres de guerre », a du les transformer en calibre 7-08 Remington, bon calibre au demeurant, avant de les revendre au public. Ceux-là sont les rares qu’on voit de temps à autres sur le marché.

Bref un MAS FR-F1, d’avant les années 86/87 et le calibre Otan, en calibre 7,5 Mas d’origine non rechambré en 7-08 et avec sa bonne lunette du modèle est très rare. On trouve bien plus facilement un FR-F2 en 7,62 Otan. Une des armes réglementaires françaises les plus difficiles à trouver qui soient.

Le SCAR H PR : Une Nouvelle Ère

En 2018, l’appel d’offre du remplacement est lancé. En 2019, la commande de 2610 de ces DMR (Designated Marksman Rifle) est effectuée, en plus des optiques, accessoires et munitions. En résumé, le SCAR H PR est une arme polyvalente pour le tir de longue et moyenne distance adaptée aux conflits actuels. Le SCAR H PR (Precision Rifle). En tant que tel, l'arme ne change pas vraiment du modèle inital; le SCAR H. Cela signifie que l’arme peut être utilisée à moyenne portée et à longue portée ; cela offre une certaine polyvalence pour l’utilisateur, même si la distance de longue portée est légèrement réduite.

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