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L'importance de l'armement à l'époque napoléonienne

Pour vaincre et parcourir les pays conquis de capitale en capitale, les simples piques révolutionnaires ne suffirent pas. L’Empereur, tributaire du passé, ne put jamais faire améliorer le système d’armement hérité de l’Ancien Régime. L'on comprend mieux comment.

Les manufactures d'armes sous la Révolution et l'Empire

L’époque révolutionnaire amène une désorganisation de la production des armes. D’autres manufactures voient le jour sous la Révolution, principalement dans le centre de la France. Placées loin des frontières, elles disposent de ressources variées, tant en énergie (rivières et charbon), qu’en matières premières (métaux, bois’). Ces établissements sont gérés par des entrepreneurs bailleurs de fonds. Ils sont surveillés par des officiers d’artillerie, inspecteurs et capitainesadjoints.

L'attention de Napoléon à la production d'armes

Le détail de la fabrication des armes, le fonctionnement des manufactures d’armes, l’accroissement de la production, l’amélioration de la qualité des produits fabriqués préoccupèrent Napoléon, dès le Consulat. La preuve de ce souci nous est donnée par les nombreux rapports d’inspection conservés aux Archives Historiques de la Guerre à Vincennes. Gassendi, officier d’artillerie réputé, fut le compagnon d’armes du jeune lieutenant Bonaparte au régiment de La Fère, à Auxonne et à Valence.

Conditions de travail dans les manufactures d'armes

Les rapports d’inspection, complétés par des documents provenant des archives départementales, révèlent le sort des ouvriers. La durée du travail nous est connue : douze à quatorze heures par jour, coupées de pauses longues. Le labeur garde une cadence artisanale. Les congés hebdomadaires sont respectés. Les salaires sont très variables : le régime de l’entreprise obligeant l’ouvrier au travail à la pièce, ce salaire est lié au devis établi préalablement.

Statut des ouvriers

Jouissant avant la Révolution de « privilèges », comme celui d’échapper au recrutement ou même d’avoir à loger les hommes de troupe, les ouvriers seront assimilés sous la Révolution et l’Empire au soldat, soumis à la conscription, passibles de punitions militaires.

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Reconnaissance des ouvriers méritants

Un contrôleur de platines de la manufacture de Saint-Etienne, Jean-Baptiste Javelle, se voit proposer au rang de chevalier de la Légion d’Honneur. A cette proposition, le général Devau ajoutait que soit accordée la pension afférente à cette décoration quand elle est accordée à titre militaire. Il rappelait que la faveur d’une décoration était autre. «… L’ancien gouvernement accordait une stérile mais belle médaille qu’ils portaient à la bouton.

L'enseignement technique et la formation des ouvriers

Les conditions d’apprentissage dans ces manufactures sont particulièrement intéressantes ; l’Assemblée Législative, puis surtout la Convention se préoccupèrent de l’enseignement technique dans le but de former des spécialistes aptes à la fabrication des armes. On encouragea la création des « Ecoles Normales », terme alors employé pour désigner ces établissements. L’oeuvre de Lakanal, alors à la tête de la manufacture d’armes nouvellement créée à Bergerac, est méritoire. Les instructeurs chargés de cet enseignement technique portent le nom « d’instituteurs ». La mère d’un jeune garçon prend la défense de son fils, apprenti à la manufacture de ClermontFerrand, accusé par ses chefs de négliger son travail.

Évolution des techniques et productivité

L’évolution des techniques de fabrication pendant cette période fait ressortir les notions de rendement et de productivité. Le général Devau avait loué à Saint-Etienne le contrôleur Javelle pour l’invention d’un tour à polir les canons de fusils.

Production annuelle d'armes

Une étude complète de la production annuelle des armes ne peut guère être envisagée que pour la période impériale, de l’an X à 1811. Les notes manuscrites contenues dans les archives du général Gassendi, à Vincennes, donnent de très nombreuses précisions.

Conditions de vie et protection sociale des ouvriers

Une loi votée par l’Assemblée Législative le 19 août 1792 prévoyait l’organisation de retraites pour le personnel des manufactures d’armes. En 1806, l’administration impériale fait effectuer des enquêtes pour connaître la situation des ouvriers âgés travaillant dans les manufactures d’armes, afin que puisse être appliquée la loi de 1792. A Maubeuge, le nombre total d’ouvriers de la manufacture d’armes est de 589 en 1802 et de 838 en 1810. Parmi les ouvriers, l’un a 81 ans, il est entré à la manufacture en 1739 ; né en 1725, il avait commencé à travailler à 14 ans. A cet état est jointe une lettre émouvante de la main d’un grand homme de coeur qui a senti la misère de ces ouvriers, Drouot, le futur général, celui que ses compagnons nommeront « le Sage de la Grande Armée ». J’ai l’honneur d’adresser à Votre Altesse l’état des ouvriers ayant plus de 20 ans de services dans les manufactures. J’ai l’honneur de supplier V.A. Des maladies spécifiques atteignent certains ouvriers. Cette classe d’ouvriers serait déjà éteinte sans la conscription ; il a été fait quelques essais pour les préserver de cette mort prématurée ; mais ils ont été tous infructueux. Il serait nécessaire que S.E. Dès 1819, Klingenthal est transférée à Châtellerault.

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Les industries d'armement pendant les guerres de l'Empire

Entre 1803 et 1815, période marquée par les guerres incessantes entre la France et les 3e, 4e, 5e 6e coalitions s'il semblerait que les industries d'armement aient été privilégiées et les fabricants assurés d'écouler leur production avec régularité et sans délais. Dans la réalité, les choses ne se sont pas présentées aussi simplement. Sur le plan économique, si l'Empire hérite d'une situation déjà clarifiée par les années consulaires, il subsiste encore bien des difficultés de tous ordres. Le rythme des fabrications continue à subir le contre-coup d'événements sur lesquels les fabricants n'ont pas de prise. Pour eux les conditions d'évaluation et de prévision des besoins des armées se présentent de la même façon qu'en temps de paix. En effet, l'Empereur se garde bien d'annoncer ses intentions précises en politique extérieure, mise à part une phraséologie pacifique destinée surtout à l'usage interne afin de rassurer les Français. D'ailleurs il n'est pas maître de la paix ou de la guerre.

L'Autriche, en 1805, puis la Prusse et la Russie en 1806 ouvriront les hostilités sans prévenir et les opérations menées tambour battant n'entraînèrent pas de grosses commandes à l'industrie. Napoléon utilise trois sources d'approvisionnement pour l'armement de ses troupes.

  • Les manufactures d'Etat : Versailles, Tulle, Saint-Etienne, Liège et Turin pour les fusils, Kligenthal pour les baïonnettes, Douai, Indret, Ruelle, Le Creusot, Saint-Gervais pour les canons et cette liste n'est pas exhaustive.
  • L'industrie privée ; les de Wendel d'Hayange par exemple fourniront des boulets de canon et des essieux d'affûts et d'avant-trains.
  • Les magasins et arsenaux de l'ennemi qui seront les principaux pourvoyeurs de la Grande Armée en ce qui concerne l'artillerie.

En 1805 après la prise de Vienne, les artilleurs trouvent dans l'arsenal de la ville plus de 2 000 canons. Après la victoire d'Iéna les places fortes de la Prusse, Magdebourg notamment, livreront des stocks de bouches à feu qui enrichiront le parc d'artillerie de l'Empereur. Qu'il y ait eu surabondance est amplement prouvé par la construction de la Colonne Vendôme qui représente un surplus de bronze que l'on peut chiffrer avec précision. Depuis 1805 les canons autrichiens de 6 livres de boulet sont utilisés par les artilleurs français. Dans ces conditions il ne reste plus aux fondeurs français que la fourniture des boulets de fonte. Si les de Wendel en fabriquent une grande part et si les bénéfices réalisés à cette occasion sont pour eux bienvenus, ils n'atteignent pas le volume que ces métallurgistes seraient en droit d'attendre de la vente de canons à l'Etat.

Notons toutefois que cette production entraîne moins de risques de rebut et se caractérise par un rythme de fabrication plus régulier et plus facile à contrôler sur le plan technique et commercial, ce qui implique une marge bénéficiaire plus grande. Dans ces conditions on comprend facilement que les commandes à l'industrie privée n'aient pas été aussi considérables de 1805 à 1810 qu'on pourrait le croire au premier examen. Ont-elles été plus importantes pour les manufactures d'Etat ? Les chiffres sont toujours sujets à caution, mais en ordre de grandeur environ 200 000 fusils ont été livrés entre 1800 et 1819 (compte tenu des fusils refaits). La moyenne annuelle de production des manufactures d'Etat est donc faible comparée au potentiel atteint par les ateliers de Paris (relevant de l'industrie privée) qui, sous la Révolution, sont arrivés à fabriquer 240 000 fusils en un an (1793-1794). Ces ateliers ont certainement réduit leur activité sous l'Empire puisqu'en 1815, après le retour de l'île d'Elbe, il fallut les remettre énergiquement en route dans l'espoir de les voir remonter au niveau de production qu'ils avaient atteint sous la Révolution.

Paradoxalement c'est en 1811, année de paix qui suit le mariage de Napoléon avec Marie-Louise, que se font les grands armements. Le budget militaire effectue un véritable bond en avant, passant de 503 millions (1810) à 640 millions. En 1812 les dépenses militaires prévues s'élèvent à 710 millions et en 1813 le total de 817 millions est atteint. Reste à savoir si la part de ces dépenses réservée à l'armement a entièrement profité à l'industrie de l'ancienne France ou si elle a été répartie entre les pays qui composent le Grand Empire de 1810. Nous savons que la crise de 1810 en France a pu être conjurée dans la deuxième moitié de 1811, mais nous ignorons l'influence que les dépenses militaires ont eu sur le cours des événements en ce qui concerne l'industrie du fer. A première vue il est difficile de se prononcer. Les métallurgistes ont évité la crise parce qu'ils en étaient restés au stade pré-industriel. Il semble donc qu'ils aient maintenu un niveau de production suffisant sans que celui-ci ait accompli après 1811 un bond spectaculaire.

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Dans un domaine précis les commandes militaires de l'Etat ont été un stimulant : la fabrication des canons de fonte de fer pour la flotte d'Anvers. Mais ce n'est pas l'industrie privée qui en a bénéficié directement. Pour approvisionner le parc de canons de la Marine à Anvers Auguste Perrier a créé la fonderie de Liège en 1803, mais elle a été mise en régie directe par Napoléon en 1804 et dès lors il faut la considérer comme un établissement d'Etat. En 1810 son potentiel de production dépasse 2 000 canons par an. Les Constructions Navales très actives sous l'Empire ont été surtout confiées aux arsenaux de l'Etat. Quelques vaisseaux ont été construits à l'entreprise, mais ils constituent plutôt une exception à la règle. En résumé les industries d'armement dans le secteur privé ont été moins privilégiées qu'on pourrait le penser.

Pour les industriels, les bénéfices ne semblent pas s'être élevés en proportion des opérations de guerre toujours plus importantes, s'effectuant sur des théâtres toujours plus étendus. Les métallurgistes ont surtout profité du blocus continental et du protectionnisme qui en découlait pour maintenir leurs entreprises sans investir de façon massive. On n'assiste pas encore au décollage d'une puissante industrie du fer. Pour les fabrications d'Etat la courbe suit une ascendance modérée, car les établissements n'utilisent pas leur potentiel au maximum en raison de la stricte économie que l'Empereur est obligé de maintenir sur le plan financier durant tout son règne.

Le fusil d'infanterie modèle 1777

Le fusil d'infanterie modèle 1777, conçu par l'ingénieur Jean-Baptiste Vaquette de Gribeauval, est l'arme principale du fantassin. Il est produit initialement à la manufacture d'armes de Charleville dans les Ardennes, puis au cours de l'Empire, aux manufactures impériales de Saint-Étienne, de Roanne, de Tulle, de Maubeuge, de Versailles, de Mutzig, de Culembourg en Hollande et de Turin en Piémont. Sans la baïonnette, il mesure 1,515 m et pèse, à vide, 4,5 kilogrammes. Il s'agit d'un mono-coup à chargement par le canon, qui tire à la vitesse de 420 mètres par seconde des balles sphériques de 16,54 millimètres pesant 27,2 grammes, cela à raison de deux à trois tirs par minute. Sa portée peut atteindre 250 mètres (100 à 150 mètres en pratique). Il est réputé pour sa robustesse.

Autres modèles de fusils et d'armes

Défini par le réglement du 7 juillet 1786, sa version simplifiée en 1792 (dite "numéro 1") est produite à 6000 exemplaires jusqu'en 1800 et sert jusqu'en 1810. Il mesure 1,065 m à 1,082 m selon les lots et pèse, à vide, environ 3 kilogrammes. Il s'agit là encore d'un mono-coup à chargement par le canon. De calibre 17,1 mm, il tire des balles sphériques pesant 29 grammes. Dès les premières années de la Révolution, cet ancien modèle est remis en service avec quelques modifications, sous le nom de "modèle n°1". Long de 402 mm pour une longueur de canon de 230 mm, pesant 1,220 kilogramme, il est fabriqué par paire afin que les cavaliers puissent garnir les deux fontes de leurs selles, à la Manufacture de Libreville [nom de Charleville lors de la période révolutionnaire]. Il s'agit d'un mono-coup à chargement par le canon, qui tire des balles sphériques en plomb de 16,5 mm (poids: 27,2 g), cela à raison de deux à trois tirs par minute. Cette évolution, qui outre Charleville sera produite à 80 000 exemplaires jusqu'en 1808 dans les manufactures de Maubeuge, Saint-Etienne, Versailles, Tulle, Mutzig et Turin, est un peu plus courte (352 mm de long, canon de 207 mm) et légèrement plus lourde (1290 g). Sa principale amélioration consiste en un système permettant de maintenir le canon de façon plus ferme.

Les armes destinées à équiper les combattants sont pour l'essentiel fourbies par la manufacture d'armes blanches de Klingenthal en Alsace. Le sabre est, sur le champ de bataille ou sur mer, une arme particulièrement efficace, létale ou vulnérante tant en coups de pointe (estoc) qu'en coups de taille.

Le sabre "briquet"

Rendu règlementaire sous l'Ancien Régime (1767), le sabre dit "briquet" à lame courbe équipe initialement les grenadiers, puis sera en dotation chez les sous-officiers, les caporaux, les soldats des troupes d'élite, les tambours et musiciens, ainsi que les fourriers. Plus tard il équipe la Garde Consulaire puis Impériale. Le modèle 1767, qui possède une lame plate de 59,5 centimètres de long, à flèche légère, large de 3,6 cm au talon. La monture est en laiton moulé, en deux parties, avec deux demi-oreillons supérieurs. Le modèle de l'an IX (1801) possède une lame pouvant être plus longue (59,5 à 62 centimètres), un peu moins large au talon (3,38 à 3,5 cm). La monture possède 36 cannelures. Le fourreau, toujours en cuir noir, se voit ajouter deux garnitures en laiton et une chape à pontet. Le modèle an XI voit le nombre de cannelures diminué à 28, tandis que la forme du quillon est différente de la précédente. Le sabre briquet de la Garde Impériale : mis en dotation en 1804, il est plus long que le précédent (68 à 69 centimètres) et présente une monture différente. La lame comporte un large pan creux sur chaque face, afin de l'alléger. La monture en laiton possède une poignée en bois recouverte de basane et filigranée.

Armes d'officier et sabres de mamelouks

En ce qui concerne les armes d'officier, il n'existe en pratique aucun modèle réglementaire. Les mamelouks de la Garde Consulaire puis Impériale sont dotés d'un sabre à lame courbe, à l'orientale, délivré par la manufacture de Versailles (la lame étant forgée à Klingenthal). Sa poignée en bois est recouverte de basane ; sa monture est en laiton, à calotte arrondie et percée (sur les sabres du Ier type) pour le passage de la dragonne, la garde à oreillons possède deux quillons droits à pans boulés ; la lame courbe est à dos plat et à contre tranchant. Le fourreau en bois est recouvert de basane en cuir et garnitures en laiton ; sa chape est ouverte sur le dos pour aider le passage de la lame. Le modèle 1811, manufacturé à Klingenthal, possède une garde en fer noirci à la poix, une coquille pleine constituée d'une tôle d'acier, un quillon en forme de palmette à cinq reliefs, une calotte et une poignée en bois de coupe octogonale gainées de tôle. Sa lame à un pan creux a une largeur de 37 millimètres au talon, et une longueur de 67,8 centimètres. Le fourreau est en cuir avec deux garnitures en laiton. Le poids du sabre est de 1,018 kilogramme, celui du fourreau de 265 grammes.

Lances des chevau-légers polonais et hollandais

Le 1er régiment de chevau-légers polonais de la Garde impériale, créé en 1807, se voit doté deux ans plus tard d'une lance de 2,75 mètres, constituée d'un fer plat de 38 centimètres à double tranchant, muni d'une boule arrêtoir, enmanché dans une hampe en hêtre noirci, laquelle se termine par un sabot de 10 centimètres ; sous le fer est fixée par trois vis une flamme rouge et blanche. En 1810, est créé le 2ème régiment de chevau-légers lanciers de la Garde (surnommés "lanciers rouges"), composé essentiellement de Hollandais, qui se voit lui aussi doté d'une lance similaire. En 1811, les chevau-légers lanciers se voient dotés d'un nouveau modèle de lance, dit "à la française" ; longue de 2,65 mètres, elle se compose d'un fer plat de 21,6 ce.

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