Envie de participer ?
Bandeau

L'histoire de l'armurerie Schneider en Allemagne est riche et complexe, marquée par des innovations techniques et une influence considérable sur l'industrie de l'armement. Cet article explore les différentes facettes de cette entreprise, de ses origines à son rôle pendant la Première Guerre mondiale.

Le Prestige de l'Artisan Armurier au Moyen Âge

Au Moyen Âge, l'artisan armurier jouissait d'un prestige exceptionnel, dépassant les simples aspects technologiques et sociaux. Son rôle était entouré de mystère et de connaissances empiriques, le plaçant hors pair dans le monde préindustriel.

Lucien Febvre a mis en lumière comment le forgeron, grâce à son savoir-faire jalousement gardé, était perçu comme un être exceptionnel, doté de pouvoirs surnaturels. Cette position privilégiée était commune à toutes les civilisations préindustrielles, d'Occident ou d'ailleurs.

Le Moyen Âge, nourri des traditions latines et germaniques, héritait d'un double courant mythique faisant de l'armurier un demi-dieu, symbolisé par Vulcain et Wieland. La croyance en des armes dotées de vertus surnaturelles participait de cette conception.

Le mystère entourant les secrets de fabrication, jalousement gardés par les armuriers, était exploité auprès des souverains désireux de monopoliser les instruments de puissance. Le dernier siècle du Moyen Âge fut un moment privilégié pour observer ce phénomène, notamment avec l'émergence des armes à feu.

Lire aussi: Découvrez l'armurerie airsoft

L'Attitude de Philippe le Bon

L'attitude de Philippe le Bon était caractéristique d'un prince souhaitant s'assurer des moyens d'action à la hauteur de ses ambitions. Il exerçait des pressions sur les fabricants de bombardes pour réserver leurs services, interdisant la divulgation de leurs connaissances à d'autres.

Avec l'apparition de l'artillerie à poudre, le prestige du fabricant d'armes ne fit que croître. De Vulcain, maître des secrets de la matière, il devint Prométhée, affirmant sa volonté de puissance par la technique.

La conscience de ses possibilités créatrices conférait à l'artisan un sentiment de supériorité, accompagné d'une dose de forfanterie. Les offres de service que ces maîtres adressaient aux employeurs potentiels, villes ou princes, en témoignent.

Position Sociale et Organisation du Travail

Indispensable dans une société où la guerre occupait une place centrale, l'armurier pouvait prétendre à une position sociale relativement privilégiée. Traiter directement avec les grands ou leur entourage était un moyen efficace d'abattre les barrières hiérarchiques.

L'admission dans la Maison ducale était une consécration pour de nombreux artisans, leur offrant un emploi à vie, une pension de vieillesse et la possibilité de léguer leur charge. La fonctionnarisation des ouvriers de l'armement était courante au Moyen Âge, garantissant aux souverains le monopole de leurs services.

Lire aussi: Votre guide des expériences avec Drome Chasse Tir

La fortune des Munier illustre la réussite d'une lignée d'armuriers. Jossequin Munier, entré au service de Philippe le Hardi, devint armurier et valet de chambre, accumulant honneurs et richesse.

La faveur dont jouissaient les armuriers se traduisait par des dons généreux, des recommandations et des mesures de grâce. Les familles d'armuriers entraient dans le patriciat urbain, détenant des charges municipales.

Les voyages et les relations ouvraient des perspectives bénéfiques aux armuriers, favorisant la diffusion des innovations techniques et créant des liens entre les compétences à l'échelon interrégional et international.

Le recours à des maîtres armuriers étrangers était fréquent, tout comme les déplacements aux fins d'information. Les experts se consultaient par-delà les frontières politiques, échangeant des connaissances sur l'artillerie et la poudre à canon.

L'armurier occupait une place à part dans l'artisanat médiéval, bénéficiant d'une considération particulière grâce à son habileté technologique et ses secrets professionnels. Bien que sa position sociale restât modeste, il jouissait d'une plus grande liberté d'action et d'un plus grand crédit que les autres artisans de son temps.

Lire aussi: Tout savoir sur Chasse Tir Malin à Luçon : notre évaluation.

La Formation

L'ésotérisme entretenu par les armuriers s'opposait à la diffusion des méthodes de fabrication en dehors d'un cercle restreint. Les techniques se transmettaient de personne à personne, par l'exemple et la pratique.

La formation traditionnelle était acquise par l'apprentissage auprès d'un maître-armurier. Les contrats d'apprentissage ne mentionnaient pas d'enseignement théorique, mais plutôt un stage dans l'atelier d'un ou plusieurs artisans.

L'Impact de la Première Guerre Mondiale

Lorsque la mobilisation fut décrétée le 1er août 1914, l’économie française se trouva d’emblée désorganisée. Le départ des classes 1896 à 1910 sous les drapeaux au sein de la réserve de l’armée active, rejoignant celles déjà conscrites, prive l’industrie de bras. Dans les petites entreprises, l’absence du chef ou de son personnel peut aboutir à la fermeture de l’établissement. Quelques ouvriers se retrouvent en chômage.

Le plan XVII, conçu au printemps 1914 par l’État-major afin de préparer une éventuelle guerre contre l’Empire allemand, ne prévoit pas de mobilisation industrielle en dehors des contrats passés avec les firmes Schneider et Marine-Homécourt. Les premiers combats illustrent l’inadéquation des réserves en obus avec les réalités de la guerre.

Si des efforts de rattrapage sont entrepris dès l’automne 1914, ce n’est qu’au cours de l’année 1915 que l’organisation industrielle de l’État et de ses fournisseurs, désormais plus nombreux, prend l’ampleur nécessaire. Le vivier des ouvriers civils, souvent trop âgés, parfois trop jeunes ou peu productifs, ne suffit pas dans les mines ou la métallurgie. La multiplication des sursis d’appel et des détachements de mobilisés ne compense pas des besoins toujours plus importants.

De nouvelles entreprises sont créées afin de répondre aux possibilités offertes par la course aux armements. D’autres, comme Marine-Homécourt, louent des usines ou des ateliers afin d’augmenter leur activité. D’importants travaux de construction au sein des principales entreprises de la région sont encouragés par l’administration de la Guerre.

Le dirigisme économique contraint la marche des entreprises. La Défense nationale étant le débouché principal des industries stéphanoises, l’obtention de marchés et la délivrance d’avances substantielles à la commande deviennent impératives. La pratique de direction se trouve engoncée dans de nouvelles normes administratives, contraignant la gestion du personnel.

Ces réalisations soulignent l’insuffisance chronique de la main-d’œuvre des usines de guerre. La venue de nombreux réfugiés originaires de Belgique ou du Nord et de l’Est de la France, fuyant l’avancée des troupes allemandes, procure aux houillères un recrutement de choix. La mise au travail des prisonniers de guerre allemands, en réalité alsaciens-mosellans ou polonais, fournit une main-d’œuvre appréciée de la grande métallurgie pour les premiers, des mines pour les seconds.

Afin de faire face aux besoins exprimés par les employeurs, l’État incite à la rationalisation des productions. L’extension du machinisme doit diminuer la dépendance à la qualification, et ainsi faciliter la mobilisation de nouvelles catégories de main-d’œuvre. Ce sont d’abord les femmes. Les femmes affluent dans les usines de guerre dès la fin de l’année 1914, pour les célibataires déjà en situation de travail, au début 1915 pour les mères de famille devant compenser la perte du salaire de leur mari.

Ce changement de politique est permis par le développement du recours aux travailleurs étrangers. Leur recrutement, organisé dans certains cas par des conventions signées entre la France et un autre pays, se fait par un engagement pouvant s’étendre entre six mois et deux à trois années. On relève également la venue massive de travailleurs coloniaux, « kabyles » ou marocains. Il reste enfin les travailleurs dits « exotiques », chinois ou indochinois.

Les travailleurs étrangers, recrutés surtout à partir de 1916, permettent de limiter les embauches d’ouvrières et de réorganiser les affectations de mobilisés - la loi Mourier du 10 août 1917 vise le renvoi d’une partie des classes 1903 à 1912 au front. Ils n’échappent pas, comme la main-d’œuvre féminine, à une essentialisation de leurs compétences.

Les conditions d’existence des travailleurs sont difficiles dans le bassin stéphanois. La pénurie de logement laisse les ouvriers à la merci des loyers exorbitants des garnis. Les baraquements construits à la hâte par les plus grandes entreprises n’offrent qu’un confort relatif. L’alimentation est aussi une question sensible dans un bassin industriel connaissant un afflux massif d’habitants. Les conditions d’hygiène et de santé laissent ainsi à désirer.

L'Évolution Technologique et la Production d'Armes

Jusqu’à l’acier Bessemer en 1856, la technologie évolue peu. Ce serait ignorer la construction de la manufacture de Châtellerault, décidée en 1819 pour remplacer Klingenthal. La Vienne y charrie la force du vieux massif à 200m3/seconde. Un barrage de 105 mètres et un canal de dérivation créent la chute nécessaire aux usines que montre le plan de 1844, trois pour l’arme blanche, deux pour l’arme à feu.

Imaginé par un français d’origine suisse, Pauly, le principe du percuteur, la détente libérant un ressort intérieur qui pousse une aiguille contre la cartouche, est adopté par la Prusse en 1841 avec le fusil Dreyse. En France, proposée en 1842 par un officier, Minié, la balle cylindro-ogivale est adoptée quinze ans plus tard. La révolution du modèle 1866, le Chassepot, du nom de son inventeur, est pourtant surtout permise par celle de l’acier.

Acier de l’outil : en 1851, l’Exposition universelle permet aux européens de découvrir la méthode de coupe rapide des américains. Acier homogène surtout, abondant et vite produit, permis par le convertisseur Bessemer, puis Siemens-Martin, et plus tard Gilchrist. Il n’est plus nécessaire de raffiner l’acier par martelage, ni de forger et souder les canons de fusil : des barres seront forées sur un tour par une mèche d’acier trempé, cannelée pour évacuer le copeau et percée pour permettre l’envoi sous pression de l’huile de refroidissement. Les machines à percer et à rayer les plus fréquentes sont américaines, de marque Pratt et Whitney. Il faut toutefois toujours dresser le canon foré, et la machine à dresser à volant se substitue au dressage à la main, le repérage du défaut se pratiquant toujours à l’œil selon la méthode du cierge.

En 1864 à Saint-Étienne, après divers essais de machine à vapeur, sous la direction de l’ingénieur Kreutzberger de retour d’Amérique en 1855, on envisage de concentrer et mécaniser la production. Il y a bien quelques résistances, notamment lorsqu’en 1865 on supprime la forge des canons. Mais le Chassepot est dès 1866 responsable d’une première envolée des effectifs. Cette même année, on inaugure la « nouvelle manufacture » commencée deux ans plus tôt. En 1874, une nouvelle série de fabrication, celle du fusil Gras, augmente à nouveau l’embauche. Pourtant le colonel directeur Dubessy note qu’à ce moment encore les machines ne font guère qu’ébaucher les pièces que l’on finit à la main.

Un Nouveau Statut pour l’Entreprise et les Ouvriers

La Restauration règle la question de la propriété des immobilisations des manufactures et prévoit de fermer celles du Nord-Est, ce que fera la Monarchie de Juillet dans la décennie 1830. L’État agit au cas par cas, résolvant à Charleville la faillite en 1810 de l’entrepreneur Morin, expropriant les anciens propriétaires à Tulle et rachetant les biens de Fréconnet, conservant l’entrepreneur Jovin à Saint-Étienne tout en construisant une nouvelle usine aux « Rives ». Au bout du compte, Tulle, Châtellerault, Charleville appartiendront à l’État, Saint-Étienne sera partagée entre l’État (bâtiments centraux), l’entreprise (11 usines) et seize maîtres ouvriers possédant leur boutique, mais deviendra quasiment propriété d’État avec la nouvelle usine et plus tard celle du Treuil.

L’entrepreneur cesse donc d’être propriétaire, et c’est l’exploitation qui lui est adjugée, pour temps assez long : 20 ans pour les frères Brunon à Saint-Étienne, 10 le plus souvent. Un état des lieux des immobilisations remises est établi en début de contrat et accompagne le cahier des charges, et une visite annuelle des locaux est effectuée contradictoirement ; toute transformation nécessite autorisation. L’entretien est partagé entre l’État et l’entrepreneur.

Par ailleurs, le règlement du 20 novembre 1822 réorganise l’Inspection, attribue à chaque manufacture un directeur, toujours un officier supérieur, et un sous-directeur. Des capitaines sont sous leurs ordres, qu’ils doivent former, à la fois sur le tas et par des conférences régulières. Le directeur dirige les travaux.

Le 12 mars 1819 paraît l’ordonnance qui fixe le statut des ouvriers pour le siècle. Il faut être immatriculé pour avoir droit à la retraite. Les maîtres doivent avoir formé des élèves de leur profession. Ce droit est acquis : après 30 ans de service et 50 ans d’âge, quelle que soit la durée du service au cas où l’ouvrier serait victime au travail d’une mutilation le mettant hors d’état de gagner sa subsistance, après 15 ans de service lorsque des infirmités constatées dans les établissements l’empêchent de continuer sa profession.

Des majorations de 1/20 par année de service sont prévues au delà de 30 ans et en cas de mutilation. Le maximum de pension est de 400F pour un maître et 300 pour un ouvrier. En cas d’invalidité, elle est de 200 et 150. Le temps de service est compté à partir de l’âge de 20 ans.

Tableau Récapitulatif de l'Évolution de l'Armurerie Schneider

Période Événements Clés Innovations Techniques Impact Social
Moyen Âge Prestige de l'artisan armurier, secrets de fabrication gardés Connaissances empiriques, armes avec vertus surnaturelles Position sociale privilégiée, relations avec les souverains
Fin du Moyen Âge Émergence des armes à feu, attitude de Philippe le Bon Artillerie à poudre, évolution de Vulcain à Prométhée Fonctionnarisation des ouvriers, monopole des services
XIXe Siècle Manufacture de Châtellerault, adoption du percuteur Acier Bessemer, machines à percer et rayer américaines Nouveau statut pour les ouvriers, droit à la retraite
Première Guerre Mondiale Mobilisation industrielle, pénurie de main-d'œuvre Rationalisation des productions, extension du machinisme Recours aux femmes et travailleurs étrangers, conditions difficiles

tags: #armurerie #schneider #allemagne #histoire

Post popolari: