Chaque drapeau possède une histoire unique, inspirée par l’histoire du lieu géographique qu’il représente, de symboles liés à sa culture, ou d’autres facteurs très divers. Le drapeau n’est pas le seul fait des États, il constitue un symbole qui permet de représenter « la personne morale » d’un groupe ou d’une communauté. À titre d’exemple, le drapeau blanc est un symbole international pour la paix, ou de reddition dans un contexte guerrier. Le drapeau arc-en-ciel symbolise la communauté LGBTQIA+, et le drapeau de la Croix-Rouge représente l’organisation éponyme.
Mais alors, d’où viennent les drapeaux nationaux que nous voyons lors de représentations politiques, militaires, sportives ou culturelles ? « Les drapeaux modernes sont nés dans des nations maritimes, qui hissaient leurs pavillons », explique Cédric de Fougerolle, président de la Société Française de Vexillologie. Lorsqu’un drapeau est hissé sur la mer, on ne parle plus de drapeau, mais de pavillon. À l’époque, le pavillon faisait état de la nationalité de rattachement de l'embarcation qui l'arbore. En général, il était hissé dans la mâture ou à l’arrière du navire. C’est pour cette raison que généralement, les drapeaux d’aujourd’hui se lisent de façon horizontale, « car comme les pavillons bougeaient au vent, c’était plus lisible. » C’est également pour cela que le drapeau du Qatar, nation de tradition navale, est très long, il devait pouvoir flotter au vent, quand celui de la Suisse, de tradition militaire, est carré. « Si l’on marche ou que l’on est à cheval, tenant un drapeau à l’aide d’une hampe, il ne faut pas qu’il ait trop de prise au vent, car sinon le drapeau peut vous échapper. »
Autrefois, le drapeau permettait de transmettre un message. « À l'époque, quand on était sur mer, la seule façon de communiquer était via ce bout de tissu », résume Cédric de Fougerolle. Ainsi, un pavillon à l’envers envoyait un signal de détresse, et un pavillon jaune : « contagion à bord, surtout ne m’approchez pas. » Aujourd’hui, la seule exception concerne le drapeau des Philippines, pour lequel l’envers signifie que le pays est en situation de guerre.
Autrefois, les formes des drapeaux nationaux étaient beaucoup plus variées. En Chine par exemple, où l’on retrouve les plus anciennes représentations de « drapeaux » connues, on en trouvait de formes triangulaires. Et même sur le vieux continent, le rectangle n’a pas toujours été la règle. « En Europe jusqu’à l’Ancien Régime, les drapeaux n’étaient pas obligatoirement de forme rectangulaire. Toutes les bannières religieuses notamment, ne l’étaient pas. » Mais au fil des siècles, le rectangle est devenu la norme et l’Occident a, petit à petit, imposé sa conception. Il existe néanmoins deux exceptions. D’un côté les drapeaux de la Suisse et du Vatican, de forme carrée, et de l’autre le drapeau du Népal, qui est une combinaison de deux pennons. Il incarne les hautes altitudes de l'Himalaya ainsi que les deux religions les plus présentes au Népal, l'hindouisme et le bouddhisme. D’après Cédric de Fougerolle, « c’est une manière d’affirmer que le pays n’est pas un état Occidental. »
Cela met en exergue l’une des fonctions premières du drapeau : l’affirmation identitaire. « Le drapeau est au départ un signe de reconnaissance, de rassemblement. » Ce dernier n’est d’ailleurs pas limité à l’échelle nationale. Par exemple, l’Union Jack marque notamment l’appartenance de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande au Commonwealth.
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De la même manière, certaines couleurs sont similaires pour plusieurs pays partageant des valeurs et des cultures proches. Le rouge, noir, vert et blanc sont les couleurs dites « panarabes », issues du drapeau de la révolte arabe de 1916-1918. On les retrouve dans la quasi-totalité des drapeaux arabes et musulmans. De même, les couleurs panafricaines sont le jaune, le vert et le rouge. « C’est une façon de montrer que l’on appartient à un groupe », déclare Cédric de Fougerolle. À ce titre, les symboles sont aussi marqueurs d’appartenance. L’étoile et le croissant représentent traditionnellement l’islam, quand la croix de Saint-Georges représente plutôt le christianisme. De même, la couleur rouge est souvent associée au communisme. D’après Cédric de Fougerolle, c’est parce que le drapeau rouge est le drapeau de la révolte ouvrière. « Sous l’Ancien Régime, en France, on disait que l’armée déployait un drapeau rouge pour signifier qu’elle allait tirer. C’était un signal d’avertissement pour disperser la foule. Ce drapeau a été utilisé en juillet 1789 à Paris. Le mouvement révolutionnaire s’est attribué l’emblème qui était affiché quand il y allait avoir une lutte armée à mort, entre le pouvoir et ce mouvement révolutionnaire. Ils l’ont détourné et en ont fait cet insigne. C’est depuis la Révolution française que le rouge est associé à l’idée de révolution. »
Aujourd’hui, l’expert remarque qu’une seconde fonction du drapeau, « une fonction d’échange, de reconnaissance », est davantage usitée à l’échelle internationale. Le drapeau est alors ce qui permet à un pays de s’affirmer comme tel aux yeux du monde. « Le drapeau n’est pas quelque chose d’obligatoire, mais il se trouve que, de fait, tous les États du monde ont un. » Cela n’empêche pas que certains drapeaux, comme celui de l’Arabie Saoudite ou encore du Brésil, comportent du texte, ce qui semble pourtant constituer un frein à l’universalité du drapeau. « Au fond, cela revient à se demander si le premier rôle du drapeau, c’est pour l'extérieur ou pour soi-même ? », explique Cédric de Fougerolle, avant d’ajouter : « beaucoup de drapeaux militaires dans le monde possèdent des écritures, cela n’est pas anormal. »
Pour de nombreux pays, le choix du drapeau s’est fait au fil de l’histoire. L’histoire du drapeau tricolore français, par exemple, est encore assez floue. Le bleu, le blanc et le rouge, « existaient déjà avant la révolution, mais elles n’étaient pas des couleurs nationales. » C’est à partir de juillet 1789 que les couleurs deviennent les couleurs de la révolution, elles deviennent les couleurs d’une nouvelle conception du pouvoir, de l’état de la nation. Pour autant, un drapeau ne devient symbole national que lorsqu’il est adopté par la nation. « Aujourd’hui, le drapeau tricolore nous paraît évident » relève Cédric de Fougerolle. « Mais entre la révolution de 1789 et la fin du 19ᵉ siècle, ce n’était pas évident. La frange la plus à gauche préférait le drapeau rouge, la frange la plus à droite préférait le drapeau blanc. » De fait, « ce qui a créé l’unanimité autour du drapeau tricolore, c’est la guerre de 1914 », estime l’expert.
Pour d’autres pays, le drapeau est le fruit d’une réflexion nationale. C’est par exemple le cas de l’Afrique du Sud, pour lequel le peuple fut invité à faire des propositions. L’objectif était de changer le drapeau précédent adopté en 1928, trop associé à l’histoire de la seule communauté blanche du pays. C’est finalement celle de Frederick G. Brownell qui fut reconnue. En vigueur depuis le 27 avril 1994, le nouveau drapeau a pour objectif de refléter les éléments clés de l'histoire sud-africaine, en incluant notamment toutes les couleurs utilisées par les différentes administrations sud-africaines et les principaux groupes ethno-politiques du pays. Cette participation citoyenne est loin d’être un cas unique. En Papouasie-Nouvelle-Guinée, le drapeau national, adopté le 1ᵉʳ juillet 1971, a été dessiné par la jeune étudiante de quinze ans Susan Karike Huhume, qui a gagné un concours organisé dans tout le pays pour imaginer le futur drapeau du pays. En outre, la création d’un nouveau drapeau a fréquemment été l’occasion, pour d’anciennes colonies, d’affirmer leur indépendance. Le Mozambique et le Guatemala ont par exemple fait le choix de faire figurer une arme sur leur drapeau, pour alléguer leur « détermination à protéger leur liberté ».
Le drapeau mozambicain a été adopté dans sa forme actuelle en 1983. Il est directement inspiré du drapeau du Frelimo, un mouvement anti-colonial d’orientation communiste, qui a lutté pour l’indépendance du Mozambique face au Portugal de 1964 à 1974. Ce combat pour la liberté est d’ailleurs omniprésent sur le drapeau du pays. On le trouve déjà dans les couleurs : le blanc pour la paix, mais aussi le rouge, pour le sang versé par le peuple. Associé au vert au noir, il fait référence au panafricanisme. Côté hampe, on retrouve d’autres symboles : l’étoile jaune à cinq branches pour l’histoire socialiste du pays, un livre blanc pour l’éducation, et, une houe et un fusil d’assaut, croisés à la manière de la faucille et du marteau. Et ce n’est pas n’importe quel fusil d’assaut : c'est une kalachnikov. Cette arme, peu coûteuse, simple, fiable et extrêmement solide, a été distribuée par centaine de millions auprès de différents mouvements indépendantistes, s’est hissée à travers le monde au rang de symbole de la révolution.
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Dans ce drapeau :
Le drapeau du Guatemala se compose de trois bandes verticales : deux bandes bleues sur les côtés et une bande blanche au milieu. Le bleu représente la couleur de l’océan, elle est ainsi à la fois l’Océan Pacifique et Atlantique. Au centre du drapeau, on peut remarquer la présence d’une couronne faite de rameaux d’olivier qui entourent deux sabres en croix et deux fusils. Un parchemin surimprimé porte la mention “Libertad 15 de Septiembre de 1821”. L’oiseau vert avec une longue queue (qui est un quetzal), perché sur le parchemin, est un symbole Maya. Il symbolise aussi la liberté du pays. Les fusils en croix indique la volonté du pays de se défendre si une guerre vient à se déclarer subitement. L’adoption du drapeau actuel tel que nous le connaissons date du 12 aout 1871. Le Guatemala a officiellement adopté son drapeau en 1968, inspiré par celui de l’ancienne Fédération de l’Amérique Centrale. Le pays a gardé les couleurs du drapeau de la Fédération des Provinces Unies d’Amérique centrale.
Dans ce drapeau :
Il existe une multitude de drapeaux à travers le monde, chacun avec sa propre histoire et ses symboles. Voici quelques exemples supplémentaires :
Le drapeau du Lesotho est certainement l’un des plus récents, puisqu’il a été adopté il y a tout juste onze ans. Pour commencer, les trois couleurs ont comme représentation la paix (le blanc), la prospérité (le vert) et la pluie (le bleu).
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Très peu connu, le drapeau du Vanuatu a été adopté en 1980 et est donc assez récent. Il tire ses couleurs du parti ayant conduit l’archipel à son indépendance, le Vanua’aku Party : le noir symbolise le peuple Vanuatu, le rouge le sang de sangliers et des hommes, le vert la richesse des îles et enfin, le jaune en forme de Y comme la disposition des îles fait référence à la lumière de l’Evangile qui s’est répandu sur les îles. Le dessin jaune sur la gauche en forme de spirale est en réalité une défense de sanglier qui a comme image celle de la prospérité.
Pour finir cette petite liste, la Croatie possède elle aussi un drapeau dont les significations sont tout aussi intéressantes. Le rouge, blanc et le bleu sont en fait les couleurs panslaves (inversées), ce qui signifie que le pays possède une majorité d’habitants d’origine slave.
Au Moyen Âge l’histoire du drapeau se télescope avec la naissance du blason. Patrice de la Condamine, dans La littérature au Moyen Âge, le résume ainsi : « des armoiries aux figures compliquées et qui ne parlaient qu’à un petit nombre, sont nées des multitudes de drapeaux dont le message simplifié doit atteindre spontanément des milliers d’individus ».
Un chef se signale par ses armoiries ou plus simplement, par une ou plusieurs couleurs issues des armoiries et composées en un drapeau.Les membres des grandes familles vont tenter de se singulariser en adoptant des couleurs personnelles différentes de celles de leur famille. Ces couleurs seront reprises comme emblèmes de leurs troupes sur les champs de bataille. Mais les couleurs des drapeaux changent vite au gré de l’humeur des individus ou des aléas des combats ; une couleur ou composition de couleurs amenant la victoire est pérennisée.
À partir du XVe siècle, la couleur blanche est reconnue comme symbole du roi de France et ce jusqu’à la Révolution, où nous nous arrêtons un instant pour une brève évocation de la naissance du drapeau français.
Juillet 1789 : en réaction à la couleur blanche, symbole de la royauté, la milice parisienne arbore une cocarde aux couleurs de la ville de Paris, bleu et rouge.Lors de la venue de Louis XVI à l’Hôtel de Ville, le maire Bailly accroche cette cocarde sur celle, blanche, du roi. Les trois couleurs - bleu, rouge, blanc - deviennent ainsi les couleurs de la Révolution, après avoir été les couleurs des livrées de nombreux rois de France, comme Louis XIV.Celles-ci sont adoptées officiellement, le 4 octobre 1789, en tant que symbole de la nation et de la réconciliation entre le peuple et le roi mais leur ordre n’est pas fixé.
Le 20 juillet 1790, est élu le comité militaire de la ville de Paris, qui propose que les couleurs de la Révolution soient composées comme suit : la couleur blanche, considérée alors comme la couleur nationale, associée au bleu et au rouge pour indiquer les couleurs de la Ville sur les uniformes et les drapeaux. Les couleurs sont disposées horizontalement.
Le 28 novembre 1792 un décret oblige les régiments et les bataillons à faire disparaître avant le 15 janvier 1793 tout ce qui rappelle la royauté sur les drapeaux, à commencer par la croix blanche sur les emblèmes de l’infanterie. Mais ce décret ne sera pas suivi d’effet et il faut attendre le 2 mars 1794 pour que le rapport du citoyen Calon à la Convention supprime définitivement les drapeaux de la royauté et les remplace par des drapeaux aux couleurs de la Révolution dont l’ordre des couleurs n’est pas arrêté. Ces drapeaux portent de nouveaux symboles (faisceaux de licteurs, couronnes de feuilles de chêne et de laurier, bonnet phrygien) et ils sont accompagnés de banderoles portant : « République française ». « Discipline », « Obéissance aux lois militaires », en lieu et place des anciennes devises des rois.
Le décret de 1796 fixe la forme et l’ordre des couleurs tel que nous les connaissons aujourd’hui d’après l’étude demandée au peintre David. Les premiers à arborer ces couleurs sont les marins sur les pavillons. Au cours des campagnes d’Italie (1796-1797), Bonaparte donne un sens nouveau au drapeau.Désireux de développer l’esprit de corps et d’exalter le sentiment d’honneur, il fait glisser le drapeau du statut de symbole de la nation à celui d’objet de culte pour chaque unité. Le principe de l’emblème régimentaire se met en place.Afin d’animer une certaine compétition entre les différentes unités d’une subdivision d’arme, Bonaparte lance l’idée d’inscrire les faits d’arme glorieux sur les soies des emblèmes.
Avec l’époque impériale (mai 1804- avril 1814), l’évolution symbolique du drapeau français est achevée. Soucieux d’associer étroitement l’armée à sa personne, Napoléon décide de doter chaque emblème d’une aigle dorée en lieu et place de la pique. Elle deviendra bientôt la partie essentielle de l’emblème, représentant Napoléon et l’Empire et conduira de ce fait à un attachement particulier des hommes vis-à-vis de leur emblème.L’attachement au drapeau est un fait nouveau, dû notamment à l’importance donnée par l’empereur à ses aigles. Elle est symbolisée par le faste de la remise des aigles aux unités, qui est effectuée par l’empereur en personne, le 5 décembre 1804.
Durant la Restauration, (avril 1814- juillet 1830), bien que s’efforçant de concilier les acquis révolutionnaires et le retour de la monarchie, Louis XVIII impose à nouveau le blanc comme couleur nationale. Ainsi, le 20 juin 1816, le drapeau blanc de la Gendarmerie est remis au Colonel commandant la 1re Légion.
Sous la Deuxième République le drapeau français se fixe définitivement (25 février 1848-2 décembre 1852). Le Gouvernement provisoire de la République décrète le 25 février 1848 que l’emblème national serait désormais composé de bandes verticales bleues, rouge, blanc. Après de vifs débats, un second décret paraît quatre jours plus tard (le 29) : l’emblème national « sujet visible de l’unité nationale » sera désormais composé de trois bandes verticales successives de couleurs bleu, blanc, rouge.
Sous le Second Empire (décembre 1852- septembre 1870), le drapeau tricolore impérial de 1812 est rétabli : aigles au sommet de la hampe, noms de bataille inscrits sur la partie blanche, décors de couronne. De la Troisième république (4 septembre 1870- 10 juillet 1940) à nos jours, la tradition d’emblème régimentaire instauré sous le Premier Empire se maintient.
Voici une liste des départements du Guatemala et quelques informations sur leurs drapeaux ou armoiries :
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