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Les critiques de cinéma et de livres sont fréquentes dans les médias, notamment dans des publications comme Télérama. Ces critiques peuvent aborder une variété de sujets, allant des drames sociaux aux comédies, et peuvent même toucher à des questions de société plus larges.

Les Pistolets en Plastique de Jean-Christophe Meurisse est une œuvre inclassable, une comédie noire qui ose s’aventurer là où peu de réalisateurs osent aller. Le film s’inspire de l'affaire Dupont de Ligonnès, tristement célèbre en France, mais la traite avec une légèreté insolente, transformant le macabre en un terrain de jeu absurde. Cette approche peut déstabiliser, mais elle reflète une certaine fascination pour ces faits divers, ces mystères irrésolus qui nourrissent l'imaginaire collectif. Ici, l’assassin devient une légende moderne, et Meurisse exploite cette obsession pour construire une œuvre qui surprend à chaque instant.

Un Film qui Bouscule les Conventions

Dès les premières minutes, le ton est donné : un mélange d’humour grinçant et de situations décalées qui fait mouche. La scène d’ouverture, avec une autopsie sur fond d'une chanson de Véronique Sanson, prépare le spectateur à l'inattendu. Léa et Christine sont obsédées par l'affaire Paul Bernardin, un homme soupçonné d’avoir tué toute sa famille et disparu mystérieusement. Le film, en plus de son scénario déjanté, regorge de références cinématographiques qui raviront les amateurs du genre. On ne peut s’empêcher de penser aux Nuls, tant Les Pistolets en Plastique joue sur l’humour absurde et irrévérencieux.

La bande sonore est un point fort, un mélange d’absurdité et de nostalgie qui renforce le caractère décalé du film. C’est un élément central qui accentue le côté loufoque des situations, transformant chaque scène en une caricature savamment orchestrée. Le casting est un autre atout majeur. On y retrouve une galerie d’acteurs remarquables, certains dans des rôles secondaires qui marquent durablement. Si des visages bien connus comme Vincent Dedienne ou Jonathan Cohen apportent leur touche d’humour, ce sont des acteurs moins médiatisés comme Laurent Stocker et Delphine Baril qui volent la vedette. Leur jeu intense et sans retenue donne au film une dimension théâtrale, poussant chaque scène à l’extrême de l’absurde.

Un Scénario Audacieux et Irrévérencieux

Le scénario, quant à lui, est un modèle d’audace. Inspiré de faits réels, il n’hésite pas à déformer la réalité pour la rendre plus extravagante. Ce duo improbable, composé de Léa et Christine, est à l’image du film : imprévisible, sans complexe, et irrésistiblement drôle. Elles sont le fil conducteur d'une aventure qui s'amuse des codes du thriller, de la satire sociale et du burlesque. En effet, ici, c’est Paul Bernardin qui a zigouillé toute sa famille pour ensuite mettre les voiles on ne sait où. Les Français se passionnent pour l’affaire dite Bernardin et deux enquêtrices amatrices se rendent sur les lieux du crime pour trouver des indices. Pendant ce temps, les médias annoncent son arrestation à l’aéroport de Copenhague. Bon, même en brouillant les pistes, il est facile, même pour un non connaisseur de la véritable affaire, de voir en quoi l’intrigue du film reprend à l’identique les quelques rebondissements de la tuerie de Nantes. C’est même d’ailleurs un point positif jusqu’au dernier tiers du récit puisque l’on prend plaisir à recoller les morceaux entre la réalité et la fiction.

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Faire de l’affaire Dupont de Ligonnès un véritable objet de cinéma, quel programme ! C’est Jean-Christophe Meurisse qui s’en charge, avec toute la folie qui caractérise son cinéma depuis Apnée (2016). Quand Oranges sanguines a débarqué sur les écrans de cinéma français, beaucoup se sont demandés qui était l’olibrius derrière ce long-métrage fantasque et extrême. D’aucuns le comparent même à Quentin Tarantino pour sa façon de tordre le cou au septième art, son usage de vieux standards comme bande originale de son film, son goût prononcé pour la violence et les guests de luxe.

Un Film à Sketchs Grinçant et Provocateur

Les Pistolets en plastique prend le contre-pied - et on pouvait s’y attendre vu le pedigree du cinéaste ! - de tous les documentaires, téléfilms et autres séries déjà produits sur le sujet. L’affaire n’est qu’un prétexte pour une succession de sketchs aux personnages hauts en couleur. Cela commence fort avec une séquence de dissection où Fred Tousch et Jonathan Cohen ne semblent pas prendre la mesure de ce qu’ils sont en train de faire, et cela se poursuit avec des séquences hilarantes d’interrogatoires totalement lunaires avec l’extraordinaire Anne-Lise Heimburger ou le danois Thomas Landbo, ou du comique de situation révélant au passage Delphine Baril. Il n’y a pas de doute, le film se créé sa propre identité et, pour une affaire aussi connue que celle de Ligonnès, ce n’est pas une mauvaise idée d’avoir emprunté cette voie-là. Seulement voilà, très rapidement le long-métrage démontre son manque de cohésion. Le récit est éclaté, choral, certes, toutefois il manque un liant à l’ensemble qui puisse empêcher Les Pistolets en plastique de rester un simple film à sketchs. On comprend la légèreté avec laquelle Jean-Christophe Meurisse compose mais on ne peut s’empêcher de penser que son film aurait gagné à être soit plus resserré, moins dispersé, chapitré à la manière de Pulp Fiction (Quentin Tarantino, 1994) par exemple. En l’espèce, pour peu que l’on reste insensible devant certaines scènes - interminable séquence de visio entre deux policiers franchouillards joués par Aymeric Lomperet et Vincent Dedienne et trois flics danois - on risque de potentiellement s’ennuyer voire de décrocher. On comprend même là où veut en venir le réalisateur : cette succession de portraits est assez grinçante pour révéler les aberrations de notre époque.

Si Les Pistolets en Plastique s'inscrit dans une veine comique, il n'en reste pas moins une satire acerbe de la société. La manière dont Meurisse aborde le fait divers et la fascination qu'il suscite est révélatrice d'une société en quête perpétuelle de sensationnel. Le réalisateur tourne en dérision cette obsession du public pour les affaires criminelles, et en particulier pour l'affaire Dupont de Ligonnès, qui depuis plus de dix ans fascine la France. Il interroge, en creux, cette propension à glorifier les criminels ou à chercher des réponses là où il n’y en a pas. Enfin, Les Pistolets en Plastique ne serait pas aussi marquant sans son humour noir omniprésent. Jean-Christophe Meurisse a su transformer un drame familial en un spectacle drolatique, presque irréel, où l’horreur se mêle au burlesque dans une danse macabre irrésistible.

C'est un cinéma qui fait du bien par son côté libérateur, une bouffée d'air frais dans un paysage souvent conformiste. Jean-Christophe Meurisse, avec son style unique, s’impose une nouvelle fois comme un réalisateur à part, capable de provoquer le rire là où on ne l'attend pas. Certains pourraient reprocher au film son manque de cohérence, ses digressions ou l’étirement de certaines scènes. Mais c’est aussi ce qui fait la force du film : cette capacité à surprendre à chaque instant, à déstabiliser le spectateur. Meurisse ne cherche pas à faire un film policé, mais une œuvre libre, sans entraves. Et cela se ressent à chaque plan, dans chaque réplique ciselée et insolente.

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