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Jean-Christophe Meurisse, connu pour son humour cynique et noir, s'empare de l'affaire Xavier Dupont de Ligonnès dans Les Pistolets en plastique. Persuadé qu’il y a de l’humain à décortiquer (et donc du rire à créer) derrière la glauquissime affaire Xavier Dupont De Ligonnès, Jean-Christophe Meurisse s’empare crânement du sujet à travers une comédie.

C'est la première fois que je me confronte au cinéma de Jean-Christophe Meurisse. J'avais juste entendu des échos comme quoi son cinéma allait très loin dans le cynisme et l'humour noir, n'hésitait pas à foncer comme un bourrin pour ce qui est de dépeindre l'être humain dans ses côtés les plus crades, les plus bassement médiocres, mesquins, et que niveau graphique, on n'était pas non plus épargnés.

Avec Les Pistolets en plastique, le réalisateur puise surtout dans le registre du mal pour déployer un rire salvateur. "Je crois aux vertus, à la puissance sauvage du rire. C’est notre fusible. J’ai trouvé cela chez Beckett, qui disait que face au pire, il nous reste le rire. C’est mon angle à moi d’opter pour ce rire de résistance."

Un Scénario Inspiré de Faits Réels

Les Pistolets en plastique s'inspire, sans s'en cacher le moins du monde (il suffit de regarder l'affiche !), de l'affaire Xavier Dupont de Ligonnès, et, rattachée à cette dernière, de l'arrestation, à Glasgow, du malheureux Guy Joao, qui avait été pris, à tort, pour l'autre gros tas de merde, avant que l'ADN le disculpe heureusement. Petite précision, les noms ont été changés. Et ce n'est pas un biopic ; c'est une comédie qui se base librement sur des faits réels, qui s'en sert comme fil conducteur.

Le film raconte notre fascination pour les monstres avec les personnages de Léa et Christine, symboles de notre curiosité morbide. "C'est une façon de parler à nos propres monstres, de ne pas passer à l’acte. Léa et Christine sont une parabole symbolique : elles sont à l'image de nous tous, lecteurs du numéro spécial du magazine Society sur Xavier Dupont de Ligonnès. Cette fascination là est à interroger. Il y a plus de fans de l’histoire de Ligonnès que d’électeurs de Macron !"

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Des Personnages Hauts en Couleur

Bon, on suit toute une galerie de personnages, du Danemark (remplaçant l'Écosse !) à l'Argentine (lieu idéal de refuge pour les criminels en fuite depuis 1945 !), en passant par Quetigny (oui, le cadre des assassinats a été déplacé de Nantes aux alentours immédiats de Dijon... euh, c'est gentil pour les Bourguignons !) qui vont se retrouver, volontairement ou non, liés à cette atroce affaire.

À Dijon, Léa et Christine (Delphine Baril et Charlotte Laemmel, duo de godiches à pleurer de rire), enquêtrices du dimanche obsédées par Bernardin, apprennent qu’il aurait été arrêté dans Nord de l’Europe… Toute ressemblance avec Guy Joao n’est évidemment pas fortuite. Constamment provoc’ mais rarement obscène, Meurisse va chercher dans la réalité ce qu’il y a de plus tordu pour l’amarrer à son propre univers déjà bien déjanté.

Et pour rendre le tout encore plus subversif et malaisant, un innocent a l'apparence et le comportement d'un tueur asocial, un coupable se dissimule derrière la façade d'un bon gars sympa, fêtard, bon vivant, attentionné (petite précision, pour l'identification du meurtrier des membres de sa famille, son nom est affiché à l'écran la première fois qu'on le voit... donc, je ne spoile pas !).

Humour Noir et Réflexion Profonde

Tout ce petit monde est ridicule, a quelque chose de méprisable. On rit de celui-ci sans complexe (tout en préférant éviter de se dire qu'on est bien plus proches de ces énergumènes qu'on le voudrait !). C'est un défonçage en règle de ce qu'est ce bipède soi-disant civilisé.

Et sous ses airs de farce noire qui se paye la tronche d’une société accro aux true crimes et aux faits divers, Les Pistolets en plastique laisse en fait transparaître une réflexion bien plus profonde sur la définition d’un monstre (pas toujours celui qu’on soupçonne) et notre incapacité à détecter notre propre part de sauvagerie.

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Une Scène Particulièrement Marquante

Sinon, une séquence détonne par rapport à toute l'ambiance générale, c'est celle du massacre de la famille par le mari. C'est filmé froidement, implacablement, sans la plus petite parcelle sardonique. Les bouches ne font que se crisper. L'effroi et la colère reprennent d'une manière écrasante leurs droits.

Et tout ceci a une raison d'être, à savoir nous ouvrir les yeux sur le fait que le type, ayant l'air le plus équilibré, le plus cool de toute la bande, qu'on ne parvenait pas à visualiser autrement (y compris en connaissance de cause, en raison de nos biais cognitifs sociaux !), est aussi une saloperie narcissique immonde, capable de se dénuer de la moindre empathie, de commettre le pire du pire et de vivre ensuite, détaché, sans le plus minuscule remord.

Une Distribution Éblouissante

Si tous les acteurs sont excellents dans l'exercice (comprenant, en bonne partie, des membres de la troupe théâtrale de Meurisse, "Les Chiens de Navarre", mais aussi des figures un peu plus connues, passant chacune, principalement le temps d'une scène, pour faire coucou, à l'instar de Jonathan Cohen !), que tous sont pleinement à l'aise pour incarner la débilité la plus profonde, je tiens à faire une mention spéciale à la comédienne Lula Hugot (ce serait son nom si je me fie à IMDb, mais n'hésitez pas à me corriger si je me trompe !), incarnant magistralement la concierge d'immeuble quetignoise, qui débite, avec un naturel désarmant, un monologue contenant les pires relents racistes, homophobes, xénophobes qui soient, trouvant même le moyen de plaindre le tueur fugitif, tout en insultant les victimes.

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