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Le Nouveau Dictionnaire Pratique et Étymologique du Dialecte de Léon, avec ses variantes dans les dialectes de Vannes, Tréguier et Cornouailles, est une œuvre d'H. Du Rusquec, Chevalier du Mérite agricole. Publié à Paris en 1895 par Ernest Leroux, cet ouvrage offre une plongée profonde dans la langue bretonne et ses particularités régionales.

Préface: Réflexions sur la Langue Bretonne

L'auteur souligne l'importance de se souvenir du passé des langues, de constater leur présent et de prévoir leur avenir. L'idiome breton a un passé qui se perd dans la nuit des temps, puisque, d'après le dire de tous nos savants, il a une origine celtique.

Nous trouvons, en effet, répandus sur la surface presque générale de l'Europe, même en Asie et en Afrique, des mots qui ont des rapports singuliers avec la langue bretonne, que nous parlons encore dans la presqu'île armoricaine. Déjà noire savant compatriote, M. Th. Hersart de la Villemarqué, en a reproduit dans ses Essais sur l'Histoire de la langue bretonne, une nomenclature assez considérable, indiquant les rapports des mots gaulois anciens, avec ceux actuels du gaël écossais, de l'irlandais, du breton du pays de Galles, et enfin du bas-breton.

Nous trouvons, en effet, dans les noms des rivières, des montagnes d'une grande partie de l'Europe, une signification galloise ou bretonne, par exemple les Alpes pennines, gallois alb blanc, breton penn tête ; parcourant les montagnes de la Savoie, je demandai le nom d'une commune, voisine du lac du Bourget, c'est un terrain sablonneux d'une longueur de trois kilomètres sur un de large, quelle fût ma surprise, quand j'appris que cette commune s'appelait Tresserve, où je retrouvai facilement les mots bretons trez sable, éro, erv, sillon ; les sommets du Cantal, ne viennent-ils pas des mots bretons, kan blanc, tal front; dans les noms de fleuve, l'Adour, l'Estramadure, le Douro, nous trouvons le mot breton dour eau.

Le mot breton goaz cours d'eau, se rencontre dans la Guadiana, le Guadalquivir ; Paris, Lutetia, la ville marécageuse, de louc'h marais. Nous avons encore une preuve de cette généralisation du celte, dans les mots français douaire, douairière ; comparez le breton douar terre ; nous rencontrons la mêrae expression dans le douar des Arabes. Les dieux sont aussi représentés dans cette nomenclature, pour Morphée, le ministre du sommeil, nous retrouvons dans le breton, le verbe morfila endormir, divorfila réveiller; Titan le surnom du soleil, où nous trouvons les mots bretons, ti maison, tan feu.

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Il semblerait que notre idiome breton soit appelé à disparaître, la langue française se répandant de plus en plus dans nos campagnes, il n'en est rien cependant; depuis plusieurs siècles^ il est resté stationnaire, comme l'indique l'étymologie d'un nom de village situé dans les environs de Saint-Brieuc. Ce village s'appelle Kerlugall, il est placé sur le versant d'un vallon ; à l'ouest de ce mouvement de terrain, le breton se parle encore, à l'est on parle français, or ker en breton veut dire village, tu côté, gall France.

Nous devons aussi constater de nos jours, une certaine amélioration dans l'usage du breton, depuis une vingtaine d'années. Le clergé, en chaire, s'étudie davantage à le parler avec plus de pureté, sans se servir des locutions anciennes, aujourd'hui hors d'usage, il évite, autant que possible, néanmoins, d'employer les moyens dont usaient les anciens membres du clergé, qui se disposaient, par l'emploi de barbarismes franco-bretons, à transformer notre langue en véritable patois.

Qui l'aurait cru, le suffrage universel, aussi, a contribué à vulgariser notre langue, des journaux sont imprimés et lus par une masse considérable des habitants des campagnes, à l'approche des élections, les professions de foi des candidats sont traduites en breton ; en effet, il existe encore beaucoup de personnes de notre génération actuelle, qui ne savent que lire le breton et qui sentent la nécessité d'être éclairées par des traductions pour se rendre bien compte delà situation et voter avec connaissance de cause.

L'instruction va se répandre de plus en plus dans les masses populaires, et l'on aurait grand tort de s'en plaindre. Mais faut-il en conclure, que par ce fait, la langue bretonne va disparaître? qui nous dit qu'il ne se présentera pas quelque fait nouveau, qui fera encore ressentir la nécessité d'en conserver l'usage? Quoi qu'il advienne, cette langue sera toujours, pour les savants, d'une utilité incontestable pour recueillir des documents, qu'ils n'obtiendraient pas sans son concours.

D'après les renseignements historiques que nous possédons, l'on doit conclure, en retrouvant des origines celtiques à un nombre considérable de noms de notre vieille Europe, qu'à une certaine époque, deux courants humains, sortis des sommets de l'Himalaya, se sont répandus sur notre globe terrestre, les uns se dirigeant vers l'est, pariant le sanscrit, et les autres vers l'ouest, parlant le celte.

En 1836, des hommes convaincus de cette vérité et aimant passionnément leur pays, ont fait revivre nos souvenirs bretons, ils ont fait parler les anciens Bardes, recueilli les chansons populaires, et ont appelé, en un mot, l'attention générale sur notre sol de granité, recouvert de chênes. La Bretagne devint à la mode; ces hommes, qui rendaient un si grand service à leur pays, s'appelaient La Villemarqué, Courcy, Brizeux, Emile Souvestre, Luzel, Ropartz, Renan, et tant d'autres qui vivent encore.

Maintenant que leur voix a été entendue, que des chaires de langue celtique existent à Paris, Londres, Berlin et autres lieux, on leur répète qu'ils ont fait fausse route, en attribuant à notre langue une origine exclusivement celtique, mais nous autres bretons, nous devons nous rappeler qu'ils ont réveillé nos instincts de nationalité, qu'ils ont attiré l'attention sur des faits généralement ignorés, et d'une importance scientifique incontestable, et si ces hommes se sont trompés, s'ils ont fait notre Bretagne trop belle, s'ils n'ont point vu ses rides, est-ce que l'on voit jamais les rides de sa mère, non, non, on les embrasse.

La tâche du lexicographe consiste à recueillir tous les mots employés dans une langue, et à les rassembler dans un même vocabulaire. J'insiste plus que mes prédécesseurs sur les étymologies, il n'y a rien d'infaillible dans cette manière de procéder, et je dois m'attendre à bien des critiques ; néanmoins, grâce aux documents scientifiques récents, cette étude n'est pas aussi hypothétique que jadis, les travaux de Zeuss, Ebel, d'Arbois de Jubainville et Loth, ont facilité cette tâche, ainsi que les ouvrages plus anciens de Le Gonidec, de La Villemarqué, et Troude ; un simple recueil de mots, est peu instructif, il nous était nécessaire de donner en même temps les sens différents dauslesquels ils sont employés.

Les progrès incessants des sciences et des arts, nous ont obligé à accepter dans cette étude> bien des mots d'origine française. Si la langue bretonne a la prétention, bien fondée à notre sens, d'être ancienne, elle ne peut échapper aux transformations qui se font, par le fait de la diffusion des idiomes ; en ce qui concerne l'orthographe et les règles grammaticales, j'ai dû me conformer aux préceptes de Le Gonidec et La Villemarqué. Quoique leur K soit déjà moins employé qu'autrefois, plusieurs modifications ont eu lieu suivant les époques, à ce sujet, ainsi les écritures de 1500 portent quer au lieu de ker, depuis la lettre Q a été abandonnée et remplacée par le K.

Tout incomplet qu'il peut être, car un dictionnaire n'est jamais fini, notre livre appartient désormais à la critique. En accomplissant cette oeuvre, nous avons voulu démontrer l'importance que nous devons avoir à conserver notre langue et à ne pas répudier l'héritage qui nous a été légué par nos ancêtres bretons.

Exemples de Mots et Leur Étymologie

Le dictionnaire offre une multitude d'entrées, chacune explorant l'étymologie et les différentes significations des mots bretons. Voici quelques exemples :

  • A: Première lettre de l'alphabet, équivalent au français. Peut aussi être une préposition signifiant "par, de, dès".
  • Abad (Abat): sm. Abbé; plur. ébéet ; latin ababs.
  • Abaden: sf. Travail, affaire; pi. nou.
  • Abalamour: conj. Parce que, à cause de ; Zeuss tire ce mot du vieux français palamour; latin propter.
  • Aber: sf. Havre ; pi. iou. Loth cite aior ancre, gallois heor, irlandais ingar. Comparez l'allemand hafen, le français havre.
  • Abrant: sf. Sourcil ; pi. ou. De Jubainville cite a-Truventa sanscrit Bhruva, Lithuanien Bruvis, grec à-opvç. Breton particule ab, ranna, partager.

Tableau des Exemples de Mots et Leur Étymologie

Mot Breton Signification Étymologie
Abad Abbé Latin ababs
Abalamour Parce que, à cause de Vieux français palamour, Latin propter
Aber Havre Gallois heor, Irlandais ingar, Allemand hafen
Abrant Sourcil Sanscrit Bhruva, Grec à-opvç, Breton ab ranna

Ce dictionnaire est une ressource précieuse pour quiconque s'intéresse à la langue bretonne, à son histoire et à ses liens avec d'autres langues européennes.

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