La baïonnette, une arme blanche conçue pour s'adapter au canon d'un fusil ou d'une arme similaire, est destinée au combat rapproché. Apparue dès le XVIIe siècle, elle est toujours utilisée de nos jours mais s'est métamorphosée.
Il existe plein d'histoires concernant l'invention de la baïonnette, et beaucoup de pays veulent s'en attribuer la paternité. En France, on dit que la baïonnette fut inventée au XVIIe siècle par des paysans de Bayonne qui, se trouvant à court de poudre et de projectiles, fichèrent leurs longs couteaux de chasse dans les canons de leurs mousquets, confectionnant des lances improvisées. Cette histoire semble aussi fantaisiste que les autres. En tant que collectionneur, j'ai toujours entendu la version suivante : la baïonnette vient de l'utilisation par les Paysans Basques qui, étant à court de poudre et de balles, utilisèrent leurs couteaux traditionnels en les fixant au bout du canon pour s'en servir comme lance !
Une autre version fait remonter son origine au « baionnier », archer français maniant le couteau court. Les premières baïonnettes apparaissent dans les armées françaises dans les années 1640, équipant le régiment Royal-Artillerie en 1671.
L'origine du mot risque de continuer longtemps à être controversée par manque de documents. Par contre, quand celle-ci va se généraliser parmi les soldats, il y a une histoire qui dit que dans un dialecte Cht'i, les arbalétriers portaient le nom de baïonniers et que la lourde flèche de fer s'appelait baïon, là, on a peut-être une piste car l'orthographe du mot est le même.
Après des vacances au pays basque, ce que j'ai entendu serait bien en rapport avec la région de Bayonne et plus ancien que le XVII ° et fortement lié au Makhila (ou Makilha ou Makila, déjà là ils ne sont pas d'accord !!!) ; ce bâton de marche et de défense du berger de montagne basque serait à l'origine du placement d'un objet tranchant dans la bouche ou au bout d'une arme à feu !
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Ces premières baïonnettes étaient des lames d'une trentaine de centimètres de long, directement fichées par une poignée cylindrique dans le canon des mousquets. Ce modèle à manchon, bien qu'il offre une protection rapprochée aux tireurs, ne permettait pas de tirer lorsque la baïonnette était fixée.
C’est l’intuition de Vauban, qui s’en ouvre à Louvois en 1687, de penser à adopter un système qui n’obstrue pas le canon. Naît alors le principe de la baïonnette à douille, composée d’une lame droite avec une base coudée rattachée à une douille cylindrique. Le coude laisse libre l’axe du canon, permettant de recharger sans gêner le passage de la main ou de la baguette. Une circulaire de novembre 1689 ordonne d’en équiper l’infanterie française. Devenus sans utilité, les piquiers disparaissent du règlement militaire de 1703.
La baïonnette se diffuse rapidement en Europe : son usage contribue à la victoire des jacobites sur les forces soutenant Guillaume d’Orange à Killiecrankie (1689). La baïonnette a l’avantage d’économiser les munitions ; elle fait figure d’arme des braves puisqu’elle engage un combat au corps à corps. L’introduction du fusil rayé à partir de 1854 ne met pas fin à la baïonnette, mais conduit à en développer un usage multifonctionnel, tel le modèle Sawback adopté par la Prusse en 1865 qui permet d’utiliser la lame pour découper les barbelés et couper du bois.
La baïonnette rentre dans le quotidien du soldat et trouve une place de choix dans l’argot militaire. Les surnoms affectueux, comme la « Rosalie », côtoient des expressions plus réalistes comme « l’aiguille à tricoter les côtes » ou, pendant la Grande Guerre, le « tire-boche ». « Aller à la fourchette » désigne les charges à la baïonnette, de même qu’un soldat qui embroche un adversaire lui fait « une Rosalie à la boutonnière ».
Toutes ces expressions disent l’importance de la baïonnette dans l’équipement, l’entraînement et le quotidien du fantassin. Mais il est à noter que la part qu’elle occupe effectivement dans les combats n’est pas à la hauteur de sa place dans l’imaginaire. Ainsi, au cours de la période 1792-1815, la baïonnette n’est responsable que de 4,5 % des blessures connues chez les vétérans français.
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Bien qu’installée dans une guerre de tranchées, la Première Guerre mondiale voit encore son usage lors des montées à l’assaut. Cependant, le mythe des charges à la baïonnette est encore à relativiser. Le fusil Lebel flanqué de sa baïonnette mesure 1,83 m, ce qui le rend difficile à manier.
Les baïonnettes modernes sont équipées d’une gouttière concave qui en réduit le poids et qui permet de laisser rentrer l’air dans la blessure, facilitant ainsi le retrait de la lame. Son fourreau peut être utilisé comme pince coupante pour sectionner le fil barbelé.
Il existe des milliers de types de cette arme blanche et presque chaque armée du monde a son, voir ses propre(s) modèle(s) de baïonnette(s). La convention de Genève a interdit l'usage des modèle triangulaires, cruciformes ou dentelées lors de conflit armé mais cela n'en a pas empêché leur fabrication ou même leur utilisation durant les conflits que les pays du monde ont connus. Les blessures qu'entraînent ces modèles de baïonnettes, considérées souvent comme inhumaines, cicatrisent difficilement.
Lors de l'adoption du fusil dit “Lebel” Modèle 1886, une nouvelle baïonnette a été conçue. L'épée-baïonnette Modèle 1886 rompt la tradition de la baïonnette fixée sur le côté droit du canon, puisque celle-ci se fixe sous le canon, dans l'alignement de l'arme. Il fallait en effet avoir une allonge suffisante face au Gewehr 98, permettre une attaque en piqué, et alléger le poids d'une baïonnette venant s'attacher sur un fusil faisant déjà 4,180 kg pour 1,307 mètre de long.
En juin 1888, il a été décidé de supprimer la vis de guidage du ressort de verrouillage et le ressort a été augmenté de 6 à 7 spirales. En 1893, les taquets de fixation ont été renforcés, à la suite de nombreux décrochages des baïonnettes lors des tirs.
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En règle générale, il y a trois modèles principaux qui sont distingués pour la collection. Ce n'est que vers janvier 1915 qu'une nouvelle version apparaît, qui est surtout un modèle simplifié pour la production de guerre : elle se distingue immédiatement par l'absence de quillon.
Outre l'absence de quillon, le bouton poussoir a aussi été redessiné par un modèle plat. Le numéro de série est désormais sous le plat de la garde.
Sachez que Remington a livré à la France des baïonnettes 1886-15 vers 1916. Parmi les curiosités, on peut citer les versions raccourcies en dague ou “poignard de tranchée” qu'on peut trouver un peu partout à la vente, sans que leur origine n'ait quelque chose d'officiel.
Si « le choc est un mot », selon la formule du colonel Ardant du Picq, la baïonnette, armement défensif se substituant originellement à la pique, reste théoriquement la principale arme de mêlée à disposition du fantassin en vue de déloger son adversaire d’une position. De fait, la charge à la baïonnette donne rarement lieu à un corps à corps, permettant le plus souvent la prise d’une position à la suite de son abandon par le défenseur.
Si la décision était atteinte par la charge plus que par le croisement des lames, la baïonnette en elle-même pourrait paraître secondaire ; là encore il n’en est rien, la lame étant un déterminant psychologique en soi pour le défenseur comme pour l’attaquant.
En parallèle de la peur de l’arme blanche chez le défenseur, il faut noter un effet galvanisant voire exaltant sur la troupe lorsque l’ordre de fixer la baïonnette est donné. La fixation de la lame permet, par elle-même, d’accroître le moral de la troupe du fait qu’elle est un symbole de l’agression, supposant l’assaut.
De la rareté des combats au corps à corps pourrait naître une remise en cause de l’utilité de l’apprentissage du combat, ou escrime, à la baïonnette. À cette tendance, en plus de l’évocation des rares, mais effectifs, combats au corps à corps, nous pouvons opposer que « la capacité forme la volonté » et qu’un tel apprentissage surajoute à la préparation physique et morale du combattant.
L’entraînement permet également de simuler et, par là, de limiter les dommages psychologiques post-traumatiques. Plus prosaïquement, un parcours pour baïonnette est une variante d’entraînement sportif exigeant et agressif, stimulant l’essentielle cohésion et aisément enrichi de fumigènes et effets pyrotechniques simulant le bruit et la confusion du champ de bataille.
Si le général Lewal fait remarquer que « la baïonnette est essentiellement l’arme des surprises de nuit », la baïonnette reste plus généralement l’arme de la surprise (de l’ennemi), car elle est silencieuse et demande relativement peu de logistique.
Bien que la plupart des combats aient lieu à distance, les opérations de « nettoyage » imposent d’approcher l’ennemi. La baïonnette est utile comme couteau, elle soutient le moral des troupes au combat.
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