L'arbalète est une arme qui semble avoir été inventée en Chine, avant d'être utilisée en Europe. Au départ, elle servait surtout pour la chasse, puis on a commencé à l'utiliser à des fins militaires, sans doute à l'époque des Croisades. Au Moyen Âge, l’arbalète est utilisée autant comme arme de chasse que pour la guerre.
Cette arme, au départ rudimentaire, fut progressivement perfectionnée. Une des évolutions majeures se produisit au XIVe siècle lorsqu'on inventa un système qui permettait de recharger automatiquement l'arbalète. L'arbrier, permettant d'adapter à l'arbalète des appareils de tension susceptibles d'emmagasiner une force très supérieure à celle que peut développer directement la main de l'humain, on put donner à son arc une grande énergie et à son tir une grande puissance.
L'arbalète se compose d'un arc, fixé par son milieu sur un fût de bois nommé arbrier. L'arbrier est creusé, dans une partie de sa longueur, par une rainure qui sert à diriger la flèche; il est terminé par une espèce de crosse que l'on appuie à l'épaule comme celle d'un fusil, pour viser dans la direction de la rainure; il est muni, vers son milieu, d'un disque d'os, d'ivoire ou de métal, appelé noix, dont le contour porte deux encoches : l'une pour recevoir la corde de l'arc, quand elle est tendue; l'autre pour arrêter l'extrémité d'un ressort de détente. Dans certaines armes, le fût se trouve évidé en demi-cylindre pour servir de direction aux différentes espèces de trait. On se sert le plus souvent d'arbalètes à jalet, dont le fût porte un canon ou tube dans lequel on met une balle ou un caillou rond, et qui est fendu de chaque côté, de manière à laisser passer la corde.
L'arbalète se tient comme un fusil : on l'élève de la main gauche et l'on appuie la crosse à l'épaule droite. L'index de la main droite appuie légèrement sur une gâchette, placée en dessous. Le projectile touche le milieu de la corde tendue; on vise : et en tirant la gâchette; on met en liberté la corde qui se détend violemment et lance au loin le projectile.
Le nom latin de l'arbalète au Moyen âge était balista. Le trait ordinaire lancé par l'arbalète était une flèche courte et solide appelée au Moyen âge carrel ou carreau, à cause de la forme carrée de son fer. On appelait ce trait vireton, quand les plumes ou le cuir dont il était empenné étaient inclinés sur l'axe de manière à imprimer à ce projectile un mouvement de rotation.
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Bien que l'arbalète, c.-à-d. l'arc monté sur affût, paraisse avoir été en usage dans l'Antiquité, au moins comme machine de guerre de grande dimension et non portative, ce n'est qu'à une époque relativement récente que nos ancêtres ont employé cette arme telle que nous venons de la décrire. Il n'en est fait mention pour la première fois dans les armées européennes que vers la fin du Xe siècle. On n'en voit nulle trace dans la tapisserie de Bayeux, quoique un chroniqueur la mentionna à la bataille de Hastings en 1066. Vers cette époque, elle paraît s'être répandue promptement en France; déjà, sous Louis le Gros (1108-1137), l'usage en est général.
Le Moyen âge vit de nombreux modèles d'arbalètes; nous allons donner une idée des plus employés. L'arbalète à pied de biche portait un appareil de tension qui peut être regardé comme le plus ancien de tous. Un cric ordinaire formait l'appareil de tension de l'arbalète à cric ou à cry, et en faisait une arme plus puissante que l'arbalète à pied de biche. Dans l'arbalète à tour appelée aussi de passe ou de passot, c'est au moyen d'une moufle que le soldat portait à sa ceinture, que s'opérait la tension de la corde. Pour cette opération, le fût présentait à son extrémité un étrier dans lequel le soldat soldat mettait le pied, afin de prendre un point d'appui. L'arbalète à jalet, quoi qu'en ait dit le père Daniel qui l'a prise pour une arme de guerre, n'a jamais été qu'une arme de chasse. La tension de la corde de l'arbalète à baguette s'opérait sous la poussée d'une baguette enfoncée dans la canon.
Comme cela a été très souvent le cas dans l'histoire, une évolution technologique fait le bonheur des uns et le malheur des autres. La diffusion de l'usage de l'arbalète modifia en effet les rapports de force entre les groupes de guerriers. Les chevaliers, qui étaient considérés comme l'élite des guerriers, se sentirent menacés dans leurs prérogatives. Ils détestaient l'arbalète car elle tuait à distance, ne permettant pas à l’adversaire de se défendre en corps à corps, ce qui était leur spécialité. De plus, l'usage de l’arbalète ne nécessitait aucune formation de haut niveau.
Considérée comme une arme déloyale par les nobles, l'arbalète fut dénoncée comme une arme immorale par le clergé, en raison du peu de courage et de formation que demandait son usage. En 1139, le deuxième concile du Latran interdit son utilisation. Quelques années plus tard, le pape Innocent II menaça même les arbalétriers, les fabricants d’arbalètes et ceux qui en faisaient le commerce, d’anathème et d’excommunication. Mais cette défense est bientôt éludée, car Richard Coeur-de-Lion; dès 1198, rend l'arbalète à ses gens de pied. Cela n'empêcha pas les princes qui se faisaient la guerre de recourir de plus en plus à cette arme nouvelle.
L’efficacité de ces armes permit à ceux qui les manipulaient de devenir des soldats d’élite. Il semble que les troupes d'arbalétriers étaient les mieux payées des armées occidentales, et parfois mieux équipées que certaines classes de chevaliers. Pendant la guerre de Cent Ans, on fit aussi appel à des mercenaires arbalétriers étrangers, en particulier italiens et génois, dont le tir pouvait percer une armure jusqu’à une distance de 100 mètres.
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L'arbalète, supérieure à l'arc comme arme de siège, lui était inférieure comme arme de campagne. Pendant qu'un archer lançait dix ou douze traits, l'arbalétrier n'en pouvait guère tirer plus de trois. En temps de pluie, l'archer pouvait abriter facilement la corde de son arc, ce qui était beaucoup plus difficile à l'arbalétrier et cette circonstance eut une certaine influence sur la défaite des Français à Crécy en 1346.
L'arbalète a été en Europe l'arme de jet par excellence du Moyen âge. Elle ne disparaît que vers le milieu du règne de François Ier (1536), comme arme de guerre, et qu'au siècle suivant comme arme de chasse. Elle n'existe plus aujourd'hui qu'à l'état d'arme servant à des tirs sportifs, dans certaines sociétés d'arbalétriers amateurs, et dans les fêtes foraines. L'arbalète, qui est quasiment oubliée depuis des siècles en tant qu'arme de guerre, est demeurée, ainsi que l'arc, une arme sportive.
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