Qui dit début des rencontres à élimination directe, dit retour des tirs au but ! En effet, ce samedi, les huitièmes de finale de la Coupe du monde 2022 font leur apparition. On pourrait donc avoir quelques séances de tirs au but dans les prochains jours. Mais alors, quelle est la plus longue de séance qui a eu lieu en Coupe du monde ? Réponse dans cet article !
C'est certainement le moment le plus stressant pour tous les supporters... La séance de tirs au but fait son retour pour les rencontres à élimination directe de la Coupe du monde 2022.
L'idée est née en 1968, après plusieurs rencontres difficiles à départager. Pour ça, il faut remonter à 1968. À cette époque, les règles du foot sont loin de celles qu’on connait aujourd’hui et les tirs au but n’existent pas encore, ce qui complique la désignation d’un vainqueur en cas d’égalité.
Avant que la séance de tirs au but ne devienne la norme pour départager les équipes, le football disposait d'un ensemble de solutions pour résoudre les matches nuls, dont aucune n'était entièrement satisfaisante. Dans les compétitions à élimination directe, les matches qui se terminaient par un match nul après les prolongations devaient souvent être rejoués un autre jour. Ce système était compliqué d'un point de vue logistique et, dans les tournois à calendrier serré, tout simplement impraticable.
Dans certaines compétitions, en particulier les tournois internationaux dont le calendrier est limité, d'autres méthodes ont été utilisées. Si le temps supplémentaire ne permettait pas de départager les équipes, le tirage au sort ou le tirage à pile ou face étaient utilisés en dernier recours.
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L'exemple le plus célèbre s'est produit lors du Championnat d'Europe de 1968, lorsque l'Italie et l'Union soviétique ont terminé leur match en demi-finale sur un score de 0-0 après 120 minutes. Aucun but n'ayant été marqué et les images n'étant pas disponibles, c'est un tirage au sort qui a déterminé la qualification pour la finale, une décision aussi insatisfaisante pour les supporters que pour les joueurs.
La finale elle-même n'a pas non plus donné lieu à une victoire dans le temps réglementaire. L'Italie affronte la Yougoslavie à Rome et le match s'achève sur un score de 1 à 1 après les prolongations. Le règlement exige que la finale soit entièrement rejouée. Deux jours plus tard, les équipes s'affrontent à nouveau. L'idée a rapidement fait son chemin dans les compétitions nationales et a rapidement été testée lors de matches internationaux.
L'UEFA a introduit la séance de tirs au but dans les compétitions européennes à partir de la saison 1970-1971. Le premier match officiel de haut niveau à être décidé par une séance de tirs au but a été le match entre Honved et Aberdeen en Coupe des vainqueurs de coupe en septembre 1970.
La FIFA a suivi l'introduction de la séance de tirs au but peu de temps après. Le premier grand tournoi international à comporter une séance de tirs au but a été le Championnat d'Europe de 1976.
La finale entre la Tchécoslovaquie et l'Allemagne de l'Ouest s'est déroulée aux tirs au but et s'est achevée sur le but emblématique d'Antonin Panenka, un moment devenu légendaire. Le fait qu'il s'agisse de l'une des premières grandes séances de tirs au but rend le but de Panenka d'autant plus admirable.
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Pour se rappeler la première séance de tirs au but effectuée dans la compétition internationale, il faut remonter près de 40 ans en arrière... La célèbre France-RFA 1982 à Séville En effet, c'est la demi-finale de Coupe du monde 1982 qui va se jouer, pour la première fois, sur des penalties ! Un match qui est encore dans toutes les mémoires des fans des Bleus. On parle de la très célèbre nuit de Séville.
Depuis leur introduction, les séances de tirs au but ont donné lieu à certains des moments les plus inoubliables et les plus chargés d'émotion de l'histoire du football. Qu'il s'agisse de surprises ou de défaites cuisantes, elles sont entrés dans la légende.
L'une des premières séances de tirs au but les plus emblématiques a eu lieu lors de la Coupe du monde de 1994. La finale de Pasadena a été la première finale de Coupe du monde à être décidée par une séance de tirs au but. Après un match nul et vierge, le Brésil s'est imposé 3-2 aux tirs au but.
L'image la plus marquante fut celle de Roberto Baggio, le joueur vedette de l'Italie, qui envoya le dernier tir au but au-dessus de la barre. Son échec est devenu le symbole de la nature cruelle des tirs au but : un seul coup de pied peut définir ou détruire une carrière.
Après avoir remonté un retard de 3-0 dans ce qui est devenu le "Miracle d'Istanbul", Liverpool a forcé la prolongation et a finalement battu l'AC Milan 3-2 lors d'une séance de tirs au but dramatique.
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Cette fin d'histoire a élevé la légende du club et consolidé le statut de la séance de tirs au but en tant qu'étape de la mythologie du football.
L'Allemagne de l'Ouest et la France réalise l'une des plus belles parties de l'histoire de la compétition. Malgré une avance de deux buts en prolongations, la France se fait reprendre et doit disputer cette séance de tirs au but. La première reste, encore aujourd'hui, la plus longue de l'histoire de la compétition. On a eu le droit à près de 12 tentatives, pour une victoire 5 à 4 de la RFA. C'est un record qui sera égalé près de 12 ans plus tard.
La Roumanie et la Suède luttent pour une place dans le dernier carré de cette Coupe du monde. Et c'est la sélection suédoise qui s'impose, lors de cette séance de tirs au but, après 12 tentatives, sur le même score de 5 à 4. Et si c'est un record qui tombait dans les jours à venir ?
Les Bleus sont si épuisés qu’on voit mal comment Michel Hidalgo va faire pour trouver cinq volontaires. Ce sera donc Giresse, Amoros, Rocheteau, Six et Platini. Les trois premiers marquent (avec une mention spéciale à Amoros qui n’a que vingt ans et dont le calme est sidérant). En face, Stielike vient de tirer sur Ettori et Six, qui joue alors à Stuttgart, a l’occasion de donner un avantage quasi-définitif aux Bleus.
Mais sa frappe du gauche est renvoyée par Schumacher, et Platini termine les poings serrés en lâchant un « fais chier ! » alors qu’il pensait envoyer les Bleus en finale. Quatre ans plus tard, c’est au terme de ce qui restera sans doute comme le plus grand match de son histoire que l’équipe de France se retrouve à l’épreuve des tirs au but contre le Brésil.
Qu’elle en soit arrivée là tient du miracle, tant les Auriverde ont dominé et se sont créé des occasions à la pelle. Mais Bats et les poteaux se sont toujours trouvés sur la trajectoire, et ça continue pendant la séance de tirs au but. La frappe sans élan de Socrates est repoussée par le gardien d’Auxerre. Stopyra et Amoros, toujours lui, transforment leur tentative.
Quand vient le tour de Bellone, on n’est pas rassuré, et l’attaquant monégasque non plus. Mais le gardien brésilien Carlos crache sur le ballon, ce qui met en rage le gaucher qui allume un pétard. Poteau, ricochet sur la tête du gardien et but. Histoire de pimenter un peu la sauce, Platini dont c’est l’anniversaire tire au-dessus de la lucarne, mais Julio Cesar trouve le poteau de Bats juste après.
Pourtant, pour le spectateur neutre, la séance de tirs au but offre certains des moments les plus palpitants et les plus inoubliables du sport. On croise les doigts pour une victoire des Bleus dans le temps réglementaire sans passer par les prolongations et les tirs au but ! Une épreuve fatidique que les joueurs de Didier Deschamps ont enfin remporté vendredi dernier face au Portugal, la première dans une compétition depuis 1998.
En un an, les Bleus ont perdu une finale de Coupe du monde, deux finales d'Euro et de Mondial U17 et un quart de finale de Coupe du monde féminine au terme d'une séance de tirs au but. Depuis la Coupe du monde 1998, les sélections ou clubs français ont disputé 16 séances de tirs au but dans des compétitions internationales et en ont remportées… trois (les Bleues face à l'Angleterre au Mondial 2011, Lyon face au Besiktas en Ligue Europa 2017 et les U17 en quart de finale du Mondial contre le Sénégal le mois dernier).
Le problème peut venir des gardiens comme Fabien Barthez et Hugo Lloris qui n'ont stoppé aucune des 14 dernières tentatives subies dans le but des Bleus. Le week-end dernier, ce sont les tireurs des U17 qui ont failli en finale face aux Allemands quand leur portier sortait le grand jeu.
La semaine dernière, sur les antennes de BeIn Sport, alors même que les Bleus ont été sortis des deux dernières grandes compétitions internationales après une séance de tirs au but, Didier Deschamps rappelait pourquoi il n'insistait pas sur ce travail spécifique : "À l’entraînement, il n’y a personne à part vous. Vous n’arrivez jamais à recréer les conditions d’un match. Si c’est une finale, le côté émotionnel, le public, le positionnement des tireurs, rien ne peut être préparé. Puis entre ce que vous pouvez prévoir et ce qu’il se passe, comme la dernière séance contre l’Argentine où tous les tireurs prévus n’étaient plus sur le terrain…"
Et l'entraîneur des infortunés U17, Jean-Luc Vannuchi avouait : "C'est encore une histoire de loterie, on a beau les travailler, c'est difficile."
A force, il n'est sans doute plus question de loterie mais de syndrome. Il paraît urgent de réagir car, à force d'études en tous genres et de datas à foison, le hasard n'a plus vraiment sa place dans l'équation. Il est par exemple statistiquement prouvé qu'un attaquant a plus de chances de réussir sa tentative qu'un autre joueur de champ, qu'un tir au milieu du but est moins efficace que sur un côté (57% contre 74% lors des 30 dernières séances de tirs au but en Coupe du monde) et même qu'un joueur qui célèbre sa réussite de façon ostentatoire donne deux fois plus de chance au coéquipier qui suit de marquer (selon une étude parue en 2010 sur la contagion émotionnelle). Bref, réduire la séance de tirs au but à un jeu de pile ou face est en 2023 une totale incongruité. Tout comme croire que la terrible série du foot français relève du pur hasard.
Il semblerait d'ailleurs que la DTN s'empare enfin du sujet. "Il ne faut pas tomber dans quelque chose qui nous paralyse, dans une forme de psychose, révélait Hubert Fournier il y a quelques jours dans L'Equipe. La gestion des émotions doit être mieux maîtrisée. Il y a sans doute des solutions, et il va falloir qu'on les trouve (…). Il est nécessaire de mettre une cellule spécialisée en place pour accompagner les joueurs sur le plan émotionnel, faire en effet appel à des psychologues. Il est important d'y réfléchir et on va le faire, croyez-moi."
Des psys au secours du football français, voilà peut-être une partie de la solution. En Allemagne, la fédération donne accès à des psychologues sportifs à toutes les sélections de jeunes. De même, les gardiens de but reçoivent un briefing penalty sur leurs adversaires avant chaque match. Luis Enrique, avant le dernier Mondial, avait demandé à ses joueurs espagnols de tirer 1000 penalties avec leurs clubs respectifs avant de prendre l'avion pour le Qatar.
Leur sélectionneur, Gareth Southgate, lui-même traumatisé par sa tentative ratée à l'Euro 1996, n'a jamais caché que son équipe bossait spécifiquement l'exercice : "Comme tous les autres aspects de notre jeu, nous sommes préparés et nous avons suivi un processus - nous devons être prêts mentalement et physiquement." Les Three Lions utilisent notamment des filets aux entraînements pour travailler les frappes dans les coins du but et toutes les statistiques d'entraînements et de match sont décortiquées pour déterminer le casting des tireurs en fin de match.
La France n'attache visiblement pas la même minutie. "Est-ce qu'on travaille assez en France les séances de tirs au but ?, s'interroge Carrasso. On ne prend pas assez en compte la possibilité des tirs au but et on entend trop souvent les coaches dire qu'on doit gagner le match avant. Ok, mais si on n'y arrive pas ? Si le mec qui s'avance tire parfaitement son penalty, le gardien n'a aucune chance et ça se travaille."
D'autant que Grey Wriggle n'a pas l'intention de prendre la nationalité française. Mike Maignan, autre grand spécialiste de l'exercice, reste une vraie sécurité pour l'avenir.
5 fois sur 10 en compétition, les Bleus s’en sont sortis à cette loterie.
Face à la Croatie, l'équipe de France disputait la dixième séance de tirs au but de son histoire. Elle compte désormais cinq victoires pour cinq défaites dans l'exercice.
Pendant l'Euro 2021 comme lors de la Coupe du monde 2022, l'équipe de France avait fini son tournoi par une défaite aux tirs au but. Depuis, les Bleus se sont imposés deux fois dans l'exercice : l'été dernier contre le Portugal (0-0, 5 t.a.b. à 3) et dimanche soir contre la Croatie en Ligue des nations (2-0, 5 t.a.b. à 4). À chaque fois, Mike Maignan était dans le but français.
Le gardien des Bleus a vu 7 de ces tentatives ne pas être transformées, avec 4 arrêts, 2 tentatives non cadrées et 1 poteau. Au total, les Bleus ont désormais gagné la moitié de leurs séances de tirs au but, soit cinq sur dix.
C’est la version foot de la roulette russe : cinq balles sur le point de pénalty, et en général une qui ne rentre pas.
Et que la séance des tirs au but est vraiment une loterie avec moins d’une chance sur deux de passer : les Bleus l’ont emporté six fois sur douze, mais si on écarte les deux matches du tournoi Hassan II en 1998 (Maroc, perdu) et en 2000 (Japon, gagné), ils ne s’en sont sortis que cinq fois sur dix en phase finale. Et à chaque fois en quart de finale (1986, 1996, 1998 et 2024, et même 2025 en Ligue des Nations).
Ce mardi 9 juillet à 21h, l’équipe de France de foot affronte l’Espagne en demi-finale de l’Euro.
"Les tirs au but, ce n'est pas une loterie, nous renseigne Christophe Revel, ancien entraîneur des gardiens du Maroc, de l'OL, de Rennes et de Brest aujourd'hui. C'est un exercice qui se prépare techniquement et mentalement à l'aide de répétitions de gestes, de situations, se rapprochant tant bien que l'on peut de la réalité. Le plus important étant de rendre le gardien de but acteur de ce moment, de le mettre à l'aise et de lui enlever toute pression pour optimiser ses chances de réussite."
"Je ne vois pas ça comme une loterie mais comme une opportunité pour le gardien, nous confie de son côté Cédric Carrasso, deuxième gardien à avoir arrêté le plus de penalties en L1 depuis 2006. Il y a bien sûr une bonne part d'intuition et d'observation. On donne des renseignements au gardien, c'est une aide mais pas une science exacte. Après, moi, à partir du moment où j'entrais sur le terrain, j'observais tout. L'échauffement des adversaires, leur tendance pendant le match, est-ce qu'untel tire croisé ou pas ? A partie de tout ça, je prenais ma décision."
La séance de tirs au but est une guerre psychologique et Redmayne est tout sauf un fou. Une étude, citée par The Telegraph et portant sur toutes les séances de tirs au but des Coupes du monde et des Championnats d'Europe de 1984 à 2012, a révélé qu'un gardien qui tente de déconcentrer le tireur de penalty réduit de 10% le nombre de buts marqués. Tous les moyens sont bons comme ceux utilisés par the "Grey Wiggle" ce jour-là. Le gardien est à la fois un agent du chaos, même si une modification du règlement réduit sa marge de manœuvre aujourd’hui, et un statisticien capable de connaître sur le bout des doigts les préférences de ceux qui se présentent face à lui.
En Australie, on l'appelle "Grey Wiggle" (ndlr : le "Wiggle gris"). Andrew Redmayne a une carrière tout à fait modeste dans le championnat australien et ne compte que quatre sélections, mais il est pourtant devenu un héros national le 13 juin 2022 au cours des barrages qui enverront l'Australie à la Coupe du monde au détriment du Pérou.
Entré en jeu quelques secondes seulement avant la séance de tirs au but, il gesticule grossièrement sur sa ligne de but, reproduisant les mouvements d'une danse du groupe australien "The Wiggles" et gagne, au passage, un surnom pour la postérité. Plus fourbe encore, il s'empare de la gourde du gardien péruvien où figure quelques indications sur les tireurs australiens et l'envoie balader dans les tribunes. Le but est clair : déstabiliser l'adversaire.
Plus original encore, Redmayne a accompagné tous les tireurs australiens jusqu'au point de penalty les protégeant des manipulations mentales adverses. Le Pérou ratera deux tentatives et regardera la Coupe du monde depuis son canapé. Mission accomplie.
Redmayne s'expliquera après le match : "C'était une question de vie ou de mort alors, même si cela va à l'encontre de tous mes principes moraux d'être ce genre de personne…"
Année | Compétition | Adversaire | Résultat |
---|---|---|---|
1982 | Coupe du Monde (Demi-finale) | Allemagne | Défaite (3-3, 4 tab à 3) |
1986 | Coupe du Monde (Quart de finale) | Brésil | Victoire (1-1, 4 tab à 3) |
1996 | Euro (Quart de finale) | Pays-Bas | Victoire (0-0, 5 tab à 4) |
1996 | Euro (Demi-finale) | République Tchèque | Défaite (0-0, 6 tab à 5) |
1998 | Coupe du Monde (Quart de finale) | Italie | Victoire (0-0, 4 tab à 3) |
2006 | Coupe du Monde (Finale) | Italie | Défaite (1-1, 5 tab à 3) |
2021 | Euro (Huitième de finale) | Suisse | Défaite (3-3, 5 tab à 4) |
2022 | Coupe du Monde (Finale) | Argentine | Défaite (3-3, 4 tab à 2) |
2024 | Euro (Quart de finale) | Portugal | Victoire (0-0, 5 tab à 3) |
2025 | Ligue des Nations (Quart de finale) | Croatie | Victoire (2-0, 5 tab à 4) |
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