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Depuis 1945, les équilibres géostratégiques entre puissances de rang ou à vocation mondiale sont structurés par la dissuasion nucléaire. Elle a gelé depuis 75 ans tout affrontement militaire direct entre elles, au risque d’une destruction complète de l’humanité. Un phénomène géohistorique inédit par rapport au premier XXe siècle qui connut deux guerres mondiales dévastatrices. Le nucléaire demeurant la pierre angulaire des rapports de forces mondiaux, il convient de s’intéresser comme géographes aux forces nucléaires stratégiques sous-marines.

Comme le souligna dès 1976 Yves Lacoste, « la géographie, ça sert d‘abord à faire la guerre » - ou la paix d’ailleurs, même armée. Et il n’y a rien de plus géographique que la mise en œuvre et le déploiement des SNLE, le Sous-Marin Lanceur d’Engins (balistique), ou pour le sigle anglo-saxon le SSBN (Sub Surface Nuclear Balistic). Il y a plusieurs raisons à cela.

À l’échelle mondiale, les SNLE sont au cœur de l’arsenal nucléaire stratégique des États-Unis, de la France, du Royaume-Uni et de la Chine ; ils vont l’être à moyen terme pour l’Inde. À l’échelle continentale, le déploiement des patrouilles dans les espaces maritimes du globe doit arbitrer entre de multiples facteurs géographiques, géopolitiques et géostratégiques et le maintien de la crédibilité de leur seule et unique mission - la mise en œuvre de la dissuasion nucléaire - qui les contraint de rester indétectables. Enfin, aux échelles régionale et locale, ces puissants systèmes d’armes ont besoin pour leur mise en œuvre et leur projection maritime de ports d’attache et de bases navales efficientes qui construisent des territoires spécifiques.

Puissances nucléaires et course à l'armement

En 2023, neuf États sont reconnus comme des puissances nucléaires militaires : les États-Unis, la Russie, le Royaume-Uni, la France, la Chine, l’Inde, le Pakistan, Israël et la Corée du Nord. Selon le SIPRI (Stockholm International Peace Research Institute, institut de référence en matière d’études et de recherches sur les conflits), ces États disposent de 12 512 armes nucléaires (nuclear weapons). Sur ce stock, 3 844 armes (27 %) sont actuellement déployées dans des forces opérationnelles et 2 000 sont rapidement mobilisables en cas d’alerte, soit 46 % du stock mondial.

Si les États-Unis et la Russie disposent de 90 % du stock mondial, un des grands enjeux réside dans la lutte contre la prolifération nucléaire afin de maintenir le statu quo prévalant depuis le TNP - Traité de Non-Prolifération entré en vigueur en mars 1970 et qui compte 190 États signataires. Washington et Moscou ont annoncé en 2018 avoir atteint les objectifs fixés par le traité sur le désarmement New START qui expire en 2021. Signé à Prague en 2010 par Barack Obama et Dimitri Medvedev, il limitait pour chaque partie à 700 le nombre de missiles balistiques déployés et à 1 555 le nombre de têtes nucléaires installées sur ceux-ci.

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Or, non seulement Washington comme Moscou refusent d’enclencher un nouveau cycle de négociation sur une réduction des armements nucléaires existants, mais ils relancent actuellement de nombreux programmes et de nouvelles armes. Le traité limitant le déploiement de missiles antimissiles balistiques (ABM) est rompu en juin 2002 et Donald Trump dénonce en février 2019 le Traité NFI (Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, INF Treaty en anglais). À une période de relatif désarmement semble succéder une nouvelle période de réarmement.

L’invasion de l’Ukraine par la Russie au printemps 2022, l’affirmation croissante de la rivalité géostratégique des États-Unis et de la Chine, ainsi que la montée des tensions géopolitiques dans de nombreuses régions (entre Chine et Inde par exemple), se traduisent par un processus de réarmement dans un cadre de nouvelles logiques et échelles de conflictualités.

La dissuasion nucléaire française

La dissuasion nucléaire demeure la clé de voûte de notre stratégie de défense. Elle protège la France contre toute agression d’origine étatique contre ses intérêts vitaux, d’où qu’elle vienne et quelle qu’en soit la forme. Elle préserve en toute circonstance notre liberté d’action et de décision, en écartant toute menace de chantage d’origine étatique qui viserait à nous paralyser. Notre dissuasion est strictement défensive. L’emploi de l’arme nucléaire ne serait concevable que dans des circonstances extrêmes de légitime défense, droit consacré par la Charte des Nations Unies. À ce titre, la dissuasion est la garantie ultime de la sécurité, de la protection et de l’indépendance de la Nation.

La dissuasion nucléaire continuera de se fonder sur la posture permanente des deux composantes océanique et aéroportée, indissociables et complémentaires. Toutes deux concourent à l’ensemble des missions de la dissuasion. Leurs performances, leur adaptabilité et leurs caractéristiques permettent le maintien d’un outil crédible à long terme, tout en restant à un niveau de stricte suffisance.

La nécessaire adaptation de nos capacités de dissuasion doit se poursuivre, pour répondre aux transformations du contexte stratégique, à l’évolution des menaces et aux changements dans le domaine de la défense aérienne, de la défense antimissiles ou de la détection sous-marine.

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La triade nucléaire

Les armes nucléaires peuvent être mise en œuvre par trois types de vecteurs - aériens, terrestres ou maritimes - constituant la « triade nucléaire ». Chaque vecteur présente des atouts géostratégiques différents, dans l’espace géographique et dans le temps. Concernant la « triade », il n’y a pas de modèle géostratégique unique. Les choix réalisés dépendent de l’histoire, de la géographie physique (masses continentales étasunienne, russe ou chinoise face au système insulaire britannique et à l’ouverture atlantique de la France), des moyens et arbitrages financiers réalisés.

Historiquement, les bombardiers stratégiques sont les premiers utilisés sur les villes d’Hiroshima le 6 août et de Nagasaki le 9 aout 1945. Puis les premiers missiles intercontinentaux sont mis en œuvre dès 1957 et les premiers sous-marins stratégiques sont déployés à la fin de l’année 1959. Ce processus impulse le développement de technologies spatiales de plus en plus complexes qui débouchent sur des systèmes d’armes de plus en plus sophistiqués associant un lanceur (SNLE, avion), un vecteur (missile) et une tête nucléaire.

Un missile balistique exige ainsi de marier une tête nucléaire avec un lanceur (une fusée). En 2001, si l’arme sous-marine ne dispose que de 37,5 % des vecteurs (y compris donc les missiles non nucléaires), elle assure déjà le déploiement de 43,5 % des têtes nucléaires. En 2001, la Chine était encore la grande absente, et sa montée en puissance constitue aujourd’hui pour les stratèges de Washington un problème géostratégique.

Pour s’intéresser aux sous-marins, aux armes sous-marines et à leurs dynamiques géographiques, géopolitiques et géostratégiques, il convient de clarifier les termes et les enjeux. Le qualificatif de conventionnel ou nucléaire pour définir un sous-marin concerne son mode de propulsion, et non celui des systèmes d’armes embarquées. Parmi ces derniers, la grande majorité des sous-marins nucléaires sont des sous-marins nucléaires d’attaque (SNA, ou SSN selon le terme anglo-saxon pour subsurface nuclear) qui ont un panel de missions varié, mais ne mettent pas en œuvre d’arme nucléaire. Une petite part seulement des sous-marins nucléaires sont des SNLE (SSBN - sub surface balistic nuclear - armés de submarine-launched ballistic missiles (SLBM)), qui constituent les composantes océaniques de la dissuasion.

Les enjeux maritimes

Avec 361 millions de km², soit 71 % de la surface du globe, 85 % de la population mondiale vivant à moins de 500 km d'un rivage et 85 % des États ayant une frontière maritime, les mers et océans jouent aujourd'hui un rôle essentiel dans la mondialisation et dans la géopolitique mondiale. En reliant l’ensemble du globe en un seul système océanique mondial, ils sont un enjeu géostratégique majeur dans l’affirmation des ambitions et des rivalités entre puissances.

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Le sous-marin est un système d’armes souple, puissant et très mobile. Tapi dans l’océan, largement indétectable, silencieux, il autorise une discrétion opérationnelle.

Dans les masses maritimes, seules les ondes acoustiques se propagent sous l’eau et permettent aujourd’hui une détection sous-marine à des portées importantes. Pour qu’un sous-marin ne soit pas repéré, il faut donc limiter au maximum les indiscrétions optiques (périscope, fumées, bulles d’air, graisses et déchets…) et surtout acoustiques (chant ou cavitation des hélices en adaptant vitesse et profondeur, bruits intérieurs limités par isolation de la coque, suspensions élastiques, installation de silencieux…).

La discrétion du sous-marin tient donc à la fois de la qualité de sa conception, de sa construction et de sa maintenance d’un côté, et à la façon dont l’équipage conduit le sous-marin à la mer de l’autre. Les bases sous-marines sont équipées de polygones d’écoute qui réalisent des tests d’essais statiques ou en mouvement.

Enfin, si la détection d’un sous-marin est une première étape, l’identification est l’étape suivante. Elle consiste à attribuer une identité au sous-marin détecté sur la base de la signature acoustique relevée. Pour être efficace, l’identification exige de posséder des bases de données de signatures acoustiques qui ont donc un degré de classification élevé.

De même, dans chaque SNLE, quelques marins, les « grandes oreilles », sont spécifiquement formés à l’identification acoustique des bâtiments rencontrés. Les différentes marines du monde se dotent donc, lorsqu’elles le peuvent, d’un vaste catalogue des signatures acoustiques des navires militaires, sous-marins et de surface, et civils du monde.

Si les sous-marins de combat sont largement utilisés durant les deux Guerres mondiales, on assiste à partir des années 1950 à un sensible élargissement de leurs capacités opérationnelles : lutte anti-sous-marine, attaque mer/terre (lancement de missile de croisière), protection des groupes aéronavals, opérations spéciales, dissuasion nucléaire...

Pour autant, tous les sous-marins ne se valent pas. En 2023, environ 70,5 % des 490 sous-marins de la flotte mondiale sont des sous-marins conventionnels, de taille réduite et aux capacités opérationnelles limitées du fait de leur système de propulsion classique AIP - Air Independant Propulsion (propulsion diesel-électrique, pile à combustible…).

De plus, on relève cette dernière décennie l’apparition de puissants drones sous-marins de grande taille (« XLUUV », pour extra large unmanned underwater vehicule), en quelque sorte des sous-marins automatiques sans équipage. On peut se demander s’ils ne vont pas transformer la guerre sous-marine dans toutes ses dimensions (combat, communications, détection acoustique, renseignement...). En avril 2022, l’US Naval Sea Systems Command a ainsi testé son premier sous-marin autonome, l’Orca, fabriqué par Boeing ; long de 26 mètres et d’une capacité de 50 tonnes, il peut descendre à 3 000 mètres de profondeur et parcourir en autonomie jusqu’à 10 500 km.

Face à la lutte sous-marine qui mobilise bâtiment de surface, avion, hélicoptère (avec sonars immergés) ou sous-marin (veille acoustique) et de nombreux moyens (vue, radar, sonars actifs et passifs), le sous-marin doit être le roi de l’invisibilité. Car ses adversaires disposent de vastes systèmes d’armes pour le détruire (torpilles auto- ou filoguidées, engins téléguidés aériens puis sous-marins, grenades classiques ou nucléaires). Dans ce contexte, la capacité des sous-marins à « disparaître » dans la masse océanique est déterminante, elle s’appelle la « dilution ».

C’est la qualité de celle-ci qui assure sa non-détection et donc son invulnérabilité. Pour l’amiral Bernard-Antoine Morio de L’Isle, amiral commandant des Forces sous-marines et de la Force océanique stratégique (ALFOST), qui était auditionné en 2019 par la Commission de la Défense de l’Assemblée nationale, la mer est un milieu opaque et un engin n’est plus visible de la surface à partir d’une centaine de mètres de profondeur.

La « dilution » tire parti à la fois de l’opacité de l’océan en exploitant ses caractéristiques physiques, océanographiques et hydrographiques, et de l’immensité géographique de celui-ci. On distingue ainsi classiquement deux mondes, l’eau et l’air : ils sont séparés par le dioptre, la surface de l’eau, qui est infranchissable par les ondes magnétiques, émises par exemple par les radars. Dans les masses maritimes, on distingue ensuite les eaux de surface plus chaudes et exogènes, les eaux profondes plus froides, anoxiques et plus salées et entre les deux la « thermocline ». Enfin, la lumière du soleil ne peut pénétrer au-delà de 100 m de profondeur.

Avantages de la propulsion nucléaire

Premièrement, le passage du moteur diesel au nucléaire est un progrès considérable en matière de furtivité et de discrétion. Les SNA et SNLE sont extrêmement silencieux (niveaux d’émission, richesse du spectre de la signature acoustique, portée…). Deuxièmement, le réacteur - ou chaufferie - nucléaire comme moteur assure au bâtiment une autonomie énergétique complète, de qualité et de très longue durée. Enfin, troisièmement, elle allonge considérablement la durée de navigation, qui passe de plusieurs semaines à plusieurs mois, et surtout les distances parcourues dans les mers du globe.

Aujourd’hui, les contraintes ne sont plus matérielles et technologiques mais fondamentalement humaines : combien de temps un équipage de 120 à 200 marins peut-il rester enfermé sous la mer dans un espace réduit, sous tension permanente, sans voir la lumière du jour et sans contact avec les familles ?

Afin de rester indétectable, le SNLE en patrouille est en mouvement permanent, horizontal et vertical. À une vitesse de 5 ou 6 nœuds, il parcourt une distance de 300 km en 24 heures. À 20 nœuds, soit 40 km/heure, la distance parcourue monte à près de 960 km en une journée. Ce qui signifie que, potentiellement, il peut - en maintenant 20 nœuds de moyenne - durant une patrouille de 70 jours parcourir théoriquement 67 000 km.

À titre de comparaison, la circonférence de la Terre à l’équateur fait 40 070 km, la distance transatlantique Le Havre - New York en ligne droite 6 000 km et la distance transpacifique San Diego (Sud Californie) - Okinawa (Sud Japon) environ 10 300 km. La maîtrise de la propulsion sous-marine nucléaire est réservée à un club d’États très fermé du fait du très haut niveau scientifique et technologique exigé : États-Unis, Russie, France, Royaume-Uni et Chine.

Depuis la Guerre froide, les États-Unis ont développé dans les océans des systèmes de détection.

L'évolution de la chasse sous-marine

Nul doute que la chasse sous-marine est une activité pratiquée de longue date. En passant à un régime alimentaire omnivore, l’homme a en effet dû pratiquer la pêche sous-marine à mains nues, pour prélever coquillages, ancêtres des crustacés et sûrement, des poissons avec une lance. Au IXe siècle avant J.-C., on trouve trace de pêcheurs d’éponges à l’époque homérique. Plus tard, du IVe siècle avant J.-C. au IIe siècle de notre ère, des écrits d’Aristote à Pline l’Ancien mentionnent une pêche au corail rouge, puis aux huîtres perlières sur les côtes italiennes et grecques. Les premiers harpons seraient eux d’origine polynésienne : il s’agissait alors de lances à une ou plusieurs pointes.

Puis, vint la foëne à l’élastique et enfin, le fusil harpon inventé en 1947 par Georges Beuchat. Ce dernier s’inspira des armes à feu avec un système de propulsion à gâchette pour mettre au point le premier fusil, nommé le Tarzan. Et depuis ? Les fusils harpon ont tantôt été grandis tantôt raccourcis, se composent d’aluminium ou de carbone, mais leur fonctionnement est resté le même.

Au Japon, depuis plus de 2 siècles, les célèbres plongeuses nues pêchaient en apnée jusqu’à l’âge de 50 ans et plus ! Du côté de la Polynésie, ce sont les pêcheurs de perles, entre autres, qui travaillent en apnée…

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