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La question des tirs policiers en France suscite de vives préoccupations, notamment en ce qui concerne le nombre de décès et les circonstances de ces interventions. Cet article examine les statistiques disponibles et les tendances observées ces dernières années.

Augmentation des décès par balles lors d'interventions policières

Les décès dus à une ouverture du feu des forces de l'ordre ont considérablement augmenté. Les décès par balle ont franchi le seuil de la dizaine par an depuis 2015. En 2021 et 2022, respectivement 18 et 26 personnes ont été abattues, soit plus du double que lors de la décennie précédente.

Le risque terroriste n'explique cependant pas l'augmentation des décès par balle en 2021 et 2022. Un seul terroriste potentiel a été tué en 2021. Aucun terroriste ne figure parmi les 26 tués de 2022.

Sur les 44 personnes tuées par balles en deux ans, un peu plus de la moitié (26 personnes) étaient armées, dont dix d'une arme à feu. Parmi elles, sept l'ont utilisée, provoquant un tir de riposte ou de défense des forces de l'ordre. Plusieurs de ces échanges de tirs se sont déroulés avec des personnes « retranchées » à leur domicile.

Armes Blanches et Situations de Dangerosité Équivoque

Parmi les 44 personnes tuées par arme à feu en 2021 et 2022, 16 étaient munies d'une arme blanche (couteau, cutter, barre de fer). Une dizaine d'entre elles auraient menacé ou attaqué les agents avant d'être tuées.

La légitime défense est la plupart du temps invoquée par les autorités dans ces situations. Cela pose cependant question lorsque la « dangerosité » de la personne décédée apparaît équivoque, comme l'illustre le cas de David Sabot, tué par des gendarmes le 2 avril 2022. Ses parents, inquiets de l'agressivité de leur fils, alcoolisé, alertent la gendarmerie de Vizille (Isère). Les gendarmes interviennent et tirent neuf balles sur David. Selon les gendarmes, il se serait jeté sur eux. Selon ses parents, il marchait les bras ballants au moment des tirs.

Refus d'Obtempérer et Usage des Armes à Feu

Outre le drame de Nanterre ce 27 juin, l'une des précédentes affaires les plus médiatisées se déroule le 4 juin 2022 à Paris, dans le 18e arrondissement. Les fonctionnaires tirent neuf balles avec leur arme de service sur un véhicule qui aurait refusé de s'arrêter. La passagère, 18 ans, est atteinte d'une balle dans la tête, et tuée. Le conducteur, touché au thorax, est grièvement blessé. Dans divers témoignages, les deux autres personnes à bord du véhicule réfutent que la voiture ait foncé sur les forces de l'ordre.

Comme nous le révélions il y a un an, les policiers ont tué quatre fois plus de personnes pour refus d'obtempérer en cinq ans que lors des vingt années précédentes. La loi de 2017 venue assouplir les règles d'ouverture de feu des policiers avec la création de l'article 435-1 du Code de la sécurité intérieure est en cause.

« Avec cet article, les policiers se sont sentis davantage autorisés à faire usage de leur arme », estime un commandant de police interrogé par Mediapart en septembre dernier.

Pour justifier leur geste, les agents invoquent la dangerosité pour eux-mêmes ou pour autrui, considérant souvent le véhicule comme « arme par destination ».

Loi de 2017 et Conséquences

Selon une étude de trois chercheurs, révélée par « Ouest-France », les tirs mortels de policiers sur des véhicules en fuite ont fortement progressé depuis 2017 et un assouplissement de la législation.

En un an de moins, 31 personnes de plus sont mortes dans ces circonstances. Une conclusion qui renvoie au rang de mensonges éhontés les propos du ministre de l'Intérieur.

Moins d'une sur quatre donc. 16 étaient munies d'une arme blanche (couteau, cutter, barre de fer), dont « une dizaine aurait menacé ou attaqué les agents avant d'être tuées », selon Basta! qui raconte, par exemple l'histoire de David Sabot, tué par des gendarmes le 2 avril 2022.

Ce qui interroge le plus c'est le nombre restant. 18 personnes ont donc été abattues par la police sans être armées en 2021 et 2022. Soit 41 % du total. « C'est plus du triple que la moyenne de la décennie précédente », assure le média indépendant. Parmi ces morts, la plupart concernent des situations de refus d'obtempérer où les forces de l'ordre ouvrent le feu sur un véhicule.

Plus de personnes (30) sont mortes dans ces circonstances depuis 2017 que sur les quinze années précédant 2017 (17). Parmi ces drames, jusqu'ici, très rares sont les poursuites judiciaires allant à leur terme. Encore plus rares sont les condamnations.

Statistiques Récentes et Tendances Baissières

Ce mercredi 28 juin sur Public Sénat, la porte-parole a affirmé que l'usage des armes par les policiers suivaient des «tendances baissières». «Il y a eu 138 tirs sur les véhicules en mouvement en 2022, contre 157 en 2021. Il y a aussi une baisse de l'usage de l'arme par les policiers, contrairement à ce qui est dit, de plus de 300 avant 2019 […] à 290 en 2021 et 285 en 2022», a-t-elle notamment affirmé, statistiques de 2022 (pas encore publiques) à l'appui.

En 2023, les policiers ont déclaré avoir fait usage de leur arme à feu individuelle - hors armes longues - à 189 reprises, contre 285 fois en 2022, selon le rapport de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) rendu public mardi 19 novembre. « Il s’agit du total le plus bas enregistré depuis 2017 (394 tirs), soit une diminution de 52 % en six ans », souligne l’IGPN.

Chaque année, les policiers doivent rendre compte de tous les tirs réalisés avec leur arme. En 2023, 161 tirs opérationnels (réalisés dans le cadre d'une mission ou intervention) ont été répertoriés, contre 255 en 2022 (-36,9% en un an). Sur 161 usages d'armes, 79 tirs ont été faits en direction d'un véhicule ou son conducteur (49%), 35 envers des animaux blessés ou mettant en danger des civils, notamment sur la route, ou des chiens agressifs sur des tiers ou des policiers (22%).

Le chiffre de 79 emplois de l'arme individuelle sur des véhicules correspond au recul le plus important de cet usage depuis 7 ans. Le nombre de décès dans des tirs sur véhicules a, lui aussi, très nettement reculé, puisque 3 personnes sont mortes dans ces circonstances 2023, contre 13 en 2022.

Rôle de l'IGPN et Enquêtes

En 2021, 6 003 signalements ont été déposés sur la plateforme en ligne de l’IGPN dont 72% jugés recevables. L’IGPN a été saisie de 1093 enquêtes judiciaires dont 47% concernent des allégations de violences, principalement lors d’interpellations, de contrôles et de manifestations. Et 37 condamnations de policiers ont été recensées à Paris en 2021. Ce chiffre est en nette augmentation par rapport à l’année 2020 qui ne comptait que 23 condamnations de policiers.

En parallèle des enquêtes judiciaires, l’IGPN peut également mener des enquêtes internes. En 2021, cette dernière a été saisie de 176 enquêtes administratives. Ces enquêtes sanctionnent les manquements à la déontologie professionnelle : 728 manquements ont été relevés contre 520 en 2020. Les manquements au devoir d’exemplarité, de probité et pour un usage disproportionné de la force sont les plus fréquents.

Depuis 2017, les personnes blessées ou décédées au cours d’une opération de police sont recensées dans le fichier RBD (recensement des particuliers blessés ou décédés). En 2021, 37 personnes sont décédées au cours d’une opération et 79 personnes ont été blessées. Ces chiffres sont en augmentation par rapport à l’année 2020 qui comptabilisait 32 décès et 78 blessés.

Récemment, Agnès Thibault-Lecuivre a été nommée nouvelle cheffe de l’IGPN. Pour la première fois de son histoire, l’IGPN voit arriver une magistrate à sa direction. Sa nomination permet enfin de suivre une recommandation du rapport de la commission d’enquête « relative à l’état des lieux, la déontologie, les pratiques et les doctrines de maintien de l’ordre » de janvier 2021 qui prévoyait l’ouverture de l’institution à des personnels extérieurs à la police nationale[1]. Cette nomination symbolique doit être le signe d’un commencement de réforme complète de l’IGPN.

Tableau récapitulatif des tirs policiers

Année Tirs opérationnels Tirs sur véhicules Décès suite à tirs sur véhicules
2021 255 157 13
2022 161 138 3
2023 189 79

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