Le pistolet à impulsion électrique (PIE), souvent désigné sous le nom de Taser, est une arme de force intermédiaire utilisée par les forces de l'ordre. Le ministre de l'Intérieur devrait annoncer aux syndicats de police la dotation à tous les fonctionnaires d'un pistolet à impulsion électrique.
Le Taser X26, qui équipe majoritairement les forces de l'ordre depuis 2004, a deux modes : un mode «contact» et un mode «tir». Le premier permet d’utiliser l’arme au corps-à-corps. Dans ce cas, il ne provoque qu’une forte douleur. Le second, plus puissant, projette deux fléchettes sous forme d'électrodes, liées à l'arme par un fil long de plusieurs mètres.
Ces fléchettes, quand elles entrent dans le corps de la personne ciblée, émettent une décharge électrique en moyenne de 1500 volts pendant un cycle d’impulsions de cinq secondes, sauf si le tireur décide de l’interrompre avant, d'après Cathy Robin, directrice France d’Axon, qui produit les Tasers. Une telle décharge permet de «neutraliser un individu (par) une sensation de douleur (ou par) la perte momentanée du contrôle du système locomoteur, pouvant occasionner la chute de la personne», indique une instruction du ministère de l'Intérieur publiée en 2014.
D'après une source policière, le nouveau modèle dont les effectifs de police nationale sont progressivement équipés, le T7, permet des décharges plus intenses. De fait, son usage est réglementé, et «soumis aux principes de nécessité et de proportionnalité», peut-on aussi lire dans ce document.
Le Taser X26 est le Pistolet à Impulsions Électriques, PIE, en dotation dans les forces de l’ordre française. Fabriqué par Axon, anciennement Taser International, il équipe les forces de gendarmerie depuis 2004 et de police nationale depuis 2008. Comme tous les PIE il rentre dans la catégorie B6 et est donc soumis à autorisation pour l’acquisition et la détention. Il y en aurait aujourd’hui 15.000 pour 240.000 forces de l’ordre.
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A l’aide de cartouche remplaçable il peut être utilisé au contact ou à distance avec une puissance de 50.000 volts et 2 milliampères par cycle de 5 secondes. La caméra Taser CAM HD est parfois intégrée aux modèles utilisés pour permettre l’enregistrement vidéo de chaque utilisation.
Depuis 2020, les forces de l’ordre sont aussi équipé du modele T7 d’Axon.
Le système nerveux humain communique avec des impulsions électriques simples. Le centre de commande (rouge), cerveau et cordon médullaire, traite l’information et prend les décisions. Le système nerveux périphérique inclut les nerfs sensoriels (bleu) et moteurs (vert). Utilisé à distance avec ses cartouches, le Taser X26 est capable de stimuler les nerfs sensoriels et moteurs. Il se produit alors une incapacité neuro-musculaire, INM, qui entraine une forte contraction musculaire ainsi qu’une vive douleur paralysant temporairement la cible.
Utilisé au corps à corps ce Taser ne provoque pas d’incapacité neuro-musculaire car il n’agit que sur les nerfs sensoriels.
Le Taser x26 utilise des cartouches à usage unique pour tirer les sondes qui une fois plantées dans la cible délivreront la décharge. Le fabriquant propose 3 cartouches différentes (plus une bleue d’entraînement et une orange pour des utilisations au combat). Classées par couleurs elles évoluent en fonction de la distance maximale de tir et de la puissance de pénétration.
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La France utilise la cartouche verte, il s’agit de celle ayant le plus de puissance pouvant atteindre 25 pieds soit 7,6m. La fabriquant rajoute que ces cartouches là « ont des capacités de pénétration supplémentaire pour aider à la rétention et diminuer les décollements de vêtements. »
A chaque tir environ 20 à 30 confettis d’identifications AFID, confetti-like Anti-Felon Identification, sont éjectées. Chaque étiquette AFID est imprimée avec le numéro de série correspondant de la cartouche déployée, ce qui permet de déterminer quel utilisateur a déployé la cartouche en question.
De son côté, pour le T7, la cartouche utilisée par la France permet deux tirs pour une distance de 7,6m à 1,22m.
Interrogé sur la question, notre policier parisien affirme que le Taser est une arme «médiane» entre l'arme à feu - qui ne peut être utilisé par les forces de l'ordre qu'en cas de danger imminent pour la vie d'un policier ou d'autrui - et l'intervention physique.
Les enquêteurs de l’IGPN devront aussi déterminer si le recours au PIE dans l’affaire de Montfermeil s’est fait au titre de la légitime défense (lorsqu’un policier protège son intégrité physique), dans le contexte de l’état de nécessité (lorsqu’un policier accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde d’une personne ou d’un bien) ou au titre de la contrainte légitime (lorsqu’un policier veut contraindre l’auteur d’un crime ou d’un délit qui s’oppose à son interpellation).
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C’est uniquement dans le cadre de ces trois règles juridiques que l’usage du Taser est autorisé. Dans une réponse au Sénat en 2021, le ministère de l’Intérieur a spécifié les conditions d’usages du Taser, en évoquant une instruction datant de 2017 envoyée à la police et la gendarmerie.
«Lorsque la décision de recourir au PIE s'impose, les agents tentent (...) de régler la situation par le dialogue avant d'utiliser, en dernière alternative, l'arme (...) Les policiers tiennent compte de l'état de la personne visée afin d'apprécier l'opportunité de l'usage du PIE. Parmi les éléments à prendre en compte figure l'état de vulnérabilité de la personne.»
Ainsi, les autorités ne doivent pas tirer au Taser sur des personnes dont les vêtements sont imprégnés de liquides ou matières inflammables, ni sur les individus victimes de saignements importants, les femmes enceintes ou les malades cardiaques.
D’autres critères doivent être pris en compte, comme l’environnement entourant la personne, en cas de chute, et la distance : elle doit être de quatre mètres pour un tir et une visée optimaux. Les policiers doivent effectivement éviter de viser la tête et le cou pour limiter les risques de lésions et de malaise.
Une fois le tir effectué, les forces de sécurité doivent «créer les conditions d’une récupération physiologique», d’après l’instruction.
Avant de tirer, le policier devra mettre en garde oralement la cible avant de la pointer avec le laser de l’arme. La tête et le cou ne doivent être visés. Il est également interdit de neutraliser avec le Taser les enfants, femmes enceintes et conducteurs de véhicule en mouvement.
«Il y a énormément de contraintes, même si elles sont bien moins nombreuses que pour une arme à feu classique», poursuit notre policier. Et pour faire appliquer ces contraintes, les Tasers sont soumis à divers contrôles.
À chaque tir, 20 à 30 confettis sont éjectés de la cartouche. Chacun d’entre eux porte une étiquette imprimée avec le numéro de série de la cartouche déployée, ce qui permet de connaître quel utilisateur a tiré les fléchettes. Cela vaut en tout cas pour le X26, majoritaire chez les forces de police ; son remplaçant, le T7, qui permet deux tirs au lieu d’un avant rechargement, ne contient pas de confettis, car «tous les évènements sont enregistrés dans la mémoire interne du Taser, ainsi que les N° de série des cartouches», nous précise Cathy Robin.
Également, l’utilisation des PIE pour les policiers municipaux est conditionnée au déclenchement d’un dispositif d’enregistrement visuel, comme l’affirme un décret du 7 novembre 2022. Les policiers nationaux et les gendarmes échappent toutefois à cette obligation depuis 2014, même si leur caméra-piéton peut être automatiquement activée lors d’un tir. «Ce n’est toutefois pas le cas pour l’heure car les forces nationales ne sont pas équipées de caméras-piétons Axon, précise Cathy Robin.
Avec des contenus à la fois théoriques et pratiques, les instructeurs d’Axon dévoilent les coulisses de leurs formations à l’usage des pistolets à impulsion électrique. Tout en privilégiant la désescalade et la dissuasion.
Pour Axon, fournisseur international de solutions de sécurité, les choses sont claires : les agents instructeurs des forces de l’ordre doivent être formés non seulement à la manipulation des Pistolets à impulsion électrique (PIE) Taser - dont le Taser 7- mais aussi aux techniques de dissuasion et de gestion de la désescalade des situations délicates.
Aujourd’hui, le fabricant dévoile les coulisses d’une formation de trois jours avec Jean-Luc Jaeger, son instructeur en chef. Les formations s’adressent aux instructeurs de la police et de la gendarmerie nationale ainsi que des polices municipales.
Les instructeurs du fabricant abordent en premier lieu l’apprentissage technique, en proposant notamment des tests écrits à la fin de la formation sur les capacités du PIE Taser mais aussi sur les précautions d’usage de l’outil. Puis, place à la pratique : « Nous formons essentiellement les instructeurs à la dissuasion », explique Jean-Luc Jaeger.
Les agents-instructeurs participent à des mises en scène. Ils débriefent et analysent ensemble comment la situation peut être améliorée. Ensuite, ils la reproduisent avec les bons gestes. » Bien sûr, les agents instructeurs apprennent en détail le fonctionnement des PIE Taser - modèles X26P, X2 et Taser 7 - et doivent réaliser au moins deux tirs réels et deux tirs d’entraînements avec chaque PIE. En effet, pour être bien utilisé, chaque modèle requiert différents enchainements et manipulations, bien différents de ceux réalisés avec une arme de poing.
Par exemple, les PIE Taser peuvent être tenus de la main droite comme de la main gauche. De même, les instructeurs formés peuvent, uniquement s’ils le veulent, se porter volontaire pour une exposition au tir de PIE. En général, 40 % à 50 % des formés souhaitent connaître l’effet de la rupture électro-musculaire (REM).
« Nous proposons de tester l’effet du dispositif pour que les agents comprennent l’effet encouru avant de tirer sur quelqu’un afin de faire tout leur possible de sorte que l’interpellé obtempère par la dissuasion, précise Jean-Luc Jaeger. Le but de cette formation n’est pas de s’immiscer dans la doctrine de travail de nos stagiaires mais bien de leur donner toutes les informations dont ils ont besoin concernant les PIE Taser.
Certaines mesures sont enseignées pour apaiser la situation mais aussi pour éviter toute forme de violence. En effet, chaque altercation est stressante pour les deux parties. « La personne en face rentre souvent dans un effet de stress, l’effet tunnel. Elle ne voit peut-être pas ce que l’agent a dans la main. C’est pour cela qu’il est important de lui proposer des réflexes et tactiques de dissuasion simple », poursuit Jean-Luc Jaeger.
Certaines mesures sont enseignées pour apaiser la situation mais aussi pour éviter toute forme de violence. Par exemple, le PIE Taser utilisé en mode contact, c’est-à-dire comme un shocker où l’arc électrique touche directement la personne est fortement déconseillé. A ce titre, il n’est plus du tout enseigné au cours des formations d’Axon. « Cette pratique est une soumission à la douleur comparée à la REM et peut être très facilement mal utilisée », enchaîne Jean-Luc Jaeger.
Reste que l’objectif de la formation est bien d’arrêter l’interpelé sans recours à la violence, le cas contraire pouvant occasionner des chocs post-traumatiques au policier ainsi qu’à l’interpellé.
En France, 70 à 80 instructeurs ont bénéficié des formations d’Axon en 2022. En augmentation ces dernières années, l’utilisation de cette arme est conditionnée à une formation obligatoire de deux jours.
Malgré tous ces contrôles, l'usage de cette arme non létale est critiqué par des associations de défense des droits humains comme Amnesty International, qui mettent en avant des cas anciens de décès liés à l'usage du PIE.
Officiellement, le pistolet à impulsion électrique a été rangé dans la catégorie des armes non-létales. Pourtant, depuis 2008, l'ONG Amnesty international ne cesse de dénoncer les personnes mortes après avoir subi une décharge de l'arme, avançant le nombre de 331 victimes entre 2001 et 2008 aux Etats-Unis. Deux ans plus tard, le Comité contre la torture des Nations Unies soulignait que le pistolet à impulsion électrique pouvait être à l'origine "d'une douleur aigüe, constituant une forme de torture".
En 2021, un homme ayant menacé un agent avec un couteau lors de son expulsion de son logement est décédé après avoir été atteint par une décharge au niveau du thorax. En 2013, Loïc Louise, 21 ans, avait trouvé la mort après avoir été touché par deux tirs de Taser - l’enquête n’avait toutefois pas conclu de lien entre le décès et le PIE. Ces polémiques n’empêchent pas les autorités d’utiliser toujours plus leur Taser.
D’après les rapports annuels de l’IGPN, le PIE a ainsi été utilisé à 522 reprises en 2014, 1820 en 2018, 2349 en 2019, 2699 en 2021 et 2995 en 2022. Une hausse à «mettre en corrélation avec la multiplication par 20 du nombre de PIE en dotation entre 2014 (500) et fin janvier 2023 (9772)», précise l’institution.
Le nombre d’usages année par année du Taser en France, et le type d’utilisation privilégiée.
Décrit comme non létale, le Taser n’en reste pas inoffensif pour autant. De nombreux rapports, enquêtes et institutions soulèvent des risques pouvant entraîner la mort. En 2007, le Comité de l’ONU contre la torture a même classé l’arme comme ‘une forme potentielle de torture’. Elle a mis en garde le Portugal lors de son achat de « Taser X26 dont les conséquences sur l’état physique et mental des personnes ciblées serait de nature à violer les dispositions de la Convention anti-torture de l’ONU ».
Reuteurs a récemment réalisé une enquête sûr, à ce jour, 1081 décès suite à l’utilisation des PIE aux USA depuis le début des années 2000. L’ONG ACAT, Amnesty et le Défenseur des Droits ce sont plusieurs fois exprimés sur les risques de blessure grave ou de décès après une exposition aux PIE.
Dans son rapport annuel publié lundi, l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) constate la mort de dix-neuf personnes en 2019 « à l’occasion de missions de police », dont une après usage de cette arme.
Mais, précise l’IGPN, « l’utilisation de techniques de sécurité en intervention ou du pistolet à impulsion électrique n’emporte pas pour autant un lien direct entre ces usages et le décès, lequel peut être provoqué par une cause exogène », donc extérieure.
Le nombre de tirs de PIE a progressé de 29 % entre 2018 et 2019, à 2 349, d’après le rapport.
« Compte tenu de l’intensité de la douleur qu’ils peuvent infliger et de leurs effets potentiellement très dangereux, les Tasers ne devraient pas faire partie de l’équipement de base des forces de l’ordre », plaide Amnesty International sur son site.
Pour l’association, seuls « des agents spécialisés ayant reçu une formation rigoureuse » auraient le droit de disposer de ces armes.
Amnesty International remarque deux cas « d’usage illégal » du Taser durant le confinement, imposé pour limiter la propagation du Covid-19 entre le 17 mars et le 10 mai inclus.
L’IGPN a répertorié 2349 tirs de PIE en 2019 dont un décès (uniquement la Police Nationale) soit 29% d’utilisation en plus comparé à 2018.
Le recours élargi au Taser, ancien nom de la société qui vend le pistolet à impulsion électrique (PIE), doit constituer une solution de remplacement à la clé d’étranglement, dont Christophe Castaner a annoncé l’interdiction lors de sa conférence de presse de lundi dernier.
En France, seuls des policiers ayant été formés peuvent le manipuler dans un cadre très strict. Cette arme, au final assez méconnue, possède trois modes de fonctionnement.
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