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Le 10 juin 2024, au petit matin, Valérie B., 46 ans, gardienne de la paix au commissariat de Cherbourg-en-Cotentin (Manche) a tué d’une balle dans le torse Sulivan S., 19 ans, à la suite d’une intervention policière déclenchée après un refus d’obtempérer.

L’IGPN considère le tir non réglementaire.

Les faits

Les faits se sont déroulés vers 23h40, rue Waldeck Rousseau. Un équipage de trois policiers a tenté de contrôler un véhicule roulant à une vitesse excessive. Le conducteur n'a «pas obtempéré aux sommations» et a poursuivi sa route avant d'être forcé à s'arrêter par le véhicule d'un second équipage de police.

«Les trois occupants ont alors pris la fuite à pied, l’un est parvenu à s’échapper, un autre a été interpellé et placé en garde à vue pour recel, le véhicule étant signalé comme volé», explique le parquet, cité par l’AFP. La troisième personne, Sulivan, originaire de Cherbourg-en-Cotentin, était donc à pied, lorsqu’elle s’est trouvée face à deux policiers.

Sulivan Sauvey «s’est trouvé face à deux des policiers du deuxième équipage et a bousculé volontairement l’un d’eux en prenant la fuite», a ajouté Pierre-Yves Marot.

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Selon les premiers éléments de l’enquête, communiqués par le parquet, Sulivan Sauvey et deux amis sont à bord d’une voiture déclarée volée et contrôlée par un équipage de police. Puis, face à un second équipage de police, les trois occupants de la voiture prennent la fuite à pied.

Le jeune homme «bouscule volontairement l’un d’eux en prenant la fuite», détaille le procureur, Pierre-Yves Marot. Les deux policiers sortent alors leur arme - une létale, l’autre non - et pressent la détente en direction du jeune homme. «Le fonctionnaire a alors utilisé un pistolet à impulsion électrique. Concomitamment, un autre agent a fait usage de son arme à feu, le touchant mortellement au niveau de la poitrine», expose le procureur.

Sulivan s’écroule et «décède des suites de ses blessures quelques minutes après le tir», précise Yassine Bouzrou, l’avocat de la famille de victime, dans la plainte pour «homicide volontaire» déposée par la mère de Sullivan que le Parisien a pu consulter.

La policière dit d’abord avoir cru voir dans la pénombre un couteau puis elle évoque une arme de poing. En réalité, Sulivan n’était pas armé, il tenait à la main un simple téléphone portable que l’on a retrouvé à côté de son corps.

La policière, «en état de choc et au vu de son état psychologique connu du service », a d’abord été conduite à l’hôpital, indique l’IGPN, précisant que la fonctionnaire a fait deux tentatives de suicide dans le passé dont une en activité.

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Au moment des faits, il n’y a pas eu de «dépistage en matière d’alcoolémie et stupéfiants, ni de tamponnoir pour la recherche de résidus de tirs sur ses mains et/ou ses vêtements », mentionne le document. Les analyses ont finalement été effectuées ultérieurement, mais entre-temps la policière a finalement reconnu après avoir d’abord omis s’être lavé les mains.

Valérie B. a tiré sur Sulivan S., 19 ans, avec son arme de service alors que ce dernier tentait de prendre la fuite à pied après un refus d’obtempérer à Octeville, près de Cherbourg. «Je n’ai pas eu d’autre choix, je me suis vraiment sentie menacée par une arme.»

Elle assure s’être sentie en danger mais soutient, «dévastée », que son intention n’était pas d’ôter la vie. «J’ai vu l’individu qui était sur le trottoir me désigner de sa main droite, il avait quelque chose dans sa main, pour moi c’était une arme de poing. Sa main venait de l’arrière ou au niveau de la poche de son pantalon dans ma direction. Ce n’était pas un geste naturel de course, pour moi je l’ai interprété comme étant une sortie d’arme. Je me suis sentie en danger, j’ai eu peur.»

Enquête et mise en examen

Le lendemain soir, la policière était toujours en garde à vue pour «homicide volontaire », a indiqué le procureur de la République Pierre-Yves Marot auprès de l’Agence France-Presse, lundi 10 juin. Elle a été mise en examen mardi 12 juin pour homicide volontaire, a annoncé le parquet de Coutances.

L'inspection générale de la police nationale (IGPN) s'est saisie de l’enquête.

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Après la mort de Sulivan S., sa mère s’est engagée mardi dans une bataille pour obtenir justice. Son avocat Me Yassine Bouzrou a déposé plainte pour «homicide volontaire » contre la fonctionnaire de police qui a fait usage de son arme, a appris Le Figaro confirmant une information du Parisien .

Selon la plainte déposée par Me Yassine Bouzrou, la policière, qui a tiré «à très courte distance» sur Sulivan S., «avait nécessairement conscience que le tir par arme à feu en direction d’une zone vitale telle que la poitrine pourrait entraîner la mort de ce dernier».

Mardi, à l’issue de sa garde à vue, la fonctionnaire a été mise en examen pour meurtre et placée «sous contrôle judiciaire strict», a fait savoir le procureur de Coutances. Elle a notamment interdiction de se rendre à Cherbourg, d'exercer l'activité de policière et de détenir ou porter une arme.

Par ailleurs, il remarque qu’à la suite des faits, la policière n'a pas été «immédiatement» placée en garde à vue mais a d’abord été transportée à l’hôpital «pour savoir si elle était choquée par les faits qu'elle venait de commettre».

«Les investigations se poursuivent, sur commission rogatoire confiée à l’IGPN, sous l’autorité du juge d’instruction», a précisé mardi soir le parquet de Coutances dans un communiqué. Ce même communiqué précise que la policière a été présentée à un juge d’instruction après la levée de sa garde à vue, et a été mise en examen pour «homicide volontaire». La fonctionnaire a par ailleurs été placée sous contrôle judiciaire «strict». Il lui est donc notamment interdit de se rendre à Cherbourg, de poursuivre son «activité professionnelle de fonctionnaire de police» ou de «détenir ou porter une arme». La policière a obligation de pointer périodiquement auprès «des services désignés par le juge des libertés et de la détention».

De son côté, le conducteur de la voiture a été condamné à une peine aménageable de huit mois de prison et une interdiction de séjour à Cherbourg pour recel et défaut de permis, a appris l’AFP auprès du parquet de la ville ce mercredi. Il a «reconnu l’ensemble des faits et accepté la peine proposée (...)», a fait savoir le procureur, Pierre-Yves Marot.

Réactions et tensions

Deux jours après la mort de Sulivan, tué par balle lors d'un contrôle routier à Cherbourg (Manche) dimanche 9 juin, les habitants de son quartier sont sous le choc. Suite à la mort de Sulivan, des échauffourées ont éclaté dans la nuit de lundi à mardi, dans le quartier populaire des Provinces à Cherbourg, où vivait le jeune homme.

Une vingtaine de personnes cagoulées ont lancé des tirs de mortier et des feux d’artifice avant d'être dispersés par les CRS autour de 2 h du matin. Des équipements urbains et des trottinettes ont été dégradés, a indiqué la préfecture de la Manche.

La tante du jeune homme explique rester dans l'incompréhension face au "geste de la policière". "Ce n'est pas parce qu'on met sa main dans la poche que, aussitôt, il représentait un danger pour elle. Il faut que justice soit faite. Il faut que cette policière arrête de travailler dans la police, elle ne doit plus avoir d'arme sur elle, tout ce qu'elle a fait est horrible", déclare Esmina.

«Repose en paix Suli.» Derrière une banderole blanche avec ce message inscrit à la bombe de peinture, les proches de Sulivan Sauvey, 19 ans, se sont rassemblés à Cherbourg ce mercredi 12 juin pour lui rendre hommage et exiger «justice».

Ce drame rappelle la mort de Nahel, 17 ans, tué par balle lors d'un contrôle policier à Nanterre, le 27 juin 2023. Des émeutes urbaines avaient secoué la France pendant plusieurs semaines, après le décès brutal du jeune conducteur.

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