Sorti en 1975, Le Vieux Fusil de Robert Enrico est un film franco-allemand qui explore les thèmes de la vengeance, de la guerre et de la perte. Cette œuvre, portée par Philippe Noiret et Romy Schneider, continue de susciter des réactions extrêmes et reste un film marquant du cinéma français.
L'action se déroule en 1944, à Montauban. Afin de mettre celles-ci à l'abri jusqu'à la fin de la guerre, le chirurgien Julien Dandieu essaye de continuer son travail, malgré la pression de la Milice, en préservant son épouse Clara et sa fille Florence. Il les envoie se réfugier dans le château familial de la Barberie.
Quelques jours plus tard, Julien décide de les rejoindre. Julien découvre les cadavres massacrés de tous les habitants du village à l’intérieur de la chapelle en arrivant à son château. Il gagne ensuite le château pour découvrir que des soldats allemands l’occupent, et il aperçoit également le cadavre de sa fille sauvagement abattue, de même que le corps de Clara entièrement calciné après avoir été violée.
Ivre de douleur, Julien, armé du fusil de chasse de son père et se servant des passages secrets du château, exécute méthodiquement les soldats allemands dans le château un par un, sans montrer aucune pitié.
L’action du film se déroule dans le Sud de la France durant l’été 1944, après le débarquement américain, et s’inspire des exactions monstrueuses commises par la division SS Das Reich lors de sa remontée sanglante vers la Normandie, et en particulier des massacres de Tulle, d’Argenton-sur-Creuse et d’Oradour-sur-Glane, les 8, 9 et 10 juin 1944.
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Le film est tourné, au milieu des années 70, à une époque où la France commence à interroger son passé d’une manière un peu différente : au niveau cinématographique, notamment, des films comme Lacombe Lucien de Louis Malle, ont fait polémique en remettant à plat les comportements individuels durant le conflit. Non, tous les Français n’étaient pas résistants, tous les Français n’étaient pas des héros, tous n’ont pas eu une attitude morale irréprochable face à l’Occupation.
Le Vieux Fusil, qu’est-ce, finalement ? Un revenge (voire un rape-and-revenge) movie ? Un film de guerre ? Un document historique, en ce qu’il commente des faits historiques avec le regard rétrospectif de son époque ? Un mélodrame en temps de guerre ? Ou un film signé Robert Enrico ? Un peu tout cela, peut-être.
Dans les premières minutes du film, Dandieu nous est présenté d’emblée comme un Français quelconque : ni collabo ni résistant, il continue de travailler, et ce n’est de toute façon pas un personnage politisé, ni même engagé, à titre individuel, dans ce conflit. De fait, parce qu’il adopte un strict point de vue individuel, Le Vieux fusil est un film qui envisage beaucoup moins de considérations générales sur l’humanité que ce que l’on a voulu lui attribuer, en bien comme en mal d’ailleurs.
Et c’est précisément ce qui explique, également, sa forme mélodramatique (pathétique, même) : les dédales, portes dérobées, vitres sans tain qui peuplent ce château ne sont pas là que pour alimenter (de façon tout à fait palpitante) la manière romanesque du récit, ils traduisent l’état mental d’un personnage qui (littéralement) erre dans les méandres de ses souvenirs ou qui, face à un miroir, ne parvient même plus à se voir.
Romy Schneider est exceptionnelle dans ce rôle. Lumineuse, radieuse, elle incarne plus qu’un personnage : une lumière. Même aux milieux des bruits de bombardements, elle conserve sa grâce. Son personnage est pourtant le centre même du film, son souvenir qui va guider le docteur dans son expédition vengeresse. Les flashbacks vont redonner une vie, une lumière paradoxale à ce qui aurait pu être insupportablement sombre.
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Pendant qu’il prépare sa vengeance contre les soldats nazis, Dandieu va être assailli par les souvenirs de sa femme, sa rencontre avec elle, sa petite vie de famille de bon père bourgeois de province avant la guerre, etc. De ces flashbacks va donc se dégager une impression paradoxale, mélange de bonté, de sérénité, de joie, et de douleur (car cette lumière s’est éteinte, car tout cela est irrémédiablement du passé désormais).
En fait, cette vengeance est désabusée, en tuant ces Allemands Julien Dandieu ne va pas vraiment en retirer quelque chose. Par la perte de ses proches, on comprend que ce personnage est profondément gentil. Cela se voit avec le casting ; on a un Philippe Noiret au visage rond, au ventre légèrement bedonnant et aux lunettes rondes.
Ce que l’on retient, ce sont les conséquences de ces actes qui sont terriblement dramatiques ; on les vit au travers des yeux du personnage principal. Au début, Dandieu est un homme qui essaie de faire son métier de son mieux (au vu des circonstances). Mais est-il possible de rester neutre en une telle période ? Dandieu pensait sincèrement échapper à tout cela et protéger sa famille en l’envoyant à la campagne, dans le hameau de la Barberie. Mais pourtant, la guerre ne préserve rien, tout est touché, souillé par sa folie destructrice.
Ce que je retiens du film Le Vieux Fusil, c’est aussi sa photographie poussée ; la composition des plans a un vrai sens et donne une dimension supplémentaire au film. La scène qui l’exprime le mieux est selon moi celle-ci ; attendant de tuer les soldats occupant son château, Julien Dandieu reste, dans le noir, seul et fatigué.
Lieux mythiques du cinéma : Le village de Bruniquel, dans le Tarn-et-Garonne, a accueilli le tournage du film de Robert Enrico, au printemps 1975. «C’était un grand moment !»
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À Bruniquel, un village de 610 habitants du Tarn-et-Garonne à trente kilomètres de Montauban, le tournage du Vieux Fusil, en 1975, reste un temps fort de l’histoire locale. Les figurants qui ont participé à cette aventure ne sont plus nombreux, mais le film continue à drainer toute l’année des touristes jusqu’à la cité médiévale, classée parmi les plus beaux villages de France.
L’ancienne conciergerie accueillait la scène où Julien Dandieu tue le dernier de ses ennemis. La cour du château a été le cadre de la fête du village, mais aussi de l’assassinat de la mère et de la fille, dans la terrible «scène du lance-flammes». «Le puits le plus profond qui soit» construit pour le tournage. Les astuces du montage -entretenant l’illusion que Bruniquel, Bonaguil et Penne, deux autres communes du Quercy, n’en forment qu’une- ont fasciné les habitants et créé une durable complicité entre le film et le village.
Plusieurs habitants évoquent aussi avec émotion la présence du fils de Romy Schneider, David Meyen, alors âgé de 9 ans, mort six ans plus tard. Mais de tous, c’est bien Philippe Noiret, cet homme «simple et ouvert», qui a su le mieux se faire aimer des Bruniquelais.
Le film triomphera lors de la toute première cérémonie des César en remportant trois statuettes : meilleur film, acteur et musique (à titre posthume pour François de Roubaix, disparu peu avant). Le temps confirmera cet engouement. En 1985, Le Vieux fusil sera élu comme César… des César par la même profession.
Catégorie | Lauréat |
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Meilleur film | Le Vieux Fusil |
Meilleur acteur | Philippe Noiret |
Meilleure musique | François de Roubaix (à titre posthume) |
Le Vieux Fusil s’ouvre et se clôt sur la même image : un homme, une femme et une enfant se promenant en vélo sur un petit chemin de campagne, accompagnés d’un chien. Mais si la scène est identique, le sentiment éprouvé par le spectateur est très différent. Le spectateur a été témoin de choses dures, éprouvantes.
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