À chaque Olympiade, aux côtés des disciplines classiques, il y a des sports invités comme cette année le breaking. Au début de l'histoire des Jeux, les organisateurs avaient beaucoup de liberté et d’imagination pour proposer des épreuves qui nous semblent aujourd'hui un peu fantaisistes. Ainsi de 1900 à 1920, on pouvait voir l'épreuve du tir à la corde, mais aussi des concours de pêches à la ligne et de montgolfière. Certaines, jadis incontournables, nous semblent aujourd'hui désuètes ou insolites. Plusieurs épreuves olympiques ont marqué les débuts des JO avant de disparaître.
Les défenseurs des animaux seraient sans doute sur les dents si cette discipline existait encore. Le tir aux pigeons est apparu lors de l'édition parisienne en 1900. La règle du tir au pigeon vivant est très simple : il faut tuer le plus de pigeons possible. Le tireur est éliminé s'il rate deux fois d'affilée sa cible.
Le 5 août 1900, au bois de Boulogne, 34 concurrents se présentent sur le pas de tir dont le Belge Léon de Lunden. Il fait un score parfait : il touche 21 pigeons en 21 tirs. Il remporte la médaille d'or.
À la fin de l'épreuve, le champ de tir est digne d'une scène de film d'horreur : 300 pigeons ont été abattus. Il y a du sang, des plumes qui tourbillonnent dans l'air et des femmes en larmes dans le public. L'historien Andrew Strunk rapporte dans un article l'état du champ de tir à la fin de l'épreuve, dans une vision où « les oiseaux estropiés se tordaient sur le sol, le sang et les plumes tourbillonnaient en l'air et les femmes assises à côté sous leurs ombrelles étaient en pleurs.
Cette épreuve ne laissera pas de trace, le Comité international olympique, ne la reconnaît pas. « Une compétition fut organisée pendant les Jeux olympiques de Paris en 1900. La série de tirs était interrompue dès que le tireur avait manqué son deuxième pigeon. Près de 300 pigeons furent utilisés pour cette compétition dont les résultats ne sont pas inclus dans la liste officielle des résultats olympiques du CIO ».
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Un tireur à Issy. Ce Tir aux pigeons a été créé fin XIXe-tout début XXe dans les Hauts d’Issy, encore campagnards à l’époque, par la maison Gastinne-Renette, célèbre armurier parisien. La société française baignait alors dans une ambiance de préparation militaire, perceptible dans la presse, à l’école ou dans les sociétés sportives.
Le Tir aux pigeons occupait un vaste terrain situé entre la rue d’Erevan (anciennement rue du Plateau) et la rue de l’Egalité. L’entrée donnait sur la rue d’Erevan (aujourd’hui, zone du marché) et les tirs se pratiquaient dans le sens sud-nord (de la rue de l’égalité vers une zone boisée en contrebas, le long du boulevard Rodin). Bien sûr, de hautes palissades en bois protégeaient le voisinage, de plus en plus important avec la vague de construction lancée après la Première Guerre mondiale. Le gestionnaire du lieu était un certain M. Carte de 1900.
La presse donne, dans les pages sportives, les résultats des concours organisés à Issy par les sociétés de tir. « Tir aux Pigeons. Société Le Biset- Voici les résultats des dernières réunions au stand d'Issy : 1re poule (un pigeon handicap). 1. comte Zamoyski et docteur Doyen, 10 sur 10 ; 2e poule (un pigeon 27 mètres). 1. M. E. Labiche et docteur Doyen, 7 sur 7.
«Tir aux pigeons. La Société Le Faisceau (Faisceau des combattants, Faisceau des corporations, Faisceau universitaire) s'est réunie au tir aux pigeons Gastinne-Renette, à Issy-les-Moulineaux. Résultats : Prix 3 pigeons, 25 et 28 m. 1. M. Armengaud, 3 sur 4 ; 2. Ex-aequo, MM. René Gastinne et Serrière, 2 sur 4. Les poules ont été gagnées par MM. Armengaud, E. Lefranc, Rousseau et Serrière.
Avec le temps, le tir se pratique sur pigeons d’argile, notamment aux Jeux olympiques de 1924, qui sont à nouveau organisés à Paris. Les épreuves de tir aux armes de chasse - inscrits pour la dernière fois au programme des J.O. - ont lieu à Versailles (pour le tir sur cerf courant) et à Issy-les-Moulineaux (pour le tir aux pigeons).
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La presse se fait l’écho de la préparation de l’équipe de France : « La Fondation nationale de tir aux armes de chasse (25 bis, rue Decamps, Paris-XVI) prie les tireurs français pratiquant le tir sur pigeons d’argile de vouloir bien s'inscrire chez M. Gastinne-Renette, 38, avenue Emmanuel-III, pour prendre part aux trois réunions d'entraînement olympique qui se tiendront au stand d'Issy-les-Moulineaux, les lundi 12 mai et lundi 2 juin 1924, à 14 h.
Après ces deux réunions d'entraînement olympique, il sera fait un classement des meilleurs tireurs, pour participer à l'épreuve éliminatoire du lundi 21 juin, à la suite de laquelle sera constituée l'équipe française chargée de représenter la France aux Jeux olympiques dans la compétition sur pigeons d'argile, qui se tiendra à Issy-les-Moulineaux, du 3 au 10 juillet 1924.
24 ans plus tard, en 1924, la grande fête olympique revient à Paris, entre le 5 et le 27 juillet 1924. Non pas sur des pigeons vivants comme c’était encore le cas en 1900, mais des pigeons d’argile. Entre le 21 et le 29 juin 1924, quatre nations sont engagées dans l’épreuve disputée au stade des Epinettes. Les Américains remportent l’épreuve par équipes devant le Canada et la Finlande. Victoire du Hongrois Gyula Halasy dans l’épreuve individuelle.
Jean-Baptiste Merlino (ci-contre), qui habitait rue de la Défense, se rappelle que, malgré la clôture du terrain, les plombs de chasse retombaient au-delà, dans les rues avoisinantes et dans la partie boisée descendant jusqu’au boulevard Rodin. Dans les années 1950, les enfants pénétraient par des ouvertures ménagées dans la palissade et les garçons ramassaient souvent des morceaux de pigeons d’argile et des douilles. Le Tir aux pigeons était un club « chic » et les enfants étaient ravis de voir passer de belles voitures dans le quartier. Quelle surprise pour M Merlino de voir un jour passer Jean Gabin (à gauche) !
Aujourd’hui, il ne reste plus rien du stade des Épinettes, où se déroulèrent les épreuves, car le site fut enseveli lors de la catastrophe du 1er juin 1961. Ce jour-là, à la limite de Clamart, en bordure de la rue Courbarien, plusieurs maisons et des immeubles, construits en partie sur d’anciens puits et carrières de craie utilisés jusqu’en 1925 pour la fabrication de la chaux de Meudon, ainsi que six rues et le stade, s’effondrent en quelques instants, sous l’effet de pluies diluviennes. Bilan : 21 morts, une cinquantaine de blessés et 200 sinistrés.
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En natation, la course d’obstacles dans la Seine consiste à nager 200 mètres . Mais l’originalité c’est qu’il faut escalader un bateau, en parcourir sa longueur, replonger, puis passer sous la coque d'une péniche pour ensuite terminer la course ! En 1900, l'épreuve se déroule entre Courbevoie et le pont d'Asnières. Les nageurs doivent faire avec les bateaux qui continuent de circuler.
Toujours en 1900 - on est très imaginatifs à l'époque - on pratique le saut en hauteur, en longueur et le triple saut mais sans élan ! C'est l'américain Ray Ewry qui remporte l'or dans les trois épreuves la même journée. Il est surnommé l'homme caoutchouc. Il saute 3m21 en longueur, 1m65 en hauteur et 10m58 en triple saut.
Concours d’artillerie au bois de Vincennes, course à dos d’âne, saut en longueur à cheval sans élan, lancer de pierres, courses en ballons (dont le vainqueur atterrira à Kiev et se fera tirer dessus par des soldats russes!), concours de manœuvres de pompes à incendie, concours de colombophilie, lancer d’œufs périmés par-dessus un mur de fortune avec rattrapage de l’autre côté à l’aide d’une épuisette, port de bidons à bout de bras sur la plus longue distance possible, voilà quelques-unes des 477 épreuves farfelues qui se déroulèrent à Paris pendant de longues semaines en ce début de 20 -ème siècle.
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