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En français, certaines lettres semblent parasiter la graphie de mots que nous prononçons au quotidien. C’est ainsi en français: les mots ne se prononcent pas comme ils s’écrivent et inversement. Contrairement à des langues comme l’espagnol ou l’italien, le français comporte de nombreux mots dont l’écriture ne reflète pas fidèlement la manière dont ils se prononcent. Une orthographe plus transparente ou phonétique permettrait pourtant de deviner leur prononciation sans grande difficulté.

Les lettres muettes et la prononciation du "fusil"

Comme vu avec le H, la prononciation française comporte des lettres muettes. Il convient donc de les oublier à l’oral pour énoncer correctement les mots concernés. Par exemple, le houx, le coquelicot, le fusil ou le poing. D'où vient qu'on ne prononce pas le "l" final de fusil, persil, outil, et, je viens de l'apprendre, terril? Pourtant, on dit fil, pistil, chenil, péril, coutil, fenil, grésil, profil, cil...Et qu'en est-il du mot sourcil? Certains semblent faire la différence entre le singulier [sursil] et le pluriel [sursi].

D'autres l'expliqueront peut-être mieux que moi, mais en français classique, on ne prononçait pas les consonnes finales, et il en reste des traces : mis à part fusil, persil, outil, etc. le c de pic (l'oiseau) était muet, d'où pivert pour pic vert, bédane pour bec d'ane (= canard, du latin anas), Saint-André-des-Arts à Paris était Saint-André-des-Arcs. La prononciation de ces consonnes finales est un phénomène récent et qui va s'accentuant, me semble-t-il. Ainsi on entend de plus en plus vingt-cinq mille là où beaucoup disent encore vingt-cin(q) mille. Cet usage s'étend aussi aux noms de lieux : l'Aunis se prononçait classiquement sans s, et je ne serais pas surpris que certains disent maintenant Montargisse pour Montargi(s).

Variations régionales et prononciations alternatives

En faisant un petit tour dans mes archives j'ai trouvé que pour le baril, le fenil, le fournil, le frasil, le goupil, le groisil, le nombril, le persil, le sourcil et le terril la prononciation du l final est facultative, on trouve cependant beaucoup de contradictions parmi les sources. Mais bon, cette discussion du forum Babel semble apporter une réponse à votre question : tout dépend d'où vient le l (un peu comme pour le h initial), en tenant compte du fait que les prononciations subissent aussi parfois l'influence de prononciations concurrentes.

C'est néanmoins la prononciation avec l sonore que Fouché indique comme la plus courante, et cela me semble vrai encore aujourd'hui. Pour ma part, il n'y a pas flottement, c'est [il] dans tous les cas, ainsi que dans chenil pour lequel Fouché pense que [i ]est plus fréquent. La prononciation évolue assez vite dans le temps ; l'ouvrage de Fouché est déjà ancien (1959) et la radio et la télévision ont sûrement contribué à généraliser aujourd'hui en France une prononciation qui était sûrement plus diversifiée autrefois.

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José, tu demandes notre prononciation pour chenil - fraisil - nombril - persil - sourcil. Je ne me mouillerai pas pour le second, que je n'ai jamais prononcé. Pour le premier, je prononce clairement [chenil], avec l sonore et deux syllabes. Mais j'ai entendu mes parents prononcer en une seule syllabe, à l'ancienne, chni. Pour nombril, persil et sourcil, je prononce plutôt -i, mais occasionnellement -il. Dans le cas de chenil, je note que l'évolution est récente mais presque complète. Le petit Robert 1993 ne connaît déjà que le "l" sonore (mais encore une ou deux syllabes). Warnant, dans son Dictionnaire de la prononciation française, 1987, donne -nil, parfois -ni.

On peut ajouter à tout cela le cas intéressant de terril, qui devrait se prononcer sans le "l", introduit bêtement par analogie avec les autres mots en -il, mais qui n'a rien à y faire. L'association liégeoise d'études historiques estime que la graphie «terril» est condamnable dans la mesure où elle aurait été introduite dans l'usage écrit à la suite d'un rapprochement abusif avec les mots français chartil, chenil, courtil, coutil, fournil, etc., qui procèdent du suffixe latin «-ilis», et dont on ne prononce plus, en français correct, le «l» final... Pour le «Vieux-Liège», comme pour l'éminent philologue wallon Jean Haust, c'est la forme «terris» qui doit s'imposer, par référence aux termes qui procèdent du suffixe latin «-icius» («hachis», «treillis», «éboulis»...). Au «Moniteur Belge», cependant, on a opté pour «terril». Quant aux dictionnaires «Le Petit Robert» et «Le Petit Larousse», ils acceptent deux graphies: «terril» ou «terri».

Le cas particulier du mot "persil"

Ce dernier est l’auteur du livre « Atlas du français de nos régions », qui s’intéresse à la variation des mots, prononciations et tournures selon les territoires français. Dans son tweet il a accolé une carte de France montrant que globalement, on ne prononce pas le L de la petite plante verte en Normandie, Ile-de-France, Centre-Val de Loire, Bourgogne Franche-Comté et Grand-Est. Ces zones sont colorées en violet lorsque le L n’est majoritairement pas prononcé et en blanc lorsque les habitants sont partagés. En revanche, dans les autres régions, colorées en vert, persil se prononce comme il s’écrit.

« Les grammairiens sont divisés, mais les deux sont bons, nous assure le maître de conférences à la Sorbonne. Cependant, les dictionnaires Larousse et le Petit Robert donnent comme prononciation de référence persi sans le L. » Celui qui sortira en octobre prochain un nouveau livre, « Parlez-vous (les) Français ? Atlas des expressions de nos régions », indique que de tout temps, la prononciation, des consonnes finales a été instable. « C’est particulièrement vrai pour les mots terminant en [il], mais des prononciations ont fini par l’emporter. Il n’y a plus qu’au Canada ou chez certaines personnes âgées qu’on ne prononce pas le L de nombril, sourcil, ou baril, mais tout le monde aujourd’hui omet le L de fusil. »

Mais persil fait figure d’exception ! « En général, ce qui se prononce en Ile-de-France se retrouve un peu partout, alors que là, c’est comme si elle n’avait pas réussi à s’imposer. Et cela dure depuis un siècle et demi, puisque aucune des deux prononciations n’a réellement réussi à prendre le pas sur l’autre ! », s’étonne encore Mathieu Avanzi.

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