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Les armes à feu sont très répandues aux États-Unis : 1 Américain sur 4 en possède. Les États-Unis se déchirent depuis des décennies sur la question de la possession des armes à feu. Régulièrement, des fusillades font des victimes, mais le nouveau président, Donald Trump, refuse d’interdire les armes dans son pays. C’est dans la Constitution, la loi suprême du pays, qui s’applique dans chacun de ses cinquante États.

Le deuxième amendement de ce texte, rédigé en 1791, le garantit : « Le droit du peuple de détenir et de porter des armes ne doit pas être transgressé. » Il est précisé que cela permet de pouvoir constituer des milices pour défendre, si nécessaire, la sécurité de l’État. En effet, peu de temps auparavant, les Américains avaient fait la révolution pour chasser les Anglais et fonder une démocratie. Le droit à porter des armes pour se défendre est donc, pour beaucoup d’Américains, une garantie de leur liberté.

C’est aussi un symbole d’héroïsme dans la culture populaire américaine. Le problème, c’est qu’avec des millions d’armes en circulation, il se produit régulièrement des fusillades meurtrières. Certains États ont donc pris des mesures sur leur territoire, en interdisant par exemple les armes de guerre. Mais il est beaucoup plus difficile de faire passer des lois sur ce sujet au niveau du pays tout entier. D’autant qu’une puissante association en faveur des armes, la NRA, finance de nombreuses personnalités politiques.

Kamala Harris et le Droit de Porter une Arme

Pourtant, la candidate démocrate Kamala Harris a déclaré, face à son adversaire républicain Donald Trump, qu’elle était propriétaire d’un pistolet, à l’instar d’une part croissante de leurs concitoyens. Une augmentation qui est poussée en partie par des mouvements plutôt progressistes. On vous explique pourquoi. Dans un pays où les opinions sur le port d’armes divisent si bien les démocrates et les républicains, il n’avait qu’à dégainer une vieille ritournelle pour bien marquer son territoire politique : selon l’ancien président, Kamala Harris voudrait « démanteler la police » et même « confisquer les armes de tout le monde ».

Mais la réponse de cette dernière en a séché plus d’un : non seulement elle ne compte désarmer personne, mais elle et son colistier Tim Walz possèdent tous deux un revolver. « Je possède une arme à feu, et ce pour la même raison que beaucoup de gens, pour ma sécurité personnelle », a-t-elle rétorqué. Avant de s’en éloigner, Tim Walz a même été un membre actif du très puissant lobby des armes à feu proche des républicains, la National Rifle Association (NRA). Kamala Harris, elle, œuvre depuis des années à une plus grande régulation des armes à feu, notamment pour vérifier les antécédents judiciaires et psychologiques des acheteurs.

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NRA et Minorités : Même Combat ?

Hier comme aujourd’hui, presque aucun démocrate n’a les faveurs de la NRA, qui s’amuse à noter tous les élus en fonction de leur position sur les armes. Quand les démocrates ont tous des F, la note la plus basse, les républicains ont toujours un A. En 2018, par exemple, il n’y avait que quatre sénateurs démocrates qui avaient obtenu un A, le plus souvent dans des États ruraux (ou désindustrialisés) et conservateurs : Montana, Indiana, Dakota du Nord, Virginie Occidentale.

Et seuls neuf n’avaient pas un F… Kamala Harris illustre en réalité un apparent paradoxe : selon un sondage USA Today/Ipsos en 2021, deux tiers des Américains se déclarent en faveur d’une réglementation plus stricte du droit de s’armer. Pourtant, dans le même temps, le nombre de détenteurs d’armes a explosé : rien qu’en 2020, 8,4 millions d’Américains s’équipent d’une arme à feu pour la première fois. Qui sont-ils ? Aujourd’hui, sur 50 millions de propriétaires, 20% s’identifient comme progressistes.

Règles et Limites du 2ème Amendement

Les fusillades aux États-Unis entretiennent systématiquement le débat sur le droit de posséder et de porter une arme à feu, et soulèvent la question de sa légitimité. Chaque État a une législation différente sur le sujet, et les lois valables chez certains d’entre eux ne traversent pas les frontières des autres. Aux Etats-Unis, le port d’arme est d’abord réglementé au niveau fédéral, puis par chaque état. Ce texte a donné lieu à maintes controverses sur son interprétation, et les pontes en robe longue de la Cour Suprême ont eu des difficultés à énoncer une règle d’application claire et uniforme.

Que les nerveux ne dégainent pas trop vite, posséder une arme ne signifie pas qu’ils peuvent se balader avec une carabine dans le coffre, ou sortir leur colt pour un duel sur le bas côté de la route. La Cour Suprême a décidé qu’« un particulier peut posséder une arme à feu ; mais que ce droit n’est valable que pour se défendre ». Chaque Etat a ses propres lois sur le port d’armes, et décide s’il est nécessaire d’avoir un permis pour en porter et en utiliser une. Un permis est nécessaire, mais il est délivré par l’autorité locale (shérif ou police), et à leur totale discrétion.

Le permis est ensuite délivré par le « Florida Department of Agriculture and Consumer Services » en Floride, est valable 7 ans et coûte environ 120$. En voiture ? En Floride, montrer son arme en public sans raison légitime équivaut à une agression à main armée, passible d’une peine de 3 ans d’emprisonnement. Ces utilisations « justifiées » d’une arme doivent toutefois être motivées par la crainte d’un danger imminent, d’une violence infligée qui serait susceptible d’entraîner la mort ou de sérieux préjudices corporels.

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Kennesaw : Une Ville Où la Possession d'Arme est Obligatoire

Dans l’État de Géorgie, aux États-Unis, une ville de 35 000 habitants appelée Kennesaw est connue pour un fait particulier. Depuis 1982, ses habitants ont une obligation légale de posséder une arme à feu et des munitions. Dans la ville de Kennesaw, dans l’État de Géorgie aux États-Unis, une loi municipale de 1982 oblige légalement les résidents à posséder des armes à feu et des munitions. Elle stipule que : « Afin d’assurer et de protéger la sécurité et le bien-être général de la ville et de ses habitants, chaque chef de famille résidant dans les limites de la ville est tenu de posséder une arme à feu, ainsi que des munitions ».

Toutefois, les résidents souffrant d’un handicap mental ou physique, de condamnations pour crime ou de croyances religieuses contradictoires sont exemptés de la loi. Si la ville compte environ 35 000 habitants aujourd’hui, elle en comptait sept fois moins au moment de l’instauration de la loi. « En 1982, il s’agissait d’une communauté rurale d’environ 5 000 habitants. La ville entière était très conservatrice et environ 95 % des habitants possédaient des armes à feu, c’était donc une loi très symbolique », soulignait dans un article de 2010 du Financial Times Robert Jones, alors président de la Société historique de Kennesaw et propriétaire d’un pistolet Magnum 357.

Interrogé par la BBC , Derek Easterling, l’actuel maire de la ville, tient le même discours : « Je ne fais pas ça pour le spectacle », assure-t-il au sujet du maintien de la loi. Un point de vue partagé par Pat Ferris, membre du conseil municipal de Kennesaw en 1984, soit deux ans après l’adoption de la loi. Selon lui, la loi est « plus une déclaration politique qu’autre chose ». D’ailleurs, il est vrai que la loi ne prévoit aucune sanction en cas d’infraction et personne n’a jamais été poursuivi pour ne pas avoir possédé d’arme.

Pour Cris Welsh, habitante de la ville et mère de deux adolescentes, « c’est juste une vieille tradition de Kennesaw à laquelle on s’accroche ». Elle possède d’ailleurs des armes à feu et s’en sert pour chasser ou lorsqu’elle pratique le tir au club de tir local avec ses filles. Dans son inventaire, elle compte un pistolet semi-automatique Ruger, un Beretta, un Glock et environ une demi-douzaine de fusils de chasse.

« Je souhaite que lorsque les étrangers pensent à la ville, ils pensent aux parcs, aux écoles et aux valeurs de la communauté, et non à la loi sur les armes à feu qui met les gens mal à l’aise », s’attriste-t-elle. Selon un article du Courrier international , cette loi est avant tout une « réaffirmation du deuxième amendement de la Constitution américaine », qui garantit le droit de posséder une arme. Mais le contexte politique de l’époque aurait aussi joué un rôle dans sa mise en vigueur.

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Cette loi aurait été appliquée en « réaction » à la réglementation adoptée en février 1981 par la ville de Morton Grove, dans l’Illinois, qui interdisait les armes à feu sur le territoire de la commune. Près de 40 ans après son adoption, la loi est toujours en vigueur et toujours populaire, notamment parce que le taux de criminalité à Kennesaw est resté disproportionnellement bas. Selon les données du département de police de Kennesaw, il n’y a eu aucun meurtre en 2023.

Origines du Droit de Porter une Arme

L'origine de ce droit remonte au XVIIème et XVIIIème siècles, à la période coloniale, durant laquelle les élites agraires étaient seules autorisées à posséder une arme pour la chasse; de leur côté, les milices anglaises voyaient leurs membres être choisis, entraînés et armés par les élites agraires. Les colonies étant très éloignées de Londres, dont la défense de la Couronne était alors un devoir, les milices ont joué un rôle déterminant dans la sécurité des colonies face aux attaques françaises mais aussi amérindiennes. Lorsque l'amendement a été voté en 1791, l'Union des États-Unis était encore jeune et fragile, et le pays ne possédait pas d'armée permanente, aussi la défense territoriale était elle surtout confiée aux milices locales.

Impact Économique et Victimes

En 2021, la vente d'armes à feu et de munitions a généré $ 70 520 000 000 et soutenu 375 819 emplois, avec notamment 52 799 boutiques dans tout le pays. Des programmes de prévention ont été mis en place dans de très nombreuses écoles et municipalités, pour sensibiliser parents et enfants aux dangers des armes et aux bons comportements à adopter pour éviter les drames domestiques.

Après les enfants, les autres victimes très fréquentes sont les personnes issues des minorités (tout spécialement afro-américaines et hispaniques), principalement en raison de préjugés raciaux présents dans l'esprit d'une partie de la population. Trop souvent assimilés à des délinquants, à des membres de gangs ou à des drogués, les afro-américains et les hispaniques sont l'objet de tirs fréquents dès lors que leur comportement peut sembler suspect aux yeux des méfiants.

Ainsi, rôder près de voitures particulières, s'approcher d'une propriété privée ou encore paraître hésitant dans certaines situations peut conduire à ce qu'un citoyen armé croit à tort que l'attitude de l'autre personne est potentiellement dangereuse et ouvre le feu. Dans les 48 830 décès dûs aux armes à feu en 2021 aux États-Unis, 15 290 victimes étaient afro-américaines, 5741 hispaniques, 576 asiatiques, 556 étaient métisses, 466 amérindiennes et 68 étaient natives du Pacifique.

La National Sheriffs Association (NSA) de son côté a exprimé le souhait que davantage soit fait pour punir plus durement les anciens condamnés à nouveau arrêtés armés, que la jeunesse soit mieux éduquée et ne recourt pas aux armes à la moindre insulte (le rôle des médias sociaux est dénoncé) en impliquant encore plue les communautés, les familles et les religieux. L'International Association of Chiefs of Police (IACP) appelle à l'interdiction de la vente en ligne de gilets pare-balles, sauf pour les forces de l'ordre et rendant la neutralisation de suspects plus compliquée; le port dissimulé d'armes à feu est aussi remis en question et plus particulièrement il est souhaité par l'IACP qu'il soit interdit sur les campus.

L'IACP soutient également fortement la loi de 1994 interdisant la vente aux civils d'armes semi-automatiques avec chargeurs de plus de 10 munitions : durant l'applicaiton de cette loi (jusqu'en 2004), le nombre d'attaques avec fusils d'assaut a baissé de 66%.

La National Rifle Association (NRA)

L'influente National Rifle Association (NRA) arrive en tête des pro-armes et fait régulièrement du lobbying auprès des hommes politiques, en très large majorité des candidats Républicains au Congrès. Créée en 1871 par deux anciens combattants de la guerre de Sécssion, la NRA avait pour raison originelle d'améliorer l'adresse au tir, car le conflit avait révélé à ses fondateurs que les tireurs n'étaient pas assez précis.

Vers le milieu des années 1970, la NRA a pris une ampleur médiatique importante, à mesure que les lois fédérales tentaient de limiter l'accès aux armes : ardente partisane du droit de posséder une arme, l'association a perçu les nouvelles lois comme une tentative d'empêcher à terme les citoyens d'acquérir des armes. A travers des campagnes publicitaires et des interviews à la radio et à la télévision, la NRA a cherché à ancrer dans la culture américaine le droit d'être armé pour se protéger des intrus, voire d'un éventuel gouvernement tyrannique.

Après avoir soutenu Ronald Reagan à l'élection présidentielle de 1980, la NRA a obtenu du gouvernement d'alors une loi protégeant les droits des détenteurs d'armes en 1986; dotée d'une budget annuel d'environ $ 250 000 000, en grande partie versés par les cotisations de ses près de 5 000 000 d'adhérents, la NRA reçoit aussi des fonds provenant des fabricants d'armes, dispose de revenus de placements financiers et profite du fait qu'elle n'est pas une association politique pour s'affranchir d'un plafond de dépense imposé pour les campagnes électorales.

La NRA a été récemment l'objet d'une lutte de pouvoir entre ses dirigeants, et de plusieurs scandales financiers et fait l'objet d'une enquête pour fraude en 2020, venant de la procureure de l'État de New York, où la NRA est immatriculée.

Firearms Owners Protection Act de 1986

Firearms Owners Protection Act de 1986 : après dénonciation d'abus d'autorité de l'ATF, spécialement par la puissante NRA, cette loi a revu le champ d'application du Gun Control Act de 1968. Légalisation de l'envoi de munitions par l'U.S Postal Service, retrait de l'obligation d'enregistrer les coordonnées des acheteurs de munitions non-perforantes, limitation à 1 seule inspection de l'ATFpar an auprès des fabricants, des vendeurs et des importateurs, sauf preuve de multiples non enregistrement des coordonnées durant une inspection.

Le Débat sur le Port d'Arme Dissimulé

Le débat fait rage entre partisans et opposants à cette partique, certains arguant que la possibilité d'avoir une personne armée qui cache son arme créé un climat de peur et d'insécurité, ou encore que laisser de telles personnes présentes sur les campus n'améliore pas forcément la sécurité globale. L'année 2022 a vu mourir 44 359 personnes par armes à feu aux États-Unis, dont 24 090 par suicides; il-y-a également eu 38 553 blessés.

Fusillades et Réactions Politiques

Un adolescent de 18 ans a ouvert le feu dans une école primaire du Texas, mardi 24 mai 2022, tuant 21 personnes dont 19 enfants de moins de 10 ans. Cette nouvelle fusillade a rouvert aux États-Unis le débat sur les armes à feu, avec peu voire aucune perspective de débouchés. "Quand, pour l'amour de Dio, allons-nous affronter le lobby des armes ?", lance le président américain Joe Biden, ému,"écœuré et fatigué" après une nouvelle fusillade dans une école, l'une des pires depuis plusieurs années.

Dix-neuf enfants de moins de dix ans et deux adultes ont été tués par un adolescent de 18 ans qui a ouvert le feu, mardi 24 mai 2022, dans une école primaire de la ville d'Uvalde, au Texas. "Ne me dites pas qu'on ne peut rien faire contre ce carnage", soutient le président.Cette nouvelle tuerie a replongé les États-Unis dans le fléau des fusillades en milieu scolaire, que les gouvernements successifs ont jusqu'alors été impuissant à endiguer, mais aussi le très clivant débat sur la prolifération des armes à feu.

Un débat stérile, sans perspective d'avancement, tant les Américains sont attachés à leurs armes et au deuxième amendement de la Constitution américaine, qui leur garantit le droit de les détenir. Dans le pays, 30% des adultes possédaient au moins une arme à feu en 2017. Fervent défenseur d'un meilleur encadrement des armes à feu, Joe Biden avait promis durant sa campagne de faire de cette cause une priorité dès le premier jour de son mandat.

En avril, le dirigeant démocrate a durci la réglementation des armes "fantômes", des armes en kit pouvant être fabriquées à la maison et dont certaines parties peuvent être achetées en ligne ou produites grâce à une imprimante 3D. Mais aucune grande avancée n'a été faite au niveau national, en raison de la très courte majorité parlementaire des démocrates. Autre frein d'ampleur : la National Riffle Association (NRA), ce très puissant lobby du port d'armes qui finance de nombreux responsables politiques républicains.

Réglementations État par État

Puisqu'il est ainsi peu probable que le Congrès adopte des réglementations fédérales sur le contrôle des armes, c'est aux États de prendre l'initiative. Washington DC et l'État de New York possèdent les législations les plus restrictives sur le port d'arme. D'autres, comme le Colorado, le New Jersey et la Virginie, ont durci leurs règles en réponse aux tueries de masse en 2021.

Mais plusieurs États ont profité de la pandémie de Covid-19 pour adopter des lois ou assouplir des anciennes afin de faciliter le port d'armes, se targuant d'être des "sanctuaires du deuxième amendement", comme l'Oklahoma et l'Arizona. Quant au Texas, théâtre de cette nouvelle fusillade, c'est l'un des États où il est le plus facile de se procurer une arme. Depuis le 1er septembre 2021, toute personne âgée de plus de 21 ans et n'étant pas visée par une interdiction peut détenir une arme à feu et la porter en public. Depuis le début de l'année 2022, plus de 200 fusillades de masses ont eu lieu en seulement quatre mois, selon le décompte de l'organisation Gun Violence Archive. La fabrication d'armes à feu a par ailleurs triplé en vingt-ans.

Statistiques sur les décès liés aux armes à feu aux États-Unis en 2021

Groupe Ethnique Nombre de Décès
Afro-Américains 15 290
Hispaniques 5 741
Asiatiques 576
Métisses 556
Amérindiennes 466
Natives du Pacifique 68

tags: #loi #port #d'arme #États-Unis

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