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En 1803, le président Jefferson achète la Louisiane à la France pour 15 millions de dollars.

Il ordonne donc à deux officiers, Lewis et Clark d'aller y voir s'il ne s'est pas fait rouler, exceptées les régions riveraines du Mississippi.

Les deux officiers partent pour l'Orégon avec une forte escorte de 32 hommes, d'une vingtaine de Rifle du Kentucky et d'un Rifle Model 1803 Harper's Ferry calibre 54.

Sans le savoir ils vont marcher sur les pas des frères La Vérendrye qui étaient passés par là 72 ans plus tôt.

Soit dit en passant, le guide de l'expédition est un Canadien Français, Toussaint Charbonneau.

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Un jour, Lewis part seul pour une courte reconnaissance, portant un rifle du Kentucky chargé.

Soudain, au détour d'un rocher, il tombe nez à nez avec un gigantesque grizzli qui fait entendre un grondement terrible et se dresse dans une intention équivoque.

Sans trop perdre son sang-froid, Lewis épaule et tire en pleine poitrine.

A travers la fumée de la poudre noire, Lewis distingue la masse velue qui fonce vers lui.

Tout en courant, il parvient à le recharger avant d'avoir parcouru 80 mètres!

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A la seconde balle, le grizzli tombe pour le compte.

Le rapport de Lewis précise que l'ours mesurait 2,70 mètres du nez au talon, et que la première balle avait traversé les poumons...

Du Tyrol à l'Amérique

L’histoire est-elle trop belle pour être totalement véridique?

Qu'importe, après tout.

Elle souligne les qualités de la première date des armes légendaires américaines, le Rifle du Kentucky.

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Je renonce à traduire rifle par carabine comme le voudrait la logique, ou par fusil comme on le fait parfois.

Le rifle du Kentucky est trop long pour une carabine et son canon rayé n'en fait pas un fusil, caractérisé dans l'armurerie civile, par un canon lisse.

Les armes longues à canon rayé n'étaient pas une nouveauté à la fin du XVIII° siècle.

Elles étaient courantes en Europe dans les pays germaniques depuis la fin de XVI° siècle.

On les appelle Jäger (chasseur) en raison même de leur destination.

Ce sont des carabines très précises jusqu'à au moins 200 mètres.

Elles sont conçues pour la chasse en montagne, lorsqu'il est nécessaire de tirer à grande distance un animal dont on est séparé par des ravins infranchissables.

Leur gros calibre (entre 14 et 20 mm) leur confère une grande puissance d’arrêt nécessaire pour foudroyer les grands ours qui ne sont pas rares au XVI° et XVII° siècle dans les Alpes Suisses, en Bavière et au Tyrol.

Dans les premières années du XVIII° siècle, des paysans et des artisans de pays germaniques, Allemands, Tyroliens, Suisses et même Alsaciens, émigrent vers la Pennsylvanie, colonie tolérante et accueillante de la Nouvelle-Angleterre.

Il y a parmi eux des armuriers et des chasseurs qui apportent des Jäger.

Ils s'établissent vers 1710 dans le comté de Lancaster, dont ils vont faire une région réputée pour l'habileté de ses forgerons et de ses artisans.

Lancaster est alors soumise à l'insécurité de la « frontière ».

Les incursions indiennes sont fréquentes.

Le passage des pionniers ou des aventuriers en marche vers l'Ouest est incessant.

Les armuriers ne chôment pas.

Ils proposent leurs Jäger.

Mais ces carabines sont lourdes à porter et lentes à charger, deux sérieux inconvénients , en échange d'une puissance et d'une haute précision qui ne sont pas réellement nécessaires sur la « frontière » de l'époque, pour chasser le daim et l'ours noir, ou pour se défendre contre l'indien.

C'est plus tard, et plus à l'Ouest, au siècle suivant que les pionniers rencontreront grizzlis et bisons : alors la puissance deviendra indispensable.

Pour l'heure, ce que veulent les hommes de la « frontière » c'est une arme légère, économe en poudre et en plomb, rapide à recharger et d'une honnête précision aux distances de chasse habituelles, c'est-à-dire à une centaine de mètres.

Calepin et sous-calibrage

Les Armuriers de Pennsylvanie trouveront la solution.

Ils en choisissent une de calibre inférieur à celui du canon, enveloppé dans un « calepin » en peau ou en toile graissées.

Il est ainsi facile de la forcer en douceur dans les rayures, par simple pression de la baguette, surtout si les rayures ne sont pas profondes.

L'adhésion du projectile aux parois internes du canon, grâce à l'élasticité du calepin, évite le « vent » , c'est à dire la perte d'énergie habituelle des fusils à canon lisse, et assure la prise des rayures hélicoïdales et le mouvement gyroscopique qui améliore la stabilité de la balle et sa précision.

Cela ne vaut pas la balle forcée, mais c'est mieux que le canon lisse.

Telle sera donc la première caractéristique du rifle de Pennsylvanie.

Pour Casser un gibier léger et se défendre contre des hommes qui ne sont guère plus résistants, un gros calibre est inutile.

On adopte donc - et c'est une grande nouveauté - une gamme de petits calibres, qui vont du 40 (10mm) au 54 (13,7mm), sans aucune normalisation.

L'arme est livrée avec un moule à balle correspondant à son calibre et chacun fond ses propres projectiles.

Grâce aux petits calibres, l'arme est plus légère, ainsi que la balle et la charge de poudre.

Pour le mème poids à porter, le rifle de Pennsylvanie offre plus de balles à tirer.

Pour Compenser la faiblesse du calibre, les armuriers de Lancaster imaginent d'allonger le canon, en le portant de 0,80m (moyenne des carabines européennes du temps) à 1,40m (moyennes des rifles du Kentucky).

Cette fois, c'est une erreur.

On pense en effet à l'époque qu'il faut retarder au maximum la sortie du projectile pour permettre à la poudre de brûler complètement et de développer toute son énergie.

En fait, le retard provoqué par la pesanteur du projectile et son frottement le long des rayures d'un canon de longueur normale est amplement suffisant pour obtenir le but recherché.

Au XIX° siècle, on reviendra par tâtonnement au canon court.

En attendant, le très long canon octogonal (pour la rigidité) devient l'attribut distinctif du rifle de Pennsylvanie, comme on l'appelle d'abord.

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