Envie de participer ?
Bandeau

Parvenir à lutter contre les armes à feu est un défi crucial aux États-Unis qui ne cesse de bouleverser la scène internationale. Chaque mois, les États-Unis sont endeuillés par de nouvelles fusillades. Ce terme de « fusillades de masse » (mass shootings en anglais) désigne des tueries faisant au moins quatre victimes, mortes ou blessées. D’après un rapport publié en septembre 2022 par Gun Violence Archive, les victimes ont atteint un total de 1 420 depuis le 1er janvier 2022, dont 293 morts et 1 127 blessés. Mais ces mass shootings ne sont que la partie visible du chaos engendré par les armes à feu.

En effet, bien que les fusillades de masse dans les écoles/supermarchés/églises attirent davantage l’attention des médias, les dégâts causés par les armes à feu sont bien plus nombreux au sein des foyers et des maisons. Les armes à feu sont donc un véritable fléau aux États-Unis (qui connaît un taux d’homicide par armes à feu en moyenne 25 fois plus élevé que celui d’un autre pays développé). Il est aujourd’hui nécessaire de faire face à cette violence. Au cours des 145 premiers jours de 2022, les États-Unis ont connu 213 fusillades de masse. Ce sont les fusillades de masse qui nous choquent le plus. Ce sont donc elles que tu peux utiliser comme exemples marquants.

Exemples marquants de fusillades de masse

Le 14 mai, le pays a été secoué par la tuerie de Buffalo. Dix personnes, dont une majorité d’Afro-Américains, ont été abattues par un jeune suprématiste blanc de 18 ans. Pour rappel, le suprémacisme blanc est une idéologie raciste consistant à prôner la supériorité de la « race blanche » sur les autres. Cette idéologie a été, du XIXᵉ siècle jusqu’aujourd’hui, la source de nombreux actes de violence. Le 24 mai, un autre jeune de 18 ans a tué 21 personnes (dont 19 enfants) dans une école d’Uvalde au Texas. Le mois de juin a lui aussi été tragique.

Le 1er juin, un homme d’une trentaine d’années a tué au moins quatre personnes dans un hôpital de Tulsa, dans l’Oklahoma. Le 9, une autre tuerie a provoqué la mort de trois personnes à Smithburg dans le Maryland. 39 fusillades de masse en vingt-trois jours, dont six ayant fait plus de quatre morts, ce qui en fait des « tueries de masse » : en ce début d’année 2023, les Etats-Unis continuent d’être endeuillés par la violence armée.

L'augmentation de la criminalité liée aux armes à feu

Les États-Unis assistent tout de même à une vague de criminalité particulièrement importante depuis plusieurs années. L’année 2020 a grandement participé à la hausse de cette criminalité. L’ATF constate une augmentation de 64 % du nombre d’armes vendues. Pour les autorités de santé, la pandémie a joué un grand rôle dans cette hausse. Mais comment ?

Lire aussi: "Rust" : Alec Baldwin face à la justice

Selon le FBI, qui publie une enquête sur l'année 2021, le nombre de personnes ayant tenté de commettre ou réussi à commettre une tuerie de masse en 2021, telle que celle commise dans l'école du Texas, a augmenté de 52% par rapport à 2020. 61 faits de ce type ont été répertoriés contre 40 en 2020. Dans 12 cas, le FBI appose le terme de "tuerie de masse", dans la mesure où il y a eu plus de 4 morts. C'est le cas par exemple du massacre de Buffalo le 14 mai dernier dans l'État de New York, où 10 personnes ont été tués dans un supermarché.

Les causes profondes de la violence armée

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette situation:

  1. Le droit d’accéder aux armes à feu est un droit constitutionnel. Il est en effet garanti par le Second amendement (ratifié en 1791) qui défend le droit de détenir et de porter des armes.
  2. Les armes à feu font partie intégrante de la culture américaine. En 1995, le politologue Robert Spitzer affirmait que la culture américaine des armes à feu s’explique par la prolifération des armes à feu depuis les premiers jours de la nation.
  3. Le lobbying pour les droits des armes à feu est bien plus fort que celui pour le contrôle des armes à feu. En 2017, le premier s’élève à 10 millions de dollars, tandis que le second peine à atteindre deux millions.
  4. Un sentiment d’anarchie/de désordre qui découle notamment de la violence policière (= « A sense of lawlessness stemming from police violence »). Gary LaFree, Richard Rosenfeld et Randolph Roth ont étudié la question et soulignent que les vagues de criminalité surviennent souvent lorsque les normes sociales s’effondrent.
  5. Un sentiment d’isolement et de frustration, sentiment qui a été exacerbé par la pandémie. La Covid a favorisé l’isolement et la prise de position sur de nombreuses questions et a ainsi divisé les concitoyens. Or, lorsque l’empathie pour les autres citoyens décline, la criminalité augmente. Mais il y a aussi eu une certaine rupture entre les citoyens et le gouvernement. En effet, d’après Gallup, 80 % des citoyens ne sont pas satisfaits par la direction du pays pendant la pandémie.

Certains affirment même que cette relation singulière que les États-Unis tiennent vis-à-vis des armes à feu relève d’une forme sombre de l’exceptionnalisme américain. Dans le cas des Etats-Unis, les fléaux sociaux comme la pauvreté, le racisme, la drogue ou le chômage sont à l’origine de nombreux actes désespérés.

Statistiques alarmantes

Quelques chiffres clés permettent de mesurer l'ampleur du problème:

  • Selon le Gun Violence Archive, une Organisation Non-Gouvernementale qui recense quotidiennement les victimes d'armes à feu aux Etats-Unis, 17.196 personnes sont décédées à cause d'une arme à feu aux Etats-Unis depuis le 1er janvier 2022. Cela correspond à 119 victimes par jour.
  • Parmi ces victimes décédées, the Gun Violence Archive a recensé 140 enfants, âgés de 0 à 12 ans en 2022.
  • Toujours selon the Gun Violence Archive, il y a eu plus de 200 fusillades aux États-Unis depuis le 1er janvier 2022, lors desquelles au moins quatre personnes ont été blessées ou tuées.
  • Selon le Pew Research Center, le taux de décès par arme à feu pour 100.000 habitants était de 13,6 aux Etats-Unis en 2020, selon les dernières données disponibles. Il s'agit du plus haut taux recensé depuis le milieu des années 1990.
  • Aux Etats-Unis, où le droit de posséder une arme est garanti par la Constitution, le nombre de pistolets, revolvers et autres fusils s'est envolé depuis quelques années. Selon le projet Small Arms Survey, 393,3 millions d'armes étaient en circulation dans la population civile aux Etats-Unis en 2017, soit 120 armes pour 100 personnes.
  • Chaque jour, la violence armée emporte plus de 130 vies aux Etats-Unis.
  • En 2020, les armes à feu sont devenues la première cause de décès chez les enfants et adolescents américains, devant les accidents de la route.

Le chiffre fait froid dans le dos : 4 752 enfants sont morts en 2021 aux Etats-Unis à la suite d'une blessure par arme à feu. C’est une augmentation de près de 42 % par rapport à 2018, et cela fait de 2021 la deuxième année consécutive où les armes à feu sont la principale cause de décès chez les enfants et les adolescents de moins de 19 ans aux États-Unis ; devant les accidents de la route, les overdoses de drogue et le cancer. Dans le détail, près de deux tiers de ces 4 752 morts par arme à feu étaient des homicides, et près de 30 % des suicides. Les victimes avaient entre 15 et 19 ans pour la plupart. Plus de huit sur dix étaient des garçons.

Lire aussi: Prévenir les accidents d'armes à feu : Guide complet

D'un point de vue statistique, les Etats-Unis constituent une aberration mondiale en matière d’armes. Outre des ventes légales inégalées, aucun pays au monde n’en compte autant en circulation : 120 pour 100 habitants selon les chiffres (sous-évalués) du SAS. Très loin devant le second pays du classement (Yémen, 52 pour 100) et plus encore de nations occidentales comme le Canada (34), la France (19) ou l’Espagne (7). Tout aussi inquiétant, quoique logique, le nombre de décès par armes à feu aux Etats-Unis bat lui aussi des records : 48 830 en 2021, en hausse de 8 % par rapport à 2020, une année jugée « historique » par les autorités sanitaires. Environ 54 % de ces décès sont des suicides. Les tueries de masse, elles aussi, font de plus en plus de victimes - près de 700 morts et 1 300 blessés l’an dernier, contre 275 et 433 en 2014. Et inexorablement, leur fréquence s’accélère.

En 1986, il y eut 1 582 meurtres à New-York, mais seulement 67 à Londres ; 1 480 à Miami et 16 à Manchester ; 666 à Chicago et 61 à Toronto ; 695 à Detroit et 75 à Munich.

Tableau récapitulatif des statistiques clés (2022)

Statistique Chiffre
Décès par arme à feu depuis le 1er janvier 2022 17 196
Décès par jour 119
Enfants (0-12 ans) décédés 140
Fusillades de masse + de 200
Armes en circulation pour 100 habitants 120

Mesures potentielles pour lutter contre la violence armée

Plusieurs pistes peuvent être envisagées pour faire face à ce problème :

  • Appliquer des « buyback programs ». C’est-à-dire des programmes destinés à racheter les armes qui sont actuellement en circulation aux États-Unis. Cela permettrait de diminuer le nombre d’armes à feu disponibles et ainsi de faciliter leur contrôle. Cette mesure a notamment été mise en place en 1996 par le Premier ministre australien John Howard et elle est au cœur du National Firearms Agreement.
  • Vérifier plus efficacement les antécédents (Effective background checks) pour résoudre l’une des grandes failles du système américain, souvent appelée « three-day loophole ». Pour l’expliquer rapidement : actuellement, les antécédents de toute personne souhaitant acheter une arme doivent être vérifiés sous un délai de trois jours pour que cette personne soit autorisée ou non à l’acheter. Cependant, si les services américains ne réussissent pas à traiter un dossier sous un délai de trois jours, l’individu peut acheter l’arme (quel que soit son profil).
  • L’instauration d’une période d’attente permettrait donc d’empêcher des achats impulsifs d’armes et d’éviter autant de crimes passionnels ou de suicides.

Actions récentes du gouvernement et mouvements citoyens

Le bilan au sujet des armes à feu est dans l’immédiat assez décevant. 11 avril 2022 : Joe Biden a durci la réglementation des armes dites « fantômes ». Ces armes sont dangereuses, car non réglementées. Elles ne sont pas traçables et n’existent actuellement pas au regard de la loi. Le gouvernement américain a donc décidé de sévir contre les fusils artisanaux achetés et vendus sans registre. Le problème qu’il affronte ici est réel et inquiétant. On estime que le nombre de ce que l’on appelle les « ghost guns » a été multiplié par dix en cinq ans (entre 2016 et 2021). Alors même que ce type d’armes à feu a été utilisé lors de plusieurs tueries de masse.

24 juin 2022 : Joe Biden signe une loi qui permet enfin de renforcer le contrôle des armes à feu dans le pays. Ces mesures visent à renforcer la sécurité des écoles, à assurer un meilleur contrôle de la vente illégale d’armes, à limiter l’accès des personnes dangereuses aux armes à feu et enfin à financer des programmes de soutien psychologique. Le projet de loi Enhanced Background Check Act of 2021 est quant à lui en suspens. Descendre dans les rues pour lutter contre les armes à feu, c’était le projet des manifestations « March for Our Lives » qui se sont déroulées en 2018, en réaction à la fusillade de Parkland. Ce mouvement a été amplifié sur les réseaux sociaux grâce à des hashtags tels que #NeverAgain, #MarchForOurLives, #WhatIf et #IWillMarch. Le mouvement « March for Our Lives » a bel et bien eu un impact.

Lire aussi: Analyse des données sur les décès par armes à feu

L'influence de la NRA

Aux Etats-Unis, les partisans de mesures de contrôle sont confrontés au formidable obstacle que représente la NRA. Comptant plus de deux millions et demi d’adhérents, parmi lesquels l’ancien président Reagan et le président Bush, qui en est membre à vie, ce lobby est l’un des groupes de pression les plus puissants. Forte du soutien financier et politique de ses adhérents et des fabricants d’armes, l’association a réussi jusqu’ici à bloquer la plupart des initiatives législatives, aussi bien à l’échelon fédéral que dans les différents Etats. Elle invoque le deuxième amendement à la Constitution, aux termes duquel une « milice bien organisée étant nécessaire à la sécurité d’un Etat libre, il ne sera pas empiété sur le droit de la population de garder et porter des armes ».

Un second argument de la NRA est de faire observer que ce ne sont pas les armes qui tuent, mais les criminels. Bien sûr, toute discussion de la violence criminelle doit distinguer entre les armes à feu en tant que moyen, les responsables directs qui sont les criminels pressant sur la détente, et les causes profondes de la criminalité.

tags: #accident #arme #a #feu #usa #statistiques

Post popolari: