C’est l’un des films marquants - et sans doute aussi controversés - du cinéma français des années 70 : Le Vieux Fusil fête ce 20 août 2020 son 45ème anniversaire.
En 1944, partout en France, les Allemands refluent dans le désordre sous la pression des troupes alliées. Seule la milice semble croire à un renversement de la situation.
À l'hôpital de Montauban, le chirurgien Julien Dandieu, son confrère et ami François et toute l'équipe opèrent du matin au soir les blessés des deux camps. Après ces heures de tension, Julien aime à se retrouver au calme, en famille, entre sa mère, Florence sa fille et Clara qu'il a épousée en secondes noces et qu'il aime passionnément.
Devant la proximité des combats et sa crainte des représailles, Julien décide d'éloigner rapidement ses proches de la ville. François, qui n'est pas de garde, conduit tout le monde dans le vieux château familial, véritable forteresse médiévale qui surplombe toute une vallée.
Cinq jours plus tard, Julien, qui ne peut supporter l'absence des siens, se rend auprès d'eux. Dans le hameau accolé au château règne un inquiétant silence; toutes les maisons sont vides. Mû par un pressentiment, Julien pénètre dans la petite chapelle et découvre les cadavres de tous les habitants du lieu.
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Par des souterrains secrets, il gagne, en hâte, le château que les Allemands occupent encore. Là, Florence gît par terre, et plus loin, contre un mur, Julien aperçoit le corps de Clara entièrement calciné.
Ivre de douleur, il se reprend peu à peu et, armé d'un fusil à chevrotines, il commence une chasse à l'homme ponctuée par de longs moments d'attente où les souvenirs viennent l'assaillir. Un à un les bourreaux nazis disparaissent violemment et, malgré une blessure, Julien peut accomplir seul et jusqu'au bout sa vengeance.
Si le sujet de la vengeance a été maintes et maintes fois traité au cinéma en particulier par le biais du western, c'est la première fois que la manière est filmé aussi crument dans un cinéma français qui ose aborder la seconde guerre mondiale sur des sujets tabous comme l'a fait quelques temps auparavant Louis Malle avec "Lacombe Lucien" alors qu'en général c'est par le biais de comédies que cette guerre est traitée.
Le film prend un départ somme toute classique. Julien Dandieu médecin chirurgien reconnu, fait ce qu'il peut pour résister aux miliciens ou à l'armée allemande. Que faire pour protéger les blessés résistants ? Peu de choses sinon montrer son courage.
La description du climat ambiant a déjà été évoquée dans le passé, mais la manière où Julien va bousculer dans l'horreur est inédite. Sur une musique écrite par François de Roubaix qui se fait d'un seul coup menaçante, angoissante, Julien découvre une horreur brute, une barbarie venue du fond des âges en rentrant dans sa propriété.
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Les soldats allemands en déroute se sont réfugiés chez lui et sa petite fille gît morte, tuée par une balle et un corps est calciné contre un mur: celui de sa femme tant aimée. Dans son cerveau paniqué il reconstitue le film des évènements. Après avoir décimé le hameau, les allemands ont envahi sa propriété. Ils ont violé sa femme et l'on froidement carbonnisée vivante au lance flamme.
Avant de sombrer dans la folie, Julien va se venger et une bête surgit en lui. Le bon médecin va faire place à un prédateur ultime qui va éliminer un à un les occupants de la propriété. Prenant des risques énormes, il ne craint plus pour sa vie et ne possède plus qu'un but: tuer sans l'ombre d'une pitié ou d'une quelconque compassion. Le médecin qui a passé des années à sauver des vies ôte celles des barbares qui ont envahit son domaine.
Utilisant les passages secrets de sa propriété il va tendre une souricière aux soldats allemands. Il va tour à tour utiliser les armes, emprisonner ses victimes dans un puits envahit par l'eau et enfin brûler l'officier allemand à travers un miroir sans tain.
Romy Schneider a prouvé maintes fois que les défis cinématographiques ne lui font pas peur. "L'important c'est d'aimer" l'a démontré récemment et qui d'autre qu'elle peut accepter d'interpréter une femme qui se fait violer par un groupe de soldats allemands, voit sa fille mourir devant elle et désespérée, se fait brûler vive par un lance flamme dans une image où elle reçoit la flamme de plein fouet. Une image non censurée qui renforce l'impact du film et qui n'a pas manqué de traumatiser l'adolescent que je fus.
Totalement dans son rôle, elle est impressionnante de détresse, haletante, acculée contre un mur devant ses bourreaux qui vont la brûler vive. Un dernier regard vers le ciel et elle meurt dans un cri de douleur impressionnant.
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Philippe Noiret n'est pas en reste. Faut-il posséder une palette de sentiments très large afin de retranscrire tous les états qui envahissent l'acteur. Personnage bon et fort, il incarne la force tranquille, l'homme qui rassure, mais qui n'a rien d'un héros avec son physique banal.
Robert Enrico joue habilement sur le contraste entre les scènes de bonheur et d'horreur; La frontière est mince entre les deux, et le bonheur peut être éphémère. Le couple Noiret/Schenider est un couple heureux . L'horreur est crue et montrée telle qu'elle est.
Le film sort pour la rentrée 1975 et fonctionne sans excès pour sa première semaine, le sujet est grave et le public sent bien qu'il ne va pas aller voir un nouvel épisode de "la 7ème compagnie". Le bouche-à-oreille fait son oeuvre et le film progresse en entrées chaque semaine et est proche d'obtenir la première place hebdomadaire su box office France mais à chaque fois est barré par un film tel "Histoire d'O" ce qui est un peu dommage. Cependant il passe la barre des 2 millions de spectateurs au bout de la 12ème semaine et reste 16 semaines dans le top 10.
Le film obtient logiquement le César du meilleur film et Philippe Noiret celui du meilleur acteur, ce qui est totalement légitime. Les deux acteurs principaux renforcent leur position et gagnent encore le respect du public et sont des incontournables du cinéma français lorsqu'il convient de monter des projets surtout pour Romy Schneider dont cette année 1975 est celle du triomphe. Le film obtiendra le César des César lors d'un vote spécial, signe que 35 ans après il garde un impact certain et n'a pas été détrôné dans le genre.
Un film que n'aurait pas renié un Sam Pexkinpah et qui a influencé bon nombre de cinéastes du monde entier.
Montauban, 1944. Le chirurgien Julien Dandieu y mène une vie paisible avec sa femme, Clara, et leur fille Florence. Cependant, l’invasion allemande ne peut le laisser indifférent : préférant les savoir éloignées des tourments de cette guerre, Julien demande à son ami François de les conduire à la campagne, où cette famille possède un château.
Beaucoup de choses plus ou moins bonnes ou mauvaises ont été dites sur le sens profond a donné au message délivré par ce film, mais il n'en reste pas moins que c'est une œuvre absolument marquante à cause de son impact psychologique et émotionnel puissant. Cela pousse Philippe Noiret dans un rôle tout simplement monstrueux, au sens propre comme au figuré ( il était l'un des rares acteurs de l'ancienne génération capable d'insuffler une telle bienveillance aux personnages qu'il incarnait ; quand Noiret disait " je t'aime ", c'était pour de vrai ; sa rondeur, sa voix, son oeil malicieux manquent définitivement au cinéma français ).
L'ambiance et la thématique fondamentale du Vieux Fusil évoquent ... Film d'une extrême dureté, Le vieux fusil nous plonge dans l'horreur de la guerre, et en particulier dans le massacre de civils par les nazis. Pour réaliser ce film, Robert Enrico s'est inspiré du triste évènement d'Oradour-sur-Glane en Haute-Vienne qui eut lieu le 10 juin 1944 et qui fit 642 victimes. C'est un film poignant devant lequel on ne peut rester insensible; certaines scènes sont vraiment insoutenables. La première fois où ... Quel choc ! Un film d’une extrême dureté, surtout en regard de son millésime : 1975.
Bien sûr, les puristes regretteront que Le vieux fusil ne fût pas tourné à Oradour-sur-Glane, puisque le scénario s’inspire du massacre qui a eu lieu là-bas, un massacre au cours duquel les nazis ont assassiné 642 victimes (hommes, femmes et enfants) et incendié le village. En effet, nous sommes à Montauban, en 1944, une région où les ...
Le Vieux Fusil est la seconde collaboration de Roberto Enrico et Philippe Noiret. L'année précédente, en 1974, ils avaient déjà tourné Le Secret, un drame conjugal avec également Marlène Jobert et Jean-Louis Trintignant, en commun.
On retrouve Claire Denis créditée en tant qu'assistante réalisatrice au générique. Le Vieux Fusil est librement inspiré des évènements tragiques d'Oradour-sur-Glane.
L.C.J. C’est l’un des films marquants - et sans doute aussi controversés - du cinéma français des années 70 : Le Vieux fusil fête ce 20 août 2020 son 45ème anniversaire. Il s’agit de la deuxième (et dernière) collaboration entre le réalisateur Robert Enrico et le scénariste Pascal Jardin, dans la foulée de leur travail sur Le Secret (dont Jardin avait signé les dialogues) et c’est à Jardin qu’on doit l’idée du Vieux fusil.
Ou plus précisément au récit effrayant que lui avait confié un ami, de ce jour de la Seconde Guerre mondiale où, enfant, il avait vu un jeune soldat allemand dormir à côté de la femme qu’il avait violée et tuée. Pascal Jardin, impressionné, décide très vite de développer un récit en s’inspirant également d’un des épisodes les plus terrifiants de ce conflit, le massacre perpétré par les SS à Oradour-sur-Glane le 10 juin 1944.
Quand l’écrivain se met à concevoir son récit, c’est seulement la troisième fois que le cinéma évoque Oradour après 10 juin 1944, le court métrage de Maurice Cohen, récompensé du Prix Jean Vigo en 1962 et Le Sauveur, un long métrage signé Michel Mardore en 1971 avec Horst Buchholz.
Mais Pascal Jardin, Robert Enrico et leur coscénariste Claude Veillot décident de changer le lieu du récit et choisissent de raconter l’histoire d’un médecin qui part venger la mort de sa femme et de sa fille, sauvagement assassinées par des SS, juste après le débarquement de juin 1944.
Pour incarner ce médecin, plusieurs noms circulent. Celui d’Yves Montand tout d’abord qui vient de terminer Le Sauvage de Jean-Paul Rappeneau. Après son refus, Lino Ventura sera immédiatement pressenti. Robert Enrico le connaît bien. Il l’a déjà dirigé à trois reprises dans Les Grandes Gueules, Les Aventuriers et Boulevard du Rhum. Mais lui aussi décline, sans que l’on sache exactement pourquoi car, à ce sujet, les explications divergent. Pour Enrico, son refus provient de sa répugnance à jouer les scènes de coup de foudre.
Dans la foulée de leur première collaboration sur Le Secret, Philippe Noiret est donc de retour devant la caméra de Robert Enrico qui pense un temps l’associer à Catherine Deneuve, sa partenaire dans La Vie de château de Jean-Paul Rappeneau et Touche pas à la femme blanche ! de Marco Ferreri. Mais le cinéaste porte finalement son choix sur Romy Schneider qu’il n’a jamais dirigée. Le premier rendez-vous de travail à trois est pour le moins tendu. Romy Schneider arrive deux heures en retard. Excédé, Philippe Noiret lui jette alors un : « Ah l'Autrichienne ! On commençait à se languir de vous. Pardonnez-moi mais je dois partir » avant de lever le camp devant le réalisateur blême qui réussit pourtant à rattraper tant bien que mal son acteur quand Romy Schneider lui explique qu’elle ne peut pas jouer avec un tel goujat. Mais dans cette scène - comme tout ce qu’elle fera au long de ce tournage qui se déroule entre Paris, Biarritz (la scène de la plage), Montauban -, Romy Schneider impressionne toute l’équipe par son implication totale.
Plus tard, au moment où les Allemands poursuivent son personnage, la violent avant de l’achever au lance-flammes, ses cris furent même si déchirants qu’Enrico choisit de les enlever au montage final par peur que ce passage déjà difficilement regardable devienne proprement insoutenable.
Si Le Vieux fusil reste fidèle aux thématiques du cinéma de Robert Enrico (qui va des Grandes gueules aux Aventuriers en passant par Pile ou face ou Fait d’hiver) c’est qu’il raconte l’histoire d’un type ordinaire, en apparence parfaitement équilibré, qui bascule malgré lui dans la violence et la folie. Pourtant, Le Vieux fusil s’inscrit dans un double contexte particulier. Les années 70 sont celles où le pays commence à regarder en face son comportement pendant la Seconde Guerre mondiale et à pointer du doigt le fait que les Français ne furent pas tous des héros ou des résistants mais aussi des collabos. Le Vieux fusil sort un an après Lacombe Lucien de Louis Malle qui avait fait polémique. Mais le film d’Enrico est aussi l’une des rares incursions françaises dans un genre qui fait alors florès aux Etats-Unis : les films de justice expéditive, popularisés par Charles Bronson (Un justicier dans la ville en 1974) et Clint Eastwood avec la saga des Inspecteur Harry.
Forcément, cette violence dérange. Une partie de la critique parle d’indécence, choquée par l’aspect insoutenable de cette chasse à l’homme que le cinéaste assume pleinement et que le public (et les professionnels) salueront de concert.
En 1975, Le Vieux fusil réunit 3 365 471 spectateurs. C’est le cinquième meilleur résultat de l’année au box-office France derrière La Tour infernale, Peur sur la ville, On a retrouvé la 7ème compagnie et Histoire d’O mais loin devant Le Sauvage, Dupont Lajoie et Sept morts sur ordonnance.
Le film triomphera lors de la toute première cérémonie des César en remportant trois statuettes : meilleur film, acteur et musique (à titre posthume pour François de Roubaix, disparu peu avant). Le temps confirmera cet engouement. En 1985, Le Vieux fusil sera élu comme César… des César par la même profession.
Le film a remporté plusieurs prix prestigieux, témoignant de son impact sur le cinéma français :
Le tableau suivant résume la performance du film au box-office français en 1975 :
Position | Film | Entrées |
---|---|---|
1 | La Tour Infernale | ... |
2 | Peur sur la ville | ... |
3 | On a retrouvé la 7ème compagnie | ... |
4 | Histoire d'O | ... |
5 | Le Vieux Fusil | 3 365 471 |
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