Réalisation: Alvin Rakoff (1924) est un réalisateur et producteur réputé, à la télévision mais aussi au théâtre. Il réalisa neuf adaptations de pièces pour The Armchair Theatre.
Alors que Le Saint (1962-1969) approchait de son terme, le producteur Robert S. Baker eut l'originale et audacieuse idée de roder sa future production en intégrant ses principaux codes à un épisode de sa série alors en cours. Cette expérience en grandeur nature permet de retrouver dans Le Roi un grand nombre des identifiants du futur Amicalement vôtre. Ces convergences (duo vedette anglo/américain rivalité débouchant sur l'amitié, la course de voitures, la bagarre, l'aventure sur la Riviera…) s'avèrent hautement plaisantes à découvrir, de même que la persistance de différences de traitement.
Le succès de l'épisode favorisa grandement l'élaboration de The Persuaders !, Baker bénéficiant ainsi d'une parfaite maquette et d'un argument de poids lui permettant de convaincre Lew Grade, dirigeant historique d'ATV, de développer le projet.
L'épisode se montre aussi intéressant parce ce qu'il annonce d'Amicalement vôtre que par le miroir distordu qu'il nous présente concernant ce qu'il aurait pu advenir de cette série. Le personnage de Rod Huston manifeste ainsi considérablement moins de subtilité et de charme que Danny Wilde. Outre son allant et son énergie, ce dernier développera toujours une vraie finesse, qui ne trouve ici aucun correspondant.
Huston se cantonne à une caricature sans nuances de l'Américain vu par les Anglais, plus spécifiquement du Texan. Chapeau de cowboy que ne désavouerait pas J.R., expressions et onomatopées de western, frime continuelle et sans subtilité, importance de l'argent que l'on jette à la face du monde, agressivité continue… Le personnage amuse un court moment puis sature très vite, tant il se montre limité. Ses dialogues désespèrent par leur insigne pauvreté. Ce sentiment se renforce par le jeu terriblement pesant de Damon.
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Rien à voir non plus avec la pétillante fantaisie de Tony Curtis, on se limite ici à un démonstratif perpétuel et jusqu'au-boutiste, épuisant rapidement la bonne volonté du spectateur. Il ne s'agit d'ailleurs pas vraiment d'une surprise, Alexandra Bastedo volant régulièrement la vedette à ses deux champions de collègues masculins.
Un autre piège que saura éviter The Persuaders ! réside dans le duo asymétrique qui nous est ici présenté. Sans que l'on puisse parler pour autant de faire-valoir, Huston demeure une simple curiosité de cet épisode, en aucun cas un partenaire d'égal à égal avec Templar, assez logiquement d'ailleurs dans le cadre du Saint. Cet aspect s'avère cependant particulièrement souligné tout au long de l'épisode.
En tous domaines (hormis la force brute) Simon domine outrageusement l'Américain. Il le bat régulièrement au jeu, connaît un succès nettement supérieur avec les demoiselles et s'exprime en parfait français (Moore convaincant en VO), tandis que son compagnon d'aventure se montre satisfait de bredouiller quelques mots. C'est également bien entendu le Saint qui dirige l'enquête, prenant toutes les décisions alors que Huston n'émet que de mauvaises idées.
La participation concrète de ce dernier se limitera d'ailleurs à ses poings, son suivisme reste absolu jusqu'à la conclusion. Ceci n'entache d'ailleurs que modérément la réussite de l'épisode, un opus du Saint se construisant toujours autour de Roger Moore. Ce dernier manifeste ici sa classe coutumière, brillant par son charme raffiné, sa présence physique et l'humour affuté de ses fines réparties. Un pur régal, Le Roi apparaissant comme une invite à redécouvrir sa propre série !
Simplement, au ressort comique consistant à ridiculiser l'un des deux partenaires réduit à la portion congrue, on préfère l'écriture plus riche et ambitieuse d'un duo antagoniste mais équilibré.
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En effet, si plusieurs scènes de Premier Contact se reconnaissent ici, leur réalisation transparait considérablement plus modeste. La fastueuse course poursuite tourne court ici, de par la rareté des décors extérieurs. Les quelques aperçus naturels ne font d'ailleurs qu'aviver cette sensation, le passage ayant été tourné, comme tant d'autres, dans les bois se situant près de studios d'Elstree.
Si la campagne anglaise est toujours aussi superbe, il s'avère difficile de l'assimiler à la Côte-d'Azur, malgré la mise en place de quelques dérisoires palmiers… L'astuce utilisée pour consacrer la victoire du Saint se montre d'ailleurs amusante, illustrant au passage que Simon Templar demeurera plus canaille que Lord Sinclair. L'omniprésence du tournage en studio, malgré des inserts globalement bien intégrés, se perçoit d'autant plus que les décors du Saint manifestent toujours cette même patine Sixties que l'on aime bien mais aussi une évidence nettement supérieure à ce que connaîtra Amicalement vôtre.
D'autre part l'épisode développe son intérêt propre, en dehors de sa nature de prologue à Amicalement vôtre. L'intrigue apparaît solidement bâtie, maintenant l'intérêt sans temps mort. Elle joue habilement des lieux leur (usine, casino, yacht) pour entretenir l'action, tandis que la mise en scène réussit plusieurs plans astucieux mettent bien en valeur les comédiens. Le mode de tricherie de Boris manifeste beaucoup d'astuce, de même que la contre-mesure de Flambeau, tout cela reste parfaitement ludique.
L'ensemble ne se départit certes pas de cette revigorante naïveté propre aux années 60 (personnalité du Roi, professeur décidant d'inspecter une usine en pleine nuit, Templar tombant encore et toujours sur ses ennemis pile au bon moment etc.) mais on apprécie cette fraicheur disparue de nos jours. Tout comme plus tard The Persuaders !, mais aussi Chapeau Melon, Le Saint n'hésite pas à recourir à de savoureux clichés, cet épisode évoquant la France par l'accordéon et l'emblématique 2CV. Cette promenade de l'Anglais (et de l'Américain) sur la Côte d'Azur, évoquant parfois l'épisode Tueurs à Gages des Avengers, nous vaut d'ailleurs une multiplication d'accents et d'expressions français particulièrement savoureux.
Tout comme plus tard Amicalement vôtre, mais également de nombreuses productions du temps, Le Roi nous vaut enfin le plaisir de redécouvrir ces comédiens si appréciés dans Chapeau Melon. Ils sont d'ailleurs particulièrement nombreux ici ! Paul Stassino réalise une solide composition, évoquant le Yacob Borb du Décapode. Si son personnage demeure un simple rouage de l'intrigue, il parvient à lui apporter une vraie présence. Il en va pareillement pour Jeremy Young.
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Aux antipodes de la diabolique mariée d'Une petite gare désaffectée, Isa Blair incarne une pétulante et charmante jeune femme. Son délicat accent français séduit mais elle résulte à peu près inopérante sur l'intrigue, rejoignant la cohorte des damoiselles en détresse alors si fréquentes. Un point commun avec Amicalement vôtre, faisant ressortir la spécificité des Avengers… Mais l'atout maître de l'épisode réside dans le formidable abatage une nouvelle fois manifesté par Ronald Radd, aussi truculent et en roue libre que dans Le Point de Mire ou Mission très improbable. Ses expressions et son accent français outré (on croirait Suchet dans Poirot, en VO) rajoutent encore à l'hilarité du personnage.
Evènement assez rare, l'épisode fait référence à un réel pays, Boris étant désigné comme ex-roi de Slovénie. Dans le Décapode, la Yougoslavie se voyait ainsi intitulée « République des Balkans », un Royaume de Yougoslavie (également nommé Royaume de Serbie, Croatie et Slovénie) exista bien durant l'entre-deux guerres. Son dernier souverain, Pierre II et non Boris, fut déposé en 1945.
Les inserts publicitaires apparaissaient déjà dans les séries télé des années 60. On s'aperçoit que Janine lit un numéro de Paris match, un élément astucieux pour planter l'ambiance française. Le magazine a été lancé en 1949. La une fait référence à l'évènement d'une opération à cœur ouvert ainsi qu'à un petit garçon pleuré par la France. Il s'agit du numéro 975, paru le 16 décembre 1967. La première transplantation cardiaque vient d'être réalisée par le chirurgien sud-africain Christiaan Barnard.
Rod Huston évoque étrangement Rock Huston, alors que cet acteur fut un temps envisagé pour incarner Danny Wilde. L'usine porte comme dénomination « Cartes Descartes ». L'intrigue ressemble à celle de Enjeux, le sixième épisode de la première saison de Mission Impossible (1966). Un tyran projette d'envahir un état voisin, riche en pétrole. Pour l'en empêcher, l'équipe de IMF va le ruiner au baccara, le privant ainsi des fonds nécessaires au conflit (et non pas à un coup d'état comme pour Boris).
Contrairement à Casino Royale pour le poker holdem, l'épisode a l'élégance de consacrer un bref moment à la présentation des règles du baccara, ce qui permet aux non initiés de comprendre ce qui se passe à la table de jeu. Ce jeu à sabot, proche du chemin de fer, est très présent dans les casinos du monde entier. Client régulier, James Bond aura l'occasion de le pratiquer dans Dr No (scène d'ouverture), ou dans Goldeneye, cette fois non pas confronté à Sylvia Trench mais à Xenia Onatopp. Templar a lui droit à Boris et à Rod.
À propos de ce rôle elle déclare : I remember very clearly having to have a fight with Diana Rigg. And I was really terrible at fighting, and the poor fight arranger was saying "oh God, this woman's useless." But that was very much a cult thing to be in. I was only ever in that one, I think lots of people did several, but I just did the one.
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