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L'expression « la fleur au fusil » est une locution française qui évoque un départ à la guerre avec enthousiasme et joie, mais aussi avec une certaine naïveté et un déni des réalités.

Origine et Contexte Historique

Dès les premiers jours d’août 1914, les soldats défilaient dans les villes pour se rendre dans les gares, d’où des trains les emmèneraient au front. Sur le parcours, une foule les acclame. Des femmes offrent des fleurs qu'ils accrochent au fusil, au bout du canon. Des femmes, notamment à Paris, les embrassent et leur offrent des fleurs, qui finissent accrochées au fusil ou logées dans le bout du canon. L'Union sacrée le 4 août 1914 a généré un même discours relayé par la presse. Dans toutes les gares, un départ joyeux au cri de « Vive la France ». Tous ont répondu à l'ordre d'appel. La foule acclame les soldats.

L'expression « la fleur au fusil » restera pour désigner ce qui, dans tout engagement, relève de la joie mais aussi du déni des réalités. L’expression restera pour désigner, dans tout engagement (militaire ou autre), ce qui relève de l’assurance et de la joie, mais aussi de la vantardise et de l’illusion, de la naïveté et du déni des réalités. Partis la fleur au fusil, les poilus rencontrèrent vite la mort.

L'expression « la fleur au fusil », l'expression s'est diffusée après 1928 avec le livre éponyme de Jean Galtier-Boissière, auteur dans les tranchées d'un journal Le Crapouillot qui survivra à la guerre.

Sur ce tableau réalisé par le peintre américain Albert Herter en hommage à son fils, engagé volontaire, mort en 1918, on voit un jeune père qui serre dans ses bras son bébé. Un homme d'âge mur, assis la tête entre les mains, sa femme à ses côtés, nous fait aussi comprendre que la mobilisation concernait les hommes âgés de 24 à 47 ans.

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Réalité de la Guerre et Désillusion

Cela dit, les vivats de la foule étaient surtout destinés à encourager la troupe.

Cependant, la réalité de la guerre était bien différente de l'enthousiasme initial. À Poitiers le 6 août 1914, L'Avenir de la Vienne relate le départ du 125e R.I. « occasion d'une grandiose manifestation patriotique à laquelle toute la population poitevine a pris part ». Le lendemain un entrefilet : « Suicide à la gare de Poitiers - Ce tantôt, à 3 h. à la gare, un territorial s'est suicidé en se jetant sous un train en marche. Le malheureux, qu'on croit originaire de Leigné-sur-Usseau, a eu le bassin écrasé. Il a été transporté en hâte à l'infirmerie. Entre deux crises de coma, le territorial a pu dire que, âgé de 47 ans, il avait cru ne plus avoir à venir sous les drapeaux. Il laisse une femme et un enfant dans la misère. » Le samedi 8 est confirmé le décès du « malheureux, originaire de Saint-Varent (Deux-Sèvres) ». Le dimanche 9 nouvel entrefilet : « Tentative de suicide »d'un soldat du 68e Régiment d'Infanterie Territoriale, originaire des Deux-Sèvres. Le 14 août quelques lignes : « Hier ont été arrêtés deux réservistes antimilitaristes, originaires de Chauvigny. Ils ont été conduits aujourd'hui, escortés de gendarmes, à Angers, où se trouvent les corps qu'ils devaient rejoindre. » Le mardi 18 une protestation du maire de Chauvigny : « Les personnages en question ne sont pas originaires de Chauvigny. Je n'ai jamais pensé qu'on pût rendre les habitants d'une ville solidaires des opinions outrancières de quelques exaltés, mais je ne connais pas un bon Chauvinois capable de lancer des cris séditieux contre la France et son armée. »

Symboles de Mémoire et de Paix

Dès le début de la Grande Guerre sont aménagés, dans la proximité immédiate des zones de combat, des cimetières provisoires dont les tombes se fleurissent spontanément, ce qui retient l’attention de certains combattants.

En 1915, en Flandre, la floraison de coquelicots inspire au lieutenant-colonel canadien John McCrae le poème In Flander Fields, qui érige le poppy en symbole du sang versé par les hommes tombés au champ d’honneur. En France, les survivants de la première année du conflit appellent les recrues de la classe 1915 les bleuets. Si ce surnom s’explique par le port du nouvel uniforme bleu horizon, il est également choisi parce que cette fleur bleue, tout comme le coquelicot, continue de pousser sur les champs de bataille.

Dans l’après-guerre, des fleurs deviennent le symbole collectif de toutes les victimes d’un même pays. D’abord mobilisé dans le cadre d’initiatives individuelles et privées, le coquelicot s’institutionnalise après 1920 en Grande-Bretagne : le maréchal Douglas Haig organise en 1921 un British Poppy Day Appeal afin de récolter des fonds destinés aux anciens combattants invalides et sans ressources. Rapidement étendue aux autres nations du Commonwealth, la pratique transforme le jour de l’armistice en Poppy Day, où de très nombreux Britanniques arborent un coquelicot en mémoire des soldats tombés au combat.

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Comme le coquelicot en Grande-Bretagne, le bleuet ne devient véritablement une marque du souvenir en France qu’après la fin du conflit. Mais à la différence de l’emblème floral choisi dans les pays du Commonwealth, il ne renvoie pas à l’ensemble des combattants tombés au champ d’honneur, Charlotte Malleterre, fille du commandant de l’hôtel national des Invalides, et Suzanne Lenhardt, infirmière major, en faisant le symbole spécifique des gueules cassées. Celui-ci doit honorer les 300 000 soldats qui portent les stigmates de la guerre sur leurs corps et leurs visages. Produits dans des ateliers par des mutilés, les bleuets de papier sont vendus afin de fournir un revenu supplémentaire à ces derniers.

En érigeant les fleurs au rang de marqueur mémoriel, la Grande Guerre a inventé une tradition qui se perpétue au cours de la Seconde Guerre mondiale. Comme en Flandre en 1914-1918, les sépultures creusées en Italie pendant la campagne alliée (1943-1945) se fleurissent rapidement et les fleurs en viennent à symboliser ce terrible théâtre d’opération. Après la reprise du mont Cassin en mai 1944, une chanson en vogue parmi les soldats polonais ayant pris part à la bataille évoque les coquelicots qui « ont bu le sang » de leurs camarades.

Pendant la Grande Guerre, à l’instar du poilu Gaston Mourlot, de nombreux soldats confectionnent des herbiers, afin de rompre avec la temporalité du conflit en collectionnant un élément qui incarne le temps de paix, celle du passé et celle à venir. De fait, il existe une forte relation entre la paix et les éléments végétaux, des arbres de la liberté plantés en France après la révolution de 1848 pour incarner la réconciliation entre les citoyens au rameau d’olivier qui symbolise la paix, symbole que la colombe de Picasso dessinée en 1949 ancre durablement dans l’imaginaire international.

La guerre froide et ses conflits connexes (comme celui du Viêt Nam) associent en effet la fleur au combat pour la paix. Les manifestations pacifistes aux États-Unis voient des militants opposer des fleurs aux forces de l’ordre, une scène notamment immortalisée en 1967 à Washington par un célèbre cliché du photographe Marc Riboud. Dans le même temps, le mouvement du Flower Power et son rejet des conflits s’exportent en Europe.

Pour autant, les fleurs continuent d’incarner la mémoire de conflits passés et des souffrances endurées en Europe. À Sarajevo, les stigmates des bombardements de la ville entre 1992 et 1995 sont remplis de résine rouge, des « roses » qui rappellent les guerres dans l’ex-Yougoslavie.

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Utilisation Moderne de l'Expression

L'expression est toujours utilisée aujourd'hui pour critiquer un excès d'enthousiasme ou un manque de réalisme dans un engagement, qu'il soit militaire ou autre.

À chaque saison, le scénario se répète inlassablement pour les secours. « On a des randonneurs qui viennent un peu la fleur au fusil et qui sont désagréablement surpris par la difficulté », constate le major Bonissone. Dès la première étape, certains doivent être évacués à cause « d’une condition physique insuffisante, de traumatismes au niveau des chevilles, des genoux ou de tendinites » et ne peuvent poursuivre.

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