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La formule de Mao : « le pouvoir est au bout du fusil » semble avoir été oubliée. Cette citation prend tout son sens à travers deux postures : la lecture et l’étude.

Coups d'État et Instabilité Politique

En Afrique comme en Asie et en Amérique latine, le coup d’Etat militaire est devenu un phénomène endémique.

La vague des coups d’Etat, réussis ou avortés, et des contre-coups d’Etat a déferlé sur le continent africain sans faire de distinction entre les différents régimes civils en place, leurs structures politiques, leurs idéologies ou leurs assises populaires, et quelles que soient les dimensions ou la puissance réelle des armées.

Elle a atteint des pays minuscules (Dahomey, Togo, Congo) comme les plus grands (Nigeria, Zaïre) ; des régimes dominés par des partis conservateurs fondés sur la clientèle (comme en Haute-Volta ou en République Centrafricaine), d’autres acquis à la démocratie parlementaire de style occidental (Nigeria ou Sierra-Leone), d’autres enfin qui se réclamaient le plus fermement de la révolution sociale (Ghana ou Mali).

Cette absence de discrimination laisse à penser que l’instabilité politique ne fait que traduire des problèmes économiques et sociaux profonds et communs à tous ces pays, un même état de crise larvée.

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Le coup d’Etat est, en Afrique, un phénomène relativement récent (comme en Asie, mais non comme en Amérique latine).

A l’époque impériale, l’Etat colonisateur exerçait son pouvoir sur toutes les classes sociales indigènes par un système de domination direct qui a disparu en même temps que l’administration coloniale, laissant un vide dans lequel, en l’espace de quelques années, les régimes militaires se sont engouffrés.

Les nouveaux dirigeants ne sortent plus des facultés ou des écoles normales occidentales, mais de Sandhurst, de Saint-Cyr ou de l’académie de police de Washington.

Exemples Historiques et Contemporains

La République espagnole croyait à la démocratie parlementaire, et Franco a instauré sa dictature.

Salvador Allende croyait à la démocratie parlementaire, et on a eu Pinochet.

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Evo Morales croyait à la démocratie parlementaire, et un coup d’État l’a chassé du pouvoir.

Illustrations parmi tant d’autres d’une loi de l’histoire : face à des loups, ne jamais faire l’agneau.

Comme les expériences précédentes, celle de Morales n’était pas sans défauts, mais elle était prometteuse.

Aucun gouvernement latino-américain, dans la période récente, n’avait obtenu de tels résultats : forte croissance, redistribution des richesses, recul spectaculaire de la pauvreté.

La Bolivie est le pays d’Amérique latine qui a la plus faible proportion d’illettrés après Cuba et le Venezuela.

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Or ces avancées sociales, fondées sur la nationalisation des compagnies gazières, sont précisément ce qui a scellé le sort d’Evo Morales.

Un président indigène qui travaille pour les humbles, voilà le scandale auquel il fallait mettre un terme.

Ce triomphe provisoire de la réaction suscite évidemment des questions redoutables.

Comment le gouvernement légal de ce pays a-t-il pu subir, en toute impunité, l’incendie des maisons de ses propres ministres ?

Comment le président élu de cet Etat souverain a-t-il dû quitter le pays, visiblement sous la menace ?

Malheureusement, la réponse saute aux yeux : cette humiliation du pouvoir légitime par les bandes factieuses n’a été possible que parce qu’il était désarmé.

Les chefs de la police et de l’armée boliviennes, dûment formés à « l’Ecole des Amériques », ont trahi le président socialiste.

Ils ont cautionné le coup d’État perpétré par la sénatrice d’un petit parti d’extrême droite qui s’est auto-proclamée présidente, brandissant une Bible de dix kilos, devant une assemblée sans quorum !

Le président légitime Evo Morales a préféré l’exil à l’effusion de sang, et ce choix est respectable.

Le contraste avec le Venezuela est frappant.

Tenté à Caracas, le même scénario a échoué lamentablement.

Malgré la crise économique qui frappe le pays, l’armée vénézuélienne a résisté aux menaces et aux tentatives de corruption inouïes en provenance de Washington.

Cette fidélité de l’appareil militaire à la République bolivarienne est le mur qu’elle dresse contre les menées impérialistes.

Mais elle n’est pas le fruit du hasard : militaire chevronné, Chavez a tout fait pour rallier l’armée, et Maduro a retenu la leçon.

Le patriotisme anti-impérialiste est le ciment idéologique de la révolution bolivarienne.

Appuyée par une milice populaire d’un million de membres, cette force armée éduquée aux valeurs progressistes protège la République.

Force et Ruse en Politique

Pour parvenir à ses fins en politique, disait Machiavel, il faut être à la fois « lion et renard », faire usage de la force et de la ruse en fonction des circonstances.

Mais pour faire usage de la force, encore faut-il en avoir.

Aussi positive soit-elle pour la majorité de la population, une politique progressiste suscite toujours la haine recuite des possédants.

Cette haine de classe, véritable passion triste des privilégiés cramponnés à leur prébendes, ne tarira jamais.

Il faut le savoir, et se donner les moyens de l’empêcher de nuire.

Dans les conditions effectives du combat politique, ce qui détermine l’issue finale n’est pas la pureté des intentions, mais le rapport de forces.

Face à la coalition de la bourgeoisie locale et de l’impérialisme, les progressistes n’ont pas le choix des armes : il faut qu’ils les prennent, l’idéal étant évidemment de ne pas avoir à s’en servir, en comptant sur la faible propension de l’adversaire au suicide héroïque.

La naïveté devant la cruauté du monde mène rarement au succès, et le désarmement unilatéral est une forme d’immolation volontaire.

On a sa conscience pour soi puisqu’on rejette la violence, mais cette noble attitude a pour inconvénient de réduire considérablement son espérance de vie.

Si l’on veut inscrire son action dans les faits, et rester en vie pour y parvenir, il vaut mieux renoncer à la « vision morale du monde », comme disait Hegel, et regarder la réalité en face.

Sans armes, le peuple sera toujours vaincu, et ce n’est pas un hasard si les seules expériences révolutionnaires ayant abouti à une transformation effective de la société ont doublé l’outil politique d’un outil militaire.

On peut toujours discuter de la nature et des limites de cette transformation.

Si seulement l’on pouvait s’en passer, bien sûr, on le ferait.

Mais le camp adverse laisse-t-il le choix ?

Ceux qui à Washington sabotent l’économie des pays en développement qui cherchent à s’émanciper de la tutelle occidentale, leur infligent des embargos meurtriers, financent des bandes factieuses, manipulent des opposants fantoches, importent le chaos et la terreur, ces bêtes féroces laissent-elles le choix à leurs victimes ?

Si Cuba socialiste ne s’était pas murée dans la défense intransigeante des acquis de la révolution, si Castro n’avait pas tué dans l’œuf toute velléité d’opposition manipulée par la CIA, le peuple cubain aurait-il aujourd’hui le meilleur système de santé et le meilleur système éducatif d’Amérique latine ?

La Voie Électorale et ses Limites

En réalité, la voie électorale choisie par les partis progressistes est honorable, mais elle se heurte aux contradictions de la démocratie formelle.

Il est naïf de croire que l’on va transformer la société en obtenant une majorité parlementaire.

On sait bien que la bourgeoisie contrôle l’économie et a la main sur les médias, mais on pense qu’on va convaincre le peuple de se rallier au socialisme.

On mise alors sur le dévouement des militants pour contre-balancer l’influence des riches qui possèdent les moyens d’information et corrompent des pans entiers de la société pour asseoir leur domination.

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