La question du port d'armes aux États-Unis est un sujet de débat constant, exacerbé par de fréquentes fusillades de masse. Chaque État a sa propre législation en matière d'armes à feu, ce qui crée une mosaïque de réglementations à travers le pays.
Washington DC et l'État de New York possèdent les législations les plus restrictives sur le port d'arme. En riposte à une décision de la Cour suprême bloquant une loi de New York encadrant le port d’arme à l’extérieur du domicile, une nouvelle loi a été promulguée. Ainsi, l’interdiction du port d’armes dans les «lieux sensibles» de New York comme Times Square, les écoles, les bars, les hôpitaux et les métros, n’est pas remise en question dans l’immédiat.
La Cour suprême des Etats-Unis a laissé en vigueur une loi de l’Etat de New York restreignant le droit au port d’armes dans des «lieux sensibles», comme Times Square, ou encore les écoles, bars et hôpitaux.
Dans leur ordonnance, les juges ne détaillent pas leurs motivations, «ce qui est typique lorsqu’ils agissent sur des demandes urgentes», souligne le New York Times dans un article publié dans la foulée. Les juges se bornent à remarquer que «la loi de New York dont il est question dans cette requête pose des questions nouvelles et sérieuses.»
La loi en question a été adoptée cet été par les autorités de l’Etat et de la ville de New York, en réaction à un arrêt historique sur le port d’arme rendu en juin par la majorité conservatrice de la Cour Suprême (six juges sur neuf). Cette dernière invalidait une loi locale qui limitait depuis 1913 la délivrance de permis de port d’armes aux New-Yorkais capables de prouver qu’ils avaient un réel besoin de protection. Au passage, elle avait consacré le droit des Américains à sortir armés de chez eux, n’autorisant que des exceptions «raisonnables» respectant «l’histoire et les traditions des Etats-Unis».
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Huit jours plus tard, les législateurs de New York avaient introduit cette nouvelle loi interdisant de porter une arme à feu en la dissimulant, dans toute une série d’endroits, dont les métros, les stades, et certains commerces. Le lobby des armes Gun Owners of America et des propriétaires d’armes ont alors immédiatement saisi la justice.
Dès l’automne, des juges avaient bloqué certains pans de ce texte, mais une cour d’appel fédérale avait jugé qu’ils pouvaient rester en place jusqu’à ce que le débat de fond aboutisse. Les défenseurs du droit au port d’arme s’étaient alors tournés en urgence vers la Cour suprême.
Deux juges, les conservateurs Samuel Alito et Clarence Thomas, ont tenu à souligner que cette décision visait simplement à «respecter» la cour d’appel en lui laissant le temps de se prononcer sur le fond.
Dans cette décision, elle avait invalidé une loi locale qui limitait depuis 1913 la délivrance de permis de port d'armes aux New-Yorkais capables de prouver qu'ils avaient un réel besoin de protection. Les législateurs de New York avaient introduit cette nouvelle loi interdisant de porter une arme de poing dissimulée dans toute une série d'endroits, dont les métros, les stades, certains commerces.
À l'automne, des juges avaient bloqué certains pans du texte, mais une cour d'appel fédérale avait jugé qu'ils pouvaient rester en place jusqu'à ce que le débat de fond aboutisse. Les défenseurs du droit au port d'arme s'étaient alors tournés en urgence vers la Cour suprême.
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Deux d'entre eux, les conservateurs Samuel Alito et Clarence Thomas, ont tenu à souligner que cette décision visait simplement à «respecter» la cour d'appel en lui laissant le temps de se prononcer sur le fond.
Ce jeudi, la Cour suprême des États-Unis, la plus haute juridiction, a renforcé la législation relative au port d’armes dans l’État de New York, à peine un mois après la tuerie d’Uvalde qui a fait 21 morts.
Saisie par « New York State Rifle & Pistol Association » et deux de ses membres, la Cour suprême a statué en faveur du droit de porter une arme de manière dissimulée hors de chez soi. Une décision prise par six voix conservatrices contre trois libérales.
Jusqu’alors, et depuis une loi adoptée en 1911 et clarifiée en 1913, il fallait, en plus du permis de port d’armes, justifier d’une « raison valable » pour transporter une arme de manière dissimulée à l’extérieur dans l’État de New York. « Une notion laissée à l’appréciation des autorités, c’est tout le problème », assure Didier Combeau, expert des États-Unis et auteur de « Des Américains et des armes à feu » (Belin).
Concrètement, les habitants de l’État de New York n’auront plus à justifier de cette « raison valable » pour porter une arme de manière cachée à l’extérieur de son domicile. La Cour suprême a considéré que la législation de l’État de New York allait à l’encontre du 14e amendement de la constitution américaine, qui garantit l’égalité entre les citoyens, puisque l’ensemble des citoyens américains n’avaient pas les mêmes droits en matière de port d’arme.
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« Le deuxième (NDLR : celui qui autorise les citoyens américains à détenir une arme) et le quatorzième amendement de la Constitution protègent le droit d’un individu à porter une arme de poing pour son autodéfense à l’extérieur de son domicile », s’est par ailleurs félicité le juge conservateur Clarence Thomas, à l’annonce du verdict.
Kathy Hochul, gouverneur démocrate de l’État de New York, a été parmi les premières à s’insurger ce jeudi matin, dénonçant une décision « absolument scandaleuse ». Un avis partagé par le maire de la ville de New York, également démocrate, Éric Adams.
Même son de cloche pour le président américain Joe Biden qui se dit, lui, « profondément déçu ». Dans un communiqué, le ministère de la Justice américain a réitéré sa détermination à « sauver des vies innocentes en appliquant et en défendant les lois fédérales sur les armes à feu ».
De son côté, le lobby des armes américain, la NRA, a salué un « tournant pour les hommes et femmes vertueux d’Amérique et le résultat de décennies de lutte ».
Un débat stérile, sans perspective d'avancement, tant les Américains sont attachés à leurs armes et au deuxième amendement de la Constitution américaine, qui leur garantit le droit de les détenir.
Autre frein d'ampleur : la National Riffle Association (NRA), ce très puissant lobby du port d'armes qui finance de nombreux responsables politiques républicains.
L'influente National Rifle Association (NRA) arrive en tête des pro-armes et fait régulièrement du lobbying auprès des hommes politiques, en très large majorité des candidats Républicains au Congrès.
Créée en 1871 par deux anciens combattants de la guerre de Sécssion, la NRA avait pour raison originelle d'améliorer l'adresse au tir, car le conflit avait révélé à ses fondateurs que les tireurs n'étaient pas assez précis.
Vers le milieu des années 1970, la NRA a pris une ampleur médiatique importante, à mesure que les lois fédérales tentaient de limiter l'accès aux armes : ardente partisane du droit de posséder une arme, l'association a perçu les nouvelles lois comme une tentative d'empêcher à terme les citoyens d'acquérir des armes.
A travers des campagnes publicitaires et des interviews à la radio et à la télévision, la NRA a cherché à ancrer dans la culture américaine le droit d'être armé pour se protéger des intrus, voire d'un éventuel gouvernement tyrannique.
Après avoir soutenu Ronald Reagan à l'élection présidentielle de 1980, la NRA a obtenu du gouvernement d'alors une loi protégeant les droits des détenteurs d'armes en 1986; dotée d'une budget annuel d'environ $ 250 000 000, en grande partie versés par les cotisations de ses près de 5 000 000 d'adhérents, la NRA reçoit aussi des fonds provenant des fabricants d'armes, dispose de revenus de placements financiers et profite du fait qu'elle n'est pas une association politique pour s'affranchir d'un plafond de dépense imposé pour les campagnes électorales.
La NRA a été récemment l'objet d'une lutte de pouvoir entre ses dirigeants, et de plusieurs scandales financiers et fait l'objet d'une enquête pour fraude en 2020, venant de la procureure de l'État de New York, où la NRA est immatriculée.
Les fusillades aux États-Unis entretiennent systématiquement le débat sur le droit de posséder et de porter une arme à feu, et soulèvent la question de sa légitimité. Chaque État a une législation différente sur le sujet, et les lois valables chez certains d’entre eux ne traversent pas les frontières des autres.
Aux Etats-Unis, le port d’arme est d’abord réglementé au niveau fédéral, puis par chaque état. Ce texte a donné lieu à maintes controverses sur son interprétation, et les pontes en robe longue de la Cour Suprême ont eu des difficultés à énoncer une règle d’application claire et uniforme.
Que les nerveux ne dégainent pas trop vite, posséder une arme ne signifie pas qu’ils peuvent se balader avec une carabine dans le coffre, ou sortir leur colt pour un duel sur le bas côté de la route. La Cour Suprême a décidé qu’« un particulier peut posséder une arme à feu ; mais que ce droit n’est valable que pour se défendre ».
Chaque Etat a ses propres lois sur le port d’armes, et décide s’il est nécessaire d’avoir un permis pour en porter et en utiliser une. Un permis est nécessaire, mais il est délivré par l’autorité locale (shérif ou police), et à leur totale discrétion.
« Tout le monde ne pourra pas porter une arme en extérieur », assure Marie-Christine Bonzom. De fait, la détention d’un permis sera toujours obligatoire, nécessitant, entre autres, d’être majeur. Mais, pour Didier Combeau, une fois les conditions nécessaires à l’obtention de celui-ci remplies, « l’État de New York devrait être forcé de délivrer les permis puisqu’il ne pourra plus prendre de décisions discrétionnaires ».
Cet arrêté de la Cour suprême pourrait également avoir des conséquences dans les six autres États (dont celui de Californie qui a dénoncé une décision « honteuse » et « dangereuse ») où une législation similaire s’applique. « Les décisions de la Cour suprême font jurisprudence, avance Didier Combeau. La législation dans les autres États sera considérée comme anticonstitutionnelle. Ils n’auront de fait pas d’autres choix que de s’adapter ».
Quelques heures seulement après la décision de la Cour suprême, le Sénat a, lui, voté une loi restreignant l’accès aux armes à feu. Ce texte, qui sera soumis au vote de la Chambre des représentants ce vendredi, prévoit notamment le renforcement de la vérification des antécédents judiciaires et psychologiques pour les personnes de moins de 21 ans souhaitant acheter une arme.
« On a effectivement un pouvoir judiciaire et un autre législatif qui ne sont pas même longueur d’onde », analyse Marie-Christine Bonzom, qui rappelle qu’ « au bout du compte, c’est la Cour suprême qui interprète les lois ». Une juridiction aujourd’hui composée de six juges conservateurs et de trois libéraux, tous sont nommés à vie.
Une situation qui pousse Anne Deysine, professeure et autrice de « Les États-Unis et la démocratie » (L’harmattan), à penser que « les mesures restrictives prises ou qui pourraient être prises par les Démocrates risquent d’être, les unes après les autres, déclarées comme inconstitutionnelles ».
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