Les armes à feu sont très répandues aux États-Unis : 1 Américain sur 4 en possède. Régulièrement, des fusillades font des victimes, mais le nouveau président, Donald Trump, refuse d’interdire les armes dans son pays. Cette nouvelle fusillade a rouvert aux États-Unis le débat sur les armes à feu, avec peu voire aucune perspective de débouchés.
C’est dans la Constitution, la loi suprême du pays, qui s’applique dans chacun de ses cinquante États. Le deuxième amendement de ce texte, rédigé en 1791, le garantit : « Le droit du peuple de détenir et de porter des armes ne doit pas être transgressé. » Il est précisé que cela permet de pouvoir constituer des milices pour défendre, si nécessaire, la sécurité de l’État. En effet, peu de temps auparavant, les Américains avaient fait la révolution pour chasser les Anglais et fonder une démocratie.
Le droit à porter des armes pour se défendre est donc, pour beaucoup d’Américains, une garantie de leur liberté. C’est aussi un symbole d’héroïsme dans la culture populaire américaine.
Le problème, c’est qu’avec des millions d’armes en circulation, il se produit régulièrement des fusillades meurtrières. Certains États ont donc pris des mesures sur leur territoire, en interdisant par exemple les armes de guerre. Mais il est beaucoup plus difficile de faire passer des lois sur ce sujet au niveau du pays tout entier.
Un adolescent de 18 ans a ouvert le feu dans une école primaire du Texas, tuant 21 personnes dont 19 enfants de moins de 10 ans. "Quand, pour l'amour de Dieu, allons-nous affronter le lobby des armes ?", lance le président américain Joe Biden, ému,"écœuré et fatigué" après une nouvelle fusillade dans une école, l'une des pires depuis plusieurs années. "Ne me dites pas qu'on ne peut rien faire contre ce carnage", soutient le président. Cette nouvelle tuerie a replongé les États-Unis dans le fléau des fusillades en milieu scolaire, que les gouvernements successifs ont jusqu'alors été impuissant à endiguer, mais aussi le très clivant débat sur la prolifération des armes à feu.
Lire aussi: Port d'arme : le point de vue américain
Dans le pays, 30% des adultes possédaient au moins une arme à feu en 2017. Fervent défenseur d'un meilleur encadrement des armes à feu, Joe Biden avait promis durant sa campagne de faire de cette cause une priorité dès le premier jour de son mandat. En avril, le dirigeant démocrate a durci la réglementation des armes "fantômes", des armes en kit pouvant être fabriquées à la maison et dont certaines parties peuvent être achetées en ligne ou produites grâce à une imprimante 3D.
Mais aucune grande avancée n'a été faite au niveau national, en raison de la très courte majorité parlementaire des démocrates.
D’autant qu’une puissante association en faveur des armes, la NRA, finance de nombreuses personnalités politiques. Autre frein d'ampleur : la National Riffle Association (NRA), ce très puissant lobby du port d'armes qui finance de nombreux responsables politiques républicains.
L'influente National Rifle Association (NRA) arrive en tête des pro-armes et fait régulièrement du lobbying auprès des hommes politiques, en très large majorité des candidats Républicains au Congrès. Créée en 1871 par deux anciens combattants de la guerre de Sécssion, la NRA avait pour raison originelle d'améliorer l'adresse au tir, car le conflit avait révélé à ses fondateurs que les tireurs n'étaient pas assez précis.
Vers le milieu des années 1970, la NRA a pris une ampleur médiatique importante, à mesure que les lois fédérales tentaient de limiter l'accès aux armes : ardente partisane du droit de posséder une arme, l'association a perçu les nouvelles lois comme une tentative d'empêcher à terme les citoyens d'acquérir des armes. A travers des campagnes publicitaires et des interviews à la radio et à la télévision, la NRA a cherché à ancrer dans la culture américaine le droit d'être armé pour se protéger des intrus, voire d'un éventuel gouvernement tyrannique.
Lire aussi: "Coup de fusil": Définition et utilisation
Après avoir soutenu Ronald Reagan à l'élection présidentielle de 1980, la NRA a obtenu du gouvernement d'alors une loi protégeant les droits des détenteurs d'armes en 1986; dotée d'une budget annuel d'environ $ 250 000 000, en grande partie versés par les cotisations de ses près de 5 000 000 d'adhérents, la NRA reçoit aussi des fonds provenant des fabricants d'armes, dispose de revenus de placements financiers et profite du fait qu'elle n'est pas une association politique pour s'affranchir d'un plafond de dépense imposé pour les campagnes électorales.
La NRA a été récemment l'objet d'une lutte de pouvoir entre ses dirigeants, et de plusieurs scandales financiers et fait l'objet d'une enquête pour fraude en 2020, venant de la procureure de l'État de New York, où la NRA est immatriculée.
Puisqu'il est ainsi peu probable que le Congrès adopte des réglementations fédérales sur le contrôle des armes, c'est aux États de prendre l'initiative. Washington DC et l'État de New York possèdent les législations les plus restrictives sur le port d'arme. D'autres, comme le Colorado, le New Jersey et la Virginie, ont durci leurs règles en réponse aux tueries de masse en 2021, note Courrier International.
Mais plusieurs États ont profité de la pandémie de Covid-19 pour adopter des lois ou assouplir des anciennes afin de faciliter le port d'armes, se targuant d'être des "sanctuaires du deuxième amendement", comme l'Oklahoma et l'Arizona. Quant au Texas, théâtre de cette nouvelle fusillade, c'est l'un des États où il est le plus facile de se procurer une arme. Depuis le 1er septembre 2021, toute personne âgée de plus de 21 ans et n'étant pas visée par une interdiction peut détenir une arme à feu et la porter en public.
Chaque État a une législation différente sur le sujet, et les lois valables chez certains d’entre eux ne traversent pas les frontières des autres. Aux Etats-Unis, le port d’arme est d’abord réglementé au niveau fédéral, puis par chaque état.
Lire aussi: Plongez dans le passé du stand de tir de Port-Louis
Firearms Owners Protection Act de 1986 : après dénonciation d'abus d'autorité de l'ATF, spécialement par la puissante NRA, cette loi a revu le champ d'application du Gun Control Act de 1968. Légalisation de l'envoi de munitions par l'U.S Postal Service, retrait de l'obligation d'enregistrer les coordonnées des acheteurs de munitions non-perforantes, limitation à 1 seule inspection de l'ATFpar an auprès des fabricants, des vendeurs et des importateurs, sauf preuve de multiples non enregistrement des coordonnées durant une inspection.
Dans l’État de Géorgie, aux États-Unis, une ville de 35 000 habitants appelée Kennesaw est connue pour un fait particulier. Depuis 1982, ses habitants ont une obligation légale de posséder une arme à feu et des munitions.
Elle stipule que : « Afin d’assurer et de protéger la sécurité et le bien-être général de la ville et de ses habitants, chaque chef de famille résidant dans les limites de la ville est tenu de posséder une arme à feu, ainsi que des munitions ». Toutefois, les résidents souffrant d’un handicap mental ou physique, de condamnations pour crime ou de croyances religieuses contradictoires sont exemptés de la loi.
« En 1982, il s’agissait d’une communauté rurale d’environ 5 000 habitants. La ville entière était très conservatrice et environ 95 % des habitants possédaient des armes à feu, c’était donc une loi très symbolique », soulignait dans un article de 2010 du Financial Times Robert Jones, alors président de la Société historique de Kennesaw et propriétaire d’un pistolet Magnum 357.
Selon lui, la loi est « plus une déclaration politique qu’autre chose ». D’ailleurs, il est vrai que la loi ne prévoit aucune sanction en cas d’infraction et personne n’a jamais été poursuivi pour ne pas avoir possédé d’arme.
Après les enfants, les autres victimes très fréquentes sont les personnes issues des minorités (tout spécialement afro-américaines et hispaniques), principalement en raison de préjugés raciaux présents dans l'esprit d'une partie de la population. Trop souvent assimilés à des délinquants, à des membres de gangs ou à des drogués, les afro-américains et les hispaniques sont l'objet de tirs fréquents dès lors que leur comportement peut sembler suspect aux yeux des méfiants.
Dans les 48 830 décès dûs aux armes à feu en 2021 aux États-Unis, 15 290 victimes étaient afro-américaines, 5741 hispaniques, 576 asiatiques, 556 étaient métisses, 466 amérindiennes et 68 étaient natives du Pacifique.
Des programmes de prévention ont été mis en place dans de très nombreuses écoles et municipalités, pour sensibiliser parents et enfants aux dangers des armes et aux bons comportements à adopter pour éviter les drames domestiques.
Année | Décès par armes à feu |
---|---|
2021 | 48 830 |
2022 | 44 359 |
tags: #port #d'arme #états #unis #législation