L'industrie française des textiles de maison (hors habillement) comptait 904 établissements en 2023. Le secteur se divise en six segments :
Les produits sont destinés aux particuliers comme aux professionnels.
Les fabricants français du secteur font face à la concurrence des produits importés et aux pressions tarifaires des distributeurs. Pour résister, ils s’efforcent de monter en gamme et investissent en R&D pour se démarquer des offres standardisées à faible valeur ajoutée.
La profession se compose de nombreux acteurs, pour la plupart indépendants comme Lestra. À leur côté interviennent des filiales de groupes français, à l’instar de Home Héritage (ex-Dodo) ou Fremaux Delorme.
Les textiles de maison sont moins demandés depuis la crise sanitaire : après 3 années de légère croissance, l’année 2023 a été touchée par un effondrement du marché de -4,5 % pour atteindre 9,1 Mds EUR de chiffre d’affaires. Comme tous les secteurs des biens de consommation, le linge de maison souffre de l’inflation et de l’épargne des consommateurs.
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Les prix des produits ont atteint un sommet en 2022 avec un taux d’inflation de 6,3 % et étaient encore à 5,2 % en 2023. C’est ce qui ressort du nouveau « Rapport de l’industrie sur la maison et les textiles de maison » de l’IFH Cologne en coopération avec BBE Handelsberatung.
Les perspectives pour les années à venir montrent que le marché se stabilisera au niveau d’avant le coronavirus, à environ 9,2 Mds EUR d’ici 2028. Les quatre groupes de produits du secteur des textiles de maison sont les revêtements de sol textile, la literie, le linge (de maison, de table et de lit) et les tissus pour rideaux/décorations.
Ces derniers ont tous évolué avec un différentiel similaire de 4 à 5 % en 2023. Ce sont les revêtements de sol textile qui perdent le plus. La literie reste le groupe de produits le plus important avec une part de marché de plus de 35 %, suivie des rideaux et des tissus décoratifs avec une part de marché d’environ 25 %.
La réticence des consommateurs à acheter devrait s’estomper dans les années à venir, notamment avec le ralentissement de l’inflation. Cependant, en raison de la saturation du marché et de la retenue persistante des consommateurs, l’industrie du textile de maison s’attend à une légère baisse en 2024.
Une normalisation est également évidente dans l’évolution des prix, qui s’établira à environ 1,7% d’augmentation des prix d’ici 2028 selon les prévisions actuelles de l’IFH Cologne et de BBE Handelsberatung.
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Depuis la pandémie, le lit s’impose comme LE nouveau refuge bien-être. Ainsi, selon une étude Ifop: “Le lit a été élu endroit préféré de leur domicile par 21% des Français. Il est même le lieu favori de la moitié des 18-24 ans! Que ce soit en mangeant, en jouant à des jeux vidéo, en faisant du e-shopping, en écoutant de la musique ou la radio, en regardant la télévision ou en lisant, chacun y laisse fatigue, stress, et contraintes pour puiser réconfort, vitalité, ancrage et optimisme.” (Étude Ifop pour Tousaulit.com réalisée en avril 2021)
Ainsi Le Jacquard Français (groupe Elis), jusqu’ici connu pour ses torchons et ses nappes, veut aujourd’hui conquérir toute la maison et a lancé au printemps ses housses de couettes et taies d’oreillers. Sur un segment du linge de maison au faible taux de renouvellement, la marque vise un marché plus important où le changement des produits se fait plus vite, augmentant la rentabilité et le chiffre d’affaires.
Voici une illustration des parts de marché par type de produit :
Groupe de produits | Part de marché |
---|---|
Literie | 35% |
Rideaux et tissus décoratifs | 25% |
Autres | 40% |
“Pendant les confinements, les Français ont passé énormément de temps chez eux. Ils accordaient déjà beaucoup d’importance à leur intérieur, mais cela s’est accentué, explique Nicolas Morschl qui a lancé fin 2017 Bonsoirs, la marque de linge de maison 100% en ligne. Le marché du linge de lit pèse plus de 1 milliard d’euros en France et celui du linge de maison plus de 2,5 milliards. Ces dix dernières années, ce marché a été un peu délaissé.
Il était resté très traditionnel et se divisait surtout entre l’entrée de gamme et le haut de gamme. La grande distribution en possède à peu près la moitié, les vépécistes (La Redoute, 3 Suisses) entre 25 et 30%, et ensuite ce sont surtout des acteurs traditionnels (Fremaux-Delorme, Carré Blanc, Blanc des Vosges). Mon idée a été de bousculer les choses avec du linge de lit avec un bon rapport qualité/prix et une bonne expérience client.”
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Lin, gaze de coton ou encore satin lavé...Résultat: Bonsoirs, ce sont des parures vendues à partir de 135 euros toute l’année, réalisées avec des matières haut de gamme (percale de coton, satin de coton, lin, gaze de coton ou encore en satin lavé). Sur le site, pas de soldes ni de promotions.
L’expérience client se veut irréprochable: service de personnalisation avec de la broderie, livraison offerte à partir de 100 euros, retours gratuits, garantie satisfait ou remboursé pendant 60 nuits, service client très réactif, recyclage des anciens draps…
“Le linge de lit et même la literie ont un trend d’activité fort depuis la pandémie, confirme Florence Delage, responsable du département maison et librairie-papeterie du Bon Marché à Paris. Nous avons en magasin notre propre marque de linge de lit Le Bon Marché, qui fête d’ailleurs ses 25 ans cette année.
Nous proposons toujours plus de matières et de couleurs autour de valeurs RSE fortes, mais nous travaillons aussi avec des marques en exclusivité comme Delorme Couture, Society. Il y a aussi Caravane qui reste un acteur fort, et Alexandre Turpault. Nous misons aussi sur les collaborations comme avec CSAO.
Également à découvrir au Bon Marché: la toute première collection de linge de lit de Mapoésie. Lancée en juillet 2010 par Elsa Poux, la marque fêtera ses 15 ans en 2025 et propose aujourd’hui un univers de plus en plus complet.
“Initialement Mapoésie, ce sont des foulards, puis sont apparues la déco et la maison (coussins, coussins de sol) en 2014, suivi par le beachwear, les foutas en 2017, jusqu’au prêt-à-porter, confie Nathalie Barataud, associée de la créatrice depuis 2018. Aujourd’hui nous nous définissons comme une marque lifestyle avec une signature graphique reconnaissable.
Le linge de lit reste pour nous du textile et l’occasion s’est présentée après la Covid. Nous avons été contacté par la société portugaise Mea Cama. Pour nous, c’est une autre façon de travailler. Nous imaginons une seule collection par an et nous travaillons via le principe de la précommande. Nous lançons la production ensuite et ne produisons que ce dont nous avons besoin.
Grâce à notre partenaire, nous travaillons avec des revendeurs comme John Lewis au Royaume-Uni, et nous nouons de nouveaux partenariats en Espagne, en Italie, en Suisse, au Canada et même à Dubaï. C’est une visibilité supplémentaire pour Mapoésie. D’ailleurs Le Bon Marché, client de la première heure de la marque, nous a tout de suite proposé en pop-up à l’étage dédié à la maison.”
“Le linge de lit a toujours fait sens au sein du Bon Marché avec un nombre de mètres carrés significatif et nous avons toujours cherché à le décomplexer alors qu’il peut se montrer ennuyant ou statutaire, poursuit Florence Delage. Nous le travaillons par pièce, avec de vraies ambiances, comme un appartement parisien.
La tendance actuellement? Je crois qu’outre les matières naturelles qui sont très présentes (coton, lin et même chanvre depuis peu), la soie se développe bien et la personnalisation monte en flèche. Le lit joue la différenciation.”
Dessinée à Paris et fabriquée en Pologne, la collection Dariia Day est dans cette mouvance. Son atout? La soie organique de la plus haute qualité pour imaginer un univers dédié à la beauté et au bon sommeil. Déclinée au féminin et depuis peu au masculin, elle propose linge de lit en soie, homewear, masques pour les yeux, accessoires pour les cheveux.
Ainsi, Simone Pérèle s'associe à Emily’s Pillow pour proposer un masque de nuit et un oreiller en soie. “ La soie a de nombreux bienfaits pour la peau et les cheveux, déclare Laure Lagarde qui a lancé Emily’s Pillow en 2020.
Cette matière douce n'absorbe pas les crèmes, ce qui permet une hydratation optimale de la peau, procurant ainsi un effet anti-âge. Thermorégulatrice, elle s'adapte à la température de votre corps. Elle est également source de fraîcheur en été et conserve la chaleur en hiver. Sa douceur fait d'elle un véritable allié beauté des cheveux, elle évite les nœuds durant la nuit. Les cheveux sont moins fourchus et retrouvent leur éclat.”
Au final, l’univers de la nuit devrait donner lieu ces prochaines années à de nombreuses nouveautés. “C’est un gros secteur en termes de valeur et qui est très dynamique, conclut Florence Delage au Bon Marché. En outre, les prises de parole autour du confort et du sommeil sont nombreuses. Le bien dormir est assurément un marché en pleine expansion.”
Un sentiment confirmé par les chiffres de Mordor Intelligence: “Le marché du linge de lit et de bain devrait enregistrer un taux moyen de croissance des ventes supérieur à 6% au cours de la période 2024-2029”.
La RSE dans l’industrie textile devient une préoccupation majeure en raison de multiples enjeux sociaux, environnementaux et éthiques. Lionel Dubos, CEO de Haomy, souligne que les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux enjeux RSE et c’est le rôle des entreprises de les y éduquer.
Les entreprises de linge de maison mettent en place des actions pour se démarquer de la concurrence premier prix, notamment en adoptant des normes environnementales strictes et en proposant des produits confectionnés dans les Hauts de France.
20% de lin, c’est un tissu issu de fibres naturelles, recyclables, et certifié Oeko-Tex. Les certifications sont très exigeantes, encadrant l’utilisation des produits chimiques. Garnier-Thiebaut met en place des formations et des tutorats en interne pour assurer la qualité de ses produits et développer les compétences de ses employés.
L’entreprise investit également dans la production du nord de la France, notamment en embauchant des apprentis et en proposant des contrats au sein de la société. Elle a réalisé un investissement de plus de 200 000 € pour moderniser son réseau de distributeurs.
Certaines marques, comme Maryne Guyot, privilégient les matières naturelles, du coton essentiellement, et travaillent avec des fournisseurs français pour le tissé teint et portugais pour l’impression. L’objectif est de relocaliser au maximum la production en France.
En ce qui concerne la seconde main, il est difficile de vendre une housse de couette en seconde main, mais pour le linge de table, les freins ne sont pas les mêmes. Des initiatives sont à l’étude au sein du groupe Vanderschooten, notamment chez Parmentier (Garnier-Thiebaut), pour promouvoir une approche plus durable de la consommation.
L’affichage environnemental est en cours et permettra d’évaluer l’impact des traitements, de la teinture, de la confection et des transports. La chaîne de valeurs du textile y sera passée au crible. Cependant, la méthode de calcul est complexe à définir en raison de la complexité et de la fragmentation de la filière.
En France, la filière du linge de maison a souffert de la concurrence des produits asiatiques à bas coûts et les effectifs majoritairement situés dans le Nord de la France et dans les Vosges se sont fortement réduits. Toutefois, certaines entreprises ont misé sur l’export et la notoriété du « Made in France » pour se développer avec succès sur les marchés étrangers. Pour Fremeaux-Delorme et Pyrenex, l’export réalise ainsi respectivement 80% et 60% de leur chiffre d’affaires.
En adoptant un positionnement luxe haut de gamme et grâce à l’export, Garnier-Thiébaut a également réussi à se développer en France comme à l’étranger pour une clientèle de professionnels ou d’individus aisés. En février 2025, la société a acquis trois nouveaux métiers à tisser, permettant de réaliser des tissages très fins, adaptés aux exigences de l’hôtellerie de luxe et des établissements haut de gamme.
L’activité des entreprises s’est également adaptée à l’essor des ventes en ligne et des problématiques de coûts de l’énergie. Le linge de lit et le linge de maison figurent parmi les produits que les ménages français achètent le plus volontiers en ligne. Les ventes en ligne ont soutenu le marché en 2020 du fait des confinements et ont continué à progresser de 2021 à 2024.
Les achats en ligne permettent également d’accéder à une grande diversité de styles (coloris, imprimés, visuels, etc.) et de matières (satin de coton, lin, coton bio, soie, percale de coton, etc.) pas toujours présents en magasins.
Pour répondre à une nouvelle demande en lien avec les problématiques de coûts de l’énergie, Home Heritage a lancé en octobre 2022, une nouvelle gamme « Économie d’énergie » pour les chambres peu chauffées. L’industriel a déclaré avoir constaté un doublement de la demande de couettes chaudes pour particuliers, ainsi qu’une augmentation substantielle de la demande des collectivités. Les plaids ont également rencontré un grand succès entre 2022 et 2024.
Enfin, le secteur du linge de maison n’échappe pas à l’attention portée à l’environnement et les enseignes tentent de convaincre sur ce terrain important pour la jeune génération.
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