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Adieu Brindavoine: Une Œuvre Précoce de Tardi

« Adieu Brindavoine » est une des toutes premières œuvres de Tardi. Et ça se voit. Non pas que cette B.D soit mauvaise, loin de là, elle est néanmoins un peu inaboutie et fait preuve de quelques maladresses. Ce n'est donc pas la meilleure B.D de Tardi mais pour ceux qui aiment cet auteur, elle vaut largement le détour.

On y retrouve tout ce qui fait l'ADN de l'œuvre de Tardi : une succession d'aventures rocambolesques, une grosse dose d'étrangeté, une touche de surréalisme et déjà un antimilitarisme affirmé. "Adieu Brindavoine" est le premier album publié par Jacques Tardi, deux ans avant le premier album des aventures d'Adèle Blanc-Sec. L'essentiel est déjà là : une histoire rocambolesque, avec des personnages baroques et bon nombre d'éléments flirtant avec le fantastique et un graphisme extraordinaire.

Jacques Tardi eut la malignité de faire réapparaître cet album entre les quatrième et cinquième tome d'Adèle Blanc-Sec, entre lesquels il vient s'intercaler temporellement (le tome 4 se terminant par la déclaration de la première guerre mondiale) et dans le fil d'Ariane de l'histoire puisque des éléments d'Adieu Brindavoine vont intégrer les futures aventures d'Adèle. Avec Tardi, tout est baroque.

Contexte et Thèmes

1914. À quelques semaines du conflit à venir, la toile de fond est le Paris de la Belle Époque. La page de garde d'« Adieu Brindavoine » illustre merveilleusement le background de l'ouvrage sur une double-page d'anthologie où pullulent les détails auxquels se référer : lorgnons et moustaches fines, képis et pèlerines sombres, chapeaux-melons et casquettes apaches, faux-cols amidonnés et cravates ficelle, gilets étriqués et montres à gousset, pavé luisant, fiacres clopin-clopant et taxis de Dion Bouton pétaradants, « Café de la Paix » et affiches publicitaires géantes sur les murs borgnes de part et d'autre d'une grande avenue. Une carte postale typique de ce début de XXème siècle qu'affectionne l'auteur. En somme : un univers à la « Adèle Blanc-Sec » ... et bien, non, on ne l'y trouve pas, et pourtant ...!

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« Adieu Brindavoine » (1974) est une bande dessinée française signée Jacques Tardi qui préfigure la série-phare de l'auteur, « Les aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec ». Le héros, Lucien Brindavoine, figurera à son générique dès « le secret de la salamandre » (tome 5) ; il y restera jusqu'au dernier épisode au rang de personnage récurrent, indispensable et incontournable.

Toutes les composantes du cycle à venir (1976) sont déjà au rendez-vous d'« Adieu Brindavoine ». On y trouve, déjà : un univers Vernien cousin du steampunk (même s'il n'est pas encore officiellement né) ; un humour de situation décalé mais omniprésent, comme prisonnier de l'époque ; l'impression d'une uchronie figée dans les prémisses de la Première Guerre Mondiale ; des aventures rocambolesques, foutraques, loufoques, oniriques et farfelues en contraste avec le réalisme graphique apporté aux décors (mobilier Art Déco, Paris urbain de la Belle époque méticuleusement dessiné ; désert afghan à l'aplomb d'un soleil brûlant.

Cerises sur le gâteau : une gigantesque construction métallique en creux de dunes, à la Gustave Eiffel, comme l'artéfact d'un repaire digne d'un ennemi de James Bond 007 ; un dirigeable fantôme balloté au gré des vents de l'océan, un cuirassé tsariste ...

Publication et Rééditions

« Adieu Brindavoine » est sorti en prépublication (N&B probable) dès le n° 680 (novembre 1972) de « Pilote, le journal qui s'amuse à réfléchir » tout du long de quelques numéros consécutifs. On le trouva ensuite en album Casterman (1974) cartonné et agrémenté de quadrichromie. L'exemplaire lu pour la présente chronique est une réédition couleurs de 1987 incorporant, en sus des 44 planches d'origine, 12 autres embarquant le même héros dans les combats de 14, ceux encore hors des tranchées, en képis, uniformes bleu garance et pantalons rouge. Ce supplément a un titre : « La Fleur au fusil ».

La Fleur au Fusil

« Adieu Brindavoine » et « La Fleur au fusil » offrent l'occasion de découvrir deux facettes de l'œuvre de Tardi, l'un des maîtres actuels de la bande dessinée. La première, son goût pour le roman-feuilleton et les récits échevelés ; la seconde, sa dénonciation de la guerre.

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Il me semble trouver une parenté graphique entre Brindavoine et Monsieur Même. Silhouettes longilignes, comme désarticulées et dégingandées, chapeau-melon étroit. Ni « Adieu Brindavoine », ni « La fleur au fusil » ne sont, encore, à l'apex de la carrière de Tardi. Ils laissent transparaitre les deux tendances principales de l'œuvre à venir ; ce sont deux bourgeons à la bifurcation entre « Adèle Blanc-Sec » et « La guerre des tranchées ». Le premier, pour le fun et le rire, en roman-feuilleton tout en couleurs chatoyantes, avance à l'instinct, à l'envie, à l'intuition, souvent à la « va-comme-j'te-pousse ».

Découvrons Lucien Brindavoine , photographe profitant de sa fortune et qui va être entraîné bien malgré lui dans une folle aventure puis dans la guerre. Ces deux histoires préfigurent la série des Adèle Blancsec où ce personnage apparaîtra de nouveau. On découvre le trait de Tardi, ses personnages aux visages et à l'allure torturés. L'histoire me semble encore plus tortueuse que dans les ‘Adele Blansec'. À découvrir pour voir la genèse de la série.

Deux histoires indépendantes sur Brindavoine. Tout commence en mai 1914 à Neuilly sur Seine. Notre rentier qui s'adonne à la photographie, va devenir malgré lui un grand voyageur. La fleur au fusil raconte une partie de ce qu'a vécu Brindavoine pendant la première guerre mondiale, en voulant persuader les allemands et les français d'arrêter de se battre, il se fait tirer dessus. Il ère et rêve de la femme qu'il aime, repense aux personnes qu'il a vues en allant à la guerre et il se voit quand il était enfant. Il se réveille dans une église.

Né en 1946, Jacques Tardi, l'un de nos plus célèbres dessinateurs de bandes dessinées, voit ses premiers albums paraître en 1974. Le tout n'est pas précisément passionnant, mais on y trouve évidemment déjà tous les ingrédients de ce qui allait faire le succès de l'anar Tardi (marié à une chanteuse française engagée et père de quatre enfants chiliens) : l'ambiance ‘julesvernienne', les décors art nouveau et le côté roman-feuilleton.

Synopsis et Personnages

Mai 1914. Jeune dilettante, Brindavoine est photographe d'art. Le pavillon luxueux de Neuilly sur Seine, sorte de cabinet de curiosité où il semble vivre seul, contribue à poser socialement notre bonhomme. Une succession d'aventures exotiques aux accents coloniaux suivent, toutes aussi loufoques qu'improbables, à grands renforts de rappels historiques et artistiques : Sarah Bernhardt et sa ménagerie burlesque, les constructions métalliques de Gustave Eiffel, l'art nouveau d'Alphons Mucha et d'Hector Guimard... Quand Lucien Brindavoine revient en France, repêché en mer Noire par la marine impériale russe, la guerre a éclaté. À son corps défendant, il est contraint de rejoindre les 1eres lignes histoire de se faire amputer l'avant-bras gauche en 1916.

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Le fabuleux talent graphique de Tardi se met en place. L'idée de prédestination de l'existence, de fatalité est prégnante comme le thème récurrent de la boucherie pendant la guerre de 14-18.

L'Antimilitarisme de Tardi

En 1974, alors que la Grande Guerre n’intéresse plus grand monde, le jeune dessinateur de 28 ans réalise deux récits ancrés dans le premier conflit mondial : La Fleur au fusil et La Véritable Histoire du soldat inconnu. Deux histoires qui en appelleront beaucoup d’autres, couronnant rapidement Tardi comme le spécialiste de la période pour la bande dessinée. La qualité de ses reconstitutions et de ses scénarios, la puissance et la crudité de son évocation, la radicalité et la sincérité de son message font de ses albums des repères, parfois indépassables par les auteurs qui se lancent dans des récits sur cette période. Au risque d’être orientés par les partis pris de Tardi, comme le choix quasi exclusif d’un arrière-plan situé dans les tranchées et du côté des Français.

Après plus de 40 ans de création autour de la Guerre de 14-18, l’empreinte de l’auteur de Putain de guerre ! est indélébile.

Le Dernier Assaut: Clôture d'une Époque

Sa décision de clore cette aventure avec l’album Le Dernier Assaut fait de cette dernière une bande dessinée très attendue à l’automne 2016. La partie graphique du Dernier assaut présente un visage beaucoup plus familier. L’action se déroule de 1916 à 1918, dans les tranchées, côté français. Le narrateur est un brancardier du 98e régiment d’infanterie, qui déambule en première ligne, croisant toutes sortes d’individus et de situations, représentatifs de la vision du conflit portée par Tardi.

Les thématiques développées au fil des 88 planches reprennent celles, bien connues, de l’auteur de C’était la guerre des tranchées : critique en règle des gouvernements et du Haut commandement, dénonciation des stratégies ineptes et des offensives pour rien, réprobation d’une guerre industrielle qui fait la fortune des grands groupes, lien entre la Première Guerre mondiale et la montée du nazisme, description d’une litanie de lâchetés, égoïsme et cynisme chez les hommes de troupe.

La représentation de la Guerre de 14-18 chez Tardi est ainsi très différente de celle de l’Anglais Pat Mills dans La Grande Guerre de Charlie, qui, tout en dénonçant la guerre, souligne la solidarité (et parfois les actes de bravoure) des soldats face aux officiers. Le Français est également beaucoup plus sombre et désabusé que son homologue britannique, comme en témoigne la scène finale du Dernier assaut.

Le Dernier Assaut. Jacques Tardi (scénario et dessins). Jean-Luc Ruault (couleurs). Casterman. 108 pages.

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