L’ancienne réglementation permettait au préfet de saisir les armes des catégories 1 à 7 lors de la commission de certaines infractions.
La nouveauté de la loi de 2012 est de se limiter simplement au vocable « les armes » sans autre précision, ce qui inclut aujourd’hui les armes de catégorie D, que ce soit les armes de chasse, de collection, répliques ou neutralisées.
Ainsi des armes de collections peuvent être « embarquées » sans ménagement sur simple décision du préfet.
Lors du vote de la loi de 2012, nous nous étions battus pour que les armes de la catégorie D soient exclues des saisies administratives.
Mais les amendements déposés par les parlementaires ont été rejetés « avis défavorable du gouvernement ».
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Il est précisé que cette mesure est prise sans formalité préalable, ni procédure contradictoire.
C’est l’application pour les armes du « principe de précaution ».
L’arrêté de saisie implique alors l’interdiction d’acquisition et de détention d’armes pour le détenteur qui sera alors inscrit dans le FINIADA.
Inutile de dire que bien souvent le propriétaire ne récupère pas ses armes.
Quand des raisons lui sont invoquées, elles sont parfois vaseuses et relèvent plus du « fait du prince » que d’une réalité de dangerosité.
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Mais bien peu de détenteurs ont le courage de poursuivre au Tribunal Administratif et ils se contentent de « pleurer leur collection » qui est vendue aux enchères à son profit.
Le saccage est une autre conséquence de la saisie.
Vous noterez au passage que le mot « craindre » laisse beaucoup de latitude au préfet.
Mais en période d’état d’urgence, il est facile de constater que cette « crainte » est largement utilisée et des amateurs d’armes sans problème en font les frais.
Désormais les armuriers consultent le fichier FINIADA avant de déclarer ou d’enregistrer une arme.
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Mais il y a également la FFTir et la Fédération Nationale des Chasseurs.
Les préfectures consultent ce fichier et le fait de trouver un nom entraine le refus ou le retrait d’une autorisation de détention.
Le grand désordre qui règne dans ce fichier est connu de la CNIL et du Ministère de l’Intérieur.
Lorsqu’on est inscrit à tort, il faut utiliser la procédure prévue par la règlementation et demander « d’effacer les données enregistrées » parce « qu’elles sont inexactes, incomplètes ou périmées ».
Si l’inscription provient d’une condamnation pénale, il faut saisir la dernière juridiction ayant statué en matière pénale et demander l’exclusion de la condamnation au bulletin n°2 du casier judiciaire.
L’exclusion se fait sur présentation des preuves de sa réinsertion.
Elle résulte de décisions de tribunaux.
L’inscription dans le FINIADA est automatique après un jugement inscrit au casier judiciaire B2 pour une des infractions énumérées par la loi.
Ce « Traitement des Antécédents judiciaire » est le fourre-tout d’anciens fichiers de la police et de la gendarmerie, dans lequel on retrouvait aussi bien plaignants, coupables et témoins.
Inutile de dire que de nombreux citoyens y sont inscrits, parfois pour avoir eu des différents avec leurs voisins il y a 20 ans et classés sans suite.
Il faut 5 mn pour entrer dans le fichier et 10 années de formalités pour en sortir, décourageant !
Nous venons de voir une situation où le B2 d’un détenteur comportait encore une inscription pour une condamnation vieille de 17 ans.
Pourtant le préfet signifie au détenteur qu’il enclenche une procédure de dessaisissement volontaire et donne trois mois à l’intéressé.
Il y a donc dysfonctionnement du système judiciaire, mais qu’importe pour le préfet, ce qui est écrit est écrit.
Alors il enjoint le malheureux détenteur de demander lui même l’effacement de la mention au B2 en s’adressant au procureur du tribunal qui est à l’origine à la condamnation.
Il aurait été tellement plus simple de reconnaître l’erreur de traitement du B2 et « faire comme si » la condamnation avait été réellement effacée pour appliquer le principe de droit dit « des baïonnettes intelligentes ».
Le ministère de l’Intérieur nous a d’abord affirmé, en préliminaire, que : « Le cadre juridique actuel de l’abandon d’armes ne prévoit que la destruction des armes remises à l’État », et affirme que : « aucune des 20 à 30 000 armes abandonnées chaque année auprès des services de police et des unités de gendarmerie n’a jusqu’alors fait l’objet d’une remise à un musée.
Elles ont toutes été détruites », tout en précisant que cette procédure serait révisée en 2023.
On ose espérer que cette affaire permettra de mettre un terme à une pratique qui serait déjà en elle-même parfaitement scandaleuse, alors que parmi ces armes il était inévitable que certaines fussent de qualité suffisante pour être abritées par un musée.
Il reste que cela est déjà un peu en contradiction avec ce que nous a dit le Musée de l’Armée, qui nous avait affirmé : « Nous sommes en relation régulière avec certains commissariats et quelques tribunaux de grande instance qui, lors de dépôts, de saisies ou une fois des affaires judiciaires jugées, s’adressent à nous pour examiner des armes susceptibles d’intéresser les collections nationales.
Le musée de l’Armée envoie alors sur place ses experts armement afin d’opérer un tri.
Les armes qui ont un intérêt du point de vue de l’histoire, des techniques ou de l’art, entrent dans nos collections ou sont proposées à d’autres musées de France.
Les autres sont vouées à la destruction. »
Le musée a ensuite complété sa réponse : « Il fait entrer chaque année dans ses collections des armes à feu, le plus souvent modernes et contemporaines, qui ont été abandonnées par des particuliers et remises à des gendarmeries ou des commissariats de police.
Pour cette opération d’ampleur, le ministère de l’Intérieur, dans sa grande mansuétude, a prévu que « à titre dérogatoire et exceptionnel [il] prendra en compte dans une mesure très limitée [1] les seules armes présentant un caractère exceptionnel, historique ou patrimonial ».
Et pour cela, ce sont les experts du SCAE « qui auront la charge de visiter les lieux d’entreposage des armes avant la destruction.
Comme nous nous inquiétions des compétences en armes anciennes des cinq experts de la SCAE, son directeur nous avait répondu que : « Certains sont spécialisés dans les armes historiques et de collection (et sont reconnus à ce titre dans ce milieu).
[Ils] assureront l’orientation des armes à haute valeur historique ou patrimoniale vers des musées.
Pourquoi le ministère de l’Intérieur n’a-t-il pas informé le Musée de l’Armée de cette opération ?
Manifestement, il y a un léger désaccord sur ce dernier point entre le ministère de l’Intérieur et celui de la Défense.
En effet, sur les compétences respectives des experts, le Musée de l’Armée nous a répondu que le Musée de Saint-Étienne est constitué « en majorité d’objets mis en dépôt […] par le musée de l’Armée », et que le récolement de ces collections est assuré par ses propres experts à la fois « connaisseurs en arme à feu […] comme les experts du SCAE », mais surtout possédant « des connaissances historiques et patrimoniales ».
« Ils ont une excellente vision des collections publiques dans le domaine des armes et sont en capacité de discriminer les armes ayant un intérêt artistique, historique et technique, quelle que soit leur date de fabrication ».
Un autre aspect doit être évoqué même s’il dépasse un peu notre champ : n’y a-t-il pas dans toute cette opération, légitime sur le fond mais manifestement très mal menée, une spoliation de certains des déposants qui ne sont pas suffisamment informés de la valeur de ce qu’ils possèdent ?
La communication du ministère, que l’on peut retrouver partout sur Internet, y compris sur son site, explique en effet benoîtement : « Vous faites partie des milliers de français qui possèdent une arme, trouvée ou acquise par héritage, sans connaître les obligations réglementaires qui s’y attachent ?
Vous souhaitez régulariser votre situation ?
Deux options : l’enregistrement ou l’abandon. »
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