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Les tirs de feux d’artifice, dont l’usage est détourné comme arme, prennent notamment les forces de l’ordre pour cible, au cours des émeutes qui durent depuis trois jours. Au cours des affrontements qui se sont déclenchés après la mort du jeune Nahel, lors d’un contrôle de police où un policier a fait usage de son arme en lui tirant dans la tête, ce mardi 27 juin à Nanterre, un phénomène continue de prendre de l’ampleur : l’usage de feux d’artifice comme arme dirigée contre les policiers, communément appelés « tirs de mortier ».

Qu'est-ce qu'un tir de mortier ?

Le « tir de mortier » c’est d’abord un abus de langage qui s’est répandu dans le langage médiatique, en même temps que le phénomène lui-même : littéralement, il s’agit de la « chandelle romaine », soit un tube (en carton, en plastique ou en métal) contenant un empilement de projectiles. Pourquoi le terme de « mortier » est-il resté ? « C’est plus spectaculaire, juge un fournisseur de pyrotechnie de la région bordelaise. Le terme a des connotations de guerre, de violence et d’armement ça marque plus les esprits. »

Il s'agit, en effet, d'un abus de langage. Les mortiers utilisés n'ont rien à voir avec des armes de guerre. Un mortier, c'est un dispositif explosif utilisé en pyrotechnie, qui permet d'allumer les feux. Comme l'expliquait le Parisien en 2013, les mortiers d'artifice se présentent « sous forme de boule dont le diamètre varie entre 40 mm et 60 mm et qui s'utilisent avec un tube planté dans le sol ».

Les mortiers d'artifice font partie de la 4e catégorie des feux d'artifice, et sont donc réservés aux professionnels ayant une habilitation. Ils sont composés d'un tube en carton, dans lequel est inséré "une bombe" avec de la poudre. Le tout, à faible charge explosive, est utilisé dans les chorégraphies pyrotechniques des artificiers. "Cela va produire des effets de couleur, des sortes d'étoiles, des effets 'saule pleureur'", explique Gwen Jalu, responsable du magasin "Les feux de la fête" dans le 15e arrondissement de Paris.

Dangers et risques associés

Car l’outil est ce que l’on appelle une arme par destination. Soit un objet détourné de son usage à des fins d’agression. Il est à noter que comme tous les outils pyrotechniques, il présente également un danger potentiel pour son utilisateur, à cause notamment de son effet de recul, qui conduit parfois à lâcher la chandelle, laquelle continue alors de tirer ses projectiles hors de tout contrôle.

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N’étant d’ailleurs pas conçu pour atteindre une cible, sa trajectoire est assez imprévisible, ce qui augmente les risques de dommages collatéraux, comme un incendie après qu’un feu d’artifice s’est logé à travers une fenêtre ouverte par exemple.

Comme la plupart des feux d'artifice, le détournement des mortiers d'artifice peut représenter un vrai danger. "À tir tendu, il peut blesser quelqu'un et en pleine figure, c'est la même chose qu'un LBD (lanceur de balle de défense, NDLR)", explique à l'AFP Rocco Contento, porte-parole du syndicat Unité SGP."Cela peut provoquer des acouphènes et des blessures sur les personnes qui peuvent les recevoir comme chez celles qui les projettent et qui peuvent perdre des doigts, ce qui arrive fréquemment quand ils n'en maîtrisent pas l'usage, voire un incendie si ça tombe par une fenêtre ouverte dans un logement ou un véhicule", ajoute une source policière à l'AFP.

En outre, la police nationale nous précisait que « lorsqu'ils sont tirés de manière tendue et non en hauteur, le tir est très rapide et peut générer des blessures et brûlures très importantes ». Thibaut Prévot complète : « Il peut aussi y avoir des lésions auditives pour la cible, des incendies.

Dans le cadre de violences urbaines, les individus les saisissent à l'horizontal, comme un fusil, pour réaliser des tirs tendus vers leurs cibles. Leurs portées, de plus de cent cinquante mètres, leur permettent ensuite de s'échapper rapidement.

Réglementation et contrôle

Depuis juillet 2017, l’utilisation de mortiers est réservée aux artificiers professionnels, titulaires d’un certificat (niveau de qualification C4). Un mortier, ça tue et ça fait de très gros dégâts là où ça tombe.

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« En France, un professionnel avec un minimum de sérieux ne vendra pas ce matériel à un particulier », affirme le fournisseur bordelais, qui confie en recevoir davantage ces derniers jours. « Nous ne sommes pas dupes. Rien que l’usage du mot ‘‘mortier’’ trahit généralement les mauvaises intentions derrière ce genre de demande. La législation réserve d’ailleurs la vente de ce type d’objet aux professionnels titulaires d’une autorisation préfectorale, dès que le calibre dépasse 30 millimètres. « Nous devons remplir un registre, demander la carte d’identité, s’assurer que le client est majeur. De quoi en décourager plus d’un », poursuit le fournisseur.

Interdits à la vente aux moins de 18 ans, une habilitation est en plus nécessaire pour acheter ce genre de produits, qui entrent dans la catégorie F4 de la nomenclature administrative. Les ventes ont beau être très réglementées, elles font l'objet de trafic, en particulier sur Internet où il est facile de s'en procurer. Dans ce cas, la sanction est encore plus dure : les infractions « sont punies d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende lorsqu'elles sont commises au moyen de l'utilisation d'un réseau de communications électroniques ».

Mais les contrôles sont rendus difficiles par l’achat sur Internet, à l’étranger. « Ça vient généralement d’Allemagne ou de Pologne.

Cette professionnelle n'en vend pas dans sa boutique, mais a déjà reçu des appels de jeunes cherchant à acheter des mortiers d'artifice. "Ce n'est pas si compliqué de s'en procurer, explique-t-elle. Les jeunes trouvent cela sur internet, car ils continuent d'être vendus sur des sites étrangers notamment". Leur commande est en effet facilitée sur Internet, confirme la police nationale.

Les colis sont livrés en France depuis des pays de l'Est comme la Pologne, avant d'être redistribués en France via des trafics. "Comme tous les trafics, il y en a qui en font venir en quantité et ensuite les revendent. Il y a une sorte de marché parallèle", affirme Gwen Jalu.

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La loi pour la sécurité globale de 2021 a durci les sanctions à l'encontre des contrevenants. Acquérir ou utiliser des articles pyrotechniques « sans posséder les connaissances techniques particulières exigées par la réglementation » est puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende. Même sanction pénale pour les commerçants qui vendraient ce matériel à des personnes « ne possédant pas les connaissances techniques particulières ou ne répondant pas aux conditions d'âge exigées ». De plus, les vendeurs sont tenus d'enregistrer la transaction et l'identité de l'acquéreur.

Autre moyen d'enrayer ce fléau, les municipalités ou les préfectures, peuvent émettre des arrêtés afin d'interdire ou de réglementer l'utilisation des mortiers d'artifice dans certaines zones, à certaines périodes.

Actuellement, le port et le transport sans motif légitime d'artifices non détonants (dont les mortiers d'artifice de catégorie F4 et les chandelles de catégorie F2 et F3) sont interdits (article L. 2353-10 du code de la défense) et réprimés de six mois d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende. Le même article permet, en outre, la confiscation de l'objet de l'infraction.

Sanctions pour tir de mortier en réunion

Le tir de mortier en réunion, en tant que délit aggravé, est encadré par plusieurs textes législatifs qui définissent son statut juridique et les sanctions applicables. Dans le Code pénal, l’article 222-14-2 est particulièrement pertinent. Il stipule que « Le fait pour une personne de participer sciemment à un groupement, même formé de façon temporaire, en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de violences volontaires contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

L’article 322-11-1 du même code vise spécifiquement la détention et l’utilisation d’artifices : « La détention ou le transport sans motif légitime d’artifices non détonants est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende.

Le Code de la sécurité intérieure, quant à lui, réglemente l’acquisition, la détention et l’utilisation des artifices de divertissement. L’article R. 557-6-3 précise les catégories d’artifices et les conditions de leur vente.

La qualification de délit aggravé permet aux tribunaux d’appliquer des peines plus sévères, allant jusqu’à plusieurs années d’emprisonnement et des amendes conséquentes.

Les sanctions pour tir de mortier en réunion en tant que délit aggravé sont multiples et peuvent être sévères, reflétant la volonté du législateur de réprimer fermement ces actes dangereux. L’application de ces sanctions varie selon les circonstances de l’infraction, le profil des auteurs et leur passé judiciaire.

Par ailleurs, les policiers et les gendarmes étant considérés comme des personnes dépositaires de l'autorité publique, il est opportun de rappeler que les violences commises sur une personne dépositaire de l'autorité publique, même sans incapacité, sont punies de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende (article 222-13 du code pénal).

Impact social et perspectives d'évolution

Le phénomène des tirs de mortiers en réunion a un impact significatif sur la société française, tant en termes de sécurité publique que de cohésion sociale. Ces actes contribuent à créer un climat de tension dans certaines zones urbaines, alimentant un sentiment d’abandon chez les habitants et de défiance envers les institutions.

L’évolution du cadre juridique concernant le tir de mortier en réunion reflète la volonté des autorités de s’adapter à une forme de délinquance en constante mutation. Il est probable que dans les années à venir, de nouvelles dispositions législatives viennent encore préciser et renforcer l’arsenal juridique existant.

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