La tribune du stand des finales du CNTS est pleine à craquer, ce vendredi 14 février 2025, pour la grande explication du championnat de France féminin au pistolet à 10 m, comme le 3 août dernier, jour de finale des Jeux Olympiques au pistolet à 25 m. Le dénominateur commun s’appelle évidemment Camille Jedrzejewski.
Elle nous a fait vibrer en remportant la première médaille française à Châteauroux pendant les Jeux de Paris l'année dernière. Camille Jedrzejewski retrouve à nouveau le stand de tir du CNTS pour les championnats d'Europe qui ont commencé ce samedi 26 juillet.
« Je suis évidemment très contente de revenir ici. Je ne peux pas oublier les moments extraordinaires que j’y ai vécus, même si c’est particulier de se retrouver dans un stand magique mais sans les décorations des JO », rigolait la pétillante tireuse du club de Noyon PM.
L'Europe a les yeux tournés vers le CNTS de Châteauroux. Les championnats d'Europe de tir sportif ont commencé ce samedi 26 juillet et voient s'affronter jusqu'au 7 août, les meilleurs tireurs du continent : 987 athlètes venus de 35 pays différents dont évidemment l'équipe de France et la médaillée olympique Camille Jedrzejewski.
Elle a décroché l'argent l'été dernier pendant les JO de Paris à Châteauroux au tir au pistolet à 25 mètres et c'est avec beaucoup d'émotions qu'elle retrouve le public berrichon."Moi ça me fait plaisir de voir qu'il y a encore des championnats à Châteauroux", confie celle qui est désormais une habituée du CNTS, entre les Jeux, les stages et les championnats de France en juin.
"J'ai l'habitude de venir ici en compétition. J'ai mes marques, on va dire, en termes de logistique, mais aussi de lumière, d'ambiance. Il y a aussi des bénévoles qu'on connaît, qu'on a l'habitude de côtoyer, des petits plus qui me permettent aussi de relativiser. C'est peut-être moins intimidant de venir ici sur un championnat d'Europe que d'être dans des endroits nouveaux. On sait que ici, on est chez nous, que les gens nous soutiendrons. Je pense à toute l'équipe de France, qu'on aura beaucoup de supporters qui donneront de la voix et de leur temps pour nous soutenir. Donc, je pense que c'est une vraie plus value."
Six mois après sa médaille d’argent aux JO, la jeune femme de 22 ans en a ajouté une deuxième aux « France », battue d’un rien par Mathilde Lamolle (Gémenos) lors de l’ultime « shoot out » pour le titre (238.8 contre 238.6 !), dans une finale garnie de Picardes (quatre sur huit), dont une certaine Céline Goberville (Creil), déjà sacrée à Châteauroux en 2013, époque où le CNTS n’existait pas.
« Il était vraiment temps que ça se termine », a d’ailleurs reconnu la nouvelle championne de France de la discipline, heureuse d’éviter la remontada d’une Camille Jedrzejewski partie moyennement lors des premières séries de tir avant de trouver la bonne carburation.
L’or s’est encore échappé à elle, finalement, mais elle n’en faisait pas tout un fromage. « Ce n’est pas forcément ce qu’on imagine d’une vice-championne olympique mais je suis contente de finir deuxième, le niveau était relevé. J’aurais aimé faire un peu mieux, bien sûr, mais c’est déjà chouette », déclarait-elle ainsi.
Il faut dire que l’une des héroïnes de Paris 2024 fréquente moins les pas de tir depuis sa consécration olympique. À dessein. « J’ai fait le choix après les JO de revenir à l’école et de me consacrer plus pleinement à mes études de kiné. J’avais envie de me préparer à une carrière professionnelle épanouissante. De fait, je consacre moins de temps au tir, même si j’arrive à m’entraîner tous les jours en m’organisant », explique Camille Jedrzejewski.
Il ne faut pas croire pour autant que la Picarde a tiré un trait sur son destin olympique. Elle a bel et bien Los Angeles 2028 dans le viseur. « J’ai d’autres challenges dans la vie et je vais en profiter lors des deux premières années post-JO 2024. Mais, ensuite, j’espère bien revenir à mon meilleur niveau pour les prochains Jeux Olympiques », prévient-elle.
Comme elle reconnaît que « 2025 fait un peu moins rêver que 2024 », Camille Jedrzejewski a apprécié de prendre la machine à remonter dans le temps pendant les quelques jours sur la terre de ses exploits estivaux. « On a besoin de ce genre d’événements là pour entretenir la flamme et garder la motivation. Et pour moi, ici, c’est forcément particulier. J’y pris le temps d’apprécier en essayant de faire appel à mes souvenirs », souriait-elle.
Plus que de la médaille, Camille Jedrzejewski se rappelle surtout de « la connexion avec le public et des moments forts de célébration partagés ensemble. » Ce vendredi 14 février, jour de la Saint-Valentin, elle a compris que l’amour était réciproque.
"J'encourage vraiment les gens à s'intéresser au tir". La tireuse à 25 mètres compte aussi sur l'aura des Jeux pour attirer du public sur toute la compétition, ouverte à tous et en plus gratuite. "Je me dis que ça pourrait être bien ça, mettre de nouveau le tir en lumière ou la ville de Châteauroux mais à tout moment c'est possible que les gens se souviennent de ce moment des Jeux et de qu'ils se disent qu'ils viennent nous voir par curiosité, j'encourage vraiment les gens à s'intéresser au tir. Sur la même journée de dimanche, on peut voir les finales au pistolet hommes et à la carabine. Je pense que ça vaut le coup en tout cas de se déplacer sur Châteauroux et de suivre ces performances."
Sur le plan purement sportif, les championnats d'Europe sont pour elle un moyen de préparer les mondiaux en novembre au Caire. "Mais le moment à Châteauroux des championnats d'Europe, il est indispensable et il est important pour ma carrière, d'être capable de le préparer et peut-être de monter sur le podium. Je me dis que j'ai de nouveau une chance de réussir en France. J'ai envie de la saisir. J'ai envie de m'investir dans cette compète pour briller."
Pour Camille Jedrzejewski, 23 ans, il y eut donc la médaille d'argent en pistolet 25 m, puis Paris, le Parc des champions, le Club France, des rencontres avec ses idoles, et ce double statut, troublant, de médaillée olympique et de groupie. L'euphorie. Et le coup de froid, quand l'orgie de félicitations, sollicitations médiatiques et des partenaires vint à se raréfier. Quand son plus gros sponsor, Decathlon, après quelques années de soutien sur le chemin des Jeux, se retira.
« J'ai vu Camille en pleurs devant d'autres champions, raconte Walter Lapeyre, son entraîneur, évoquant les quelques jours parisiens qui ont succédé à son séjour castelroussin. Il y avait Marie-José Pérec, Renaud Lavillenie, qu'elle admire et qui lui disaient que ce qu'elle avait fait était fantastique. Ils la tutoyaient, elle avait l'impression que les rôles étaient inversés. »
Deux mois ainsi, les yeux ronds, à rencontrer des gens qui paraissaient la connaître depuis toujours, à être appelée par son prénom par la ministre des Sports, échanger avec Djokovic et comparer leurs médailles.
Le tout sans trop toucher au pistolet, sachant que l'après-Paris 2024 était tourné vers ses études de kinésithérapie, délaissées le temps de la prépa olympique. « À l'automne, le retour à la vie normale a été compliqué, avec aussi ces désillusions niveau sponsor, ajoute Lapeyre. C'était''je me retrouve dans mon appart et je révise''.
Camille Jedrzejewski tire à 10 et 25 m. Mission accomplie, deuxième année validée, « mais c'est vrai, confie Jedrzejewski, que décembre a été dur mentalement. J'ai repris l'entraînement, je suis tombée malade et j'étudiais. Le souvenir des Jeux a commencé à devenir plus lointain en janvier, en reprenant la compétition. Et là, hop, des athlètes que je n'avais pas vues depuis longtemps m'ont encore félicitée. Alors, là, j'ai dit''Eh les gars, faut arrêter, c'était il y a six mois !'' »
Mais on ne se refait pas, elle n'avait pas abdiqué ses ambitions, malgré un entraînement technique et physique allégé. Des Championnats d'Europe de pistolet 10 m en mars (6e), une Coupe du monde à Munich (2e à 10 m) et des Championnats d'Europe en juillet à Châteauroux, où elle a moins brillé, à 25 m, qu'un an auparavant (11e). Avec, à la fin, des yeux très humides assez raccords avec ce mélange d'ambition et d'émotions qui la caractérise. Mais surtout une nouvelle cible : les Mondiaux au Caire, en novembre.
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