Quel lien existe-t-il entre Verlaine, Rimbaud, Vincent Van Gogh et la famille des armuriers Lefaucheux originaires de Bonnétable ? Le pistolet inventé par les seconds a scellé la destinée des premiers.
Le revolver à six coups avec lequel Paul Verlaine tenta de tuer Arthur Rimbaud, un après-midi de juillet 1873 à Bruxelles, a trouvé preneur mercredi soir au prix phénoménal de 434 500 euros lors d'une vente aux enchères chez Christie's à Paris. Le revolver, un Lefaucheux (célèbre marque de l'époque) à la crosse de bois, un six coups de calibre 7 millimètres, était estimé entre 50 000 et 60 000 euros.
L'acheteur, dont on ignore la nationalité, a enchéri par téléphone, a précisé la maison de vente. La ville natale de Rimbaud, Charleville-Mézières, avait lancé une souscription publique pour acquérir l'arme. Mais le prix atteint ne lui a guère laissé de chance.
Le 10 juillet 1873, 14 heures, dans une chambre d'un hôtel de la rue des Brasseurs à Bruxelles, trois personnes sont réunies: Verlaine, sa mère et le jeune Arthur Rimbaud. L'ambiance est électrique. Soudain, deux coups de feu claquent. Verlaine, alors âgé de 29 ans, a tiré sur Rimbaud de dix ans son cadet. Une balle blesse le jeune homme au-dessus de l'articulation du poignet. L'autre va se loger dans le plancher.
La brouille entre les deux hommes a commencé à Londres en mai 1873. Le torchon brûle entre les deux amants. Verlaine a envie de renouer avec sa femme, Mathilde, épousée en 1870, un an avant sa rencontre avec l'auteur du "Bateau ivre". Après une énième dispute, il plaque son jeune amant et part pour Bruxelles. Rimbaud le rejoint. Verlaine a des envies de suicide, Rimbaud parle de s'engager dans l'armée. Ils s'enivrent, pleurent, connaissent le désespoir des amours qui s'achèvent. Avant de lui tirer dessus, Rimbaud raconte que Verlaine lui aurait dit : "Voilà pour toi puisque tu pars !"
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La détonation et la vue du sang ont calmé tout le monde. Le trio se rend à l'hôpital. À peine pansé, Rimbaud songe à quitter Bruxelles pour Paris. Verlaine, qui a gardé l'arme avec lui, le menace à nouveau en pleine rue. On connaît la suite. Verlaine est condamné à deux ans de prison à Mons. Derrière les barreaux (où il passera 555 jours), Verlaine écrira les 32 poèmes de Cellulairement qu'il dispersera dans les recueils Sagesse, Jadis et naguère, Parallèlement ou Invectives. Rimbaud, rentré chez sa mère, se met à l'écriture d'Une saison en enfer.
Verlaine et Rimbaud se reverront brièvement une dernière fois après la libération du premier, en février 1875, à Stuttgart où Rimbaud remet à son ami le manuscrit des Illuminations.
Confisqué par la police, le revolver, d'un modèle très courant à l'époque, sera rendu à l'armurerie Montigny avant d'être cédé en 1981, au moment de la fermeture de ce magasin, à son actuel propriétaire, un huissier de justice belge, amateur d'armes à feu, nommé Jacques Ruth. Le revolver dort dans un placard. C'est en voyant au début des années 2000 le film sur les amours entre Rimbaud et Verlaine, Rimbaud Verlaine (Éclipse totale) avec Leonardo DiCaprio que Jacques Ruth se rend compte qu'il possède un trésor.
Il contacte un conservateur de la Bibliothèque royale de Belgique, Bernard Bousmanne, commissaire d'une exposition consacrée à Rimbaud en 2004 à Bruxelles. "J'ai cru à une plaisanterie. Mais tous les éléments correspondaient, le modèle, la date et le lieu de fabrication. Nous avons même demandé des expertises balistiques à l'École royale militaire de Bruxelles. Elles ont été concluantes", a indiqué Bernard Bousmanne aux médias belges.
Eugène Lefaucheux, vers 35 ans, est un armurier de renom. En juillet 1873 dans une chambre d’hôtel de Bruxelles, Paul Verlaine, ivre de passion et d’alcool, tire sur Arthur Rimbaud, avec un revolver type Lefaucheux à six coups. Un autre juillet, en 1890, le 27 exactement, le tir d’un Lefaucheux à broche, calibre 7 mm, retentit dans un champ d’Auvers-sur-Oise. Vincent Van Gogh vient de se tirer une balle dans la poitrine après avoir peint son ultime tableau, Racines d’arbres.
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Un siècle et demi plus tard, peu savent qu’une famille sarthoise est indirectement liée à ces deux événements. On a oublié ce que l’artillerie doit aux Lefaucheux père et (surtout) fils. Et pourtant ! Laissons Rimbaud et Verlaine définitivement brouillés à Bruxelles et Vincent Van Gogh à l’agonie à Auvers-sur-Oise, pendant deux jours en dépit des soins du docteur Gachet. Cette lignée sarthoise qui allait connaître la prospérité à Paris, fut en France et en Europe l’équivalent de Samuel Colt aux États-Unis.
Tout commence par Casimir Lefaucheux, né à Bonnétable en 1802, monté à Paris en 1827, l’esprit d’entreprise en guise de viatique.
L'Armée Allemande n'aurait jamais pu imaginer que les pistolets lance-fusées (de son nom original Leutch-Pistol) seraient utilisés à grande échelle et ce durant les 4 années de guerre dans laquelle elle est engagée. En effet à l'époque, très peu de moyens sont mis à disposition des troupes; les ondes hertziennes sont très peu utilisées et ce sont des kilomètres de câbles téléphoniques qui doivent être déroulés pour permettre la transmission de messages divers et variés.
Ainsi les pistolets signaleurs allemands, déjà en service avant la guerre, vont s'avérer d'une redoutable efficacité d'autant plus que son ennemi principal, la France, n'en est pas encore dôtée !
Pour mieux organiser notre réflexion, nous traiterons dans un premier temps des principaux pistolets lance-fusées utilisés par l'Armée Impériale, puis dans une deuxième partie des fusils transformés en arme de signalisation pour enfin envisager, dans une troisième et dernière partie, les cartouches employées ainsi que leur conditionnement.
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Ce pistolet dénommé Hebel par les collectionneurs du monde entier est une arme de conception moderne et de fabrication soignée. C'est l'un des rares pistolets pour lequel nous pouvons déterminer avec une certaine précision l'année d'adoption, 1894, et ce grâce à un manuel d'instruction allemand datant du 30 avril de cette même année. En avance sur son temps, il sera dans un premier temps distribué aux pionniers, puis très vite étendu à l'infanterie.
Le pistolet Hebel, très robuste, est réalisé en acier usiné. Toutes ses pièces finies à la main sont bronzées en noir, sauf le chien et la détente qui sont polis en blanc glacé et les vis qui sont jaunies ou bleuies à la flamme. Ce pistolet signaleur ayant été construit par une multitude de fabricants, presque tous ceux que l'on rencontre sont différents sur de légers détails comme, par exemple, la réalisation des poignées en bois qui peuvent être en noyer, voir plus rarement en hêtre.
Ils présentent cependant tous et à peu de choses près les mêmes dimensions, 227 à 234mm de longueur de canon pour une longueur totale comprise entre 355 et 360mm environ, et arborent un poids important de près de 1,5kg.
Cette arme dispose d'un double verrouillage de son canon; canon qui d'ailleurs est très bien usiné puisque celui-ci ne prend aucun jeu malgré une utilisation intensive comme le prouvent les armes découvertes, et ce quel que soit leur état. L'ouverture est commandée par un levier placé devant le pontet tandis que le système à bascule, dit "à brisure", est muni d'un extracteur automatique. Cet ingénieux procédé sera d'ailleurs repris sur la plupart des pistolets lance fusées adoptés par les allemands avant la Seconde Guerre Mondiale.
La carcasse du pistolet lance-fusées Hebel comporte, sur le côté gauche, une plaque de recouvrement maintenue par 3 vis qui permet d'accéder à une platine dont la qualité n'a rien à envier à notre revolver réglementaire modèle 1873. Cette dernière est à simple action et dispose d'un chien à rebondissement qui lui permet de revenir automatiquement sur le cran de sûreté.
On retrouve une multitude de marquages estampillés à différents endroits du pistolet lance-fusées Hebel. Ainsi au niveau de la bascule, sur le côté gauche de la carcasse, figurent le numéro de série de l'arme et le sigle du fabricant, voire ses initiales. On en comptabilise une bonne dizaine dont certains ont pu être identifiés avec certitude. La plupart d'entre eux sont situés dans le Land de Thuringue, région du centre de l'Allemagne.
Le côté droit de la carcasse du pistolet signaleur Hebel et le plan latéral de ce même côté du canon disposent quant à eux de poinçons relatifs aux bancs d'épreuve et émis sous forme de lettres couronnées ( A, B, S ou U ) mais également du fameux aigle impérial. Il arrive également parfois de rencontrer la désignation du calibre ( 26.65mm ) sous forme de cercle renfermant le chiffre 4 ainsi que la date de production de l'arme.
Par ailleurs, il est possible de trouver, comme sur la plupart des pièces d'équipement de cette armée, des marquages régimentaires sur la partie avant ou arrière de l'armature de la poignée mais également sur le côté gauche de la carcasse.
Ce type de lance-fusées était dénommé Pistole für senkrechten Leuchtschuss et était livré aux unités dans une caisse spécifique contenant également :
Des cartouches de signalisation bien particulières qui s'illuminent en phase ascendante, et non en phase courbe lors de la retombée comme avec les fusées ordinaires, devaient être utilisées avec ce type d'arme. Ces dernières étaient conditionnées dans la caisse en plus des accessoires précités comme suit :
A savoir qu'il pouvait être fait usage d'un modèle Hebel ordinaire dont on aurait ôté les plaquettes afin de pouvoir être fixé convenablement.
Ce pistolet lance-fusée de fabrication rustique a été produit à Lièges durant l'occupation allemande de la Belgique ( Août 1914 / Novembre 1918 ) même si aucune date, même approximative, n'est avancée ! Il est entièrement réalisé en acier et arbore un bronzage noir, voir plus couramment une peinture Feldgrau, même si la plupart des exemplaires rencontrés en sont démunis; absence due très certainement aux perpétuels nettoyages auxquels se livrent les gens !
La longueur du canon de ce modèle est de 206mm, pour une longueur totale de 358mm. Cette arme se compose d'un canon prolongé par un boîtier de culasse renfermant un percuteur linéaire.
Ce pistolet fonctionne en simple action, le percuteur étant armé manuellement à l'aide d'un bouton-tirette situé à l'arrière. L'ouverture se fait par rotation du canon autour d'un axe situé sur le côté gauche et est commandée par un bouton-poussoir. Le côté droit quant à lui, diamétralement opposé à cet axe, est muni d'un verrou qui fait également fonction d'extracteur.
Le numéro de l'arme est frappé sur le côté gauche du pistolet, à cheval sur les 2 parties rotatives. Les autres marquages se limitent à la lettre D et à une lettre I surmontée d'une couronne qui peuvent s'apparenter à des poinçons de contrôle. La partie supérieure gauche de la poignée en chêne comporte elle aussi une inscription dans un rectangle gravée profondément au feu, "MKD Lille" ( pour Militär Kommandantur Lille ).
Druckknopf, c'est le nom donné à ce lance-fusées par le cercle des collectionneurs. Sa longueur est de 343mm pour un canon de 248 et son poids avoisine les 1.125kg.
Ce pistolet à canon long entièrement fabriqué en acier est de fabrication simpliste. Son système d'ouverture est d'ailleurs différent de ce que l'on a pu voir jusqu'à présent. En effet, le canon muni d'un extracteur automatique comporte un simple verrou dont l'ouverture est commandée par un bouton-poussoir situé sur le côté gauche de la carcasse ( système repris sur le célèbre LP 42 utilisé durant le second conflit mondial ).
La détente du pistolet lance-fusée Druckknopf est démunie de pontet, c'est ce que l'on appelle un type de détente "à éperon" ou encore détente " américaine " ou "mexicaine". Par ailleurs, contrairement au Hebel, le percuteur de cette arme ne se trouve pas sur le chien mais sur la carcasse qui ne dispose pas de plaque de recouvrement de platine. Le mécanisme est comme à chaque fois à simple action.
La poignée, de forme arrondie, possède un anneau facilitant le port et ses plaquettes réalisées en noyer sont fixées par une seule et unique vis.
Les poinçons du banc d'épreuve, situés sur le côté droit du canon et de la carcasse, sont les mêmes que ceux apposés sur le Hebel. Les initiales du fabricant et le numéro de série se trouvent quant à eux sur le côté gauche de l'arme. La seule et unique firme de production pour ce type de pistolet lance-fusée a pour initiale J.K.
Modèle | Année d'adoption | Longueur du canon | Longueur totale | Poids | Fabricant |
---|---|---|---|---|---|
Hebel | 1894 | 227-234 mm | 355-360 mm | 1,5 kg | Multiples |
Kommandantur Lille | 1914-1918 | 206 mm | 358 mm | N/A | Liège (occupation allemande) |
Druckknopf | N/A | 248 mm | 343 mm | 1,125 kg | J.K. |
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