Fondé en 1966 à Oakland (Californie), le Black Panther Party se définit comme un mouvement révolutionnaire de libération afro-américaine.
Nés en octobre 1966, Les Panthères s'étaient d'abord constituées en groupes d'autodéfense. Aujourd'hui, le parti compte, dans toutes les grandes villes américaines et sur les campus, quelque 5000 membres rigoureusement sélectionnés, qu'inspirent de plus en plus Mao et Che Guevara.
Leurs jeunes élèves scandent à tue-tête "Power to the people" ("Le pouvoir au peuple"), et les maîtres prêchent maintenant la révolution. "Seul le socialisme marxiste peut ouvrir l'avenir aux Noirs", nous dit leur tribun, M. Eldridge Cleaver, "ministre de l'information" exilé à Alger âgé de 33 ans, dont une dizaine en prison pour attaques à main armée.
Les Panthères ont ouvert cet été, dans les ghettos, des "liberation schools", écoles où ils servent la nourriture spirituelle avec le petit-déjeuner.
Nul n'a su mieux que l'auteur noir Eldridge Cleaver décrire la fascination qu'ont tout de suite exercée les "Panthères noires" sur la jeunesse humiliée des ghettos lorsqu'ils sont apparus, il y a trois ans.
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Inspirant la peur aux Blancs, l'homme noir recouvrait sa dignité. L'un de leurs leaders, Bobby Seale, nous avait dit, il y a dix-huit mois : "Nous nous appelons Panthères noires parce que la panthère est un animal qui n'attaque que pour se défendre."
Mais cette peur s'est retournée contre les Panthères.
Bardés d'armes et de cartouchières, leurs caves pleines de bombes et tout de noir vêtus, les membres du Black Panther Party, organisation noire et premier mouvement marxiste révolutionnaire des Etats-Unis, inquiètent.
M. Edgar Hoover, premier policier d'Amérique, veut mater les Panthères noires. Car le groupuscule armé - devenu parti - refuse l'intégration des Afro-Américains dans la société capitaliste américaine, et prône l'émancipation par la violence.
Aussi les enferme-t-on. En trois mois, 150 membres du parti, dont 40 responsables, ont été emprisonnés. Leur chef, M. Bobby Seale, 32 ans, secrétaire général et fondateur, a été arrêté le 19 août, accusé de complicité dans le meurtre du "Panther" Alex Rackley.
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Trouvé mort après d'atroces tortures, brûlé à la cigarette, ébouillanté et percé de coups de pic à glace, Rackley a été assassiné, selon la police, pour trahison.
Ces derniers mois, le FBI a pris d'assaut plusieurs locaux du Black Panther Party, saisissant archives et argent. Une brigade spéciale vient d'être formée au ministère de la Justice pour enrayer ce que M. Edgar Hoover, chef du FBI, appelle "la plus grande menace pour la sécurité des Etats-Unis".
Les Panthères noires crient au coup monté. "C'est une répression fasciste, dit à L'Express Robert Scheer, rédacteur en chef de la revue Ramparts, organe des jeunes révoltés américains. Pour arrêter Bobby Seale, cinquante fédéraux, fusil d'une main, pistolet de l'autre, ont fait irruption dans un mariage hippie. On aurait cru qu'ils cherchaient [le gangster de la Grande dépression] Dillinger ou Al Capone."
En quelques mois, vingt-huit de leurs militants ont été abattus par la police, affirme leur avocat de San Francisco, M. Charles Garry. Leurs chefs sont en prison ou en fuite, comme Eldridge Cleaver, réfugié en Algérie.
Fred Hampton, président des Panthères noires de l'Illinois, parlait la langue de la violence, mais il était tout, sauf violent. Il avait été condamné, en mai, sous une accusation ridicule : deux ans de prison ferme pour vol de 710 chocolats glacés dans une camionnette en stationnement.
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Aux journalistes qui assistaient à son procès, il avait dit en riant : "J'ai beau être grand et fort, vous ne me voyez quand même pas déguster toute cette crème?" Il lui fallut attendre la fin de juin pour obtenir le droit de faire appel et de retourner dans son appartement du West Side de Chicago.
Il y a été abattu à la carabine et à la mitraillette par quatorze policiers en civil, le 4 décembre, une heure avant le lever du jour. Fred Hampton avait 21 ans.
Le Dr Victor Levine, ancien médecin légiste de Chicago, auquel les Panthères noires ont demandé de pratiquer l'autopsie du corps de Hampton, rend ce verdict : "Il a été tué pendant son sommeil."
Mais, avec les provocateurs et les indicateurs de police, des criminels s'infiltrent dans toutes les sections du mouvement, et quand celui-ci veut les rejeter, ils vont à la police et témoignent contre leurs anciens camarades.
Un journal de San Francisco publie un de leurs tracts qui dit : "Un bon flic est un flic mort." M. Edgar Hoover, directeur du FBI, a beau jeu de voir en eux "la plus grave menace pesant sur la sécurité intérieure des Etats-Unis".
Quand celle d'Oakland tire, celle de San Diego, à l'autre bout de la Californie, se dit qu'elle peut y aller à son tour. La répression atteint Los Angeles, Chicago, Kansas City, Seattle, New York.
Les Panthères n'ont pu ni attaquer ni se défendre. A vrai dire, sur l'ensemble du territoire des Etats-Unis, ils ne comptent guère plus de 3000 membres. Mais une sorte d'émulation saisit la police.
Beaucoup de jeunes Noirs américains, en désespoir d'intégration, approuvent les Panthères. Mais de plus âgés croient encore au développement du capitalisme noir, et les condamnent.
C'est un juge noir, M. Sidney A. Jones, qui a envoyé le leader des Panthères noires de l'Illinois en prison pour cinq ans. Il était accusé d'avoir volé 710 cornets de glace pour les distribuer aux petits Noirs de Chicago. "Je ne pouvais le laisser courir, a dit le juge. Il prêchait la révolution."
En dépit de sa jeunesse, Fred Hampton était très populaire parmi les Noirs, et même parmi les étudiants blancs, nous dit notre correspondant à Chicago, Jerry Demuth.
Maintenant, des parlementaires, des intellectuels, des prêtres commencent à s'interroger. Ils commencent à comprendre que tout cet exotisme et ces poses bravaches n'étaient que ceux du ghetto, où la violence exerce une grande attraction sur les jeunes.
C'est en adoptant leur langage que les Panthères essayaient de leur offrir une autre issue que le désespoir et le crime, une idée d'un programme et d'une action politique plus concrète que leur phraséologie révolutionnaire ne le donne à croire. Et ils avaient beaucoup appris depuis la fondation de leur mouvement à l'automne 1966.
Ces jeunes, ont perdu l'espoir de l'intégration raciale depuis longtemps, et ils croient venu le moment d'une impitoyable répression contre les Noirs.
Au même moment, cependant, une flambée de sympathie se lève pour eux à travers les ghettos d'Amérique. Une partie de l'opinion blanche s'émeut. Il y a eu, comme le dit un journaliste noir de Washington, "un mort de trop".
Pourtant, mardi, un phénomène nouveau est apparu à Chicago. "Des milliers de Noirs et de Blancs défilent devant le cercueil de Fred Hampton à l'église baptiste de Melrose Park, écrit Jerry Demuth. Il y a beaucoup de jeunes, mais aussi des ménagères, des ouvriers, des postiers.
La mort de Hampton a unifié la communauté noire, et, surtout, j'ai compté 30 % de Blancs aux services religieux célébrés à sa mémoire. Pas seulement des étudiants et des hippies, mais aussi des personnes plus âgées, appartenant à tous les milieux."
Événement | Date | Conséquences |
---|---|---|
Fondation du Black Panther Party | 1966 | Montée en puissance du mouvement |
Arrestation de Bobby Seale | 19 août | Accusation de complicité dans le meurtre d'Alex Rackley |
Assassinat de Fred Hampton | 4 décembre | Indignation et unification de la communauté noire |
Répression du FBI | 1969 | Arrestations massives et affaiblissement du parti |
Traquées par le FBI, les "Panthères" se disloquent à partir de 1971.
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