Sur la vidéo, le «spotteur» observe la scène et donne son ordre de tir. Kovalskiy appuie sur la gâchette, le coup part. S’ensuivent 9 longues secondes jusqu’à l’impact - une durée conforme à la distance, analyse un expert balistique dans le Wall Street Journal. Le soldat russe se plie en deux et tombe, tandis que les quatre autres militaires s’enfuient.
«Pour le tir de précision, il y a tellement de variables difficiles à quantifier qu’en réalité, tout ce qui dépasse environ 1300 mètres est plus une question de chance que de compétence», a expliqué Steve Walsh, un ancien instructeur de tireurs d'élite du corps des Marines, au WSJ.
L’Ukraine a introduit l’utilisation d’avions ultralégers A-22 pour intercepter les drones russes. Ces avions, relativement bon marché et faciles à piloter, sont équipés de tireurs d’élite qui abattent les drones ennemis en vol. Cette approche offre une solution économique et flexible face aux menaces aériennes, comblant les lacunes des systèmes de défense traditionnels souvent coûteux ou en nombre insuffisant.
Le concept d’utiliser un tireur d’élite à bord d’un avion ultraléger pour abattre des drones est une innovation tactique issue des efforts non conventionnels de l’Ukraine pour contrer les menaces aériennes russes. Dans une vidéo récente, on voit un tireur d’élite abattre un drone avec un fusil automatique depuis un A-22. Cette tactique répond à un besoin urgent de solutions efficaces et économiques face à la prolifération des drones de reconnaissance russes.
Les systèmes de défense aérienne traditionnels, tels que les systèmes de défense portables (MANPADS) et les systèmes de défense Patriot, sont soit en nombre insuffisant, soit trop coûteux pour être utilisés systématiquement contre des drones. L’acquisition et l’adaptation des A-22 pour la chasse aux drones représentent un investissement relativement modeste par rapport aux coûts des systèmes de défense aérienne avancés. Chaque appareil a été acheté grâce à des dons de volontaires, pour un montant d’environ 32 000 euros. L’équipement de ces avions avec des fusils Malyuk, largement utilisés par les forces spéciales ukrainiennes, ajoute une dimension supplémentaire à leur capacité d’interception. Le Malyuk, un fusil de conception bullpup, est compact et bien adapté aux espaces confinés du cockpit d’un A-22.
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Les drones russes jouent un rôle crucial dans la reconnaissance et le ciblage des infrastructures ukrainiennes. Lors des récentes attaques balistiques sur les bases aériennes ukrainiennes, des drones de reconnaissance ont été utilisés pour localiser les cibles pendant plusieurs heures avant de fournir les coordonnées pour les frappes de missiles. En réponse, l’utilisation d’avions ultralégers pour la chasse aux drones offre une défense supplémentaire contre ces menaces. Les patrouilles aériennes peuvent détecter et intercepter les drones avant qu’ils ne fournissent des renseignements cruciaux pour les frappes ennemies.
L’introduction des A-22 pour la chasse aux drones en Ukraine représente une avancée significative dans la défense aérienne. Cependant, cette stratégie présente également des défis. La précision requise pour abattre un drone en vol depuis un avion nécessite une formation extensive des pilotes et des tireurs. À long terme, le succès de cette initiative pourrait inspirer d’autres pays à adopter des solutions similaires pour leurs propres défenses aériennes. L’innovation ukrainienne dans l’utilisation d’avions ultralégers armés démontre comment des approches non conventionnelles peuvent combler les lacunes des systèmes de défense traditionnels. L’Ukraine continue de repousser les limites de l’innovation militaire pour défendre son territoire. L’utilisation d’avions ultralégers pour la chasse aux drones est un exemple frappant de cette ingéniosité.
Ce besoin tactique a été identifié et reconnu lors des guerres d’Irak et d’Afghanistan avec le designated marksman intégré à chaque groupe de combat US. Les Forces de Kiev bénéficiaient donc d’une tradition riche et multiple, essentiellement tournée vers la méthode nordaméricaine.
Les snipers reçoivent des missions d’observation, reconnaissance et renseignement, qui reposent sur leur mobilité et leur discrétion. Ils peuvent évidemment être utilisés pour exécuter des frappes sur les personnels critiques (officiers, spécialistes) et le matériel sensible, avec l’armement adapté. Ils ont également un emploi de harcèlement qui délivre des effets psychologiques sur l’ennemi.
Les deux camps ont multiplié le nombre de leurs snipers, chaque bataillon ukrainien disposant des siens et les unités russes cumulant une dotation organique du niveau de la section et des compagnies spécialisées pouvant être envoyées pour renforcer un axe d’effort ou accomplir une tâche particulière. La formation des personnels est l’apanage des officiers en Russie et les gouverneurs militaires sont responsables de l’équipement et de la préparation des troupes issues de leur circonscription. On voit donc des unités indépendantes être formées et entrainées, parfois avec l’appui direct des fournisseurs.
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Comme l’artillerie, le tir de précision a subi la « révolution des drones ». Il était déjà devenu courant que les tireurs emploient des caméras HD, des GPS et des tablettes/smartphone pour observer, enregistrer et transmettre. Les Marksmen ou TE travaillaient souvent seuls, aux ordres de leur hiérarchie organique qui devait procéder à une analyse opérationnelle à chaud pour diriger leurs tirs. Les Scouts ou TELD étaient généralement déployés sur ordre du commandement, sur une mission définie ou d’initiative, opérant en binôme traditionnel observateur/tireur, éventuellement regroupés dans des unités ad hoc temporaires.
L’équipe sniper aligne désormais trois, voire quatre personnels, avec un observateur, un tireur, un opérateur de drone, voire un responsable des liaisons avec les unités. Cette articulation ressemble un peu à celle d’une équipe des forces spéciales, la polyvalence étant cependant moindre. On peut considérer que la nouvelle organisation recoupe le concept de « complexe de reconnaissance/frappe » défini pour l’artillerie, à moindre échelle naturellement. Cela a toujours été de mise en théorie, mais l’intégration des snipers, y compris les scouts, est approfondie ; ainsi, la destruction de snipers ennemis pourra être confiée à l’artillerie ou à des munitions rôdeuses, grâce aux liens établis et aux possibilités de transmission ultra rapide de l’information que la technologie informatique autorise.
Les missions périphériques au tir (reconnaissance, observation, recueil de renseignement) demeurent ; les tirs connaissant un changement majeur, en reposant sur la recherche de la précision à longue, voire très longue distance. Il était généralement admis que le TP pouvait engager un torse jusqu’à 600 mètres, voire 800, et que le TE devait toucher jusqu’à 1800 mètres.
Pour l’anecdote, l’emblématique ghillie suit indispensable à tout film de sniper est peu prisée en Ukraine. Elle est jugée trop pénalisante pour les progressions, prompte à s’alourdir dans le terrain boueux et identifiant le sniper comme tel, ce qui l’expose à une frappe par lance-grenades, mortiers, artillerie ou drones rodeurs. L’usage de simples filets de camouflage individuel, de teintes et de surface adaptées, remplace avantageusement la lourde tenue de camouflage du sniper. En revanche, l’équipement qui s’est imposé est l’appareillage de vision thermique.
Les caméras thermiques ou appareils de vision nocturne se sont largement démocratisés et constituent un danger réel et permanent sur le champ de bataille. Les Ukrainiens considèrent que les Russes sont davantage dotés mais il existe de nombreuses vidéos prises dans les deux camps montrant des tirs efficaces grâce à ces moyens. Certaines lunettes de tir offrent une vision diurne et une option thermique, parfois avec un télémètre.
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L’Armée ukrainienne comme l’armée russe étaient initialement équipées d’une arme de précision semi-automatique datant des années 1960, tirant une munition de 1891. Léger mais long, il complétait de manière cohérente la panoplie à disposition des bataillons de fusiliers motorisés (BFM) soviétiques, qui déployaient le fusil d’assaut AK, le LRAC RPG-7 et bénéficiaient de la mitrailleuse lourde ou du canon mitrailleur et des dispositifs de visée, notamment nocturnes, de leurs véhicules, BTR et BMP. L’entrainement du tireur, souvent un conscrit, correspondait à ce cadre et ne répondait pas à la définition anglosaxonne du sniper imposé aux FAU après 2016.
Le fusil VSS Vintorez de calibre 9×39 était une arme silencée et munie d’une optique, de portée intermédiaire compte tenu de la balistique de sa cartouche, réputée « aplatir le tchétchène ». Parfois décriée, ce concept est pourtant à l’origine du développement des calibres .300 Whisper et des armes correspondant, en Occident. Le fusil russe présentait l’intérêt de faciliter l’autodéfense du tireur, notamment par rapport à un fusil de précision à verrou comme ceux préférés à l’Ouest et permettait des tirs précis et discrets.
Les forces de Kiev ont quasiment retiré le SVD de leur arsenal ; ils ont déployé à la place des fusils à répétition manuelle, à l’image des snipers US et britanniques. Longtemps ce type de fonctionnement offrait une précision supérieure à celle des armes automatiques, qui permettaient, elles, un doublé rapide, option explorée par les Français dés 1917 avec le FSA du même millésime.
Les Ukrainiens ont commencé leur transition avec ce type d’arme, des M24 SWS (sniper Weapon system) ayant été rendus disponibles lorsque l’US Army a adopté une extrapolation du fusil AR 10 (M 110). Kiev a élargi son arsenal grâce à des armes fournies par l’étranger : Dans le calibre .308 Winchester (adopté comme calibre OTAN en tant que 7,62×51) à côté des armes étatsuniennes on trouve des fusils italiens Victrix, des fusils canadiens CADEX, des fusil britannique Accuracy international fournis par les Pays Bas et les pays scandinaves, des fusils finlandais TRG ou autrichiens Steyr SSG. Kiev recourt aussi à sa production indigène. Les mécanismes de M24 sont montés sur des châssis ukrainiens Automat et les firmes fournissent des armes de précision sur le modèle occidental.
S’il n’est pas surprenant que Kiev ait choisi un calibre OTAN, plus étonnamment l’armée russe fait de même en adoptant le Lobaev LAR 10 (également copie de l’AR 10), ainsi que plusieurs armes à verrou, dans ce calibre dont le SV 98 de Izmash. Pour le tir à longue distance, le .308 est « limite » et les deux camps ont développé des armes nouvelles.
La société ukrainienne Snipex s’est spécialisée dans des « méga-calibres », ses fusils à verrou Alligator et T-Rex en calibre14,5×114 (celui du canon mitrailleur ou de la mitrailleuse lourde des blindés soviétiques) et le Monomakh est une version semiautomatique dans le même calibre, trouvant leurs racines dans les fusils antichars soviétiques PTSD et PTRS de la seconde guerre mondiale. Ces armes imposantes (deux mètres) s’inspirent également des fusils antimatériel Barrett M82 et M107 ou Mc Millan dans le calibre 12,7×99 (.50 BMG) dont Kiev a reçu plusieurs versions notamment des USA, des pays scandinaves. Des productions comparables (Wkw TOR) ont été remis par la Pologne et le Canada (LRT 50).
Le fusil Volodar Obriyu (seigneur de l’horizon) a permis le touché à la plus grande distance (3800 m) par un sniper du SBU en novembre 2023. Cette performance a été atteinte grâce à la cartouche de 12,7×114, un wildcat qui rétreint la munition de 14,5 mais conserve la charge de l’étui. Au-delà de la propagande, ces armes permettent donc des tirs très distants mais au prix d’une masse et d’un encombrement qui sont une véritable limitation tactique, n’étant adaptée qu’à une situation relativement statique, comme les combats positionnels.
Les calibres « lourds » évoqués supra permettent des tirs bien plus lointains. Mais plus que le 14,5mm ou le 12,7mm, les progrès ont portés sur l’adoption de calibre plus puissants que le .308 ou le 7,62 Mosine, mais moins pénalisant que 12,7 et au-delà. Le calibre .300 Winchester Magnum est ainsi décliné sur plusieurs fusils de sniper (dont le Barrett MRAD disponible en trois calibres et fournis à Kiev) ; c’est toutefois le .338 Lapua Magnum (8,6 x70 ou 8,58×70) qui est devenu un excellent calibre longue distance (au-delà de 1500 mètres).
Les forces russes ont compris la tendance et ont mis en service des armes offrant précision, allonge et gabarit tactiquement acceptable. Le modèle soviétique (proche du français) du tireur de précision intégré au groupe d’infanterie a été remis en cause et si cet appui direct existe toujours, des modalités spécifiques ont été développées pour le sniping spécialisé, à longue distance.
Cette réorganisation s’est accompagnée d’une remise à niveau des équipements et armements. Il s’agit d’un mélange de calibres indigènes et de calibres occidentaux. Ainsi, le fusil Lobaev VSL Stalingrad est chambré en .338 LM, et le DXL8 Havoc l’est en calibre 12,7×99. Le fusil OSV 96 est chambré dans le calibre 12,7×108 de la Mitrailleuse lourde Dshk, offrant un peu plus d’allonge et de puissance que son homologue occidentale 12,7×99. Le SVtch Tchoukavine a été développé par l’usine Kalashnikov ; c’est une arme semi- automatique, destinée au tir à 1000 mètres et plus, tirant parti des RETEX de Syrie. Il peut être chambrée en .338 LM ou en .308 Win, ou 7,62 Mosine.
Comme en Ukraine, l’industrie russe s’est penchée sur les meilleures réalisations occidentales, incluant les productions civiles Wildcat. Ainsi le Lobaev Sevastopol est proposé dans le calibre 408 CheyTac (cheyenne tactical). Ce calibre développé pour le fusil CheyTac M 200 (visible dans le film Shooter tireur d’élite de 2007) délivre plus de 11 000 joules (une cartouche de 9×19 atteint 450 Joules en moyenne) et permet des tirs jusqu’à 4000 mètres.
L’arsenal russe s’est également enrichi d’armes très spécialisées, comme le VKS Vykhlop à silencieux intégral, en calibre 12,7 x55, spécialement développé pour ce type de tir discret.
En conclusion provisoire, on observe des optiques de grossissement x4, x6 et même x8 sur les AK74N et les AK12 qui apparaissent. Parallèlement à l’accroissement du nombre de tireurs qualifiés
Année | Tireur | Distance | Arme | Lieu |
---|---|---|---|---|
2017 | Sniper canadien | 3 540 mètres | McMillan Tac-50 | Irak |
2023 | Vyacheslav Kovalskiy (Ukraine) | 3 800 mètres | MCR Horizon’s Lord | Kherson, Ukraine |
2016 (Entraînement) | Adjudant français | 4 150 mètres | - | - |
2017 (Entraînement) | Tireur russe | 4 210 mètres | - | - |
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