Depuis l'autorisation donnée aux femmes de s'engager dans la Gendarmerie grâce à la loi du 13 juillet 1972, l'intégration des femmes dans cette institution a connu une évolution significative. Engagée volontaire au titre de sous-officier de la Gendarmerie à mes 21 ans, depuis un désir de servir pour l’intérêt collectif de mon pays et de ses populations, ces 17 années d’un métier aux exigences de toutes natures m’ont appris à vivre de la plus petite des situations à de plus grandes, dans la profondeur des territoires du milieu rural et l’adversité des milieux urbains en proie à l’impunité des réseaux délinquants.
Jusqu’aux années 60, les femmes n’étaient pas autorisées à intégrer la Gendarmerie nationale. Considérée comme l’institution militaire pas excellence, la Gendarmerie Nationale considère jusqu’à cette époque que les femmes ne peuvent pas exercer le métier des armes. Cette perception change définitivement le 13 juillet 1972 grâce à une loi qui donne aux femmes le droit de s’engager dans la Gendarmerie. Cela constitute un énorme bond en avant, voire une révolution pour l’institution.
Toutefois, durant une décennie, l’évolution du rôle des femmes en gendarmerie reste assez lente. En effet, celles-ci occupent essentiellement des fonctions de soutien (un soutien administratif). Il faut attendre 1982 pour voir les femmes affectées à des fonctions opératonnelles, participer à des missions jusqu’alors réservées aux hommes.
L’année 1987 représente une année charnière pour le processus de « féminisation » de la Gendarmerie nationale. C’est cette année-là, qu’Isabelle Guion de Méritens (brillante étudiante issue de l’école Saint-Cyr) décide de rejoindre la Gendarmerie. Elle devient alors la première femme à obtenir le rang d’officier en Gendarmerie. Depuis 2013, elle devient également la première femme à être nommée au rang d’officier général de Gendarmerie.
Par ailleurs, dans le cadre de la professionnalisation des armées initiée par le Président Jacques Chirac, l’augmentation de la présence féminine au sein de la gendarmerie va encore s’accélérer. Au moment de la création des premières unités de Gendarme Adjoint Volontaire, les femmes ne seront pas oubliées. Certaines d’entre elles seront d’ailleurs affectées dans les Centres d’Information et de Recrutement (CIR) pour représenter les femmes dans le Gendarmerie nationale et convaincre encore plus de femmes de servir dans l’institution. C’est grâce à la création des GAV que la féminisation de la Gendarmerie nationale va passer à la vitesse supérieure. En 2005, il y a 12% de femmes au sein de la gendarmerie, dont la majorité est essentiellement des GAV.
Lire aussi: Circonstances troublantes autour du décès
Actuellement, on compte environ 20% de femmes et l’Institution accentue sa politique d’ouverture de spécialités ou d’unités aux femmes gendarmes : le GIGN et les escadrons de Gendarmerie mobile, pour ne citer que ceux-là. L’évolution de la place des femmes dans la Gendarmerie n’a pas été un processus simple et rapide mais aujourd’hui, la tendance est à la normalisation de la situation avec notamment, l’égalité des rémunérations à grades similaires entre autre.
De cette manière, j’ai acquis des connaissances et développé des savoirs, ce qui me permet aujourd’hui de conduire une équipe de plusieurs personnels dans la réussite des missions vers l’accomplissement des objectifs fixés par mes chefs. Servant pour le démantèlement d’importants réseaux de la criminalité organisée implantés sur la plaque parisienne, manipulant des techniques d’enquête spéciales, sollicitant les sections des tribunaux et exerçant en coordination avec les actions des commandants territoriaux au plus près de leurs problématiques de terrain de la sécurité publique, la Gendarmerie m’a permis de m’articuler autour d’un travail collaboratif pour la progression de l’Institution vers une société en pleine transformation dans ses faits, ses personnes et son environnement dans son ensemble.
La journée internationale pour les droits des femmes et l’égalité entre les filles et les garçons du 08 mars 2024 pourrait être l’occasion de souligner les victoires et les acquis désormais ancrés dans notre corporation (féminisation dans tous les postes et les spécialités, égalité des salaires, féminisation du grade, constructions d’infrastructures adaptées au personnel féminin, mixité dans les écoles et les formations, intégration plus aisée, complémentarité homme/femme avérée…).
La situation des femmes en gendarmerie pourrait toutefois être encore améliorée, notamment en poursuivant la sensibilisation sur le sexisme et le machisme dont nous pouvons encore être la cible. Investir en faveur des femmes est une question fondamentale de droits humains, de liberté de talents et d’expression des potentiels. Être une femme n’a selon moi jamais posé problème dans les capacités humaines à atteindre les objectifs et dans l’exercice des responsabilités. Chacune mérite naturellement toute sa place dans la progression de la société, à hauteur de ses ambitions, notamment dans le monde du travail, tant que l’on continuera à la promouvoir à partir de ses compétences propres, loin de toute guerre des genres et au-delà même de l’égalité professionnelle.
Cette évolution est une des nombreuses opportunités qu’offre l’institution en terme d’ascenseur social. La gendarmerie nationale permet de se réaliser personnellement en intégrant par exemple des unités très spécialisées telles les PGHM, les plongeurs, la cybersécurité… voire par le biais de concours internes de passer du statut de sous-officier à celui d’officier.
Lire aussi: Tout sur le Chapeau de Gendarme
Les modalités de recrutement au concours de Sous-Officier et aux tests de sélection de Gendarme Adjoint Volontaire sont bien sûr les mêmes pour les candidats masculins et les candidats féminins. Toutefois en ce qui concerne le concours de Sous-Officier, malgré le fait que le barème de notation des épreuves sportives soit adapté pour les femmes, le taux d’échec féminin à ces épreuves est toujours plus élevé.
Présente à la section de recherches depuis bientôt 8 ans, j’espère, sans prétention, être l’égal de chacun, appréciée pour mes qualités et mon sens du devoir. Je ne veux pas et ne cherche pas à être estimée pour ma condition. Je suis certes une femme mais dans mon service, je me sens uniquement militaire et je tiens à ce que mes camarades agissent avec moi sans quelconque considération sexuelle. C’est à mon sens une des vertus de la gendarmerie de permettre un épanouissement personnel dépourvu de caractéristiques genrées. Je ne suis ni au féminin ni au masculin.
La force de la gendarmerie est de pouvoir exercer plusieurs métiers au sein de la même institution. Après plusieurs années passées à rechercher les traces et indices sur des scènes de crime, en tant que technicien en identification criminelle, aujourd’hui j’interviens auprès de publics vulnérables.
Adjudante-Cheffe Déborah DURAND, du haut de mes 8 ans, assise à l’arrière de la voiture, rehaussée et réglementairement attachée, je guettais par la fenêtre un point de contrôle de gendarmes en espérant que ma mère se fasse arrêter pour pouvoir me rapprocher de ces hommes à l’allure fière, portant impeccablement l’uniforme, et faisant respecter la loi tout en protégeant la population… « mes héros » ! A l’été 2003, alors que je me questionne sur mon avenir professionnel après avoir échoué à deux reprises au concours du CAPEPS, mon père me dépose une brochure sur la table mentionnant en gras le slogan ; « gendarmerie, pourquoi pas vous ?! ». J’ai été stupéfaite de découvrir sur la première page une femme portant l’uniforme !
Je me suis empressée d’ouvrir le dépliant pour m’assurer qu’il ne s’agissait pas de postes de bureaux… A la lecture des compétences attendues pour devenir gendarme (esprit d’équipe, engagement, dépassement de soi, disponibilité…), détaillées sans distinction de sexe, je me suis exclamée avec engouement et conviction « mais oui, pourquoi pas moi ! ». Je ne réalisais pas que j’envisageais de faire « un métier d’homme » en remplissant mon formulaire d’inscription en 2004 au concours des sous-officiers, 21 ans après le début de la féminisation en gendarmerie. Il m’est apparu comme une évidence que cette profession correspondait à mes attentes de développement personnel et professionnel, tant au regard de ses missions riches et variées, que par sa dimension de relations humaines prédominantes.
Lire aussi: Urinoir Féminin Portable : Une Solution Discrète
J’ai choisi de servir en gendarmerie dans un premier temps pour son cadre militaire et son sens du service publique. Mes premières années en gendarmerie ont renforcé ma conviction de servir la population et d’apporter, au travers des différentes formations que j’ai pu réaliser, toute mon expertise dans des domaines précis. Adjudante-Cheffe, je suis affectée à la Section de Recherches de PARIS depuis 12 ans. J’exerce la police judiciaire à la division atteintes aux personnes (affaires relatives aux homicides, pédophilie, proxénétisme, agressions sexuelles…) à travers des techniques d’investigations spécifiques à la grande délinquance (interceptions de correspondances par voies de télécommunications, sonorisation et fixations d’images, surveillances discrètes, cyber-infiltration …).
Mon expérience professionnelle cumulée à mes formations me permette, notamment, de diligenter des dossiers en qualité de directrice d’enquête à portée régionale, nationale, voire internationale. Mutée en 2007 à la brigade territoriale autonome de BONNIERES SUR SEINE, je fais comme tout gendarme, mes premières armes dans une unité généraliste. J’y découvre l’ensemble des composantes missionnelles, au plus près de la population, m’appuyant notamment sur le contact et la recherche du renseignement pour résoudre les enquêtes dont j’ai la responsabilité.
Prenant goût à la matière judiciaire, je décide de m’y investir davantage en postulant pour la brigade des recherches de RAMBOUILLET. Poursuivant et m’appropriant pleinement la culture « JUD », je candidate et suis retenue à la SR de Versailles. Attirée par les métiers de la sécurité et désireuse de m’impliquer dans une action de service public, la gendarmerie s’est progressivement imposée comme la profession, l’Arme idéale.
À 51 ans, la capitaine Sophie Jouy, officière adjointe au commandant de groupement de gendarmerie des Côtes-d’Armor, est une militaire engagée et exigeante. La capitaine Sophie Jouy, officière adjointe au commandant de groupement de gendarmerie des Côtes-d’Armor, est la numéro 4 dans l’échelle hiérarchique du commandement. La seule femme. « Je n’ai jamais ressenti de difficulté dans le commandement. Homme ou femme, à partir du moment où vous êtes légitime dans la technicité… » Ce qui fait la différence, « c’est la personnalité, le caractère, assure la militaire chargée de la police judiciaire.
Le port des armes est indissociable du pouvoir militaire dont la domination masculine a exclu les femmes, arguant de leur nature dite fragile et vouée à la maternité, et d’une virilisation que provoquerait leur armement. Tel est - et demeurera - l’enjeu d’une féminisation des armées officielles. Au début des années 2010, l’armée française est l’une des plus féminisées avec 15 % des effectifs.
En France, jusqu'en 2016, les escadrons de la gendarmerie mobile sont demeurés fermés aux femmes. La marine française ouvre à titre expérimental les équipages de sous-marins aux femmes à partir de 2017. La gendarmerie nationale compte 18% de femme dans ses rangs (sur 99.000 personnels d’active).
Je suis référente départementale aux violences intrafamiliales (VIF) et formatrice régionale au recueil de la parole du mineur victimes/témoins. Mes missions sont, dans le domaine des VIF, de former l’ensemble des militaires du département à la prise en compte des victimes de violences intrafamiliales et de les accompagner par mon expertise lors de procédures judiciaires (relogement d’urgence, mise en confiance, accompagnement social). D’autre part, en tant que formatrice régionale aux techniques d’audition des mineurs, je forme les militaires au recueil de la parole de l’enfant dans le cadre de procédures judiciaires à caractère délictuel.
Je suis également formée à entendre les mineurs victimes/témoins d’infractions à caractère sexuel et ou criminel. Je sensibilise aussi les professionnels de l’enfance au recueil de la parole. Ainsi, je suis amenée à assurer administrativement les missions, rédiger et adresser les convocations des réservistes, saisir les comptes rendus des services effectués… Je fais également partie du programme de parrainage des nouveaux réservistes.
En juin 2023, afin de me préparer au mieux et prendre plus de responsabilité au sein des patrouilles, j’ai suivi la formation chef de patrouille dispensée au sein du Groupement de Seine-et-Marne. Je suis aujourd’hui officier de gendarmerie et j’en suis fière. Servir en gendarmerie est pour moi une grande satisfaction et j’espère pouvoir apporter encore plus ma contribution au sein du groupement du 77.
Je ne suis pas naïve malgré tout. S’engager en gendarmerie nécessite de forts sacrifices. Il faut bien être conscient que le temps consacré à ses proches est soumis à la versatilité du service. La disponibilité requise, malgré les évolutions sur le temps de travail, constitue une obligation que chacune doit prendre en compte à l’instar de tout militaire. L’égalité homme/femme prônée par tous et pleinement instituée en gendarmerie s’inscrit parfaitement dans ce traitement commun asexué. Je n’ai donc pas de message majeur à porter, outre le fait que la gendarmerie m’a permis et me permet de m’accomplir. Je dirais simplement qu’Être une femme n’est pas un sujet.
tags: #gendarme #femme #armement