Dans les années tumultueuses du XXe siècle, alors que l’art cherchait sans cesse à redéfinir ses frontières, Niki de Saint Phalle émergea avec une vision audacieuse et révolutionnaire.
L’artiste qui a réalisé cette toile, est connue pour ses monumentales nanas. Niki de Saint Phalle est autodidacte, engagée, féministe. Elle fait partie du groupe des Nouveaux-Réalistes, fondé par Yves Klein un an avant. Ce mouvement est une nouvelle approche de la réalité, un recyclage poétique de l’espace urbain. Les nouveaux réalistes utilisent des palissades, des barils ou même des détritus dans leurs œuvres.
Pour réaliser cette œuvre, elle ouvre le feu sur une toile enduite de plâtre et recouverte d’objets. Des poches remplies de peinture sont disposées sur la surface. Dès lors que les balles percent les bulles, les couleurs s’échappent et se rependent sur la toile. Ce processus de création, qui laisse une grande place au hasard en laissant couler la peinture, n'est pas sans rappeler la technique du dripping de Jackson Pollock, artiste qui compte parmi les influences de Niki de Saint Phalle. Un clin d’œil à la technique du dripping de Jackson Pollock, que Niki de Saint Phalle admirait beaucoup. Elle le dit elle-même “La peinture était la victime” mais “Qui est la peinture ? Papa ?
Ces tirs sont d'abord réalisés avec ses amis, puis en public et les spectateurs eux-mêmes sont invités à participer et à faire "saigner la peinture". À l'origine des Tirs, on trouve Portrait of my Lover, un premier tableau-assemblage composé d'une chemise et une cravate volées à son amant, et d'une cible figurant sa tête, sur laquelle les spectateurs étaient invités à jeter des fléchettes. La couleur dégouline, blessure faite au tableau. Sur les images figuratives sont accrochées des poches de peinture. Le tir au plomb les éclate au hasard; le tableau pleure.
Le 12 février 1961 débute la grande série des tableaux-tirs. Citons, en 1962-1972, La mort du patriarche ; en 1962, Pyrodactyl de New York/The New York Alp, 250 x 310 x 30 cm, Galerie de France, Paris. L’idée est de « faire saigner une peinture en lui tirant dessus27 ». Elle prépare des reliefs de plâtre sous lesquels étaient de la peinture, de l’œuf et d’autres substances colorées. Les premiers tirs ont lieu dans un terrain vague, impasse Ronssin à Paris, avec une carabine de fête foraine, plus tard avec un 22 long rifle. Niki incite tout le monde à tirer, hommes et femmes. Parmi eux, le critique Pierre Restany, qui invite Niki à être membre du groupe des « nouveaux réalistes » qu’il a fondé.
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Une anecdote emblématique de cette période nous transporte lors de l’une de ses premières performances publiques. Lors d’une exposition à la galerie J à Paris, en février 1961, Niki invita le public à participer à l’acte créatif en tirant eux-mêmes sur ses œuvres. Parmi les invités, des artistes renommés comme Robert Rauschenberg et Jasper Johns se prirent au jeu, transformant cette performance en un événement collectif et festif.
Lors d’une autre performance mémorable au Moderna Museet de Stockholm en 1966, Niki de Saint Phalle érigera un mur entier de cibles à détruire. Cette installation, spectaculaire par son ampleur, attirera une foule nombreuse et fascinée. Les spectateurs, armés de carabines, participaient à la destruction créative de l’œuvre, chacun contribuant à l’explosion de couleurs et de formes.
Les « Tirs » ne furent pas seulement des performances spectaculaires, mais aussi des réflexions profondes sur le rôle de l’artiste et de l’acte créatif. Pour Niki de Saint Phalle, tirer sur la toile était une manière de se libérer de ses propres démons intérieurs, de canaliser sa colère et sa douleur en un geste cathartique. Niki de Saint Phalle poursuivit cette série de « Tirs » jusqu’au milieu des années 1960, avant de se tourner vers d’autres formes d’expression artistique, telles que ses célèbres « Nanas » et ses sculptures monumentales. Ces premières œuvres sont non seulement féministes et engagées (en tirant sur ces tableaux, elle tire sur les injustices sociales que subissent les femmes à l'époque), mais également autobiographiques et salvatrices (Son père l'a violée alors qu'elle avait onze ans ; par le tir, elle cherche à se réparer de la violence subie).
Couple fusionnel dans la vie comme dans la création, Niki de Saint Phalle et Jean Tinguely ont fait de leur lien amoureux un moteur artistique. Quand Niki de Saint Phalle rencontre Jean Tinguely, elle a 25 ans, des dessins plein les poches et des rêves de chapelles et de jardins extraordinaires. Lui ne rit pas, il l’écoute, et lui dit cette phrase qu’elle n’oubliera jamais : "Le rêve, c’est tout. Jean Tinguely, c’est l’énergie brute, l’instinct de la machine et le feu de la sculpture en mouvement. Niki de Saint Phalle : la couleur, l’intuition, les récits symboliques et mythologiques. À deux, ils forment un duo électrique. Tout au long de leur vie, l’amour indéfectible qu’ont éprouvé Niki de Saint Phalle et Jean Tinguely l’un pour l’autre a été placé sous le signe de l’admiration mais aussi du défi.
Titre de l'Œuvre | Année | Description |
---|---|---|
La mort du patriarche | 1962-1972 | Tableau-tir |
Pyrodactyl de New York/The New York Alp | 1962 | Tableau-tir, 250 x 310 x 30 cm |
Tir | 1961 | Réalisée le 26 juin 1960 impasse Ronsin à Paris |
Portrait of my Lover | 1961 | Tableau-assemblage avec une chemise, une cravate et une cible |
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