L'histoire des établissements d'armement à Bourges est intimement liée à l'attachement de la ville à la nation et à sa défense. L'installation de la compagnie d'artificiers de Napoléon 1er en 1815 marque la naissance d'une compétence munitionnaire de la ville. Son ralliement à Napoléon 1er lors des «cent jours», comme sa lutte pour accueillir, en plus de deux régiments d'artillerie et d'un régiment d'infanterie, un escadron de cavalerie illustrent son profond attachement à la nation et à sa défense.
Le 12 juillet 1861, l'empereur Napoléon III décide l'installation des Etablissements militaires à Bourges. Le 30 juin 1860, Napoléon III approuve la décision d’installer, à Bourges : « un arsenal principal pour matériels neufs, un dépôt de matériels confectionnés et d'approvisionnement, une fonderie et une école de pyrotechnie avec polygone ». Cette décision est officialisée par la loi du 2 juillet 1861. Elle a été prise pour des raisons stratégiques ; les industries d'armement étaient auparavant souvent trop proches des frontières, donc trop exposées aux éventuels ennemis.
C'est à partir de 1845 que le rôle de Bourges a commencé à se préciser dans l'esprit du Ministère de la Guerre. La position stratégique de Bourges au centre de France présente des avantages au plan industriel. L'arrivée du chemin de fer en 1847 est un élément important. Dans le département du Cher, des forêts permettent de fournir du bois pour les affûts de canons et les fusils, et on y trouve aussi des forges réputées pour la qualité de leurs productions. Et des terrains disponibles à proximité de la ville peuvent permettre d'installer diverses activités. En 1853, c'est la création du polygone de tir et, en 1856, l'installation définitive d'une école d'artillerie. En 1861, un décret d'utilité publique facilitant les acquisitions de terrains à Bourges pour les Etablissements Militaires est publié.
En 1852, le prince-président Louis-Napoléon fait une visite à Bourges. Il y est reçu dans une ambiance de fêtes et de cérémonies qui favorisera les futures installations militaires à Bourges. Le 10 juillet 1862, l'empereur confirme la décision du 30 juin 1860 lors d'une nouvelle visite au cours de laquelle toute la ville témoigne sa reconnaissance par des arcs de triomphe à la gloire de l'empereur. La visite se déroule dans une extraordinaire ambiance de fête, mais sans inauguration … rien n'est encore sorti de terre !
Les implantations suivront ces décisions. Dans les années 1870, on commence la construction du grand arsenal, l'école de pyrotechnie est transférée de Metz à Bourges et enfin une commission d'expériences est créée.
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Les travaux de construction de la fonderie commencent en 1862 et s'achèvent en 1866. Le premier canon y sera coulé en mai et la fonderie prendra le nom de « Fonderie impériale de canons ». Cette fonderie moderne remplacera les fonderies de Strasbourg, Toulouse et Metz qui fermeront respectivement en 1864, 1865 et 1867. Elle perdra son titre « Impériale » après 1870 et deviendra « Fonderie de Bourges », puis prendra le nom d' « Atelier de Construction de Bourges » (ABS) en 1912.
La halle aux fontes, nom donné au principal bâtiment de cette fonderie, est prévue pour couler des tubes en bronze. Depuis 1866, la cadence de production augmentera sans cesse, mais, vers 1870, les tubes de canons seront en acier et il faudra repenser et modifier toute les installations. Le dernier matériel en bronze sera le 138 mm de Reffye, le premier matériel en acier sera le 95 mm Lahitolle.
A Metz, l'Ecole de Pyrotechnie militaire, fondée par une Ordonnance Royale du 19 mai 1824, formait les artificiers des corps de troupe. Ceux-ci étaient chargés de préparer les charges propulsives, les munitions des matériels d'artillerie et certains artifices. Bien qu'au cours du temps cet établissement ait commencé, avec l'évolution des matériels, à concevoir les divers éléments pyrotechniques et à les fabriquer en série, il continua à s'appeler « Ecole de Pyrotechnie ». Les élèves de l'Ecole étaient employés à ces tâches. Suite au Décret Impérial, l'Ecole de Pyrotechnie de Metz est transférée progressivement à Bourges à partir de 1867. Elle prend le nom de « Ecole Centrale de Pyrotechnie » (ECP) en 1870 pour bien marquer sa nouvelle situation au centre de la France.
L'ECP, destinée à l'origine à l'instruction, évolue rapidement vers les études puis les fabrications de fusées de guerre, de composants pyrotechniques et de munitions.
Pour procéder aux essais des armes et des munitions de l'Armée de terre, la Commission d'expériences est créée le 30 décembre 1871. La Commission s'installe, avec l'Ecole d'Artillerie et l'Etat-Major de l'Artillerie du 8ème corps d'armée, dans le bâtiment de la place Malus.
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Les dimensions du champ de tir, à l'origine de longueur 3 km, suivent l'accroissement de portée des armes d'artillerie. Le polygone atteint 12 km en 1914, 30 km en 1918.
Les établissements militaires sont fortement impliqués lors de la première guerre mondiale. A l'Atelier de Construction de Bourges, où l'on travaille jour et nuit, 8300 ouvriers assemblent quotidiennement plus de 40 canons de divers calibres, en particulier le canon de 155 GPF Filloux, créé en 1917, dont la portée eut un impact décisif sur l'issue de la guerre. A l'Ecole Centrale de Pyrotechnie, quelque 12 000 ouvriers et ouvrières produisent chaque jour 80 000 munitions d'artillerie, pour l'essentiel des munitions de 75mm, 40 000 fusées diverses, 700 kg d'explosif (fulminate de mercure). La population de Bourges passe de 46 000 habitants au début de la guerre à 110 000 en 1918.
L'activité militaire s'effondre quand vient l'armistice. Une partie de l'immense savoir-faire technique et industriel est utilisé à des fins civiles avant de connaître à nouveau une période de mobilisation totale à l'approche du 2e conflit mondial. Pendant cette période, l'ABS étudie et réalise des tubes pour canons anti-aériens qui seront installés sur des affûts fixes ou mobiles ainsi que des canons antichars et diverses munitions.
Les productions sont interrompues à l'arrivée des troupes allemandes. Le personnel est replié dans les établissements du sud de la France (Tarbes, Tulle, Roanne et Châtellerault). Tout ce qui peut être récupéré (parc machines, bâtiments, matériaux stratégiques...) est démonté et transporté en Allemagne par l'armée allemande.
Après la guerre, les locaux détruits sont reconstruits et de nombreuses installations nouvelles sont aménagées. Une partie des machines sera rapatriée après l'armistice. La reprise est vraiment effective en 1950 lorsque l'ABS se voit confier la réparation des chars, puis l'étude et la fabrication du canon 75/50 du char AMX 13, les obusiers de 105/50, tracté et automoteur, et de 155 BF/50.
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Les écoles d'apprentissage de l'ABS, de l'ECP puis de l'EFAB forment, dans les métiers de la pyrotechnie et de l'usinage des métaux, des ouvriers hautement qualifiés appréciés dans toutes les entreprises de la région. La promotion sociale est assurée grâce à des cours de formation générale et technique. Après concours, les ouvriers peuvent accéder à des formations de technicien, et même d'ingénieur, dispensées dans les écoles de la Direction des Armements terrestres.
En 1967 trois établissements, l'Atelier de Construction de Bourges (l'ancienne fonderie), l'Ecole centrale de Pyrotechnie et l'Atelier de construction de Mulhouse sont regroupés et prennent le nom d'Etablissement de Fabrication d'Armement de Bourges (EFAB) qui deviendra successivement Centre de Bourges de GIAT Industries en 1990, et Nexter établissement de Bourges en 2006.
La fonderie de canons, également connue sous le nom d'établissements militaires, est actuellement un centre de formation et un établissement administratif. Elle est située au 1 ter-11 boulevard Lahitolle, Bourges.
Depuis Napoléon premier, Bourges est considéré comme emplacement stratégique pour installer une production d’armement. Mais c’est seulement en 1845 que Bourges abrite pour la première fois un dépôt d’artillerie. En 1853, c’est la création du premier polygone de tir. En Avril 1860 Napoléon III décide d’implanter les “Établissements militaires” à Bourges avec la Fonderie impériale de canons dont les premières pièces sortent en1867 sous l’impulsion de l’ingénieur Henry Perrier de Lahitolle. En 1870, une l’École centrale de pyrotechnie s’implante à Bourges.
Date | Événement |
---|---|
1815 | Installation de la compagnie d'artificiers de Napoléon 1er |
1845 | Bourges abrite pour la première fois un dépôt d’artillerie |
1847 | Arrivée du chemin de fer à Bourges |
1853 | Création du premier polygone de tir |
1860 | Décision de Napoléon III d'implanter les "Établissements militaires" à Bourges |
1862 | Début des travaux de construction de la fonderie de canons |
1866 | Achèvement des travaux de la fonderie et premier canon coulé |
1867 | Transfert progressif de l'École de Pyrotechnie de Metz à Bourges |
1870 | L'École centrale de pyrotechnie s’implante à Bourges. |
1871 | Création de la Commission d'expériences |
1912 | La fonderie prend le nom d'Atelier de Construction de Bourges (ABS) |
1967 | Regroupement de l'ABS, l'École centrale de Pyrotechnie et l'Atelier de construction de Mulhouse en EFAB |
1990 | EFAB devient Centre de Bourges de GIAT Industries |
2006 | Nexter établissement de Bourges |
Plusieurs explosions accidentelles ont marqué l'histoire du Polygone de Bourges. Le samedi 2 novembre 1907, une explosion terrible se produit sur la route de Crosses, faisant sept morts et plusieurs blessés. Les victimes étaient des militaires et un ouvrier civil. D'autres explosions avaient déjà eu lieu en 1890, 1898 et 1899, mais le drame de 1907 fut particulièrement cruel. Une stèle aux victimes est érigée au cimetière des Augustins à Bourges.
D’abord l'explosion du 10 octobre 1890, elle fera quatre victimes. Celle du 7 mars 1898 fera deux morts et plusieurs blessés. L'explosion du 18 mars 1899 fera deux morts et deux autres succomberont à leurs blessures. Puis c’est l'explosion du 2 novembre 1907. Elle sera suivie le 2 juillet 1914 d’une autre explosion causée par un orage. L'explosion du 18 septembre 1915 fera encore un mort. Enfin, il y a l'explosion du 20 août 1946 dans les carrières du Château avenue de Dun ; le bilan sera de dix morts parmi les ouvriers chargés du désamorçage des bombes entreposées pendant la deuxième guerre mondiale…
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