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Les éditions Gallmeister ont eu la bonne idée de sortir des sentiers battus en publiant des romans d'un genre particulièrement déconsidéré dans les milieux littéraires tel que le western ou le roman de guerre. Pour fuir ce diktat culturel, je vous propose de découvrir cette nouvelle traduction intégrale d'un ouvrage de Glendon Swarthout publié en 1975, intitulé Le Tireur que le réalisateur Don Siegel porta à l'écran en 1976 sous le titre Le Dernier des Géants avec John Wayne dans sa dernière apparition au cinéma.

Au tournant du XXe siècle, John Bernard Books est l'un des derniers survivants de la conquête de l'Ouest. Après des années passées à affronter les plus grandes gâchettes du Far-West, il apprend qu'il est atteint d'un cancer incurable : il ne lui reste que quelques semaines à vivre. Les vautours se rassemblent pour assister au spectacle de sa mort, parmi lesquels un joueur, un voleur de bétail, un pasteur, un croque-mort, une de ses anciennes maîtresses.

Au tournant du XXe siècle, John Bernard Books est l'un des derniers survivants de la conquête de l'Ouest. Lorsque Grey débarque à Tokyo, elle ne connaît pas le Japon, n’y a aucune relation et pas d’argent.

Le Tireur est un roman intelligent, subtil et touchant tout en bénéficiant du talent de conteur hors pair de son auteur. Autant dire que je n'en ai pas fini avec Swarthout.

Un Western Crépusculaire

On a souvent qualifié Impitoyable, le chef d'œuvre de Clint Eastwood, comme étant un western crépusculaire. Ce qualificatif conviendrait pourtant davantage au roman de Glendon Swarthout qui nous relate l'agonie d'une époque révolue au travers des derniers soubresauts d'un homme en fin de parcours.

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Un des aspects que j'apprécie particulièrement dans le western, c'est qu'à travers des destinées intimes de personnages archétypaux inscrits dans une culture spécifique, il s'intéresse à des thèmes ayant une portée universelle. Le fait que l'Ouest, tel qu'on l'entend dans le western, s'inscrit dans une période très circonscrite permet notamment d'évoquer la construction d'une société et la mutation finale de celle-ci. Swarthout s'est intéressé à ces deux moments charnières de l'Ouest. Ainsi, l'action de Homesman se situait plutôt dans les débuts de la conquête de l'Ouest tandis que dans Le Tireur, le récit prend place alors que cette ère de conquête est achevée. Il est d'ailleurs très intéressant de lire l'un en ayant lu l'autre auparavant.

J'avais adoré ma lecture de Homesman, grand roman humaniste et j'ai retrouvé dans Le Tireur la même délicatesse, la même bonté. Homesman évoquait les perdants de la Frontière, ceux qui n'étaient pas assez durs pour survivre dans cet environnement hostile, encore sauvage. Au contraire, Le Tireur se déroule en 1901, la conquête de l'Ouest est achevée, les territoires sauvages ont été domestiqués et refaçonnés par l'Homme, et avec le chemin de fer qui s'étend la Frontière n'est plus.

La conquête de territoires hostiles demandait des Hommes au cuir épais, au coeur dur, taillés par les éléments et l'adversité. Mais en ce début de XXème siècle, ces Hommes à l'ancienne ne sont plus vraiment à leur place, leur temps est fini. C'est le cas de Books, le héros du Tireur, dont on va suivre la lente agonie, symbole de la mort de l'Ouest et de l'avènement d'une nouvelle ère. J'ai trouvé ce récit vraiment poignant, il y a quelque chose de bouleversant à assister à la mort lente d'une époque, dure certes, mais pleine de promesses et d'espoirs.

La conquête de l'Ouest s'est faite dans le sang et dans la boue mais il y avait aussi beaucoup d'espoir là-dedans, l'espérance en de meilleurs jours, la croyance en des valeurs morales fortes. Une fois la conquête achevée, force est de constater que ces espoirs ne peuvent être que déçus. Ce n'est pas un monde meilleur qui est né, la civilisation n'est qu'un vernis, la violence est toujours au coeur de la société même si cette violence s'exprime différemment. L'ère des tueurs comme Books est révolue, fini le temps des as de la gâchette, voilà maintenant le temps des cyniques, des escrocs sournois. Ceux qui tirent leur épingle du jeu ne sont plus les tireurs les plus rapides mais les manipulateurs et les menteurs les plus habiles. Ce n'est plus la force qui est au coeur de la société mais l'argent. Cet adoucissement de la société n'est qu'une apparence, sous le vernis de la civilisation, la bassesse humaine est plus que jamais là. Lequel des deux est le plus inhumain entre le tueur qui tue d'une balle celui qui lui fait face ou le vautour qui calcule ce qu'il pourra gagner sur le dos d'un mourant ?

La Dignité Face à la Mort

Avec tous ces cyniques qui l'assaillent de toutes part, on ne peut s'empêcher d'éprouver une grande empathie envers Books. Les Hommes à l'ancienne avaient un code d'honneur, des valeurs et Books ne déroge pas à cette règle. Il sait qu'il va mourir et va tout faire pour partir avec honneur et dignité. Il ne manque pas de panache et affronte la mort avec courage et une forme d'élégance.

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En 1901, John Bernard Books, vacillant sur son cheval, débarque à El Paso avec une réputation de tueur légendaire. Seul survivant d'une lignée de pistoleros redoutables, Books va découvrir qu'il est atteint d'un cancer incurable et qu'il ne lui reste que quelques semaines à vivre. En apprenant cela, une cohorte de vautours va se rassembler afin de profiter des ultimes instants de ce dernier monument de l'Ouest sauvage.

JB Books est un dur, un vrai. C'est un tireur, une espèce en voie de disparition dont il est probablement le dernier spécimen. Une légende vivante. Il est de ceux que l'on regarde du coin de l'oeil entre crainte et admiration malsaine. Il a le cuir épais du bison et le sang froid du crotale, un pur produit de l'ouest sauvage. Inébranlable. Indestructible. Du moins avant d'entamer une partie de poker avec la grande faucheuse. Il a beau essayer de bluffer il sent bien que ce coup quelque chose cloche. Il a une très mauvaise main et sur l'une des cartes s'affiche un crabe très moche qui s'en prend méchamment à sa virilité. Cancer de la prostate.

Alors après une vie de solitude et de nomadisme Books va devoir se poser. Pas longtemps, juste le temps de mourir. C'est donc dans la chambre d'une pension modeste mais respectable, avec pour seule compagnie son journal, qu'il décide de s'installer. N'en déplaise à la logeuse qui se serait bien passée de ce locataire encombrant. Books est tout ce qu'elle déteste et pourtant ce sera la seule à se montrer réellement humaine envers lui. Car évidemment la mauvaise nouvelle s'est répandue comme une traînée de poudre et les vautours ne tardent pas à rappliquer. Cette petite chambre à El Paso va voir défiler des personnages tous plus cyniques les uns que les autres. La mort est rentable pour qui sait y faire et ils sont nombreux à vouloir une part du gâteau. Shérif, ex, journaliste, croque mort que des braves gens. Des citoyens modèles qui n'ont jamais enfreint la loi mais dont la morale laisse pour le moins perplexe.

Seul, assailli de tous les côtés, affaibli physiquement et moralement Books n'a plus que sa fierté, son code d'honneur et ses colts. Mais ça reste Books et pas question qu'on lui vole sa mort. Alors, accrochez vous à vos caleçons longs, ça va chauffer. Glendon Swarthout nous offre une réflexion sur la maladie et nos choix face à l'inéluctable.

Lecture très agréable même si j'avais préféré Homesman du même auteur.

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L'Évolution d'une Société

Considéré comme un spécialiste du genre, l'auteur parvient, de manière originale, à nous restituer cette période charnière par le biais de quelques articles que le personnage principal découvre dans son journal. Nouvelles internationales, faits divers et encarts publicitaires, c’est toute cette série d’articles ponctuant le récit qui restituent la perspective des changements sociétaux qui s’amorcent désormais à travers tout le pays.

C’est également par l’entremise de la série de portraits que dresse l’auteur tout au long du roman que le lecteur peut se demander ce qui change vraiment d’une époque à l’autre car si le progrès apporte son lot de confort et de commodité, la sauvagerie des personnages aux caractères veules et cyniques semble demeurer immuable.

Il ne fait pas bon vieillir et tomber malade quand on a été une figure du Far West, un de ces tireurs hors pair qui ont fait trembler dans les saloons. La nouvelle de sa présence et de sa maladie se répand en ville comme une traînée de poudre, et aussitôt les chacals se pressent autour de son lit pour lui arracher qui un peu de sa notoriété, qui son cheval, qui de l'argent. Un petit bijou que ce court roman, dans lequel rien n'est épargné au lecteur de l'agonie de ce vieux lion que l'on découvre au fil des pages bien moins terrible et redoutable que ceux qui l'entourent, jusqu'à voir en lui le symbole du déclin inéluctable d'un certain Ouest, fier et libre, face à l'avancée du progrès et ses valeurs plus délétères. Une fierté jusque dans la mort, à travers une scène finale digne des plus grands westerns et d'une élégance certaine.

17 janvier 2025 Glendon Swarthout, un des meilleurs spécialistes du grand ouest américain aux livres multi primés devenus de grands films, voilà un auteur de westerns (mais pas que) que je voulais lire depuis un moment. Le Tireur écrit en 1975 a eu mes faveurs, souvenez-vous pour les amateurs du genre, Le Dernier des Géants de Don Siegel avec John Wayne et Lauren Bacall et revivez l'aventure avec l'authentique récit. Et j'y ai cru dès le début, propulsée en 1901 à El Paso, Texas, la poussière des chemins de terre sur mon pilou pilou, assise non plus dans ma bibliothèque mais dans un saloon, je le vois arriver en ville, John Bernard Books, la meilleure gâchette encore vivante, ce mythe effrayant pour les uns, fascinant pour les autres. Je le suis dans la pension de Mme Rogers, observe ses deux Remington légendaires fabriqués sur mesure qu'il range dans le placard de sa chambre, qui sera probablement sa dernière, entends sa gouaille percutante, cinglante et tellement imprégnante. J'observe qu'il souffre, comprends qu'il va mourir, et tout ça, grâce à la qualité de l'écriture de Swarthout qui a le pouvoir de vous embarquer dès la première page dans le Far West.

Profiteurs aux doigts charnus de la mort, analyse avec une vision implacable la cupidité rapace, la convoitise décomplexée, l'égoïsme du profit aux dépends de la charité miséricordieuse, tous, intrasèquement, flirtant avec la solitude, qui toujours, habite les hommes, du tireur désarmé aux ratés par ignorance, du pasteur, croque mort ou ancienne maîtresse sans valeurs souhaitant gloire et reconnaissance . Brutal par sa puissance de clairvoyance, Glendon Swarthout arrive à reconstituer avec une aisance surprenante les replis souterrains des tares humaines alliant une tension grandissante jusqu'au final, véritable scène regroupant la grandeur des plus grands westerns. Tireurs, rivalités, psychologie, le tout arrosé de whisky, à la lisière d'une époque changeante.

Un des aspects que j'apprécie particulièrement dans le western, c'est qu'à travers des destinées intimes de personnages archétypaux inscrits dans une culture spécifique, il s'intéresse à des thèmes ayant une portée universelle. le fait que l'Ouest, tel qu'on l'entend dans le western, s'inscrit dans une période très circonscrite permet notamment d'évoquer la construction d'une société et la mutation finale de celle-ci. Swarthout s'est intéressé à ces deux moments charnières de l'Ouest. Ainsi, l'action de « Homesman » se situait plutôt dans les débuts de la conquête de l'Ouest tandis que dans « le tireur », le récit prend place alors que cette ère de conquête est achevée. Il est d'ailleurs très intéressant de lire l'un en ayant lu l'autre auparavant. J'avais adoré ma lecture de « Homesman », grand roman humaniste et j'ai retrouvé dans « le tireur » la même délicatesse, la même bonté. « Homesman » évoquait les perdants de la Frontière, ceux qui n'étaient pas assez durs pour survivre dans cet environnement hostile, encore sauvage. Au contraire, « le tireur » se déroule en 1901, la conquête de l'Ouest est achevée, les territoires sauvages ont été domestiqués et refaçonnés par l'Homme, et avec le chemin de fer qui s'étend la Frontière n'est plus. La conquête de territoires hostiles demandait des Hommes au cuir épais, au coeur dur, taillés par les éléments et l'adversité. Mais en ce début de XXème siècle, ces Hommes à l'ancienne ne sont plus vraiment à leur place, leur temps est fini. C'est le cas de Books, le héros du « tireur », dont on va suivre la lente agonie, symbole de la mort de l'Ouest et de l'avènement d'une nouvelle ère. J'ai trouvé ce récit vraiment poignant, il y a quelque chose de bouleversant à assister à la mort lente d'une époque, dure certes, mais pleine de promesses et d'espoirs. La conquête de l'Ouest s'est faite dans le sang et dans la boue mais il y avait aussi beaucoup d'espoir là-dedans, l'espérance en de meilleurs jours, la croyance en des valeurs morales fortes. Une fois la conquête achevée, force est de constater que ces espoirs ne peuvent être que déçus. Ce n'est pas un monde meilleur qui est né, la civilisation n'est qu'un vernis, la violence est toujours au coeur de la société même si cette violence s'exprime différemment. L'ère des tueurs comme Books est révolue, fini le temps des as de la gâchette, voilà maintenant le temps des cyniques, des escrocs sournois. Ceux qui tirent leur épingle du jeu ne sont plus les tireurs les plus rapides mais les manipulateurs et les menteurs les plus habiles. Ce n'est plus la force qui est au coeur de la société mais l'argent. Cet adoucissement de la société n'est qu'une apparence, sous le vernis de la civilisation, la bassesse humaine est plus que jamais là. Lequel des deux est le plus inhumain entre le tueur qui tue d'une balle celui qui lui fait face ou le vautour qui calcule ce qu'il pourra gagner sur le dos d'un mourant ?

« Où est votre place dans cette marche du progrès ? Nulle part. Votre place est au musée.

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