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Ce vendredi 27 janvier 2023, deux conférenciers historiens sont intervenus auprès des TG1 et des THLP, dans le cadre du cours de philosophie de Mme Claire Le Van pour le projet UNESCO « Persécutions et Résistances », afin de leur parler des persécutions et résistances qui se sont déroulées en Alsace à partir de l’Annexion de fait de l’été 1940.

L'Alsace sous le IIIème Reich

M. Jean-Laurent Vonau, professeur de faculté (re), spécialiste de l’histoire du droit, et membre de la SMLH d’Alsace du Nord - association partenaire de ce projet avec laquelle nous collaborons depuis plus de cinq ans - leur a expliqué que comme l’Alsace est devenue partie intégrante du IIIème Reich, les Alsaciens devaient se comporter en « Allemands loyaux », sous peine d’être considérés comme des « opposants au régime », et par suite, subir une oppression plus dure qu’en zone occupée, notamment au camp de redressement de Vorbruck-Schirmeck.

M. Vonau a présenté une carte avec la France divisée en quatre, en expliquant que le Haut-Rhin, le Bas-Rhin et la Moselle ont été annexés de fait au Reich en juillet 1940. Ce sont de ce fait les seules régions de France à avoir fait l'expérience du totalitarisme : elles ont été non seulement germanisées, mais aussi nazifiées, car il s’agissait pour Hitler de récupérer toutes les populations dites « de souche allemande » (Volksdeutsche).

L’idéologie raciste, précise-t-il, violemment antisémite, opère des hiérarchies au nom de la « pureté du sang » : seul le « sang allemand » est considéré comme « noble » ou « supérieur ». Une loyauté absolue est exigée des citoyens à l’intérieur du Reich, si bien que la résistance est durement réprimée.

La Jeunesse Alsacienne en Résistance

Ensuite M. Sébastien Soster, enseignant-relais au Mémorial de l'Alsace-Moselle de Schirmeck, grâce à notre partenariat avec les Archives d’Alsace, a évoqué « une jeunesse alsacienne en résistance - 1940-1943 », en présentant trois groupes de jeunes résistants alsaciens : La main noire, Les Pur-Sang et le réseau Adam. Pour chacun de ces trois réseaux, il a précisé leur composition et leur organisation, les motivations qui les ont poussés à agir, ainsi que la nature de leurs actes de résistance.

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M. Soster nous fait écouter un extrait d’interview de Jean-Jacques Bastian, dit « Franzmann » (le français), membre du réseau La main noire : « Nous étions choqués, il y avait des uniformes et des drapeaux nazis partout. Nous ne voulions pas de cette mentalité autoritaire. En tant qu’éclaireur au scoutisme, nous avions promis de servir Dieu et la Patrie, et non le Vaterland. Il fallait réagir. Avec Marcel Weinum, nous nous sentions français et nous n‘acceptions pas cette main mise. Nous avons monté des actions, avec un véritable arsenal à domicile. Mon action était notamment de déchirer des drapeaux ».

Dès le mois de septembre 1940, avec quelques amis et d’anciens élèves de la maîtrise de la cathédrale de Strasbourg, âgés de 15 à 18 ans, et issus de milieux modestes, Marcel Weinum organise l’un des premiers réseaux de résistance en Alsace. Le réseau, au départ, a mené des actions jugées être des « gamineries » par le Gauleiter Wagner (arracher des drapeaux, inscriptions dans la rue de slogans).

Le Gauleiter Wagner : "Le Bourreau de l'Alsace"

Le conférencier, auteur de l’ouvrage Le Gauleiter Wagner, le bourreau de l’Alsace, a montré en quoi ce haut dignitaire du parti nazi était une véritable incarnation du Mal, fanatique et sans scrupules. Le Gauleiter Wagner s’était engagé auprès de Hitler à « germaniser l’Alsace en moins de cinq ans ».

De 1940 à 1945, « le bourreau de l’Alsace » a réalisé l’annexion de fait de la région au IIIème Reich, ordonné l’incorporation de force de 100 000 « Malgré Nous » alsaciens, décidé l’exécution des évadés de Ballersdorf et des résistants de la Main Noire, organisé l’embrigadement des jeunes garçons et filles dans les organisations paramilitaires du RAD, soutenu activement les sinistres expériences menées par les médecins nazis sur des détenus du Struthof... Un effrayant bilan !

Nazi de la première heure et serviteur zélé de Hitler, le Gauleiter Wagner exerça un pouvoir sans partage, poussant l’idéologie nationale-socialiste à son paroxysme. Au printemps 1946, son procès et celui de ses complices mirent en émoi toute l’Alsace, sortie traumatisée de la guerre. Jamais Wagner n’émit le moindre regret. Au moment de son exécution, il s’écria : « Vive Hitler ! Vive l’Alsace allemande !

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Si le Gauleiter Wagner avait des pouvoirs exorbitants, ajoute le conférencier, un seul domaine lui échappe, celui des armées et de la police, c’est Himmler qui en a la haute main. La répression politique relève de la Gestapo (police secrète d’Etat) et du SD (Sicherheitsdienst - service de sécurité).

Dès juillet 1940, Gustav Adolf Scheel est devenu commandant de la police de sûreté (SIPO) et du service de la sécurité-renseignement (SD) en Alsace annexée (Befehlshaber der Sicherheitspolizei). En Alsace, une toile d’araignée oppressive est mise en place, en utilisant les services des Vertrauungsmänner (des hommes de confiance, ce sont des fonctionnaires qui travaillent de manière permanente pour repérer les insoumis), et des Zubringermänner (des hommes qui dénoncent occasionnellement les récalcitrants, toujours pour de l’argent…).

Il y a deux Kommandos de la Gestapo, l’un situé à Strasbourg, l’autre à Mulhouse. Un camp est créé dans la vallée de la Bruche pour briser la résistance politique dans le Bas-Rhin et le Haut-Rhin.

Le Camp de Redressement de Vorbruck-Schirmeck

Le camp de redressement de Vorbruck-Schirmeck va être aménagé dès le 6 juillet et sera opérationnel à partir du 13 juillet. « Plus qu’un camp de rééducation (Erziehungslager ou Umschulungslager), plus qu’un camp de triage (Auffanglager), ce Sicherungslager est un camp de sureté », précise le conférencier, « c’est le seul de l’univers concentrationnaire allemand, il devait rééduquer les réfractaires par la torture, la répression, voire la disparition… ».

Près de 15 000 personnes sont passées par ce camp entre le 13 juillet 1940 et le 23 novembre 1944, et au moins 500 d’entre elles sont mortes lors de cette détention. Le SS-Hauptsturmführer Karl Buck sera commandant du camp jusqu’à la fin, il est surnommé le « commandant à la jambe de bois » (en raison de sa blessure lors de la Première Guerre mondiale).

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Dans ce camp, les Häftlinge (les prisonniers) n’ont le droit de se déplacer qu’en courant, il faut courir sous peine de recevoir des coups. Les détenus étaient tondus à l’arrivée, puis leur crâne lisse était frotté à vif par des brosse à crins durs pour animaux, ensuite on leur mettait la tête dans des baquets d’eau froide.

Toute la résistance alsacienne est passée par le camp de Schirmeck. Il n’y a eu que très peu d’Alsaciens au Struthof. « Durant la guerre, rappelle le conférencier, les Alsaciens ne connaissaient que Schirmeck, et ils ignoraient l’existence du Struthof. C’était Schirmeck qui provoquait la terreur en Alsace, parce que l’on voyait, parfois, dans les villages, revenir des personnes amaigries, blessées, tuméfiées… ».

Ces rescapés de l’enfer répressif, réfractaires à l’Annexion de fait et à l’incorporation de force, prisonniers de guerre, résistants…, on les appelait les « Schirmeckler ».

M. Vonau déplore le fait qu’il ne reste aujourd’hui que peu de traces du camp de sureté, intégralement démonté, à l’exception du bâtiment de la « Kommandantur » qui date de 1943. Aujourd’hui propriété privée, une simple plaque apposée sur la façade rappelle la triste page d’histoire qui s’est écrite en ces lieux. Une stèle mémorielle a été posée à l’emplacement de l’ancien camp de Schirmeck en 2019.

Les "Malgré-Nous"

M. Vonau a précisé qu’en 1942, environ 130 000 Alsaciens et Mosellans ont été incorporés de force dans l’armée allemande, la plupart a été envoyée sur le front de l’Est et 40 000 sont morts. La mémoire des « Malgré-nous » est sensible encore aujourd’hui, notamment en raison du massacre d’Oradour-sur-Glane où une expédition punitive dans ce village de Haute-Vienne, à 15 km de Limoges, a eu lieu le 10 juin 1940, faisant 644 victimes civiles.

Parmi les Waffen-SS qui ont mené cette action, il y avait 13 incorporés de force alsaciens, de simples exécutants, dont une majorité n'avait pas tiré un coup de feu et était âgée, à l'époque des faits, de moins de dix-huit ans. Cette année a lieu le 70ème anniversaire du controversé procès de Bordeau, procès qui a condamné certains auteurs du massacre de ce village martyr (mais pas les commanditaires).

La Résistance Alsacienne

Le conférencier explique que la Gestapo fournit toutes les semaines un rapport à Berlin qui contient des informations secrètes, ne paraissant pas dans les journaux. Dès juillet 1940 des sabotages ont lieu, comme la dispersion de clous sur les routes, le fait de couper des lignes téléphoniques, mettre des morceaux de sucre dans les réservoirs d’essence, crever des pneus. « On parle peu de cette résistance inorganisée », précise M. Vonau.

« En 1943, par exemple, à Batzendorf (près de Haguenau), un projecteur anti-aérien des nazis a été saccagé, donc mis hors d’usage malgré les sentinelles qui n’ont rien vu. »

M. Vonau poursuit en mentionnant les filières de passeur. « Tout ce qui affaiblit l’ennemi constitue un acte de résistance. S’évader d’Alsace et rejoindre la France occupée était un acte d’opposition jusqu’au 12 novembre 1942, après, toute la France sera occupée, il ne sera dès lors plus la peine de traverser les Vosges, il faudra aller en Suisse ».

Théo Gerhardt est un résistant savernois qui a refusé l'annexation de l'Alsace, son père était chef de gare à Saverne. Théo avait une bonne connaissance des environs et en particulier de la forêt autour du Haut-Barr, ce qui lui a permis d’organiser une filière d'évasion.

Les Acteurs de la Résistance

Charles Mangold, à Périgueux, là où les Alsaciens ont été évacués ; René Fontaine qui est devenu « chirurgien du maquis » près de Périgueux, il a accueilli les blessés, il les a cachés et soignés. Deux autres médecins le suivront, mais décèderont : Schieffman et Schreiber. A Sarlat, Nessmann, est un médecin qui soigne les blessés et qui est à la tête du maquis.

Des incorporés de force font de la résistance. Jacques Knecht (Roberstau) déserte l’armée allemande dans la Drome et rejoint le maquis de l’Ardèche, mais est repris par les Allemands et sera fusillé comme résistant ; Pierre Michel, orphelin de Strasbourg (Neudorf), il n’a pas de famille, donc il peut s’engager librement, il ne met pas en péril sa famille.

Il est dans la Luftwaffe (défense anti-aérienne), son régiment est situé près de Chantilly : il y a une ancienne carrière de grès où les Allemands fabriquent des V1. Il veut déserter, va trouver le maire pour lui faire part de son intention, et lui demande des habits civils. Le maire va lui demander de rester pour être un agent infiltré qui va pouvoir fournir le plan complet de l’usine.

Il sera aidé par Georges Reiter (de Wisches, vallée de la Bruche), qui est un apprenti géomètre, donc pour lui faire des plans est chose aisée. Dès que le premier V1 est sorti de l’usine, le site est bombardé par l’aviation anglaise. Puis ce régiment se déplace en Belgique, où une nouvelle usine, cette fois pour V2, va être créée, à nouveau Pierre Michel donnera des informations aux résistants belges, ce qui permettra encore une fois à l’aviation anglaise de bombarder l’usine. Il n’a jamais été découvert et a survécu à la guerre.

L'Amicale de Tir Saint-Hubert de Wisches

Entre la commune de Wisches-Hersbach et l’Amicale de tir Saint-Hubert, c’est une longue histoire. Au début des années 1970, quelques passionnés de tir à la carabine, avec l’aval de la municipalité et du maire Joseph Huck, investissent une des caves voûtées de l’église. Emile Claire, Rémy Dieda, Robert Hoermann, Gérard Dangelser et Denis Emmelin se lancent ! Et, très vite, ils font des émules. A tel point que, quelques années plus tard, les locaux se révèlent trop exigus.

Jamais en panne d’imagination, les fondateurs de...

Victimes du Nazisme en Alsace
Catégorie Nombre
Alsaciens et Mosellans incorporés de force 130 000
Morts parmi les incorporés de force 40 000
Personnes passées par le camp de Schirmeck 15 000
Morts au camp de Schirmeck 500

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