Le nettoyage des canons est une étape bien souvent bâclée, alors que chacun sait pourtant qu’elle est nécessaire afin de prolonger la durée de vie du canon et maintenir sa précision.
Un bon nettoyage ne consiste pas simplement à passer un coup d’écouvillon imbibé d’huile après la séance de tir... Cet article a pour objectif de vous présenter une méthode fiable de nettoyage sans pour autant prétendre être la meilleure.
Il existe pratiquement autant de méthodes de nettoyage des canons qu’il existe de tireurs. Chacun a sa petite idée sur la question et chaque canon est différent.
Il n’est pas dans mon propos de donner ici la solution miracle mais plutôt d’étudier différents types de procédures. Les méthodes présentées dans cet article semblent avoir fait leurs preuves.
Elles sont pour l’essentiel dérivées de celles appliquées aux fusils de haute précision comme ceux utilisés en Bench Rest. C’est finalement un peu grâce à cette discipline exigeante que le tireur moyen bénéficie aujourd’hui de tant d’améliorations, qu’il s’agisse des performances comme du matériel.
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Pour l’essentiel elle se résume à enlever les résidus de combustion et les dépôts métalliques tout en limitant au maximum l’usure ou l’endommagement du canon.
Cet article ne traitera essentiellement que du nettoyage des canons d’armes d’épaule rayés tirant des projectiles chemisés. On remarquera cependant que les procédures évoquées ici peuvent tout à fait être appliquées à des armes de poing.
L’absence de nettoyage ou parfois pire, un mauvais nettoyage, peuvent avoir plusieurs conséquences :
Une fois l’amorce percutée, celle-ci va provoquer l’inflammation de la charge de poudre. La pression qui en résulte va normalement propulser la balle hors du canon (dans le cas contraire, revoyez sérieusement votre méthode de rechargement et contactez votre armurier, voire votre médecin…).
Lors de son passage dans le canon, le projectile est tout d’abord forcé afin de « prendre » les rayures, il se développe alors une pression supplémentaire appelée pression de forcement.
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Une fois les empreintes des rayures imprimées à la balle, celle-ci va frotter tout le long du tube au fur et à mesure de son avancement. Ce frottement dégage de l’énergie sous forme de chaleur (en proportion bien moins importante que l’échauffement provoqué par la combustion de la charge de poudre) mais dégrade en partie la chemise, ou blindage, du projectile.
Celle-ci étant généralement composée de tombac (un alliage à base de cuivre et de zinc) la balle va ainsi déposer des particules de cuivre et autres de la prise de rayure à la bouche du canon.
On remarquera que ces dépôts seront normalement plus importants sur les quelques premiers centimètres à partir de la prise de rayure pour se réduire progressivement puis augmenter quelquefois sur les derniers centimètres avant la sortie du canon.
La présence de ces dépôts peut être facilement détectée en observant à la lumière la bouche du canon. Si des traces de couleur jaunâtre ou cuivrée apparaissent sur les rayures, c’est que votre canon est « encuivré ».
Le terme « encuivrage », couramment utilisé pour désigner ce phénomène, n’est pas véritablement exact puisque nous venons de voir que la chemise d’une balle n’est pas composée seulement de cuivre. Cependant cette expression fait depuis bien longtemps partie du langage familier des tireurs, alors pourquoi en changer ?
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En résumé, à chaque cartouche tirée, il se dépose dans le canon une couche de tombac, puis une couche de dépôts carbonés issus de l’inflammation de la poudre. Au fur et à mesure des tirs, on obtient théoriquement un « millefeuilles » bien indigeste pour le canon… En pratique il est bien difficile de quantifier cet amoncellement de dépôts divers.
La rapidité d’encuivrage dépend de plusieurs paramètres. Au nombre de ceux-ci on notera les tolérances de diamètres entre projectiles, rayures et âme du canon, la vitesse de la balle, l’état de surface interne du canon et celui externe de la balle, le type et la quantité de poudre brûlée, la présence d’un traitement de surface (MoS2, Danzac, etc…).
Plus un canon comportera de traces d’usinage ou de défauts et plus rapide sera l’encuivrage. En revanche, plus la finition et le polissage interne seront soignés, et plus le phénomène d’encuivrage sera retardé.
Tous les canons sont concernés par le phénomène d’encuivrage, ceux de qualité « super match » utilisés en Bench Rest y compris. Même avec une finition censée être parfaite, un canon encuivrera à plus ou moins longue échéance.
L’accumulation de dépôts métalliques dans le canon peut être néfaste à la précision d’une arme, augmentant sa dispersion. Il convient cependant de relativiser cette affirmation.
Certains canons, notamment ceux avec une bonne finition interne, semblent s’accommoder d’un certain encuivrage. Ainsi, au fur et à mesure des tirs, le canon peut trouver un « point d’équilibre » en ce qui concerne l’accumulation de dépôts métalliques et carbonés.
Même avec un nettoyage très modéré, celui-ci peut conserver une précision convenable. Nettoyer de façon intensive un tube répondant à ces conditions consisterait à modifier sensiblement ce point d’équilibre. Il serait alors nécessaire de tirer un certain nombre de cartouches avant de retrouver une précision optimale.
La règle générale serait la suivante : plus le canon est encuivré et plus les résidus de combustion risquent de s’accumuler.
Les tireurs de Bench Rest connaissent parfaitement le phénomène qu’ils ont mis en évidence dès les années 50 à 60. C’est pourquoi beaucoup nettoient leurs canons entre chaque série, soit toutes les 10 à 20 cartouches, parfois beaucoup moins.
Si on n’y prend garde, l’accumulation de dépôts métalliques peut être à la longue très difficile à enlever. En cas de stockage prolongé de l’arme, les dépôts métalliques peuvent favoriser l’oxydation du canon.
Mais les traces d’encuivrage ne sont pas les seules à souiller l’intérieur des canons. Les résidus de combustion de la composition d’amorçage et de la dose de poudre se déposent à chaque tir.
Ces dépôts sont nettement plus abrasifs que ceux de l’encuivrage (surtout ceux provenant de l’amorce contenant souvent du verre pilé qui tend d’ailleurs à être remplacé par de l’oxyde d’aluminium) et contribuent à une usure prématurée du canon.
Si les nettoyages sont trop espacés, la couche produite par ces dépôts carbonés peut devenir très dure et extrêmement difficile à enlever.
L’accumulation de ces résidus à hauteur de la prise de rayure peut créer une bague qui sera néfaste non seulement à la précision, mais aussi à la sécurité du chargement. En effet, cette bague va modifier les données de chargement en « avançant » la prise de rayure, la balle sera ainsi placée plus proche du départ des rayures ce qui a tendance à augmenter la pression développée par la cartouche.
La présence de cette accumulation de dépôts carbonés peut être facilement mise en évidence par une exploration endoscopique. A l’œil nu, il est bien difficile de détecter la présence éventuelle de cette bague.
Cette bague produite par l’accumulation de carbone n’est pas à confondre avec la bague provoquée par l’érosion à la prise de rayure, phénomène différent mais inévitable au fur et à mesure des tirs.
Il existe un matériel de nettoyage spécifique pour les fusils de précision. Certaines armes ont été endommagées par une utilisation impropre du bon matériel, ou par l’emploi de matériel peu adapté.
Il est ainsi préférable de bannir de ses accessoires de nettoyage toutes les baguettes composées de plusieurs parties et assemblées par vissage. Au moment où la baguette effectue des va-et-vient dans le canon, une des parties peut se dévisser.
Même avec un léger dévissage, les angles constituant les deux parties de la baguette peuvent endommager l’intérieur du canon. Les baguettes de nettoyage démontables ne sont à utiliser qu’en dernier recours, lorsque l’on n’a rien d’autre sous la main.
De même, on évitera d’utiliser des baguettes dont le corps trop fin serait composé d’acier. Par flexion dans le canon, la baguette peut rentrer en contact avec les rayures et risquer ainsi de les détériorer.
Pour limiter ces flexions, on prendra soin de choisir une baguette dont le diamètre est légèrement inférieur à celui du canon. Il faut, par exemple, éviter d’employer une baguette de diamètre 5 mm conçue pour des canons de calibre .22 pour nettoyer un canon de calibre .30 !
Le corps des baguettes de nettoyage doit être d’une seule pièce, composé d’un alliage de laiton ou d’acier capable de supporter des flexions.
Il existe une controverse à propos de la gaine enveloppant la baguette de nettoyage chez les tireurs de précision. Ceux qui y sont favorables affirment que ce revêtement, généralement en plastique, protège le corps de la baguette des produits de décuivrage agressifs.
De plus, cette gaine empêche le corps en laiton ou en acier de la baguette de rentrer directement en contact avec les rayures du canon ce qui évite d’endommager l’un et l’autre.
Pour ceux qui y sont opposés, l’argument principal réside essentiellement dans le fait que la couche de plastique protectrice des baguettes, d’une consistance bien plus molle que celle du laiton et à plus forte raison de l’acier, peut accumuler divers résidus de nettoyage qui vont s’incruster dans le plastique et risquent à la longue d’endommager le canon...
La parade reste pourtant simple : il suffit d’essuyer la baguette à l’aide d’une feuille de papier essui-tout lorsqu’un cycle de nettoyage est terminé.
La poignée des baguettes est montée sur roulement à bille, ce qui permet aux brosses ou aux pousses-chiffons de suivre le pas des rayures.
Les baguettes les plus répandues sur notre continent sont celles proposées par Dewey et Parker Hale. Elles ne sont pas bon marché mais en y faisant un peu attention, elles se révèlent pratiquement inusables. On peut citer aussi Bore Tech, Midway, Outers ou Pro Shot aux Etats Unis.
Les brosses et les écouvillons servent à décoller les dépôts métalliques et les résidus de combustion par frottement à l’intérieur du canon. Elles servent aussi à déposer les divers produits de nettoyage censés dissoudre tombac et dépôts carbonés.
Les brosses autres que celles composées de laiton, de plastique ou de bronze phosphoreux sont à éviter, celles en acier sont à proscrire. Des brosses composées d’un métal trop dur peuvent véritablement endommager un canon en altérant la finition interne du tube.
Certains en viennent d’ailleurs à penser que même les brosses composées de cuivre ou de bronze peuvent rayer un canon et n’emploient celles-ci que de façon détournée comme nous le verrons plus loin.
On remarquera que les brosses composées essentiellement d’un alliage à base de cuivre restent sensibles aux produits de décuivrage puissants, comme le Sweet 7,62. Il convient de bien les rincer après utilisation avec de l’essence A par exemple afin qu’elles ne s’usent pas prématurément.
Dès qu’une brosse donne des signes d’usure, il est nécessaire de la remplacer. Dans le cas contraire, la brosse n’agira plus de façon uniforme dans le canon. Celles tordues sont aussi à jeter. Mal centrées, elles risqueraient d’endommager le canon.
Les brosses Parker Hale ont une excellente réputation mais leur prix est assez prohibitif. Celles de chez Dewey ont une longévité d’utilisation un peu plus courte mais d’un prix bien plus abordable.
Comme leur nom l’indique, les pousses-chiffons servent à pousser des morceaux de chiffons d’un bout à l’autre du canon. Ils peuvent être de plusieurs types.
Il existe des pousses-chiffons pleins et généralement moletés sur leur longueur avec une extrémité ronde où le morceau de chiffon calibré, le fameux « patch » des anglais et des américains, s’enroule autour.
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