En janvier 2024, la Corée du Nord a procédé à quatre tirs de missiles de croisière qualifiés de « stratégique », permettant de confirmer l’intérêt de Pyongyang pour ce type de système. Pour rappel, le premier essai de missile de croisière pouvant emporter des armes nucléaires a été annoncé par le régime en septembre 2021.
En effet, il a fallu attendre février 2023 pour que la Corée du Nord donne publiquement le nom de Hwasal‑2 aux missiles de croisière exhibés. Par déduction, il a été supposé que le modèle essayé à partir de 2021 était le Hwasal‑1. Les deux systèmes sont très proches, avec comme principale différence observable de manière évidente la couleur, le Hwasal‑1 étant a priori noir et le 2 blanc.
Selon certaines sources, le Hwasal‑2 aurait une longueur d’environ 7 mètres, un diamètre de 60 cm, une masse au lancement de 1 300 kg et pourrait emporter des têtes de 400 kg.
Caractéristique | Hwasal-2 |
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Longueur | Environ 7 mètres |
Diamètre | 60 cm |
Masse au lancement | 1 300 kg |
Charge utile | 400 kg |
En parallèle, la Corée du Nord a annoncé le 12 mars 2023 le tir depuis le sous-marin « 8.24 Yongung » ou Héros du 24 août d’un missile de croisière stratégique non spécifié. Le 24 et le 28 janvier 2024, Pyongyang a annoncé le tir d’un nouveau système, nommé Pulhwasal‑3‑31. Aucune information technique n’a été communiquée, si ce n’est le fait que le missile de croisière, de nature stratégique, donc vraisemblablement à capacité nucléaire, puisse être lancé depuis un sous-marin.
L’agence de presse nord-coréenne KCNA a indiqué que Kim Jung-un avait assisté au second tir de ce missile « en développement ». Selon ces informations, les missiles auraient volé en mer Jaune/mer de l’Est pendant près de 2 heures sur environ 1 500 km pour atteindre un îlot utilisé comme cible. Sans autre précision, il est impossible de vérifier les informations nord-coréennes selon lesquelles le missile aurait prouvé pendant les essais son « efficacité » et sa « précision ».
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On ignore en particulier si le tir a bien été effectué d’un sous-marin ou s’il s’agissait d’une simple barge. Dans le cas d’un tir depuis un sous-marin, aucune image ne permet pour l’instant d’indiquer si le bâtiment était en plongée ou en surface.
Par ailleurs, d’autres images seront nécessaires pour confirmer si le Pulhwasal‑3‑31 peut être lancé depuis les tubes-torpilles de 533 millimètres de diamètre qui équipent la plupart des sous-marins d’attaque nord-coréens (et certains bâtiments de surface). En février 2023, il avait été noté que le SLCM tiré depuis le sous-marin d’entraînement Yongung (Héros du 24 août) aurait pu être monté à bord des tubes traditionnellement utilisés par les missiles balistiques, ou fixés à l’extérieur de la coque.
En revanche, l’objectif affiché, à savoir l’utilisation de ces capacités de frappe pour « construire une force navale puissante » semble clair, Kim ayant rappelé en janvier 2024 que « l’armement militaire de la Marine est une tâche urgente en ce moment et un prérequis central pour construire la force nucléaire stratégique de l’État ».
Quelques jours plus tard, l’organisation Conflict Armament Research (CAR), après avoir analysé des débris de missiles retrouvés à Kharkiv suite à la frappe du 2 janvier 2024, a pu déclarer que ceux-ci provenaient de Corée du Nord. Ces informations ont été réitérées depuis par l’armée ukrainienne, qui a affirmé que des douzaines de missiles nord-coréens ont été tirés par la Russie en Ukraine, causant la mort d’au moins 24 personnes et plus de 70 blessés, puis par le panel d’experts de l’ONU en avril 2024.
L’introduction de missiles nord-coréens sur le théâtre ukrainien pointe tout d’abord un problème de prolifération : l’efficacité avec laquelle la Corée du Nord réussit à contourner les sanctions pour construire des munitions élaborées avec des composantes électroniques et à les exporter. En acquérant ces missiles, la Russie contrevient à la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU 1718 et ouvre possiblement la voie à la dissémination de ce type de missiles, capables d’emporter des armes de destruction massive, à d’autres pays.
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Par ailleurs, le missile observé par le CAR, un KN‑23 (Hwasong‑11) ou KN‑24, contiendrait 290 composants importés dont une puce électronique produite aux États-Unis en mars 2023. Cette découverte illustre les difficultés à faire respecter le régime de sanctions en vigueur. Par ailleurs, au printemps 2024, la Russie a posé son véto quant au renouvellement du mandat du panel d’experts de l’ONU ayant pour mission d’examiner la mise en œuvre des sanctions onusiennes contre Pyongyang.
D’un point de vue économique, le choix russe de se procurer des systèmes nord-coréens est sans doute justifié par une logique de coût et de capacité de production, dans la mesure où la Russie opère depuis deux ans une tactique de frappes de missiles à outrance. Ainsi, selon les forces armées ukrainiennes, la Russie a lancé depuis le 24 février 2022, 9 590 missiles et 13 997 drones, dont 1 388 missiles balistiques (principalement Iskander-M, Tochka-U au début du conflit et désormais quelques KN‑23).
Moscou éprouve sans doute la nécessité de compléter par des exportations ses propres productions pour soutenir le rythme de frappes. Les exportations nord-coréennes présentent vraisemblablement deux avantages, tout d’abord, un coût attractif pour ce type de systèmes, et deuxièmement, une capacité de production importante. L’observation (via des images satellites) des sites de production présumés de missiles à propulsion solide tels que le KN‑23 corrobore l’hypothèse de capacités de production robustes ; tout comme le déploiement, en août 2025, de 250 TEL de KN‑23 (Hwasong‑11D), pouvant chacun emporter quatre missiles, à des unités combattantes.
En matière de dissuasion, ces exportations et cette exhibition de missiles ont évidemment comme premier effet de montrer le potentiel des forces nord-coréennes, les systèmes en question ayant comme caractéristique de pouvoir emporter des armes nucléaires. Mais l’emploi sur le terrain de dizaines de ces missiles avait peut-être également pour objectif de crédibiliser la dissuasion nucléaire nord-coréenne d’un point de vue opérationnel. À ce titre, les observations sont mitigées.
De manière globale, les missiles balistiques employés sont parmi ceux qui sont le moins souvent interceptés par les forces ukrainiennes (4,5% d’interceptions depuis le début de la guerre), malgré l’acquisition par Kiev de systèmes antimissiles réputés performants. Les missiles balistiques, quasi-balistiques ou dans une moindre mesure aéro-balistiques (Kinzhal) restent donc les plus efficaces pour détruire des cibles distantes.
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Les données sur le KN‑23 sont plus discutables. En mai 2024, le gouvernement de Kiev a ainsi indiqué que sur les cinquante KN‑23 reçus et tirés par Moscou entre décembre 2023 et février 2024, près de la moitié ont dévié de leur trajectoire ou explosé en vol. D’après les autorités ukrainiennes, aucun tir de missile nord-coréen n’a été recensé entre février et juillet 2024. Depuis le 31 juillet, plusieurs salves de frappes de KN‑23 ont à nouveau été annoncées en Ukraine.
Ce hiatus pourrait être dû à l’attente d’un nouveau stock, la livraison de missiles plus perfectionnés, ou une réflexion tactique sur leur utilisation par l’armée russe. Quoiqu’il en soit, des difficultés continuent d’être observées, toujours selon Kiev, qui a fait savoir que le tir du 31 juillet 2024 avait explosé en vol. Ces dysfonctionnements sont à mettre en relation avec la grande proportion de munitions d’artillerie nord-coréennes défectueuses importées par la Russie.
Dans ce contexte, la démonstration de problèmes techniques et le manque de fiabilité qui semble être observés en Ukraine sont sans doute perçus comme un signal négatif par Pyongyang. Ces difficultés peuvent en effet mettre en doute la crédibilité opérationnelle de l’ensemble des capacités balistiques nord-coréennes. Elles sont d’autant plus dommageables que la propagande du régime avait réussi à illustrer la fiabilité, précision et portée allongée de ces SRBM lors de séries intensives d’essais, avec en particulier des images semblant démontrer des précisions (ECP) très correctes.
Pour autant, toute expérience de terrain est utile pour des concepteurs d’armes et les données collectées sur le théâtre ukrainien seront probablement utilisées pour améliorer l’ensemble de l’arsenal nord-coréen.
La Corée du Nord a testé jeudi 31 octobre un nouveau missile balistique intercontinental à combustible solide (ICBM), Hwasong-19, soit le plus avancé de son arsenal, a affirmé vendredi matin l'agence d'Etat nord-coréenne KCNA. Un missile à combustible solide permet de le transporter plus facilement et de le tirer plus rapidement que les versions à combustible liquide.
Cet essai a prouvé que "le développement et la fabrication de vecteurs nucléaires" par la Corée du Nord "sont absolument irréversibles ", a déclaré KCNA. Cet essai "semble avoir été mené pour détourner l'attention des critiques internationales sur le déploiement de ses troupes" en Russie.
En septembre 2023, la Corée du Nord a fièrement et ostensiblement dévoilé au monde son nouveau sous-marin lanceur de missiles balistiques nommé "Heros Kim Kun Ok". L'engin, aussi connu sous le nom de sous-marin nucléaire d'attaque tactique n°841, est en réalité une "variante" remaniée d'un sous-marin d'attaque soviétique de classe Romeo datant des années 1950.
Cette fierté nord-coréenne est capable de porter deux types de missiles : les SLCM-N, autrement dit les missiles de croisière mer-sol nucléaire, ainsi que les SLBM, des missiles mer-sol balistiques stratégiques capables de transporter de grandes charges et de frapper des cibles plus éloignées que les SLCM-N.
Seulement, le nouvel appareil pourrait ne pas être en capacité de contenir l'ensemble des missiles. En effet, les grands SLBM nord-coréens seraient beaucoup "trop grands" pour "tenir dans les sous-marins" que le pays peut construire.
Autre atout sous-estimé, ces mini-engins sont bien moins coûteux et peuvent être produits plus rapidement et en plus grande quantité que les "bateaux plus gros et plus complexes".
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