Starship, la mégafusée réutilisable de SpaceX, symbolise la puissance technologique américaine. Starship est actuellement la fusée la plus massive en service, avec une hauteur de 120 mètres et une capacité potentielle de transfert de 100 à 150 tonnes en orbite basse, soit 5 à 7 fois plus qu’Ariane 6. Elle est propulsée par un booster Super Heavy, son premier étage, lui-même équipé de 33 moteurs Raptor.
SpaceX teste Starship exclusivement depuis Starbase, au sud du Texas. Les dégâts causés prendront vraisemblablement plusieurs mois à être réparés. SpaceX devra déterminer la cause des problèmes rencontrés en vol, en plus de renforcer son pas de tir avant de pouvoir revoler. La force du premier décollage de la nouvelle fusée de SpaceX, Starship, à la fois la plus grande et la plus puissante du monde, a sérieusement amoché son pas de tir au Texas. L'entreprise a pensé "à tort" qu'il résisterait au test a reconnu Elon Musk.
Morceaux de béton éjectés, métal plié et cratères creusés dans le sol témoignent de la puissance du lancement. La gigantesque tour de lancement a tenu le choc. L'immense socle sur lequel repose le véhicule (table de lancement) est lui aussi toujours là, même s'il a été abîmé. Mais sous lui, un profond cratère a été creusé, selon des images publiées par des spécialistes sur les réseaux sociaux. Tout autour règne un paysage de désolation. Lors du décollage, une pluie de débris a été catapultée jusque dans la mer voisine, montre une vidéo de SpaceX. Un nuage de poussière a atteint une petite ville à plusieurs kilomètres, selon la presse locale.
"Les dommages principaux du pas de tir sont en dessous, là où les flammes (des moteurs) attaquent le sol", a expliqué Olivier de Weck, dont plusieurs anciens élèves travaillent pour SpaceX. "Le cratère qui a été créé va devoir être rempli et réparé, et cela va certainement prendre plusieurs mois."
L'aire de lancement de Starship ne semblait pas être équipée de deux infrastructures généralement utilisées pour des lanceurs lourds. D'abord, un "déluge": des quantités phénoménales d'eau déversées au moment précis de l'allumage des moteurs, afin d'atténuer les ondes acoustiques, limitant les vibrations. Ensuite, un "déflecteur de jet" (ou carneaux): un système de tunnels permettant de rediriger les gaz émis, protégeant à la fois le béton et la fusée. Mais les construire est extrêmement cher, d'autant qu'ils doivent être adaptés à la taille de la fusée - démesurée dans le cas de Starship.
Après le test, Elon Musk a expliqué que l'entreprise avait commencé à construire "une plaque en acier refroidie par de l'eau" pour être placée sous le socle de la fusée, finalement pas "prête à temps". L'entreprise a pensé "à tort" que le pas de tir résisterait au test, a-t-il reconnu, en ajoutant qu'un nouveau décollage serait probablement possible "dans un ou deux mois". Une telle plaque en acier "aurait du sens, je pense que ça marchera", a déclaré Philip Metzger, ancien employé de la Nasa ayant travaillé sur la physique des aires de lancement. Concevoir un pas de tir est aussi complexe que développer une fusée, a-t-il souligné.
SpaceX ne fait pas que lancer des fusées. Elon Musk souhaite également récupérer l’étage supérieur de sa méga-fusée. En y parvenant, il ferait encore plus avancer la réutilisation en récupérant la totalité du lanceur. On refait le plein et on repart. S’il atteignait ses objectifs, Elon Musk écraserait à coup sûr la concurrence. A coup sûr, la saga Starship valide la méthode de développement de SpaceX. Celle-ci consiste à réduire la phase de conception pour aboutir très rapidement à un prototype, testé en vol. L’échec est attendu et accepté, les leçons des vols précédents nourrissant la réflexion sur la conception du lanceur. Pas étonnant dès lors que les recettes d'Elon Musk inspirent fortement la nouvelle vague de minilanceurs en Europe et notamment MaiaSpace, la filiale d'ArianeGroup.
Les dégâts causés prendront vraisemblablement plusieurs mois à être réparés. SpaceX devra déterminer la cause des problèmes rencontrés en vol, en plus de renforcer son pas de tir avant de pouvoir revoler. Les organisations écologiques sont furieuses des dégâts environnementaux causés à l’occasion du précédent test de vol orbital.
La dalle de béton a été refaite mais avec un double de surface, puisque maintenant son rayon, 20 mètres, dépasse largement les pieds de la table, qui sont pris dedans, plutôt que de s’y arrêter. A la verticale des moteurs, sous la plateforme haute de 15 mètres (inchangé), SpaceX a déposé une dalle en acier (« water cooled steel plate ») pour permettre le fameux « déluge » ou « stardouche » (« starshower ») dont tous les commentateurs du premier vol avaient déploré l’absence. La dalle est creuse, constituée de deux plaques prenant en sandwich de gros tuyaux serrés les uns contre les autres, et la plaque supérieure est perforée jusqu’aux tuyaux, d’une multitude de trous, comme un pommeau de douche ou plus précisément comme une couronne de pommeaux de douche, avec au centre un pommeau hexagonal plus grand.
La partie tuyauterie est reliée par deux conduites à trois énormes containers remplis d’eau (à proximité immédiate de l’OLP et disposés à l’horizontal pour minimiser le risque d’impact) qui seront vidés à très haute pression par la pulsion d’azote, gaz neutre et cryogénique (réservoir également à proximité). Il s’agit de 1,4 millions de litres d’eau, ultra-froide donc (on parle de « glace liquide »), qui seront mélangés à l’azote. Chacun des pommeaux de douche sera exactement en vis-à-vis de chacun des moteurs périphériques. La projection de l’hexagone central se fera, elle, en éventail, avec un angle de 45° vers l’extérieur (pour constituer une couche d’eau plus épaisse, une sorte de matelas d’eau). La plaque en acier a été scellée dans le béton.
La partie centrale qui va jusqu’aux piliers de l’OLP est complétée par six plaques plus petites (dont trois sont reliées aux tubulures d’eau glacée) qui passent entre les quatre piliers de la plateforme et les deux escaliers. Les piliers et escaliers sont protégés par des plaques de blindage en acier aussi épaisses que celles de la dalle. L’eau agira comme un bouclier entre le flux de gaz chauds et l’acier. Elle va refroidir la plaque et absorber l’énergie libérée par la projection des gaz. La dalle d’acier sur plaque de béton était la seule solution pour résister à la poussée des moteurs lors du décollage car le sol sableux de Boca Chica ne permet pas de creuser sous la plateforme un « carneau », soit une fosse avec une pente, évacuant les gaz ultra-chauds d’en dessous de la fusée vers l’extérieur, comme l’on fait dans les autres astroports, notamment celui de Cap Kennedy.
Déjà trois tests ont été effectués. Le 28 juillet il y a eu pendant 40 secondes un test de projection d’eau à pleine puissance, qui a réussi ; le 6 août, une mise à feu statique, « static fire », (2,74 secondes) avec utilisation du déluge, qui a partiellement réussi. Sur les 29 moteurs du lanceur B9 mis à feu, 4 ne se sont pas allumés, mais il n’y a eu aucun dégât sous le pas de tir. Le 25 août un second static fire, cette fois pour 33 moteurs, a eu lieu. 31 moteurs se sont allumés et le test a duré 6 secondes. Le déluge a bien fonctionnée et aucun dégât au sol n’a été noté.
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