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Bob multicolore, chapeau à plumes façon Robin des Bois, casquette floquée au nom de son pays, tous les styles de couvre-chef défilent sur le pas de tir de l’esplanade des Invalides. Les corps des archers alignés depuis jeudi 29 septembre sont tout aussi variés : grand, petit, mince, costaud, plus ou moins musclé, amputé d’un bras, d’une jambe, des deux, en fauteuil ou debout.

Un sport inclusif par nature

«Comme dirait une célèbre enseigne, au para tir à l’arc, c’est un peu : “Venez comme vous êtes”, résume Vincent Hybois, le sélectionneur de l’équipe de France. N’importe quelle personne, quelle que soit la nature de son déficit, va pouvoir venir nous voir et on trouvera des solutions pour qu’elle puisse pratiquer.» Un potentiel d’inclusion rare, même pour une discipline paralympique.

Sheetal Devi : un exemple d'inclusion exceptionnel

L’exemple le plus probant est sans doute l’Indienne Sheetal Devi, née sans bras en raison d’une maladie congénitale rare. L’archère de 17 ans a la particularité de tirer avec ses pieds et sa bouche. Une gestuelle impressionnante avec laquelle elle enchaînait les 10 au centre de la cible, lors de l’épreuve arc à poulies «open» samedi 30 septembre, et suscitait l’étonnement du public en tribunes.

Assise sur un tabouret, la numéro une mondiale tient son arc du pied droit et installe la corde entre son menton et son épaule pour décocher. «Je les estime beaucoup ces filles qui tirent avec leurs jambes. Il faut avoir de la force dans les orteils, c’est très impressionnant», souligne la Française Julie Rigault-Chupin, qui concourt dans la même catégorie, mais debout avec une prothèse à la jambe gauche. Sur le circuit international, Sheetal Devi reste pour l’instant la première et l’unique archère sans membre supérieur. Peut-être plus pour longtemps.

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L'évolution de la participation des athlètes handicapés

Si les handicaps les plus lourds étaient rares sur le pas de tir il y a quelques années, il y en a aujourd’hui de plus en plus. A Londres en 2012, l’Américain Matt Stutzman, surnommé «the armless archer» (l’archer sans bras) était le premier à tirer avec ses pieds et à remporter une médaille d’argent. A Paris, pour ses quatrièmes Jeux, ils sont désormais quatre : trois archers chez les hommes et Sheetal Devi. «A Los Angeles [JOP de 2028], nous pourrions doubler notre nombre, avec probablement huit archers sans bras. C’est ça ma médaille d’or», commentait le pionnier jeudi lors des qualifications. Dimanche soir, il a décroché l’or.

Aux Jeux paralympiques, la catégorie «open», qui inclut un grand nombre de handicaps physiques, permet cette large accessibilité. Au sein de celle-ci, deux épreuves sont proposées en fonction du type d’arme utilisé : l’arc classique, le même que celui utilisé aux JO, ou l’arc à poulies, pour les archers qui ne peuvent pas le maintenir durablement en tension comme Sheetal Devi, Julie Rigault-Chupin et Matt Stutzman.

Il existe ensuite «une multitude de techniques et d’aménagements réglementés» pour s’adapter au handicap, précise Vincent Hybois. «On est toutes dans la même catégorie, c’est un avantage et un inconvénient. Mais Devi a permis de montrer qu’on peut être numéro une mondiale avec un handicap plus lourd. La preuve que le tir à l’arc est à la portée de tout le monde», observe Julie Rigault-Chupin, éliminée en quarts de finale samedi 30 septembre.

L'innovation au service de l'inclusion

Guillaume Toucoullet, paralysé du bras gauche, pensait que le tir à l’arc n’était pas pour lui. Jusqu’à ce qu’on lui évoque une technique hors du commun : «La première fois que j’ai essayé, on m’a proposé de tirer avec la bouche, j’ai trouvé ça incroyable de pouvoir faire un truc pareil.» A ses débuts en 2017, le Basque s’inspire d’un autre Américain : Eric Bennett. L’Arizonien a improvisé le geste dix ans auparavant pour continuer de chasser, après un accident et la perte de son bras droit.

A Paris, pour ses cinquièmes Jeux depuis Pékin en 2008, ils sont désormais trois à tirer avec la bouche. Tous avec des techniques différentes en termes de placement ou de positionnement de la tête. C’est d’ailleurs avec ce geste que Guillaume Toucoullet a battu le record paralympique, en qualifications de l’arc classique open jeudi, sous les yeux de Bennett, qui le félicitait. Le Français a longuement travaillé la technique pour parvenir à compenser le déficit du bras gauche par la force de la nuque.

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«Au début, on ne savait pas trop où il fallait mettre la languette (lanière de cuir placée sur la corde qu’il attrape avec ses dents pour tirer), rembobine Guillaume Toucoullet. J’ai pris quelques idées dans ce qui se faisait déjà et j’ai peaufiné en club. Ce n’est qu’en 2019, quand je suis arrivé en équipe de France, que j’ai vraiment progressé sur la technique de tir.» Avec Vincent Hybois, ils ont pensé chaque détail pour être prêt le 4 septembre (jour de sa compétition individuelle), jusqu’à effectuer un dernier réglage il y a un mois à peine.

«Un gros pan du métier d’entraîneur, c’est d’inventer, du matériel, des techniques pour qu’une personne en situation de handicap puisse pratiquer et s’améliorer en permanence. Quand ça fonctionne, c’est une énorme satisfaction, avant même les résultats», explique Hybois qui a d’abord entraîné des valides, avant de se consacrer aux Bleus handisport. En étroite discussion avec l’archer, le coach «bidouille, essaie et teste» au préalable chaque système qu’il imagine. Toucoullet, lui, tire jusqu’à 500 flèches plusieurs jours par semaine à l’entraînement, pour emmagasiner un maximum de répétitions et de sensations. Avec un suivi spécifique constant sur les cervicales «car c’est violent», mais aussi chez le dentiste.

Le Français, numéro 1 mondial et favori de sa catégorie, espère inspirer ceux qui pensent que le tir à l’arc «n’est pas un sport» ou «n’est pas fait pour eux». Vincent Hybois, lui, en est certain : avec de l’imagination et de la créativité, tout le monde peut pratiquer.

Sheetal Devi : une étoile montante du tir à l'arc paralympique

Il fallait se trouver du côté de l’esplanade des Invalides jeudi, premier jour des Jeux paralympiques, pour assister à une performance hors du commun. Sheetal Devi a brillé lors la manche de classement de l’épreuve individuelle féminine d’open arc à poulies en inscrivant 703 points sur 720 possibles. Suffisant pour battre le précédent record mondial (698), mais pas pour remporter la manche. La performance est d’autant plus impressionnante que la para-archère indienne de 17 ans est atteinte de phocomélie, une rare malformation congénitale qui l’a fait naître sans bras. Elle utilise sa bouche et ses pieds pour tirer.

Après avoir accroché la corde à l’aide de ses dents à une fixation installée sur son épaule, Devi décoche la flèche grâce à son pied droit, pendant que la jambe stabilise l’arc. Lors des Jeux asiatiques paralympiques de 2022 à Hangzhou, en Chine, l’Indienne avait décroché deux médailles d’or en double mixte et en individuel, devenant au passage la toute première championne de para-tir à l’arc à ne pas avoir de membres supérieurs. Sheetal Devi a marqué le para-tir de son empreinte.

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Engagée sur l’épreuve individuelle féminine d’open arc à poulies, elle a battu le record du monde inscrivant 703 points (sur 720 possibles), dépassant ainsi l’ancien record qui était de 698 points. Mais son exploit ne s’arrête pas là ! La vraie beauté de ce score, c’est qu’elle l’a réalisée avec ses pieds. Pour ce faire, elle accroche la flèche à la corde avec ces dents sur un support se trouvant sur son épaule, puis tend l’arc avec sa jambe droite. C’est ensuite avec son pied qu’elle décoche. Une technique qui lui permet ainsi de rivaliser avec ces adversaires qui ont le plus souvent des bras. Si les para-athlètes refusent que l'on analyse leur performance sous le prisme du handicap, on ne peut néanmoins s'empêcher d'être admiratif devant de tels accomplissements.

Un parcours inspirant

Atteinte de phocomélie, une rarissime malformation congénitale, Sheetal Devi est venue au monde, en Inde, le 10 janvier 2007 sans bras et a donc dû adapter la pratique de son sport à son handicap. Pour tirer ses flèches, elle arme ainsi son arc avec ses... dents, puis accroche la corde à une espèce de harnais fixé à son épaule. Le tout en stabilisant son arc qu'elle tient à la perfection avec son pied droit.

L'athlète handisport a, en outre, battu un record du monde en inscrivant 703 points (sur 720 possibles), le 31 août 2024, lors d'une manche de classement de l'épreuve individuelle féminine d’open arc à poulies. Sheetal Devi avait été auparavant éliminée en huitièmes de finale du tournoi, face à la Chilienne Mariana Zuniga.

Depuis son entrée dans la compétition le 29 août, la dextérité et les performances de l’archère indienne sur l'épreuve individuelle féminine de tir à l'arc font le buzz sur les réseaux sociaux. Grâce à son pied droit, elle installe sa flèche et stabilise son arc. Avec la bouche, elle accroche la corde à une fixation installée sur son épaule et décoche des flèches impressionnantes de précision. À noter que lors des Jeux paralympiques asiatiques, qui s'étaient déroulés à Hangzhou (Chine) en 2022, Sheetal Devi avait déjà remporté deux médailles d'or en double mixte et en individuel.

À 17 ans, Sheetal Devi est l’un des visages des Jeux paralympiques de Paris 2024. Il a suffi qu’une vidéo de son épreuve individuelle féminine de tir à l’arc, le 31 août, soit massivement partagée sur les réseaux sociaux, pour que Sheetal Devi devienne une icône.

Les débuts des Jeux paralympiques

Si les premiers Jeux paralympiques eurent lieu en 1948, cela faisait toutefois au moins soixante ans que des athlètes souffrant de handicaps physiques participaient déjà à des activités sportives. Dès 1888, des athlètes sourds avaient ainsi créé leur propre club de sport à Berlin. Mais ce n’est qu’après la Seconde Guerre mondiale que l’idée de tenir des compétitions pour les athlètes handicapés a commencé à se diffuser, celles-ci constituant une manière d’aider les vétérans et les civils blessés.

Ludwig Guttmann, un médecin qui dirigeait un centre pour les blessés de la moelle épinière en Grande-Bretagne, fut le fer de lance du mouvement. Selon lui, participer à des activités sportives constituait une forme de rééducation mentale et physique. Craignant que les personnes souffrant d’un handicap ne soient trop souvent abandonnées, le médecin vit le sport comme un moyen de participer à « la réintégration sociale des personnes paralysées dans la société ».

« J’ai découvert que le sport avait un impact considérable sur le plan social pour les personnes handicapées, déclara ainsi Ludwig Guttmann dans un entretien disponible sur le site Internet de l’IPC. Lorsque j’ai vu à quel point le sport était accepté par les personnes paralysées, il m’a semblé évident de lancer un mouvement sportif ».

De Stoke Mandeville à Rome : la naissance des Jeux paralympiques

C’est en 1948, le même jour que la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Londres, que Ludwig Guttmann organisa la première compétition sportive pour athlètes handicapés, qu’il nomma Jeux internationaux en fauteuil roulant. Au cours de cette compétition, seize vétérans (hommes et femmes) en fauteuil roulant s’affrontèrent au tir à l’arc. Les jeux devinrent un évènement annuel, s’ouvrant à un nombre croissant d’athlètes chaque année. Le lancer de javelot ne tarda pas à faire son apparition au programme. La compétition changea ensuite de nom et devint les Jeux de Stoke Mandeville, nom de l’hôpital où Ludwig Guttmann exerçait. Elle devint une compétition internationale en 1952, lorsque les Pays-Bas y envoyèrent une délégation.

En 1960, les Jeux de Stoke Mandeville devinrent officiellement les Jeux paralympiques. Cette année-là, plus de 400 athlètes en situation de handicap et provenant de 23 pays se rassemblèrent dans le stade olympique de Rome après la fin des Jeux olympiques d’été. Ils s’affrontèrent lors d’épreuves de tir à l’arc, de basket, de natation, d’escrime, de lancer de javelot, de poids et de massue, de tennis de table, de pentathlon et même de snooker, une variante du billard.

Les Jeux paralympiques se tiennent depuis systématiquement après les Jeux olympiques, dans la même ville. Le terme « Paralympique » reflète la nature parallèle des Jeux : il est composé du préfixe « para », qui veut dire « à côté » en grec. Jeux Olympiques et Jeux paralympiques existent en tandem.

Les Jeux paralympiques ont rapidement gagné en popularité. Plus de 1 500 athlètes de 40 pays ont participé aux 13 sports au programme de l’édition 1976, qui s’est tenue à Toronto. C’est également en 1976 qu’eurent lieu les premiers Jeux paralympiques d’hiver en Suède. À partir des Jeux paralympiques de Séoul 1988, les mêmes infrastructures que les Jeux olympiques accueillaient les compétitions. Les Jeux d’Atlanta de 1996 furent eux présentés comme « le second plus important évènement sportif au monde » et les épreuves furent retransmises à la télévision pour la première fois.

L’exposition croissante de l’évènement a favorisé une plus grande inclusivité. D’abord imaginés pour les vétérans blessés à la moelle épinière, les jeux de Ludwig Guttmann se sont ensuite ouverts aux civils souffrant des mêmes handicaps, puis aux athlètes présentant d’autres handicaps (par exemple, les personnes amputées ou atteintes de déficience visuelle).

La classification des athlètes

Il a alors fallu décider de la manière de rendre la compétition juste, pour que la personne présentant un handicap moindre ne soit pas toujours celle qui décrocherait le titre. Les organisateurs des Jeux paralympiques ont alors commencé à classer les compétiteurs selon le type de handicap les touchant et sa sévérité. On compte trois grandes catégories (handicap physique, visuel et mental), qui déterminent si les athlètes peuvent concourir ou non à une épreuve et la manière dont ils sont regroupés.

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