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L'histoire est un orage de fer qui hache comme du bois sec.

Contexte Historique et Personnel

Né à Saint-Sulpice (Tarn), le 15 septembre 1889, dans une famille d’ouvriers agricoles, Édouard Ferroul a fait le service militaire au 122e RI de Rodez d’octobre 1910 à septembre 1912 et en est sorti caporal. En août 1914, jeune marié, il a 25 ans. Sur sa fiche matricule, il est noté comme plâtrier. Il part le 3 août ; il est blessé au combat de Loudrefing en Lorraine le 18 août et évacué vers le sud. En convalescence, il recopie ses notes au propre sur deux cahiers : 181 pages pour décrire moins d’un mois, c’est dire que le témoin nous donne bien des détails.

Il repart en janvier 1915 au 80e RI ; blessé le 19 mars en Champagne, à Beauséjour, il rédige un troisième cahier, de 56 pages. Il a ensuite combattu de décembre 1915 à septembre 1917 au 116e RI, puis du 10 août au 11 novembre 1918, l’interruption étant due à une maladie non précisée sur sa fiche matricule (à remarquer que celle-ci ne mentionne pas sa première blessure ; les documents officiels ont parfois leurs limites).

Démobilisé, et devenu père d’une fillette, il entre comme homme d’équipe à la compagnie ferroviaire du Paris-Orléans en 1920. Ses petits-enfants ont conservé les trois cahiers mentionnés ci-dessus.

Première Guerre Mondiale: Expériences d'un Soldat

Nous avons d’abord une fine description de l’atmosphère lors de l’annonce de la mobilisation : l’incertitude, les rumeurs, le manque subit de numéraire, la consternation, les pleurs, le souci de faire bonne figure (après avoir avoué que lui-même a pleuré). Puis c’est l’effet de groupe lors du départ et du passage du train de gare en gare. On retrouve les camarades et les gradés du temps du service ; on accepte sans rechigner de vivre à la dure ; on part vers l’est, la fleur au fusil. Là, du côté de Lunéville, on entre rapidement en contact avec les réalités de la guerre.

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Les premiers morts, des uhlans, qui ont sans doute le même âge que lui, inspirent de la compassion, de même que les habitants du village de Xousse incendié par l’artillerie allemande. La frontière est franchie. Certains habitants se comportent en vrais Allemands ; d’autres leur annoncent le piège vers lequel se précipitent les régiments français.

C’est là, au débouché du bois de Loudrefing, que les Allemands les attendent dans des tranchées cimentées préparées à l’avance et protégées par des rideaux de barbelés et le tir des mitrailleuses et des canons. Le 122e et le 142e sont fauchés. Édouard Ferroul est blessé par ce qu’il croit être une balle de fusil ou de mitrailleuse, qu’il sent dans son pied, et il doit battre en retraite en rampant sous les balles et les obus, au milieu des morts et des blessés. Il a la chance d’atteindre le bois, puis d’être soigné par les Français et évacué vers Lunéville où un étudiant en médecine le charcute « comme un boucher » pour extraire la balle qui se révèle un schrapnel.

En janvier 1915, il note que le retour de blessés guéris vers le front manque d’entrain. En Flandre, il découvre la guerre des tranchées et les incessants travaux de consolidation. Son régiment est ensuite envoyé en Champagne, du côté de Mesnil-les-Hurlus, où les combats ont été acharnés.

Blessé une fois de plus, le 19 mars 1915, Édouard va être évacué : « Au moins, je pourrai aller voir ma famille. »

Joseph Varenne: Un Témoignage de la Somme et de Verdun

Né le 27 février 1894 à Chavigny (Meurthe-et-Moselle), Joseph Varenne, fils d’un ouvrier mineur, est appelé le 1er décembre 1914 et part pour la Somme le 17 mai 1915 avec le 414e RI. Le 31 mai, son régiment tient le secteur de Lihons, puis celui de Frise où Varenne reçoit son baptême du feu. Son régiment participe ensuite à la bataille de Souchez.

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Du début de l’année 1916 jusqu’à la fin du mois de mars, son régiment est en Haute Alsace, occupant les tranchées de Moos et participant aux combats de Seppois. Après une préparation au camp de Beholle, Varenne monte en ligne avec son régiment à Verdun, le 31 juillet, et occupe la tranchée Christophe.

Dans le secteur de Douaumont, le 414e tient le bois des Caurières où il est engagé du 22 décembre 1916 au 18 janvier 1917. Le 16 mars, il participe à une action sur le village de Crapeaumesnil et reçoit une citation à l’ordre du Corps d’Armée pour cette action de sang-froid.

Les 7, 8 et 9 mai, son régiment est engagé sur le plateau de Californie, et après 10 jours de repos, il retrouve le secteur de Vauclerc du 19 au 31 mai. De septembre à octobre 1917, Varenne participe à l’offensive qui aboutit à la prise du fort de la Malmaison. Le 27 mai 1918, le 414e est en ligne pour tenter de contenir l’offensive allemande et c’est là que Varenne est grièvement blessé au crâne par un éclat d’obus, le 6 juin 1918. Il était alors sergent.

Après guerre, il s’implique dans de multiples activités associatives et présidences au sein du monde des anciens combattants. À Carcassonne où il est muté en 1946, il se lie d’amitié avec Joë Bousquet. Varenne lit beaucoup, dessine encore de la main gauche, et écrit poèmes, articles et nouvelles dont certains sont publiés dans des revues et journaux.

Souvenirs de Guerre et Réflexions Tardives

Paru une première fois en 1934, à compte d’auteur, les souvenirs de guerre de Varenne ont été l’objet d’une réédition en 2004, conforme à l’édition originale, et préparée par ses deux fils. Dans l’avant-propos de l’édition de 2004, André et Georges Varenne examinent les raisons qui poussèrent leur père à attendre près de 15 années avant de se replonger dans ses carnets et de publier ce livre. Lecteur passionné, Joseph Varenne lit la littérature d’après guerre.

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Il ressent le devoir de raconter son expérience de combattant. Si l’on compare cette note au récit qui en est fait dans le témoignage, on mesure l’importance du travail de réécriture et de mise en récit a posteriori. Ce travail de mémoire s’inscrit dans une démarche de lutte farouche contre la guerre, ainsi que l’indique la dédicace : « à mes fils André et Georges. Qu’ils ne connaissent jamais pareil sacrifice ».

Analyse du Témoignage: Qui Parle?

La première raison tient au fait qu’ayant été grièvement blessé, Joseph Varenne avait perdu l’usage de sa main droite et souffrait de séquelles importantes. La seconde raison de cette attente découle de la première : il dut consacrer beaucoup de temps et d’effort pour assurer son insertion sociale. La troisième raison avancée par ses fils est un motif souvent invoqué dans l’explication de la rédaction sur le tard des souvenirs de combattants : choqué, traumatisé, Varenne avait trop souffert. Au lendemain de la guerre, il avait soigneusement remisé dans un tiroir de son bureau 6 carnets où il avait noté pendant 42 mois de guerre, presque chaque jour, ses « Souvenirs et impressions de guerre ».

Une question essentielle dans l’étude du témoignage est de savoir qui parle par la plume de Joseph Varenne. Est-ce « je »? Est-ce un « on » impersonnel ou le « nous » des copains? Le choix du système d’énonciation par le témoin est significatif d’une démarche, d’une intention. Le « on » pluriel comme le « nous » appellent la communauté à témoin. Varenne est de ces auteurs qui recourent fréquemment au « on » des copains.

Cependant, le « je » tient une place importante dans ce texte, en partie parce que Varenne exerça souvent la fonction de coureur, expérience « solitaire », et qu’il relate donc des missions effectuées en marge de l’action collective. Le point de vue adopté pour la narration se limite strictement à ce que l’auteur a vu et fait. L’exemple le plus éloquent de cette subjectivité : le témoignage se termine sans la moindre allusion à la victoire ou à la paix !

Le 120e Bataillon de Chasseurs à Pied: Origines et Premières Armes

Un joli village de Bourgogne, Sennecey-le-Grand, par un clair matin de mars, est le lieu de rassemblement d'une troupe, majoritairement composée de soldats de vingt ans. Ces soldats sont vêtus et équipés de façon disparate. Le Commandant ROUSSEAU présente le 120e, son Bataillon : « La Guerre, préméditée et voulue par l'Allemagne, dure depuis plus de sept mois. ».

Les chasseurs du 120e Bataillon, unis à leurs Chefs par les liens solides de l'affection et de la confiance, ne failliront pas au devoir sacré de libérer le territoire. Les clairons jettent aux échos le pimpant refrain du 420e, composé de ceux du 1er Bataillon et du 20e Corps d'Armée. Puis, de brefs commandements, et les chasseurs à petits pas alertes regagnent leurs cantonnements. C'EST AUJOURD'HUI LE 15 MARS 1915.

Les compagnies sont là depuis le 13. Elles sont venues du 1er, du 2e, du 4e, du 17e, du 18e et du 20e Bataillons, pour former dans le même ordre, les six compagnies de ce nouveau Corps, de ce Bataillon de marche, comme on l'appelle. Ainsi que vient de le rappeler le Commandant ROUSSEAU, la France rassemble toutes ses forces vives pour faire tète à l'Allemagne.

Seuls ont déjà fait campagne la plupart des officiers, les gradés et quelques anciens, qui ont été blessés au début de la guerre. Mais les jeunes chasseurs ont déjà belle allure et sont animés d'un ardent esprit de sacrifice. Quel rôle leur est réservé dans la prochaine offensive? Le 2 avril, nous quittons Sennecey emportant le plus agréable souvenir de ce séjour.

Le cantonnement de Poivres n'est pas très confortable. Après une revue passée par le Général DE LANIILE DE CARRY, Commandant la 4° Armée, le Bataillon quitte la Division et embarque de nouveau le 13. Nous arrivons et nous sommes dans les Vosges! Mattaincourt nous accueille avec la généreuse hospitalité que nous trouverons toujours dans ce beau pays. Nous sommes maintenant affectés à la 5e Brigade de chasseurs qui comprend les 106e, 114e, 115e, 120e et 121e Bataillons sous les ordres du Général TROUCHAUD. Notre peloton de mitrailleurs arrive avec les Lieutenants LABRIET et FQDÉRÉ.

Le Bataillon, dont l'instruction et la cohésion se perfectionnent de jour en jour, est passé en revue Je 19 par le Général DE Maud'ituy, commandant la 7e Armée. La revue se termine par un cri enthousiaste de : « Vive la France! », déchaîné par le Général et répété en écho formidable par les cinq bataillons présents. La fanfare est créée sous la direction de Rousselot. D'un souffle vigoureux elle rythmera désormais nos défilés. Elle fera nos fêtes plus exubérantes et claironnera ses airs joyeux, dans les plus tristes cantonnements.

Le Général Diïbatl, Commandant le Groupe d'Armées, assiste à des exercices de combat le 3 mai. A l'arrivée, nous cantonnons à La Chapelle. Nous abordons les Hautes-Vosges; déjà leurs ballons se dressent plus nombreux et plus hauts sous d'épaisses forêts.

Le 10 mai, des camions automobiles nous enlèvent et, par une route magnifique de pittoresque, en pleine montagne, nous mènent sous les hauts sapins, jusqu'au Collet. Apres une grand halte, le Bataillon monte vers le Honeck. Les Vosges étalent sous nos yeux, au soleil couchant, la Vallée des Lacs, perles enchassées d'émeraudes. La nuit est venue ; le Bataillon chemine par des sentiers de montagne ; on commande le silence, l'ennemi n'est pas loin. A chaque pas, on risque de se heurter ou de tomber, et la pente est raide. Sous les sapins, l'obscurité est si dense que force est de se coucher à la place où l'on s'arrête. A chaque pas, on risque de se heurter ou de tomber, et la pente est raide.

Le lendemain, fanfare dès le petit jour. « Sidi-Brahim » et la « Marseillaise » saluent ce coin de terre d'Alsace déjà reconquis. Et le soir, occupation des tranchées au Petit-Reichackerkopf et au Sattel, devant Metzeral. Pendant huit jours, les jeunes classes vont s'acclimater à la tranchée et s'aguerrir au contact de l'ennemi. Puis, le 19 mai, le 106e Bataillon vient relever le nôtre. Le retour est très pénible. Il faut passer le Honeck dans un épais brouillard de pluie et croiser sur le sentier, entre les rochers et les précipices, les longs convois de mulets qui ravitaillent chaque nuit les lignes. Nous arrivons enfin au Collet. - Il est minuit. Embarquement en camions.

Le 24 mai, le Président POfNCARE nous passe en revue dans le quartier que nous avons pavoisé. Il remet la Croix au Capitaine DU GUET. Le 4 juin, les lieutenants HERVIEUX, Commandant la 4,; Compagnie, et PELLETIER, Commandant la 6e, sont promus capitaines. Le 8, grande réjouissance, et le 9, Je Bataillon quitte Corcieux en automobiles. Il fait une grand'halte au Rudlin et commence ensuite la longue ascension du Lac Noir. Vers minuit, il prend la place du 114e R. C. P.

Des travaux commencent, laborieuse préparation de l'attaque du Lingekopf. Il y a quelques chasseurs blessés et malheureusement des tués. Le Commandant ROUSSEAU fait faire d'émouvantes funé- railles aux premiers morts du Bataillon, inhumés à Muhnwenwald. Le séjour près du Lac Noir rassemble les fourriers au P. C. du Commandant et le calme relatif favorise leurs joyeux propos.

GRIMBERT, dans ses moments de repos, compose une pièce de vers sur les Poilus et la dédie au Chef de Bataillon. Le Commandant, auquel rien n'échappe, prévoit immédiatement ce qu'il peut attendre du talent de GRLMBGRT et lui demande de créer un journal de tranchée. L'idée est lancée, elle se développera et, au prochain repos, le premier numéro du « 120 Court » paraîtra.

Le Bataillon redescend le 1er juillet, il cantonne dans le village d'Anould. Par leur forme et sous l'amoncellement des ustensiles qu'il est inévitable de traîner, les cuisines roulantes donneront aux fins de colonnes une allure de bohème. Le Capitaine JIU GUET est chargé de la formation d'une compagnie de mitrailleuses de brigade. Le Capitaine REAL vient le remplacer. Le 9 juillet, alerte et départ pour Taintrux. De retour à Anould pour le 14 juillet, nous y célébrons joyeusement la Fête Nationale.

L'Assaut du Lingekopf: Citation à l'Ordre de l'Armée

Longue et pénible étape de nuit, depuis Anould jusqu'au camp de Tinfronce. La nuit suivante, le Bataillon vient occuper le camp de Muhnwenwald. L'attaque du Linge est commencée. Le 22 juillet, à 6 heures du matin, alerte ! nous gagnons le col de Wetzstein. A to h. 30, ordre de porter le Bataillon dans le boyau n° 3, puis ordre d'attaquer les carrières du Schratzmânnele.

L'Histoire de Nicolas Aizemberg

Né le 26 mai 1916 à Poltava, Nicolas Aizemberg s’engage dans les Brigades internationales durant la guerre d'Espagne. En 1937, il regagne à Paris en 1940. Il vit également à Marseille où il milite au sein de la Main d’œuvre immigrée. Il y rencontre Léon Szwarcbart et sa compagne avec lesquels il se rend à Lyon en 1943. Ensemble, ils rejoignent les rangs du bataillon Carmagnole des FTP-MOI. L’état-major nomme ensuite Nicolas Aizemberg dirigeant du bataillon Liberté à Grenoble en 1943 sous le pseudonyme de Luc. Il est secondé par Léon Szwarcbart avec lequel il partage un logement au 7 rue Arago à Grenoble.

À Lyon et à Grenoble, ils organisent des sabotages et des attentats Nicolas Aizemberg organise aussi des groupes de combats et se révèle un chef expérimenté et respecté. En plus de son activité de combat, le bataillon Liberté est chargé à l’été 1944 d’accueillir les déserteurs de l’armée allemande. Nicolas Aizemberg et Léon Szwarcbart sont arrêtés par les Allemands le 18 juillet 1944 alors qu’ils reviennent d’une réunion avec le responsable départemental de l’Armée secrète. Le 21 juillet 1944, ils sont extraits de la prison installée dans la caserne de Bonne à Grenoble avec huit autres détenus.

Les dix résistants sont sommairement exécutés par la Sipo-SD allemande et des Français des Jeunes de l’Europe nouvelle au lieu-dit Le Désert de l’Ecureuil dans la commune de Seyssinet-Pariset (Isère). Le maire et des habitants retrouvent les corps et les enterrent dans le cimetière de la commune malgré les ordres contraires donnés par les Allemands. Ils sont photographiés avant d’être inhumés par un photographe de Fontaine (Isère) afin que les familles puissent les identifier plus tard.

Enterré anonymement, Nicolas Aizemberg a été identifié le 11 septembre 1944 par une voisine après la parution dans la presse locale de la photographie prise avant l’inhumation. Il a été enterré au cimetière du Grand Sablon à La Tronche (Isère). Sur l’acte de décès de Nicolas Aizemberg est écrit la mention Mort pour la France.

Homologué membre des Forces françaises de l’Intérieur, il est décoré de la médaille de la Résistance française à titre posthume (décret du 15 octobre 1945). Son nom figure sur une stèle dans le carré juif du cimetière du Grand-Sablon à La Tronche, sur le monument commémoratif aux dix patriotes fusillés à Seyssinet-Paris et route départementale 106b, sur le monument commémoratif au bataillon FTP-MOI Carmagnole-Liberté, place Sublet à Vénissieux (Métropole de Lyon).

Contexte de l'Exécution

Le terme de fusillé se caractérise le plus souvent par une exécution codifiée qui suit un jugement. Dans le cas présent les dix résistants ont été exécutés au pistolet-mitrailleur par des hommes qui n’obéissaient sans doute pas à un ordre. Le Mémorial de l’oppression des Archives départementales du Rhône classe l’événement de Seyssinet-Pariset sous le terme pénal d’homicide volontaire. Le mémorial de la Shoah utilise le terme d’assassinat.

Une plaque a été dévoilée en juillet 2021 sur le Musée de la Résistance et de la Déportation de Vénissieux.

La Gendarmerie Française Pendant la Libération

Moins de trois mois après le débarquement du 6 juin 1944 sur les côtes anglo-normandes, le reflux des troupes d’occupation s’accélère. À la mi-septembre, l’ennemi résiste encore dans les poches de l’Atlantique, en Alsace et en Lorraine. Dans le pays, en proie à un déferlement de ferveur patriotique, c’est une explosion de joie.

À l’image de la France, la gendarmerie sort affaiblie de l’Occupation. Pour le général Martin, placé à sa tête d’août 1943 à août 1944, «… il y a bien eu de temps en temps quelques fissures, c’était fatal, mais vite colmatées. La Libération, en vérité, lui apporte son lot de problèmes. » Les motifs de préoccupation ne manquent pas.

Trois volets constituent cet inventaire. Le premier concerne sa réorganisation et sa contribution au rétablissement de la paix publique. Le deuxième se rapporte à l’action résistante de ses personnels.

Le cadre chronologique, dans lequel s’inscrit le sujet, ne se limite pas strictement à la période proprement dite de la Libération, qui va des premiers jours d’août 1944 jusqu’en mai 1945. Quant au champ d’observation, il intègre non seulement les quelque 40 000 gendarmes en service sous l’Occupation, mais aussi une grande partie des militaires de la G.R.M. La dimension de ce corps social, fort de 50 000 hommes en majorité répartis sur l’ensemble du territoire, par petites cellules de 5 à 10 au maximum, confrontés à une situation inédite pendant plus de quatre années, ne facilite pas l’étude entreprise.

Cependant, leur dispersion, ajoutée à des règles strictes de consultation, nuit à leur exploitation. Celles de la gendarmerie se répartissent dans plus d’une centaine de sites du territoire national. Comment apprécier à sa juste valeur le comportement des gendarmes patriotes qui, au péril de leur vie et parfois, jusqu’au sacrifice, ont pris le parti de la liberté, si on ne le met pas en parallèle avec celui de leurs pairs qui ont encouru un châtiment ? Comment rendre leur honneur aux victimes innocentes de règlements de compte où à ceux que l’on a suspectés de collaboration si l’on n’évoque ni le sacrifice des premiers, ni la souffrance des seconds ?

Des pièces manquent encore au puzzle pour en avoir une vue cohérente.

Rétablissement de la Légalité Républicaine

À la fin du mois d’août 1944, les efforts conjugués de la Résistance intérieure, des armées françaises et alliées aboutissent à la libération d’une partie importante du territoire métropolitain. Une seconde libération commence, juridique celle-là, pour soustraire le pays à l’œuvre législative du Gouvernement de Vichy qui, sur de nombreux points, a pris le contre-pied des idées philosophiques et politiques admises avant l’armistice par la grande majorité du peuple français.

L’ordonnance du 9 août 1944, datée d’Alger, publiée le 10 au Journal officiel (n°55) de la République française porte rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental, à l’exclusion des départements de l’Alsace et de la Lorraine sur lesquels le Gouvernement de Vichy n’exerçait pas son autorité. D’abord, il pose deux principes fondamentaux. La forme du Gouvernement de la France « est et demeure la République » En droit, elle n’a pas cessé d’exister. En second lieu, il déclare « nuls et de nul effet » les actes constitutionnels, législatifs et réglementaires édictés par le Gouvernement issu de la défaite de 1940.

L’article 3 annule expressément et globalement les actes les plus nocifs : lois raciales, lois instituant des juridictions d’exception, lois imposant le service du travail obligatoire, lois fixant la structure constitutionnelle du régime issue de l’armistice de 1940 etc. Notons la dissolution des mouvements qui s’étaient fixés pour tâche, avec sa disparition, l’intégration du peuple français dans l’ordre européen par la voie de la collaboration.

Tableau: Les Actes de Vichy Annulés

Tableau Description Effet
Tableau I Actes de Vichy Nullité rétroactive
Tableau II Actes de Vichy Effets annulés à partir de la constatation

tags: #pistolet #mitrailleur #Sablon #historique

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