Sans gravure, nos armes de chasse, aussi belles soient-elles, ne seraient que de très beaux outils. Ce n’est qu’une fois ornées de scènes animalières, de feuilles d’acanthe, de fleurs qu’elles deviennent des oeuvres d’art uniques, magnifiques et enchanteresses.
Les techniques de gravure sur armes de chasse incluent la taille douce, le fond creux, la ciselure et l’incrustation. L’utilisation de la gravure au trait reste la plus vieille technique artistique.
Ces techniques peuvent être utilisées seules ou combinées pour créer des styles uniques, comme le mélange des styles anglais traditionnel et américain contemporain.
Cet article revient sur les plus grands noms de la gravure stéphanoise. Il ne s'agit pas ici de faire l'historique des techniques de la gravure sur armes. Cet article n'a d'autre prétention que de présenter brièvement les plus célèbres graveurs stéphanois. Nous espérons simplement forcer un peu la mémoire des vivants. Parce qu'eux morts, ils forcent encore notre respect. Après avoir forcé la nature.
En 1766, le maître graveur Jacques Olanier ouvrit son atelier de la rue du Chambon à de jeunes apprentis désireux d'apprendre le dessin. En mariant l'art et l'enseignement, Olanier (honoré aussi par une rue) est considéré comme l'inventeur de l'Ecole des Beaux Arts.
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Anciennement nommée Ecole Régionale des Arts Industriels (en 1884), l'établissement forma longtemps des étudiants dans des domaines en relation avec les industries traditionnelles stéphanoises : le tissage, la mécanique, la géométrie, mais aussi, bien sûr, la gravure et la ciselure sur armes.
En même temps qu'une phalange de maîtres armuriers, tels que les Dufour, les Cessier, les Jalabert-Lamotte... inventaient et perfectionnaient des armes remarquables par leur technique et l'élégance de leurs lignes, une pléiade d'artisans domptaient le métal froid de ces objets virils et les transformaient en oeuvres d'art raffinées.
De ce milieu des artisans stéphanois qui gravaient les platines et ciselaient les bascules des fusils, vont sortir de l'anonymat des artistes de renommée internationale, de véritables dynasties de graveurs. Pas uniquement sur armes d'ailleurs puisque Saint-Etienne, à partir de la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle (période faste de la gravure), a donné naissance à de grands médailleurs.
On ne peut que conseiller une visite au Musée d'art et d'industrie pour admirer le travail de ces hommes. Vous y verrez certaines pièces qui font la gloire de ce musée, dans son domaine un des premiers d'Europe : oeuvres de Tissot, Lavialle...
Une autre visite, cette fois au Conservatoire des Meilleurs Ouvriers de France, vous apprendra que ce savoir-faire absolument remarquable perdure encore. Dans le domaine de l'ornementation sur armes, nombreux furent les Ligériens à avoir reçu le titre de MOF : Jean-Marie Doron en 1927, puis, en 1933, Antony Bourgier, Pierre Gadoud cette même année, Roger Picot en 1936 (dans la classe Armurerie, catégorie Graveur-Ciseleur). En 1965, Félix Faure fut distingué dans cette même catégorie. D'autres encore la reçurent dans la catégorie Graveur-Décorateur en Armurerie, le plus récent étant Pierre Chapuis en 1997. Au total, dans toute la classe Armurerie (comprenant aussi les catégories Ajusteur, Monteur), ce sont 25 Ligériens qui furent honorés !
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Un mot enfin pour distinguer la gravure de la ciselure. La gravure est un procédé de décoration par enlèvement de matière. Plusieurs techniques décoratives permettent au graveur de réaliser des motifs en taillant le métal avec différents outils : burin, onglette, échoppe... En creusant des traits plus ou moins profonds, il élabore un motif décoratif et des effets de surface. La gravure se distingue de la ciselure par l'enlèvement de matière. Avec la ciselure, le métal est « simplement » relevé et frappé pour donner du relief à la surface.
Si on est graveur par vocation, on l'est aussi souvent par atavisme et nombre d'artistes stéphanois se sont honorés d'un titre de gloire cher aux coeurs bien nés : « Elève de son père ». C'est pourquoi on retrouve des patronymes semblables, même si parfois les descendants ont oeuvré dans d'autres domaines.
Alain Lovenberg est un maître graveur dont le parcours est marqué par un concours de circonstances et une passion innée pour le dessin et la gravure.
Alain Lovenberg: La fabrication et le commerce des armes à feu a débuté très tôt à Liège, aux environs du 16ème siècle. L’usage étant de décorer les armes , c’est aux graveurs que l’on a naturellement confié cette tâche et le développement de la gravure a évidemment suivi celui de la fabrication d’armes. L’apogée de cette activité se situe à la fin du 19ème siècle et le début du 20ème siècle, période où Liège est devenue une référence en ce domaine.
Alain Lovenberg: Je ne peux pas dire que je propose un type de gravure particulier, je pratique les techniques usuelles du métier telles que les sujets animaliers (ou autres), l’ornementation dite en « fonds creux », la ciselure, l’incrustation appelée parfois damasquinure. J’ai, comme tout graveur, un style personnel mais malgré tout liégeois, semble-t-il.
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Pendant longtemps je n’ai gravé que pour les armuriers de Liège mais les demandes de clients internationaux se font de plus en plus fréquentes.
Alain Lovenberg: Le métier de graveur se fait toujours en collaboration avec l’armurier, pour des raisons techniques. En général, c’est l’armurier qui choisit le graveur et lui impose ses conditions.Dans mon cas personnel, comme dans celui de quelques graveurs réputés, la situation est un peu différente.
Alain Lovenberg :Je ne me suis jamais contenté de graver exclusivement des armes de chasse, bien que ce soit le principal de mon activité. J’ai débuté dans le métier par de la gravure de bijouterie et je continue toujours. Je grave à l’occasion quelques couteaux, des montres de luxe, des matrices pour médailles parfois, bref tout ce qui est en rapport avec le métier de graveur.
A.L. : Certainement, le public non averti a de la gravure et des armes une opinion plutôt négative à cause de ce climat. On m’a d’ailleurs souvent demandé pourquoi je grave des armes. Evidemment, si la législation se durcit, ce qui est le cas chez nous, ce n’est pas très favorable à la profession d’armurier ni à tous les métiers qui gravitent autour de cette activité, dont le mien.
A.L. : J’ai en effet réalisé des gravures pour des personnes renommées, je ne les citerai pas toutes. Par l’intermédiaire d’ armuriers, j’ai gravé quelques armes pour le roi du Maroc, pour Spielberg, j’ai aussi rencontré Georges Bush… une de mes armes est devenue « star » dans le film « In the Blood » film dédié à un safari organisé pour le Président des Etats-Unis, Théodore Roosevelt.
Alain Lovenberg: Un peu par hasard- mais est-ce vraiment un hasard quand on est liégeois? Je suis tombé sur un petit article illustré dans une gazette locale, annonçant la rentrée scolaire à l’Ecole d’Armurerie et de Gravure Léon Mignon.J’étais, à ce moment, élève à l’ Académie des Beaux-Arts et je n’étais pas satisfait du climat un peu anarchique et débraillé qui y régnait.
L’ambiance de travail était tout autre dans la classe de gravure, les élèves assidus, penchés sur leur établi, m’ont donné l’impression d’apprendre réellement un métier.
Il existe des graveuses françaises sur armes. La liste de ces dames est loin d’être exhaustive et si vous vous en connaissez que j’ai pu oublier, pourriez vous compléter à la suite avec leurs noms, et éventuellement leur site ? Ce serait sympa Je vous les présente par ordre alphabétique
Son père Marius Brunon était graveur à St Etienne, on peut donc dire qu’elle es tombée dans la marmite étant petite .Dans cette vidéo elle montre comme elle grave une bascule de fusil en utilisant les techniques stéphanoises : l’étau est monté sur une sorte de tour de potier et ce sont les pieds qui font tourner le plateau. Techniques liégoises donc pour notre graveuse .J’aime beaucoup son site. Ses dessins promettent des gravures de plus en plus fabuleuses. Elle aussi a fait le classique parcours par Leon Mignon à LiègeMasi elle a aussi appris l’hitoire de l’art .
Aujourd'hui, les graveurs continuent d'apporter leur touche personnelle à chaque arme, en adaptant les techniques traditionnelles aux demandes spécifiques de leurs clients.
« J’ai commencé mon métier de graveur en 1987. Mon mari était armurier et très grand passionné d’armes. Je me suis penchée sur sa passion d’un peu plus près, principalement sur le travail de gravure des armes et c’est finalement devenu une évidence pour moi.
« Les clients peuvent choisir auprès de Chapuis Armes entre un motif sur catalogue ou un motif entièrement personnalisé et réalisé sur mesure. La demande de gravure personnalisée du client m’est transmise puis je procède au travail de gravure en m’appuyant sur des photos (un portrait d’une personne, d’un animal…). Pour finir, j’imagine un décor qui viendra entourer et sublimer le motif.
« Il existe 4 techniques principales de gravure sur arme : la taille douce, faite de traits très fins et doux, le fond creux, qui vise à mettre le sujet en relief, la ciselure qui consiste à réaliser un fond creux plus poussé avec un remodelage du sujet et enfin l’incrustation, d’or ou d’argent. Certaines techniques comme l’incrustation sont difficiles à maîtriser et nécessitent une grande expérience et un grand savoir-faire. C’est un métier qui exige beaucoup de dextérité et de patience.
« J’ai eu de nombreuses demandes diverses de gravures sur arme sur-mesure, notamment des portraits mais la demande la plus insolite de ma carrière de graveur sur arme ne concernait pas un fusil de chasse mais une des deux épée qui ont été remises aux présidents pendant la rencontre entre Bill Clinton et François Mitterrand lors du cinquantenaire du débarquement allié en 1994.
« Je n’ai pas vraiment de spécialisation mais j’ai une affinité toute particulière pour la technique de la taille-douce. J’aime aussi beaucoup le rendu du fond-creux mais la technique est plus rude et agressive pour les doigts.
« L’aspect le plus satisfaisant dans mon métier, c’est de rendre un objet unique avec la gravure. Les armes sont des objets que j’ai appris à aimer et que j’ai plaisir à sublimer grâce à cet art. J’ai aussi eu l’occasion de donner des cours pendant 15 ans et je dois dire que j’ai adoré former et transmettre mon savoir-faire pour le faire perdurer. J’arrive bientôt au terme de ma carrière de graveur sur arme et je ne regrette pas mon choix de départ et mon orientation vers cette voie.
« J’ai commencé mon métier de graveur en 1971. Ma mère travaillait à la Fabrique Nationale (FN Herstal, célèbre armurerie belge), elle me répétait souvent que le métier de graveur sur arme était un magnifique métier, c’est ce qui m’a donné envie de me lancer dans ce métier !
« La réalisation finale dépend beaucoup du budget du client. On commence par voir ce qu’il est possible de faire avec le budget annoncé, puis on imagine un motif et on choisit un style en fonction des envies du client.
« Contrairement à ce qu’on pourrait croire, les lettrages sont pour moi ce qui est le plus difficile, surtout quand il s’agit d’incrustation en or.
« Ce qui me plait le plus dans ce métier, ce sont les sujets. J’aime beaucoup représenter des scènes de chasse et les animaux, les graver, les reproduire dans leur biotope le plus fidèlement possible. Représenter des animaux dans un environnement naturel qui n’est pas réaliste est d’ailleurs une erreur que l’on fait souvent en tant que jeune graveur. Par exemple, si je dois représenter un gibier pour l’arme d’un client américain, je prends soin de graver si possible une espèce américaine entourée d’arbres que l’on trouve dans son habitat naturel.
Dès la sortie de l’école, je suis rentré à Grasse, dans le sud-est de la France, et c’est dans mon atelier que je pratique ce métier qui me passionne et à travers lequel j’espère satisfaire ma clientèle. A l’écoute de chacun, je vous propose la finition de votre arme avec une gravure unique, des ornements en fond creux ou en taille douce, scènes, ciselures ou autres incrustations. Chaque réalisation est faite selon les souhaits du client, que ce soit pour des particuliers ou en collaboration avec les maisons de fabricants d’armes fines.
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