Parmi les missions du département Son, vidéo, multimédia de la BnF, la collecte de jeux vidéo est peut-être l’une des plus surprenantes. Dépositaire de plus de 20 000 jeux rentrés via le dépôt légal, la BnF dispose d’un corpus représentatif de l’histoire des jeux vidéo, et qui met à la disposition des chercheurs une véritable machine à voyager dans le “temps profond des médias”.
Or, qu’est-ce qu’un jeu vidéo ? La question de la définition du média n’a rien d’évident. Elle a notamment été traitée d’un point de vue philosophique par Mathieu Triclot. Selon lui, le jeu vidéo entraîne une « expériences instrumentée » qui se déploie dans la relation à l’écran : comme les formes d’expérience produites par la littérature et le cinéma, c’est dans la relation avec un dispositif technique que les jeux vidéo provoquent des régimes d’expérience qui leur sont propres. Peu importe que les mondes vidéoludiques soient dits “virtuels”. Développer un jeu vidéo, c’est bien sûr écrire un scénario et produire des contenus sensibles (images, sons), mais c’est surtout proposer un ensemble de choix. Jouer, c’est alors s’orienter dans un labyrinthe, chercher à résoudre des énigmes, relever des défis de précision ; c’est consentir activement à suspendre notre incrédulité à travers l’investissement émotionnel et l’engagement attentionnel dans un monde imaginaire.
Les jeux qui mettent en scène des époques historiques bien documentées comme la seconde guerre mondiale ou le Japon médiéval sont en effet très populaires ; nombreux sont aussi les jeux qui nous invitent à interagir avec d’autres périodes et d’autres contrées, telles que l’Antiquité gréco-latine et la Scandinavie pré-moderne.
Depuis quelques années maintenant, certains jeux proposent une expérience de plus en plus réaliste. Cette notion de réalisme peut se transmettre par les graphismes, le son, le scénario et bien d’autres éléments.
Comme nous l’avions évoqué dans l’article sur l’évolution du jeu vidéo, les graphismes d’un jeu posent généralement le premier jugement du spectateur. Et lorsqu’on parle de réalisme, on s’imagine aisément des graphismes proches de la réalité. Mais attention de ne pas confondre qualité graphique et graphismes réalistes. Une image proche du réelle va forcément renforcer l’immersion et l’impression de réalité pour le joueur. Cela vaut aussi bien pour l’environnement que pour les personnages.
Beaucoup de jeux vidéo ont aujourd’hui une esthétique dite photoréaliste. C’est une forme d’art qui consiste à reproduire le plus fidèlement possible une photographie sous une autre forme de média, en l'occurrence ici le jeu vidéo. Pour les personnages, la motion capture et la performance capture sont des atouts majeurs, comme nous l’avions déjà évoqué dans l’article cité plus haut. Ces deux point permettent de créer une expérience visuelle se rapprochant au maximum de la réalité. Comme en vrai.
C’est là que réside le principal problème d’un jeu qui dispose de graphismes réalistes, tout doit être réaliste (à moins d’assumer un éventuel non-réalisme sur certains points). Par exemple, la moindre animation hasardeuse ou collision un peu buggée va donner une impression d’étrange au joueur. Il ne suffit donc pas d’avoir une esthétique réaliste pour l’être totalement.
Certains studio comme Rockstar ou Naughty Dog l’ont bien compris, dans leur plus récents jeux (Red Dead Redemption II, Uncharted 4…) le soin apporté aux animations est impeccable. La démarche du personnage, sa manière de prendre un objet, son interaction paraissant naturelle avec ce qui l’entoure (par exemple une main se mettant à frôler une paroie lorsqu’on s’en approche)...
Le réalisme ne se limite pas aux deux éléments évoqués ci-dessus. Parce qu’au fond, qu’est-ce qui est réaliste ? Pour une personne aveugle par exemple, cela va concerner le son et les sensations (physiques, psychiques et mentales). D’ailleurs Concernant le son, il peut, soit jouer un rôle d’accompagnateur à l’expérience de jeu, soit complètement essayer de retranscrire fidèlement les sonorités du monde réelle. Cela peut être le piaillement des oiseaux, le son d’une chute d’eau, les bruits ambiants d’une ville ou dans un registre différent, le bruit d’une arme à feu. Les jeux de tir, et de guerre notamment, en font d’ailleurs un de leur argument de vente.
Un autre point important est le scénario et l’époque. Nombreux sont les jeux à nous embarquer dans des univers fictifs, de science-fiction, post-apocalyptiques, fantaisistes etc. et bien qu’il peuvent être très cohérents, un jeu où l’action se déroule à notre époque ou à une époque passée, se rapprochera forcément plus de la réalité car il pourra aisément se référer aux archives historiques. Par exemple, la série Assassin’s Creed est très réaliste sur la représentation des époques qu’elle met en scène. Assassin’s Creed II, qui se déroule au XVè siècle lors de la Renaissance italienne, nous fait voyager à Florence, Venise ou encore Monteriggioni.
On pourrait aussi évoqué l’intelligence artificielle (IA), qui constitue encore aujourd’hui l’un des aspects les plus complexes du jeu vidéo. Difficile de faire une Intelligence Artificielle (IA) réaliste sans trop empiéter sur la difficulté.
Un jeu peut donc intégrer tous ces éléments pour être le plus réaliste possible, sur tous les points, et tenter de se rapprocher au maximum de notre réalité.
L'intérêt premier du jeu vidéo est en effet de divertir. Et il faut faire attention de ne pas confondre les jeux vidéo “classiques” avec les simulations. Ces dernières se doivent justement de simuler le réel, plus ou moins fidèlement. Un joueur qui achète et qui joue à une simulation sait à quoi s’attendre. Au contraire, lorsqu’on joue à un jeu vidéo “classique”, on ne s’attend pas forcément à devoir patienter plusieurs minutes durant un trajet ou à nourrir obligatoirement son personnage.
Certains jeux qui intègrent des notions de réalisme s'adressent parfois à un public spécifique et averti. Red Dead Redemption II n’a pas convenu à tout le monde, considéré comme trop lent par certains joueurs. Le jeu amène à prendre son temps et à simuler la réalité sur quelques points : dormir, panser sa monture, manger, voyager (à cheval, ça prend du temps)...
Bien que les jeux évoqués précédemment disposent de plusieurs éléments de réalisme, il y en a toujours d’autres qui nous rappellent que nous sommes dans un jeu vidéo : un inventaire bien trop grand pour un être humain, une endurance hors pair ou bien le simple fait d’avoir une barre de vie (ou une alternative).
Quoi qu’il en soit, le média a assez évolué pour nous proposer des expériences en tous genres, intégrant chacunes leur dose de réalisme à divers niveaux.
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